Vous allez me dire que je suis monomaniaque, mais je fonctionne par périodes... J'ai eu envie de relire Nightbreed après avoir lu le bouquin Cabal, et après Nightbreed, j'ai relu tout ce qui me tombait sous la main en adaptations de Barker en bande-dessinées...
... ce qui consiste en deux numéros de l'anthologie publiée chez Epic / Marvel (Epic, dont on ne dira jamais assez de bien) "Hellraiser", du nom du roman et de la série de films de Barker.
Je ne suis pas sure que les ricains soient très branchés anthologies en règle générale. Ça c'est plus une tradition française (ou japonaise), comme avec les nombreuses revues de bédés actuelles et passées que l'on peut trouver en kiosque en France.
Aux States, à l'exception de l'excellent Dark Horse Presents, de Negative Burn et de quelques autres, les anthologies n'ont jamais super bien marchées...
... et je parle encore moins des anthologies consacrées à l'oeuvre d'un seul auteur de fiction : on a eu les 6 numéros du Harlan Ellison's Dream Corridor (ceci dit qui méritent largement le détour), on aura les 20 numéros de cette anthologie consacrée à l'univers de la terrible boîte de Lemarchand...
Barker a, en effet, écrit un livre (pas lu) et scénarisés et réalisés plusieurs films (4 à mon dernier souvenir) autour de l'étrange casse-tête chinois créé par l'ingénieur fictif Lemarchand...
En gros, cette boîte est une sorte de rubik's cube démoniaque qui - quand on l'a manipulé dans un certain sens pour en révéler les secrets - ouvre une porte sur un enfer où vivent des créatures maléfiques appelées les Cénobites...
... dont le plus connu est Pinhead (que l'on retrouve dans le premier film).
En gros, deux sortes de gens "ouvrent" le cube et rencontrent les Cénobites :
- ceux qui veulent leur demander quelque chose et obtenir du pouvoir : ils finissent (en principe) mal ou deviennent leurs agents sur Terre
- ceux qui y arrivent, par "hasard", parce qu'ils ont trouvé le cube (ou plutôt que quelqu'un le leur a laissé sur leur route) et qui finissent aussi mal, servant de victimes pour satisfaire l'appétit des Cénobites
Parce que les Cénobites cherchent surtout ce que les hommes peuvent leur apporter : des sensations fortes, que ce soit en art déréglé ou par la cruauté des hommes...
(... mince, Barker ne serait-il pas, finalement, un écrivain moral ? Genre "ce sont les hommes qui créent leur propre enfer" ?)
Quoi qu'il en soit, les films sont flippants (surtout les deux premiers, après ça baisse un peu) à souhait et cette anthologie dont je n'ai pu lire que 2 numéros (il existe une traduction française partielle, en trois volumes, chez Editions USA à vil prix) est excellente.
Parce que c'est de l'horreur, de la vraie. Mais aussi parce que c'est somptueusement dessiné la plupart du temps et brillamment scénarisé.
Sur les deux numéros (le 2 et le 3 de 64 pages chacun) en ma possession, on trouve les histoires suivantes :
- "The Vault", histoire un peu confuse se déroulant dans les geôles d'une prison d'Amérique latine, où le Directeur de la tôle essaye de briser - par l'ordre - les révolutionnaires qui y sont enfermés...
- "Diver's hand", histoire qui se déroule dans un centre de traitement de la lèpre, où une infirmière dévouée aide un patient qui ne peut plus se servir de ses mains à résoudre le puzzle de Lemarchand... Somptueusement illustré !
- "Writer's lament", dessiné par Kevin O'Neill (Marshal Law, Lobo, Batmite), qui se déroule dans l'enfer des Cénobites et met en scène un scénariste qui se rend compte que l'industrie des médias en Enfer et du même acabit que celle dans le monde des vivants ^^
- "The Threshold", dessiné et co-scénarisé par Scott Hampton, la grande histoire de ce recueil, où un employé d'une boite exploitant un simulateur de réalité virtuelle se pose la question de savoir ce qu'il y a
au-delà de la douleur...
- "The Pleasures of Deception", où un peintre en panne d'inspiration fait appel au cube de Lemarchand pour lui redonner des idée pour peindre... Flippant et conceptuel.
- "The Crystal Precipice", avec des explorateurs en rade sur une planète où la seule forme d'intelligence semble être des cristaux animés...
- "The Blood of a Poet", écrit par Jean-Marc Lofficier (que l'on connait pour un million de trucs chez DC et Marvel mais aussi pour le Garage Hermétique de Moebius) et (magnifiquement) dessiné par John Ridgway (qui a dessiné du Miracleman mais aussi plusieurs épisodes des Invisibles), qui, à mon sens, est de loin la meilleure bédé d'horreur que j'ai pu lire récemment. On est dans le Paris des années 20 et le héros est un jeune poète américain dans la dèche et sans logement (ça me rappelle l'une des nouvelles du Roi en Jaune de Chambers, d'ailleurs). Par hasard, on lui recommande la Pension Veneur, une fondation pour artiste dans la dèche où on est logé gratuitement pour peu que l'on réalise des œuvres... et dès le premier soir, le héros est pris par une transe qui lui fait écrire, dans un état second, des poèmes d'une horreur indicible... chose qu'il n'avait jamais faite auparavant (ça peut aussi faire penser à "La musique d'Erich Zann" de Lovecraft)
- "Songs of Metal & Flesh", illustré par Dave Dorman, met en scène un pianiste aveugle dont le puzzle de Lemarchand n'est plus une boîte mais une symphonie... le tout sur un fond de vengeance personnelle...
Tout ça mérite largement le coup d’œil. Beaucoup plus sombre et désespéré que Nightbreed, Hellraiser n'accorde aucune foi en l'homme qui, dans toutes ces histoires, est toujours son propre bourreau.
Pour les amateurs d'horreur.
A noter que la franchise Hellraiser a également été reprise ces dernières années par Boom (décidément...) et qu'une nouvelle série Hellraiser est en cours de publication aux States...
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J'y jetterai un oeil après avoir vu les films, merci !