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Un goupil dans la ville

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Un goupil dans la ville Lun 19 Fév 2018 - 13:56




Comme il existe plusieurs façons de « revenir » pour les Néos-Dieux, il s'est vu des cas bien particuliers, rarissimes même, où le « revenant » se retrouvait scindé en plusieurs entités dissociées dont la genèse n’était que le résultat d’un trouble ante-mortem installé.

La dualité entre le « fils reconnu de Darkseid » et le « fils adoptif d’Yzaya » parfaitement visible tant physiquement que mentalement, cette double personnalité intrinsèque résultant d’une origine génétique puissante et d’une éducation / socialisation depuis la prime enfance contrôlée artificiellement par une boite-mère dédiée, cet antagonisme donc avait provoqué un schisme profond dans l’âme de celui qu’on appelait Orion. Par-delà la mort, surtout dans les conditions que l’on connaît, cette fracture est passée d’un trouble psychologique patenté à une réalité physique de la psyché.

Lorsque l’appel de la vie aspira le Néo-dieu de sa phase d’attente dans les limbes vers le corps qui serait son réceptacle à l’avenir, ceci se produisant avec un léger retard sur ses compatriotes « stockés » dans cette aire de transit et revenus eux sous leur forme initiale provenant d’une « sauvegarde » automatique, la fragile liaison qui constituait le lien subtil entre ses personnalités se brisa.

La partie « New-Génésienne » civilisée investit le corps de l’enfant qui venait de décéder alors que l’autre, cette part « démoniaque et bestiale » provenant d’Apokolips s’incarnait ailleurs sous une autre forme. Mais cela est une autre histoire qui pourrait être narrée en d’autres temps.
Ici commence la lente ascension d’un Néo-dieu tronqué et amnésique, perdu au milieu des humains sur la Terre, notre Terre.



Quelque part entre Ivy Town et Métropolis, à bord d'un train de marchandises

Je balançais le paquet de biscuit derrière mon épaule tout en enfournant goulument la dernière pile dans ma bouche, buvant au goulot d’une canette de jus de fruits pour faciliter le transit du tout vers mon estomac qui se calmait enfin.
Mes pieds balançaient dehors alors que j’étais assis dans l’encadrement de la porte du wagon dont j’avais forcé l’ouverture aussi facilement qu’on ouvre une enveloppe de courrier, comme les trois précédents.

Il faut avouer que mes premiers choix avaient été infructueux en terme de découverte de produit comestibles. J’avais visé initialement une autre voiture dont le côté portait une immense pomme multicolore, promesse d’un contenu fruité et juteux. Mais une fois la protection qui en interdisait l’ouverture tombée et le premier carton ouvert, je n’y trouvais rien de ce que j’espérais. Que des ordinateurs, des téléphones ou des produits électroniques manufacturés tous frappés du même sceau, cette fameuse pomme si engageante et alléchante.

Déçu, je passais au wagon suivant et le cambriolais de la même façon, mais c’était des produits électroménagers. A quoi bon un four si on a ni électricité, ni gaz, ni rien à y faire cuire ?!

C’est ma quatrième tentative qui combla mon bonheur et je pillais allègrement cette réserve de denrées sous cartons et blisters, y trouvant tant à manger qu’à boire à profusion.
Le ventre plein, je regardais maintenant le paysage défiler sous mes yeux dans la pénombre de la nuit, les cheveux agités par le vent relatif, mes doigts de pieds frissonnants au contact de l’air frais car dépassant maintenant de mes bottes découpées pour leur laisser la place devenue exigüe, et mes pensées vagabondant sur les seuls souvenirs que j’avais, ceux collectés depuis ma résurrection à l’hôpital.

De la main je replaçais bien inutilement cette tignasse rousse qui couvrait le haut de mon crâne, repensant à ces quelques jours où j’avais été non seulement entièrement chauve, mais également proprement et totalement glabre de la tête aux pieds, sans ongles ni dents.

Il y a un peu moins de deux mois en effet, je me réveillais d’entre les morts dans les murs du Ivy Town’s Regional Public Hospital, étendu sur un lit du Service Traumatologie. Étendu est d’ailleurs un euphémisme, j’étais littéralement enchaîné dessus par des sangles, des fils raccordés à des machines bredouillantes et les bras criblés de perfusions en tous genres reliées à des bouteilles dont le contenu qui s’écoulait jusque dans mes veines juvéniles m’était inconnus.

J’avais à peine battu des paupières qu’une nuée de personnes se ruait sur moi, m’interrogeant et m’auscultant. Il me fallut quelques instants pour que mon esprit commence à comprendre ce qu’elles me voulaient, ce qu’elles disaient dans ce babillement mystérieux. J’étais incapable de prononcer un son, mes tentatives n’aboutissant qu’à éructer des grognements et à raviver une douleur dans mon œsophage.

J’avais été intubé, intubation trachéale qu’ils ont dit, pour que je puisse respirer et qu’on me nourrisse ces trois jours qui suivirent mon bref moment de conscience post-mortem pendant lequel je leur avais donné mon nom, enfin celui avec lequel ils s’adressaient à moi. Même ce moment là m’était sorti de la tête. Imaginez !

Ces tentatives de communication éveillèrent d’autres douleurs qui provenaient d’à peu près toutes les parties de mon corps ainsi que cette sensation de froid brûlant qui m’envahissait.
Plus je les écoutais, plus que les comprenais, et de leurs échanges je pris conscience de l’état lamentable dans lequel j’étais. Brisé de partout, brûlé gravement par endroits, sans doute sujet à une infection mystérieuse et invasive, j’avoisinais les quarante-trois degrés Celsius, soit en Fahrenheit la centaine bien pesée, ce qui les affolait plus que tout si on faisait l’impasse sur les résultats anarchiques des examens sanguins réalisés sans mon consentement du fait d’être dans les pommes.

Quelques mots savants du type « Carcinum », « IRM », « chimiothérapie » et autres barbarismes de leur langage codé et technique plus loin, je comprenais que mon cas était désespéré plus ou moins et que mon réveil étais la pire chose qui puise m’être offerte dans mon cas quand bien même relevant du miracle.

Tout ce que je savais, c’est que j’avais mal, aux dents et au bout des doigts, sous les ongles, et à pratiquement toutes les articulations dont je découvrais l’existence un peu trop rapidement maintenant.

En levant ma main devant mes yeux, ce qui m’obligea à un effort presque surhumain et me valut ensuite un épuisement total de quelques heures, je découvrais ma peau blafarde et exsudant des humeurs squameuses ainsi que des ongles violacés au bout de mes doigts tremblants. Pas rassurant quoi. Une bienheureuse inconscience provoquée par une injection providentielle de narcotiques me replongea dans l’oubli jusqu’au lendemain.

Je restais ainsi lamentable et souffreteux pendant plus d’une semaine pendant laquelle je perdis mes dents, toute pilosité jusqu’aux cils et mes ongles ainsi que quelques bandes de peau. D’un côté, j’en étais plus que chagriné, surtout en voyant les visages décomposés des infirmières, mais d’un autre, démangeaisons et douleurs disparurent aussi soudainement que cela se décrochait de mon corps.

Enfin, juste le temps que de mes gencives pointent de belles dents toutes neuves, que des ongles en pleine forme se remettent à pousser à une allure étonnante et qu’un nouveau système pileux ne pointe son nez partout où en était communément l’usage à l’âge que j’étais censé avoir. Seul bémol, du brun foncé, sans doute sale, tous ces poils poussaient maintenant d’une couleur presque rouge sang, auburn comme a dit l’interne de service ce week-end là…

En l’espace de deux jours, j’avais retrouvé une pelouse d’un centimètre sur la tête, croquais la biscotte du matin et la pomme du midi et, cerise sur le gâteau, je pouvais enfin me gratter efficacement le bout du nez ! Mirifique !

C’est ensuite que ça se gâta … Quand à mon réveil, mon infirmière dédiée, une vétéran de l’armée aguerrie à soigner les prisonniers les plus dangereux et incroyables pendant la moitié de l’année, écarquilla les yeux en croisant mon regard pourtant plein de la joie de la voir, surtout en prévision de nos conversations futiles mais si instructives pour moi vu qu’elle était le seul trait d’union complaisant des lieux avec le monde extérieur, quand donc je la vis tourner les talons en aboyant presque de terreur qu’on appelle un médecin certifié, je fus presque pris de panique…

Ben quoi ? Qu’est-ce que j’avais ? Une rapide palpation me rassura sur une éventuelle difformité et je restais ainsi dans l’incertitude jusqu’à ce qu’elle revienne avec du renfort médical agréé et averti. C’est à mes yeux qu’ils s’intéressèrent, et une dépigmentation de l’iris fut la seule chose que je pus saisir dans leur jargon. En gros, j’étais devenu un gros lapin roux aux yeux rouges … Tout un programme !
Et surtout l’objet de curiosité plus ou moins malsaine suivant les personnes qui venaient me visiter, du professeur spécialiste venu de l’autre bout du Conté au technicien de surface prenant au passage et en douce une photo avec son appareil de communication portable.
Vint ensuite l’épisode des perfusions imperfusables … Vu que ma fièvre était tombée, que je me nourrissais tout seul aussi, on décida de me délester de certaines entraves, et aussi au passage de changer la place de certaines autres à des fins pratiques.


Pas de bol pour eux, une fois enlevées, sans que j’en ressente la moindre chose, ma peau se refermait définitivement et immédiatement et quand ils, ou plutôt elles voulurent piquer ailleurs, impossible de percer ce cuir qui me recouvrait maintenant tout en ayant le même aspect que le précédent … Une seule « perf » resta donc à demeure par laquelle ils procédaient à l’introduction de différentes substances dans mon organisme malade et prélevaient quelques portions de ma personne pour les examiner attentivement.

Pendant ce temps là, mes cheveux poussaient, mes dents finissaient de percer et de pousser, affichant leur étincelante blancheur sur des gencives en béton alors que ma faim devenait presque ma seule préoccupation.

C’est le Week-end suivant, douze jours après mon retour parmi les vivants, que je m’asseyais sur le bord de mon lit et que fébrilement, je posais un pied sur le sol puis le second avant d’entamer mon premier pas.

Quoi de plus naturel me direz-vous, je voudrais bien vous y voir moi ! Dans ma tête se bousculaient des pensées étrangères, des images d’un passé lointain dont je ne connaissais rien où j’y vivais le même genre d’instants au travers d’autres yeux qui furent les miens et pire, d’autres images provenant d’un autre moi qui vivait ou avait vécu ce genre d’état ailleurs.

C’était passager, fugace, mais persistant et rémanent dès que je faisais quelque chose ou assistais à une scène provoquant le phénomène incompréhensible. S’en suivaient maux de tête et vertiges qui ne manquèrent pas de m’agresser au moment où je reportais tout mon poids sur mes guiboles foireuses alors qu’une colère inexplicable m’envahissait, initiant une envie de tout casser autour de moi. Mais je commençais à contrôler plus ou moins la chose, refoulant au mieux tout cela dans un coin juste à temps pour me rattraper et reprendre l’équilibre, attirant à moi le trépied où était accroché la bouteille à laquelle j’étais relié par ce tube et cette canule planté dans la saignée de mon bras.

Sortir de ma chambre fut une épopée, puis longer le couloir désert en cet instant cramponné à la main courante, une aventure de tous les instants. Je fis le tour de l’étage sans être repéré, arrivais devant un ascenseur dont je connaissais le fonctionnement pour l’avoir observé alors qu’on me charriait d’un étage à l’autre aux fins d’examens.

Bon, je ne me vanterais pas de mes essais infructueux pour enfoncer le bouton d’appel puis celui du rez-de-chaussée où se trouvaient mes objectifs, mais finalement, j’y arrivais clopin-clopant, cahin-caha, et me retrouvais devant le distributeur de sucreries éclairé de sa douce lumière attirante. C’est à ce moment là que je pris connaissance du système monétaire en vigueur et que je me découvrais une capacité à me faire obéir d’une machine irréductible, bornée et insensible aux coups.

Je n’avouais jamais à personne être l’auteur des bosses et déformations de l’appareil car il aurait fallu que je parle de cette lumière violette qui était finalement sortie de mes yeux alors que mes forces me quittaient, provoquant la mise en fonction de toutes les vis sans fin des chaînes de stockage et la descente dans le réceptacle d’à peu près tout le contenu de la vitrine, ravitaillement et boissons sous canettes mêlées.
Sans m’en départir, je fis la récolte de ce dont j’avais besoin dans l’immédiat et reprenais ma progression les bras chargés, arrachant le blister d’une barre chocolatée pour me gaver littéralement de son trésor.

Second objectif, le distributeur de journaux qui malheureusement était enfermé derrière le rideau de l’espace presse … Qu’à cela ne tienne, un regard mauve et langoureux plus tard, comme quoi j’apprenais vite à utiliser ce que j’avais sous la main, le rideau métallique se leva avec un bruit de ferraille et me livra passage. Je ne m’attardais pas, il y avait quand même du monde dans le bâtiment et mes explosions de colère sur la carlingue du distributeur ne pouvaient être passées inaperçues, quelqu’un viendrait voir de quoi il retournait sous peu. Je pris donc ce qu’il me tombait sous la main en revues, journaux de la veille et canards à la mode, trouvais un sac plastique assez grand pour contenir mes acquisitions tant comestibles que livresques, puis filais sans demander mon reste vers l’ascenseur en poussant devant moi mon trépied grinçant.

La minute d’attente devant la porte me parut interminable, surtout que celui d’à côté remontait lui des sous-sols sans doute avec les gardiens à bord.
Il s’en fallut d’une poignée de secondes pour qu’ils me coincent, mais au moment où je commençais à peine mon ascension, ils franchissaient le pas de leur cabine et découvraient le carnage. Cette incartade fit le tour de l’hôpital et devint LE sujet de bien des conversations les deux jours suivants alors qu’elle m’apportait personnellement quelques ennuis avec les autorités compétentes intra et extra muros tandis que paradoxalement, j’en retirais quelques avantages en nature.

Plutôt que de me voir saccager le matériel et me conduire comme un voleur, on me fournissait en boissons, sucreries, barres vitaminées et autres gâteries ainsi qu’en lectures de presse et plus intellectuelles. J’eus accès aussi à la radio, à la télévision et, plus important, à un ordinateur et aux moteurs de recherche associés. Bien sur, tout cela ne fut pas sans contreparties.

Et d’un, j’étais muni d’une sorte de bracelet à une cheville qui donnait en permanence ma position au mètre près ainsi que mes signes vitaux principaux. Si je tentais de sortir du territoire qu’il m’avait été donné de pouvoir visiter, une alarme retentissait et deux minutes plus tard au maximum, deux agents de sécurité, des flics en fait, surgissaient et me ramenaient à la case départ manu-militari illico-presto.

Je ne me formalisais pourtant pas de ce traitement vu que pendant mes « promenades » je rencontrais d’autres patients équipés de cette façon, par contre, tous étaient vieux, très vieux et fripés. Étais-je frappé d’une maladie qui jusqu’ici ne touchait que les gens d’un certain âge ?


En me renseignant, je fus convaincu d’être dans l’erreur et aussi j’appris que certaines personnes portaient également ce genre de dispositif, des condamnés en convalescence …
Pourquoi tant de haine envers moi me direz-vous ? Parce que, on ne me le dit pas directement mais j’interceptais quelques bribes de conversations à mon sujet, quand j’étais quasi mort, mes empreintes avaient été prises faute de papiers d’identité et une recherche menée par la suite pour voir si on me connaissait.

Le résultat était tombé la veille de mon incartade, mais le week-end aidant, c’est le lundi suivant qu’ils déboulèrent en sus des policiers enquêteurs. Je ne m’appelais ni John Doe ni Anthony J. Masters et ma présence dans ce parking qui s’est retrouvé enseveli sous des tonnes de caillasses après l’explosion provoquée d’une sorte de quartier général de héros nationaux n’était peut-être pas fortuite ni innocente. Si j’avais eu la vie sauve, c’était grâce à la résistance de la Cadillac modèle 1973 que j’étais en train de mettre à sac et d’alléger de son matériel HIFI dernier cri.

A presque douze ans, j’avais déjà à mon actif quelques lignes de délits et n’avais échappé à la prison qu’à cause de mon jeune âge tandis que les barreaux de la maison de redressement dans laquelle j’étais censé me trouver alors ne m’avaient qu’à peine retardé dans ma quête de « liberté ».

Je n’avais aucun souvenir de cela, réellement, et cela me semblait si étranger. Devant mon état, vu que j’avais pris quelques centimètres depuis mon réveil et changé radicalement d’apparence, surtout suivant l’avis de mon infirmière préférée et de mon médecin qui la suivit dans son désir de me défendre, on me reprit à nouveau les empreintes, mais cette fois avec des techniques plus modernes que de l’encre et du papier utilisés sur les cadavres. Le scan fut rapide, la recherche un peu plus longue, mais finalement le verdict tomba, je n’étais pas ce petit malfrat en herbe qu’ils pensaient avoir débusqué.

En fait, j’étais inconnu de leurs bases de données accessibles tout simplement. Le gars me jeta un regard de coin, grogna un coup et partit la queue basse sous les sourires de mes défenseurs.
Mais on ne m’enleva pas pour autant ma balise. J’avais un fil à la patte mais de fait plus de liberté qu’avant de me lever.

A partir de ce jour là donc, je commençais mes propres recherches pour expliquer ce qui m’arrivait et éventuellement trouver si cela en avait touché d’autres. Tout naturellement, j’en venais à m’intéresser à un certain Superman avec lequel je me trouvais les plus grandes similitudes … Et du coup, me fixais comme nouvel objectif de partir d’ici et de me rendre à Métropolis pour voir, pour LE voir.

Mais mes forces étaient encore trop défaillantes, je devais prendre patience et j’en profitais pour étendre mes connaissances générales, en langues, en littérature, en technologie et en histoire tant ancienne que contemporaine. Curieusement, chaque ligne que je parcourais, quelque soit le sujet ou la langue, réveillait des connaissances en moi, comme si je réapprenais tout sur tout sauf une chose, MOI !

C’est en regardant la rue de ma fenêtre un matin que je remarquais l’Homme en Noir qui surveillait en bas depuis sa limousine aussi noire que son trench-coat.
Nos regards se croisèrent et je sus que c’était bien moi qu’il surveillait. Il y eut aussi cet enquêteur, vous savez, celui qui voulait m’embarquer après ma nuit de débauche. Il revint à la charge en disant que j’étais fiché mais que mes informations étaient bloquées au niveau fédéral, et de fait, après avoir été reconduit poliment à la porte, il revint le surlendemain encadré par des agents d’une agence gouvernementale qui emmenèrent mon médecin pour lui poser quelques questions sous couvert du secret défense.

Cela puait de plus en plus et je me décidais à anticiper mon évasion pour la réaliser la nuit suivante. J’avais rassemblé des vêtements glanés dans les vestiaires et même à la morgue tout en dissimulant mes allées et venues en occultant le signal de mon boulet électronique par du papier aluminium au début, puis devant mon échec, en le bricolant après avoir forcé ses attaches. Lui restait dans ma chambre alors que je me livrais à mes rapines.

Donc, j’étais prêt … Mais on vint me chercher et on m’obligea à m’asseoir sur un fauteuil roulant pour me convoyer avec deux « gros-bras » comme escorte vers les quartiers réservés aux détenus et aux patients un peu particuliers. C’était plus une sorte d’ensemble de cellules médicalisées qu’autre chose, de toute façon pouvant être totalement bouclé et écarté des zones publiques. De fait, quand la porte de ma nouvelle chambre se referma derrière moi, je ressentis une sorte d’événement définitif à l’encontre de ma liberté qui me décida à agir dès que possible.

Vouloir, c’est bien, pouvoir, c’est mieux, c’est la visite de mon ex-infirmière qui me donna l’occasion d’évaluer mes chances de succès.

Premièrement, cela déclencha en moi l’apparition d’une nouvelle faculté, repérer la présence d’êtres vivants et identifier à qui j’avais à faire aux travers des murs. On avait mis deux gardes devant ma porte, et plus loin, un troisième était assis toujours immobile, sans doute face à des moniteurs. En levant les yeux, je découvrais la caméra logée dans un recoin, petit œil rouge dardé sur ma personne.

Les soins se déroulèrent comme d’habitude, elle enleva le tube de la canule, fit des prélèvements puis remplaça ma bouteille par une nouvelle bien pleine. Par contre, elle m’ébouriffa les cheveux en partant avec dans son regard ce petit quelque chose de poignant qui annonce une inéluctable séparation. Pas un mot ne fut prononcé entre nous, mais ce silence en dit plus que toutes les paroles au monde.

La journée se prolongea au rythme du goutte à goutte, ponctué par le service d’un repas sous haute protection, et enfin je sentis le soir tomber à l’extérieur et je perçu le départ d’un de mes gardes, puis du second. L’équipe de nuit n’allait pas tarder, la surveillance s’étiolait, j’en profitais.

Cette lumière violette que j’arrivais à produire maintenant volontairement avait développé chez moi une sorte d’affinité avec tout ce qui était mécanique ou électronique et ma « prison » possédait une serrure contrôlée électriquement par un clavier et sa surveillance par une caméra numérique. Autant de faiblesses pour moi faciles à contourner. Du doigt, je touchais l’appareil qui était relié aux consoles et elle commença à émettre en boucle des images d’une heure auparavant.

Quant à la serrure, poser la main à plat contre le morceau de mur derrière lequel était accrochée la boite de commande suffit à provoquer l’ouverture de la porte. J’étais dehors la seconde qui suivit, fermant derrière moi par prévoyance, et je me faufilais dans les couloirs et descendais dans les entrailles du complexe hospitalier jusqu’au débarras où étaient entreposés vêtements collectés et autres petites bricoles.

J’avais subtilisé à la morgue la tenue d’un jeune rocker inconnu, un autre John Doe ayant une taille de plus que moi il y a une semaine, mais, comme mon taux de croissance anarchique me faisait prendre pas moins de dix centimètres en ce laps de temps, tee-shirt, veste en cuir bardée de clous m’allaient tout juste aujourd’hui alors que les pantalons avaient du « feu » et les boots assorties me serraient les orteils …

Qu’à cela ne tienne, c’était presque mieux qu’aller pieds nus et moins voyant aussi … Je remontais au rez-de-chaussée par une porte de service sans rencontrer âme qui vive, ou du moins en évitant toute rencontre grâce à ce sixième sens de détection, et je me retrouvais dans la rue encore animée à cette heure de la soirée.

Aucune alarme n’avait retentit pour l’instant, mais cela ne tarderait pas vu que mon « lien » avec les appareils de surveillance devenait plus faible à mesure que je m’éloignais.

De loin, je vis l’homme à la Cadillac sortir soudain et se précipiter vers les portes de l’hôpital, puis quelques instants plus tard deux voitures banalisées et une autre de la police surgir des rues adjacentes et freiner en dérapant, crachent un flot de représentants de l’ordre qui suivirent le même chemin.

Il y en a même deux qui me croisèrent sans que je sois inquiété plus que cela.
J’avais bien préparé mon départ, et je me retrouvais vite dans la zone industrielle jouxtant les rails du chemin de fer et de la gare de fret. Faisant un effort de mémoire, je trouvais un convois qui partait vers la destination que je m’était fixé et, la faim commençant à me tenailler, je visais le wagon que l’on sait, courrait à une vitesse dont je ne me savais pas capable pour m’y agripper et forcer la porte qui m’en barrait l’entrée.

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Très loin, là-bas, se profilaient les lumières de New-York où je ne serais qu'au petit jour. De là, je devrais faire le reste à pieds jusqu'à la ville mythique de l'Homme d'Acier. Le plus dur serait encore à faire, attirer son attention et le faire venir à moi ... Mais j'avais ma petite idée pour cela même si elle était discutable ...
Je soupirais puis rentrais mes guibolles à l'intérieur, me calais dans un coin et fermais les yeux pour sommeiller. Aujourd'hui, j'aurai besoin de toutes mes forces ...


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