[RoD] Fear and Fire [LIBRE]

Hum... Je dérange ?

Les regards se tournant dans sa direction purent voir Conner flotter au-dessus du sol, à quelques centimètres à peine de la fenêtre ouverte qu'il venait présumément d'emprunter. Paisiblement, il se laissa redescendre jusqu'à ce que ses baskets délavées atteignent le sol de la chambre - et s'adossa à l'encadrement, n'osant s'aventurer plus loin sans y avoir été invité.
Il était venu en civil - sans doute, au moins en partie, car il n'avait plus vraiment de costume à lui depuis qu'il avait restitué celui de Superman à son propriétaire légitime. Redevenir Superboy n'était pas envisageable - et d'aucuns étaient d'avis que sa tenue en tant que tel ne méritait de toute façon pas cette appellation.

Je dirais bien que tu as bonne mine... Ôtant ses lunettes, il posa sur M'gann le bleu glacé de ses yeux - et lui adressa un pâle sourire. ...Mais j'imagine que ce serait de mauvais goût.

Il considéra alors l'autre occupant de la pièce - qui n'était autre que Mister Miracle. C'était peut-être la première fois qu'il le voyait hors de son costume, mais toutes les infimes nuances qui séparaient l'organisme d'un Néo-Dieu de celui d'un humain véritable étaient aussi flagrants qu'un oeil au milieu du front pour ses sens d'exception.

Il le salua d'un simple signe de tête ; bien qu'il ait toujours entretenu des rapports amicaux avec le New God, il ne savait trop à quoi s'en tenir depuis sa résurrection.
Tout portait à croire qu'il en était revenu meilleur, bonifié - mais Conner n'est pas sans rester un brin sceptique. Revenir d'entre les morts était peut-être commun dans leur métier, mais ça ne voulait certainement pas dire que le voyage retour se faisait sans encombres.

Plus simplement, le clone se demandait aussi ce qu'il pouvait bien faire ici - surtout maintenant. Il n'avait rien contre lui, bien au contraire, mais s'était attendu à ce qu'ils se retrouvent en tête à tête. Ses relations avec la martienne étaient déjà assez complexe sans ajouter un autre facteur à l'équation - à supposer qu'elle veuille le voir, pour commencer.

Je devrais peut-être repasser plus tard, suggéra-t-il en les observant tour à tour.

Spoiler:

Scott Free parut autant surpris que lui de tomber sur un autre visiteur. De ce que le kryptonien croyait comprendre, il avait lui aussi des sujets privés dont il devait s'entretenir avec M'gann, et n'être pas seul à seule avec elle n'arrangeait pas ses affaires.
Pour autant, Conner ne voulait en aucune façon l'obliger à partir ; malgré les situation délicates dans lesquelles il s'était plusieurs fois retrouvé par sa faute, il lui devait beaucoup également, et ce n'était pas quelque chose qu'il risquait d'oublier. Sans son aide, peut-être serait-il toujours en train d'errer dans la Zone Fantôme.

Ainsi, malgré tout ce qu'il s'était produit, pensait-il pouvoir le considérer à juste titre comme un ami - et même croire que c'était réciproque. Cependant, bien que leurs mésaventures communes les aient amenés à apprendre certains de leurs secrets respectifs, cela ne signifiait en rien qu'il soit prêt à tout dire devant lui - et vice-versa ; Conner respectait cela.

Cependant, comme le Néo-Dieu fit bien de le souligner, c'était à la martienne de décider qui elle voulait dans sa chambre - et elle semblait décidée à ne laisser partir aucun d'entre eux.
Conner se contenta d'acquiescer en réponse à cette décision. À bien y réfléchir, c'était peut-être pour le mieux : avoir un chaperon à leurs côtés réduisait les risques de débordements dans le genre de ceux qui avaient saboté leurs dernières entrevues.
Et cela lui laissait le temps de réfléchir à ce qu'il voulait dire, ce qui n'était jamais de trop avec elle. Il avait bien vu l'infinité d'émotions complexes et contraires qui avaient déferlé dans son regard en le voyant ; la précision du sien lui permettait d'en apprécier chaque nuance, mais il eut la délicatesse de ne pas le faire remarquer. Il y aurait tout le temps pour ça plus tard, s'il en était besoin.

Comme tu voudras, dit-il à M'gann en refermant la fenêtre derrière lui, comme pour confirmer qu'il renonçait à l'idée de repartir. On te suit.

Ainsi s'engagèrent-ils tous ensemble dans les couloirs, Conner découvrant pour la première fois la clinique - de l'intérieur, du moins, ayant déjà eu un aperçu à l'aide de sa vision rayons X.

Pas besoin d'être aussi nerveux, glissa-t-il subrepticement à Scott Free en se plaçant à sa hauteur, à quelques mètres derrière leur guide. On est entre amis.

D'après les signes de tension qu'il pouvait discerner dans l'attitude du Néo-Dieu, la précision ne lui semblait pas superflue. Ne jugeant pas utile d'en dire davantage, il se reconcentra sur M'gann - car c'était pour elle qu'il était venu au départ, après tout.

Elle avait, semble-t-il, passé assez de temps ici pour s'y sentir chez elle - ou en tout cas en sécurité, et il en était content pour elle. Cela changeait radicalement de ce qu'elle lui avait dit la dernière fois qu'ils s'étaient vus, où elle comptait - ou en tout cas prétendait - vouloir repartir sur Mars avec les siens.

Il ne savait si elle avait complètement renoncé à ce projet, et, si oui, ce qui l'y avait poussée - mais savoir qu'elle avait encore un endroit sur Terre où elle pouvait se ressourcer le rassurait plus qu'il ne l'aurait pensé.
Leur rupture et ses conséquences avaient peut-être creusé un fossé entre eux, et il doutait que celui-ci disparaîtrait un jour tout à fait - mais il n'avait aucune envie de la voir partir pour une autre planète, et ce même s'il était capable de s'y rendre sans trop d'efforts. Et il aurait aimé lui dire ; ça, et tant d'autres choses. Mais ce serait pour plus tard - voire jamais.

C'est un bel endroit, fit-il en scrutant le décor dans lequel ils progressaient, moins pour faire la conversation que pour ne pas laisser le silence s'installer ; il n'était toutefois pas plus doué pour l'un que pour l'autre. Il faudra que je m'en rappelle la prochaine fois que je me retrouve avec de la kryptonite plantée dans le corps.

C'est tentant, mais je ne sais pas si c'est une si bonne chose de nous enlever notre seule faiblesse, répondit-il au Néo-Dieu alors que la porte s'ouvrait devant eux. Au cas où.

Nonobstant les manipulations télékinétiques, le mot d'ordre lorsque M'gann leur fit découvrir ses appartements était normalité.

Conner n'en fut pas surpris : elle avait passé un temps invraisemblable à s'adapter aux moeurs terriennes. La maîtrise qu'elle en avait n'était peut-être pas parfaite au moment où ils s'étaient quittés, mais le temps qu'elle avait passé en Australie avait dû lui permettre de se perfectionner.

Oui, elle s'était échinée à tout faire pour se fondre dans la masse - pour leur ressembler ; ce qui aurait pu être inquiétant si elle n'avait pas été animée de tant de gentillesse et de bonne volonté. Avant, en tout cas ; le clone devait admettre n'en avoir guère trouvé trace lorsqu'elle était venue le chercher à Metropolis... Et s'en était senti fautif ; tant de l'avoir laissée s'enfoncer à ce point - voire de l'y avoir menée malgré lui - que de n'avoir pas su la convaincre de se laisser aider.

Mais cette aide, elle semblait l'avoir trouvée autre part - ici, en l'occurrence ; et s'il était presque blessant que des étrangers y soient plus à même que lui, il pouvait comprendre pourquoi.

La dernière fois, elle lui parlait de quitter la Terre, de partir renouer avec ses racines martiennes - avec son peuple ; ce n'était, de ce qu'il pouvait en juger, plus à l'ordre du jour.
Dans cette petite pièce qui lui revenait de droit, qu'on lui avait laissé le soin de personnaliser, elle s'était bâti un foyer - un endroit où elle pourrait vouloir retourner. Pourquoi s'être donné tant de mal si c'était pour si vite le quitter ?

Elle avait certes gardé son teint d'albâtre, mais si cela restait un brin troublant, Conner savait qu'il finirait par s'y faire. Il était, après tout, conscient de sa vraie nature depuis fort longtemps, et pouvait se douter que viendrait le jour où elle n'aurait plus besoin de se cacher. Si ça pouvait l'aider à se sentir mieux dans sa peau - au propre comme au figuré -, nul n'avait le droit de le lui interdire ; il s'assurerait que ce ne soit pas le cas s'il le fallait.

Délicatement, il s'empara de l'un des cadres posés sur une étagère pour y regarder de plus près - ce qui était stupide, dans la mesure où il avait l'oeil assez perçant pour en distinguer chaque pigment à un continent de distance, mais le geste typiquement humain lui restait.
C'était une photo des Titans - l'une des rares où il apparaissait, s'évertuant à disparaître dès qu'il était question d'en prendre une. Il n'aimait pas ça encore maintenant, même s'il avait appris à le supporter - en tout cas la plupart du temps.
S'il se rappelait bien, celle qu'il tenait avait été prise quelques jours à peine après que M'gann et lui-même aient rejoint l'équipe, tandis qu'ils faisaient leurs premiers pas dans un monde pour qui ils n'étaient encore que des mythes.
Au début, oui ; avant que tout commence... Avant que tout se complique.

Conner avait de quoi être fier du chemin parcouru, pour tout un tas de raisons ; il n'avait pas ménagé sa peine et s'était battu pour en arriver là. Mais une partie de lui, petite mais néanmoins présente, aurait bien voulu pouvoir retourner à cette époque. Refaire, faire mieux. Et peut-être que les choses seraient plus simples maintenant.

Il n'y avait cependant rien à gagner à s'accrocher à cette idée ; il la reposa donc en même temps que le cadre - et prêta plus assidûment l'oreille au discours de Mister Miracle, qui, pour quelque raison, ne semblait guère plus à l'aise que lui dans cette situation.
Il doutait que les raisons en soient les mêmes - voire l'espérait pour lui : pour ce qu'il en savait, Barda n'était pas femme à laisser marcher sur ses plate-bandes -, mais le moment lui semblait peu indiqué pour vocaliser sa curiosité.
À la place, il attendit qu'il en ait terminé pour prendre sa suite :

Je voulais venir plus tôt, mais... Je n'étais pas sûr que tu aies envie de me voir. Il releva les yeux - jusque là fixé sur ses chaussures - pour lui faire face. Des excuses, je suppose que je t'en dois aussi. Pour la manière dont les choses se sont passées... La dernière fois, mais aussi les précédentes. Son regard passa sur Mister Miracle ; il n'était pas sûr de vouloir d'un public pour toucher à ces sujets sensibles, ami ou pas. Finalement, il décida que ça n'avait pas d'importance - et croisa mentalement les doigts pour qu'elle soit du même avis. Je sais que les choses ne seront sûrement plus jamais les mêmes... Mais je ne veux plus de cette distance. J'aimerais pouvoir être là pour toi.

Comme avant, se retint-il de dire, conscient que cela pourrait être mal interprétée - et raviver des braises qu'ils avaient déjà bien du mal à éteindre. Ce n'était pas aussi clair qu'il l'aurait souhaité, mais espérait qu'elle avait retenu la leçon, et ne viendrait pas voir dans sa tête pour pallier à ses carences sociales - en tout cas pas sans sa permission.

Enfin, si tu restes. Sur Terre, je veux dire, ajouta-t-il, pour peut-être cette fois être fixé.

En venant, Conner n'avait pas prévu une discussion à coeur ouvert, encore moins en présence d'un troisième parti. Malgré les quelques égarements ayant précédé sa mort et sa résurrection, il savait pouvoir faire confiance à Scott Free, là n'était pas le problème ; mais taciturne comme il l'était, cela lui compliquait encore l'exercice. Il fallait cependant que ce soit dit, dans leur intérêt à tous les deux.

Il était en train de tourner une page importante de sa vie - de prendre un nouveau départ. Et s'il voulait que M'gann en fasse partie, d'une manière ou d'une autre, il fallait commencer par se débarrasser de ses sentiments négatifs. Pour repartir sur de bonnes bases, il devait d'abord faire table rase. Il espérait de sa part qu'elle le comprenne - voire l'entende elle aussi de cette oreille.

Bien qu'il n'en laissât rien paraître, une petite partie de lui se demanda si le fait que le Néo-Dieu ait choisi ce moment précis pour passer était vraiment le fruit du hasard. La dernière fois qu'ils s'étaient vus, c'était après tout grâce à lui - à l'occasion de ses funérailles.
Ils n'avaient fait que se tenir la main pour le temps que dura la cérémonie, sans échanger un mot - mais rien que ça, c'était déjà plus positif que la somme de tout ce qui avait suivi leur séparation. Était-ce assez pour espérer enfin une amélioration ?

Le clone sursauta en entendant les récipients voler en éclats tout autour d'eux - et se fustigea mentalement : s'il n'avait pas été distrait, il aurait dû pouvoir les rattraper avant qu'ils n'heurtent le sol.

Attends, je vais... fit-il en s'avançant pour ramasser les débris - mais avant qu'il ait pu en faire quoi que ce soit, M'gann avait déjà tout nettoyé.

Perplexe, il reprit donc sa place sans ajouter un mot - notant toutefois la célérité dont elle avait fait preuve pour effacer les traces. À croire qu'il fallait y voir une forme d'habitude. N'était-ce pas la première fois que ça lui arrivait ? Il savait qu'il pouvait lui arriver d'être maladroite ; il en avait été la victime accidentelle plusieurs fois... Mais ça, c'était autre chose.

Cela avait au moins eu le mérite de raviver son attention - qu'il consacra à suivre au mieux leur intrigante discussion. Sans en saisir tous les tenants et aboutissants, il pouvait comprendre que cela avait quelque chose à voir avec ce dont elle lui avait parlé à Métropolis ; ce qu'elle lui avait reproché, à vrai dire, bien qu'il n'ait eu aucun rôle à y jouer. Cela ne concernait qu'eux : il ne se voyait pas s'immiscer dans leur conversation, surtout sans y avoir été invité. Si elle voulait qu'il soit au courant... Et bien, elle avait déjà montré qu'elle savait comment s'y prendre.

Puis, ce fut enfin son tour. Elle évoqua les événements de Gateway - ceux qui l'avaient amenée jusqu'ici. S'il n'avait personnellement pas eu à faire face aux Black Lanterns, trop occupé à défier la Guerre ayant pris forme, il savait que ça n'avait été un épisode heureux pour personne ; pour elle non plus, de toute évidence.

Tu n'as pas à te forcer, la coupa-t-il dans ses paroles lorsqu'il la sentit sur le point d'éclater en sanglots.

Le temps n'y avait rien changé : il n'avait jamais aimé la voir aussi bouleversée, aussi fragile. Il n'avait jamais été très bon pour réconforter, mais jadis, il aurait au moins pu la prendre dans ses bras. Plus maintenant.
Elle allait mieux, oui ; mais il lui restait encore de la route à faire sur le chemin de la guérison, et il ne servirait à rien de brûler les étapes. Il n'avait pas fait tout ce chemin pour obtenir d'elle une quelconque confession : cela ne ferait aucun bien. Ni à elle, ni à personne.

Ravi de l'entendre, fit-il quand elle leur annonça n'avoir plus l'intention d'attenter à sa propre vie.

À la bonne heure, oui : une pensée aussi sinistre n'aurait jamais dû avoir sa place dans la tête de M'gann telle qu'il la connaissait. Ou plutôt du souvenir qu'il en gardait, façonné à une époque où tout était plus simple - eux comme le reste.

Oui, sa santé mentale lui semblait sur une pente montante - du moins jusqu'à ce qu'elle leur demande de l'aide pour sortir d'ici. Malgré lui, Conner leva le sourcil sous l'effet de la surprise.

Je... Croyais que tu étais ici de ton plein gré, confia-t-il. De son plein gré, oui - au sens où martienne pouvait littéralement passer à travers les murs si elle le désirait. Qu'est-ce qui pouvait bien la retenir contre son gré - ou plutôt qui ? Si tu veux sortir, pourquoi est-ce que...

Il se figea sans avoir pu finir sa phrase, ayant lui aussi entendu les bruits de pas en approche sans avoir eu à tendre l'oreille. Son regard se tourna dans la même direction, illuminé par un tel flot d'informations qu'on l'aurait cru habité par une pluie d'étoiles filantes alors qu'il passait à travers le spectre du visible et de l'invisible en une seconde à peine. Peut-être même moins.

Une seule personne, prévint-il les deux autres, voyant aussi clairement à travers les murs épais de la clinique que s'ils avaient été transparents. Une femme. Docteur, apparemment.

Malgré ce rapport rassurant - supposait-il -, il s'avança pour se placer entre eux et le seuil. S'il le fallait, il serait leur bouclier. Il ne resterait pas les bras croisés si quelqu'un essayait de lui faire du mal, qu'importe comment leur relation avait évolué.

Un refuge où les justiciers peuvent venir panser leurs plaies en paix ?
Il se disait aussi : c'était trop beau pour être vrai.

Spoiler:

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À la demande de M'gann, le clone ne fit rien pour bloquer la porte. Ça ne lui plaisait pas, surtout en la voyant aussi apeurée - mais elle était « chez elle » : il n'avait pas à décider à sa place de qui ou non avait le droit d'entrer...
Quand bien même il commençait à se poser de sérieuses questions.
Si cet endroit était aussi bénéfique qu'il voulait le faire croire, pourquoi se mettait-elle dans un tel état ? Sa seule présence n'était pas sans contribuer à la mettre sous pression, mais il doutait que le seul poids de leur bagage commun lui pèse à ce point...

Elle n'a rien fait de mal, répliqua-t-il, catégorique. C'est moi qui suis venu à l'improviste.

Cela se passait de plus amples explications ; ils pouvaient difficilement traiter la martienne pour quoi que ce soit sans connaître sa vraie nature - et par conséquent avoir une idée du genre de personnes qu'elle pouvait fréquenter. Notamment celui qui préfère passer par la fenêtre que par la porte principale.

Outre les doutes qu'il nourrissait envers l'établissement, Conner n'était pas sans éprouver une aversion naturelle pour les milieux hospitaliers. Leurs décors aseptisés lui rappelaient celui dans lequel il avait été conçu - et même des années après, rien de ce qui le ramenait à cette époque n'était de nature à le mettre dans de bonnes dispositions.

Si bien qu'il dut s'abstenir de grogner en sentant qu'on touchait son esprit par-dessus le marché. Cela faisait longtemps que plus personne ne s'était lié à lui de la sorte, mais jamais il n'aurait pu oublier ce que ça faisait. Après tout, M'gann et lui avaient passé tellement de temps à dialoguer de cette manière, avant que... Avant.

Il tourna un regard interrogateur dans sa direction. Est-ce que c'était elle ?

Il avait peine à y croire : bien qu'elle s'en soit rendue coupable au point de les séparer, elle avait depuis démontré une nette réticence à venir dans sa tête sans son accord - même lorsqu'il était possédé par une obscure entité ; même lorsqu'il menaçait de la faire brûler vive.

Qui plus est, il n'avait pas perçu un mot, rien - et ça n'avait duré qu'une fraction de seconde. Quelqu'un de moins habitué que lui - quelqu'un qui n'aurait pas partagé, des années durant, la vie d'une télépathe - ne s'en serait probablement pas aperçu.
Alors qui, et surtout pourquoi ? Il n'en savait encore rien ; ce qu'il savait par contre, c'était que ça ne lui disait rien qui vaille.

L'exclamation de M'gann, toujours cachée derrière lui sans qu'il sache si c'était volontaire, lui fit réaliser que le médecin amenait de la visite - Martian Manhunter, ainsi que quelques autres héros que l'hybride connaissait au moins de réputation. Ce qui, d'après la stupéfaction dans la voix de la locataire de la chambre, n'était pas non plus prévu au programme.

À nouveau, cette sombre affaire qui s'était déroulée en Russie revint sur le tapis. N'en sachant pas assez pour s'exprimer sur le sujet en question, Conner préféra rester en retrait - mais assez proche, cependant, pour constituer un élément dissuasif.
Au vu des mines patibulaires qu'arborait une partie des nouveaux arrivants, ce ne serait sans doute pas de trop pour que la conversation demeure courtoise. Bien que plus au fait que lui des détails de l'histoire, Mister Miracle ne paraissait pas plus enclin à participer, dans un sens ou dans l'autre.

Il fut choisi de régler ça en tête à tête - au sens littéral ; d'esprit à esprit.

Conner avait un mauvais pressentiment à ce sujet, mais rationalisa la chose en la mettant sur le compte de sa propre expérience des... Dérives que cela pouvait entraîner. Hélas, les instants qui suivirent se chargèrent de lui donner raison - puisque le martien vert fit l'objet d'une combustion spontanée, s'enflammant à l'endroit-même où il se tenait !

Qu'est-ce qui se passe ?!

Ceux situés au plus près de J'onn réagirent les premiers pour tenter de l'éteindre ; les arroseurs automatiques se déclenchèrent... Mais rien de tout ça ne suffit à arrêter le feu - à les empêcher de calciner le membre fondateur de la Justice League. Bien qu'horrifié, il n'en réagit pas moins au quart de tour en voyant Pravda se jeter sur M'gann, l'accusant de ce qui venait de se produire et réclamant vengeance.

LÂCHEZ-LA ! hurla-t-il férocement tandis qu'il frappait violemment le héros russe du revers de la main, l'arrachant à sa proie pour l'envoyer s'écraser contre le mur de la pièce dans un déluge de plâtre. Ses yeux rayonnèrent d'une lumière écarlate et il se campa solidement sur le sol, rendant clair pour tout le monde que quiconque tenterait de s'en prendre à elle subirait le même sort. Est-ce que vous êtes stupides ? Elle n'a pas pu faire ça ! Depuis quand est-ce que les martiens contrôlent les flammes ? Vous croyez qu'elle l'a fait brûler par la pensée ?!

Avant que les choses n'aient pu empirer, toutefois, la Boîte-Mère de Mister Miracle se fit entendre - et celui-ci avec elle. Et les conclusions qu'il en tirait étaient pour le moins inquiétante. Difficile, donc, de ne pas lui donner raison : il fallait s'en aller, et vite. Nul besoin d'en savoir plus.

Il suffisait de demander, répliqua Conner - avant de s'élancer vers le mur le plus proche afin le faire voler en éclats, poing en avant, avec la subtilité d'un boulet de canon.

Pour leur permettre de vider les lieux - pourvu qu'il soit encore temps.