L'auteur de comics de la semaine !

Chers joueurs,

Voici un nouveau sujet consacré aux comics et plus précisément à leurs créateurs. Chaque semaine nous mettrons en lumière un scénariste ou un dessinateur en faisant un court rappel de leurs principaux travaux, que ce soit chez DC Comics ou ailleurs, avec une petite liste de lectures chaudement recommandées...

... tout naturellement, ce sujet sera aussi l'occasion pour vous - chers joueurs, chers lecteurs - de nous faire part de vos conseils de lecture relatifs à cet auteur !

Pour mémoire, nous avons honoré dans ce sujet, depuis sa création :

- John Byrne
- Matt Wagner
- Frank Miller
- Colleen Doran
- Bill Sienkiewicz

Né au Royaume-Uni, Byrne est parti avec sa famille au Canada quand il avait 8 ans. C'est là qu'il a lu son premier comics avant d'être subjugué par le travail de Stan Lee et de Jack Kirby sur Fantastic Four en 1962 !


C'est alors qu'il est étudiant en art entre 1970 et 1973 (il quittera la fac' sans diplôme) que Byrne créera son premier super-héros, Gay Guy (qui à en croire Wikipedia aurait inspiré par la suite le personnage de Harfang). Puis, il rentrera dans le monde des comics en 1974...

... il faudra attendre 1977 et X-Men n°108 dont il signe les dessins sur un scénario de Chris Claremont pour que la reconnaissance arrive. Souvent considéré en tant qu'âge d'or de la série, les numéros signés avec Chris Claremont emporteront le lecteur - notamment - dans la saga du Phoenix noir, de Proteus ou de "Days of Future Past". L'aventure s'arrêtera, en revanche, au n°143 en 1981.

Mais Byrne est également connu pour son travail sur Fantastic Four (1981-1986), Alpha Flight (1983-1985) ou Namor (1990-1992) ! Son She-Hulk était particulièrement sympathique et décalé d'ailleurs ^^


Bon, pis John Byrne c'est aussi la mini-série Superman : The Man of Steel, dans laquelle il opère un reboot complet du personnage, dégageant au passage bon nombre de super-animaux et de couleurs de kryptonite !

Dans les années 90, Byrne s'est éloigné des majors (DC et Marvel, donc) pour travailler pour Dark Horse Comics et notamment sur la gamme "Legend". On lui devra - outre d'avoir contribué à la création d'Hellboy - les séries "Danger Unlimited", "Babe" et surtout "Next Men", une véritable pépite dont la fin a été publiée dans les années 2010 par IDW, le label qui publie actuellement Byrne.


La force de Byrne ? Son trait reconnaissable entre mille ! Mais aussi de solides scénarios, aux allures parfois très "soap" (un peu comme un Claremont de la grande époque ?) ! Il serait - dans le privé - un peu "difficile" à vivre et prompt à s'engueuler avec tout le monde. C'est surtout l'un des auteurs de super-héros les plus "personnels", notamment dans sa capacité à aborder tout un tas de sujets sensibles (la schizophrénie dans "Alpha Flight", l'avortement dans "Next Men", ...) s'agissant d'un médium de divertissement grand public.

Ce qu'on vous recommande de lire :

- X-Men, n°108-143 (Marvel)
- Superman : the Man of Steel, n°1-6 (DC Comics)
- Alpha Flight, n°1-29 (Marvel)
- John Byrne's Next Men, n°0-44 (Dark Horse Comics, puis IDW)

Gloire à mon créateur !

Très bon sujet hâte de lire la suite

Tiens, ça je l'ignorais ^^

Du coup, après m'être renseignée, Byrne a participé à la création :

- pour Marvel d'Arcade, des personnages de la Division Alpha (Aurora, Guardian, Northstar, Puck, Sasquatch, Talisman, Vindicator) du Club des Damnés (Emma Frost !), de Mariko-la-copine-de-Wolverine, d'Omega Red, de Kitty Pryde, de Pyro, de Dents-de-Sabre, du Roi d'Ombre, de Rachel Summers...
- pour (en plus de Silver Banshee) DC, de Kelex, de Maggie Sawyer, d'Amanda Waller, de Cassandra Sandsmark

Pas mal donc !

Un immense créateur, mais un sacré caractère !
Merci pour ce super article, Jade.

Miss Martian, je l'ai lu aussi : si mes souvenirs sont bons, il s'agit de l'un des épisodes de la mini-série Superman : Man of Steel.

Et je suis d'accord : les personnages féminins sont souvent mis en avant chez Byrne. Sans parler de sa She-Hulk complètement décalquée (une très bonne série, à l'époque publiée dans Nova), sa Vindicator dans Alpha Flight est super (celle qui à la base n'était qu'une femme au foyer et qui va revêtir l'armure de feu son mari pour diriger à nouveau la Division Alpha et la faire perdurer), Aurora (toujours dans la Division Alpha) ou Harfang sont également de très, très bons personnages, et je parle même pas de son travail sur Next Men avec Jasmine ou Bethany.

Quand Wagner publie sa première histoire en 1982, dans le légendaire Comico Primer n°2, alors qu'il n'a que 21 ans, sait-il qu'il va inscrire durablement dans le paysage des comics le personnage de Grendel ?

Car - maintenant tout le monde a oublié (ou presque) Comico (pas une mauvaise compagnie d'ailleurs, qui publiait l'excellent "Elementals" de Bill Williingham) mais Wagner a su - avec un personnage dont il détient toujours les droits (après la faillite de Comico, il ira - d'ailleurs - voir Dark Horse Comics) - se faire une place au soleil.

Grendel, pour celles et ceux qui n'en auraient jamais entendu parler (et c'est normal tant la série a été partiellement et mal éditée en VF) c'est Hunter Rose, un überkid costumé, super-intelligent qui décide, dès le plus jeune âge, a devenir un génie du crime ! Il a monté un empire du crime et seul le loup-garou-policier Argent peut lui mettre des bâtons dans les roues...

... après la petite histoire dans "Comico Primer", Wagner a l'opportunité - toujours chez Comico - de publier trois numéros (1983-1984) qui, malheureusement, ne finissent pas, laissant le lecteur sur sa faim !


Mais ce n'est rien car Wagner a un autre projet : Mage (1984-1986). L'histoire d'un jeune homme qui lui ressemble physiquement, Kevin Matchstick, qui vit dans le doute permanent. Qui ne sait pas où sa vie le mène. Qui rate tout ce qu'il entreprend... jusqu'au jour où il tombe sur un drôle de sorcier qui va voir son potentiel et l'entraîner dans une folle épopée contre les forces du mal !

Ce qui est marrant c'est que les personnages emblématiques de Wagner semble représenter celui qu'il aurait voulu être (Hunter Rose / Grendel, enfin - j'imagine - pas pour le côté criminel) et celui qu'il pense être (Kevin Matchstick / Mage, les pouvoirs magiques en moins).


En bonus, de Mage, d'ailleurs, il y a un roman graphique consacré à Hunter Rose (Devil by the Deed, une VF existe) et qui donne - enfin - la fin de l'histoire : qui se solde, d'ailleurs, par la mort de Rose !

Autrement dit le personnage emblématique de Wagner est mort ! Mais Grendel, son alter ego masqué, vit au moins en légende. Une série de 40 épisodes sera publiée chez Comico (1986-1990) consacrée aux aventures des personnes qui endosseront successivement le masque de Grendel : la journaliste Christine Spar (avec des dessins des frères Pander), puis son malheureux compagnon Brian Li Sung (avec des des dessins de Bernie Mirault), puis le tourmenté Eppy Thatcher, le puissant Orion Assante...

... jusqu'à ce que l'on arrive dans un futur post-apocalyptique où un Grendel est un guerrier faisant partie d'une caste d'élite !

Vous l'aurez compris, Grendel c'est palpitant. Et Mister Miracle ne pourra pas me dire le contraire ^^

Mais Wagner a aussi participé à des travaux chez DC Comics. Notamment sur un mémorable arc de "Batman : Legend of the Dark Knight" consacré à Double-Face et à l'ambiance proche du film "Freaks" de Tod Browning et à la série "Sandman : Mystery Theatre", consacré à Wesley Dodds !

Il y aura également 2 crossovers plutôt réussis Batma / Grendel (même si je préfère nettement le premier).


Actuellement, Matt Wagner (avec son fils aux couleurs) est en train de boucler le troisième et dernier cycle de Mage, pour Image, cycle qui est exceptionnellement bon !

Sur le plan personnel, Matt Wagner est marié à Barbara Schutz, la frangine de son éditrice, Diana Schutz (qui a écrit, d'ailleurs, une histoire de Grendel, Devil Child, consacré à la vie de Stacy Palumbo, la fille adoptive de Hunter Rose).

Wagner c'est un dessin qui sait être dynamique (c'est presque du manga par moments) et qui peut - avec des cases très petites - être très expressif (je pense - notamment - à son travail sur le Batman / Grendel I). C'est aussi un auteur qui réalise des peintures très saisissantes (Devil Quest).

Côté scénario, je ne tarirai pas de louage sur la profondeur des trois cycles de Mage ou la richesse de l'univers créé à partir du personnage de Grendel / Hunter Rose.

On l'aura compris, Matt Wagner c'est super-puissant ^^

Ce qu'on vous recommande de lire :

- Grendel la mini-série, le Graphic Novel "Devil by the Deed" et la série régulière (Comico)
- Grendel War Child, 1-10 (Dark Horse Comics)
- Mage I, 1-15 (Comico)
- Mage II, 1-15 (Dark Horse Comics)
- Mage III, 1-15 (Image)
- Batman / Grendel I, 1-2 (DC Comics / Comico)
- Batman : Legends of the Dark Knight, 28-30 (DC Comics)
- Sandman : Mystery Theatre, 1-60 (DC Comics)

+1 avec Mary : Wagner, dans Mage, a de magnifiques pages (souvent en double-page) se rapportant à de la Fantasy, comme là, dans la deuxième série...


Pour la SF, on a bien sur le cycle Devil Quest de Grendel...


... qui fait furieusement penser à du Terminator (d'ailleurs, Grendel Prime voyagera dans le passé pour accomplir une mission à Gotham City ^^) ! Wagner illustrera, en outre, un excellent one-shot consacré à Terminator !

Si Frank Miller a commencé sa carrière dans les comics en 1978, c'est en 1979, avec Daredevil n°158 qu'il dessine, qu'il obtiendra de vives réactions à son style ! Déjà, Miller divise : il y a les fans et puis... les autres.

D'ailleurs, il reprend le dessin sur un titre qui va relativement mal : Daredevil ne passionne plus comme par le passé, Marvel réfléchit limite à supprimer ce titre qui ne se vend guère... mais Marvel s'abstient et confie, plutôt, le scénario en plus des dessins à Miller à partir du n°168 (1981). Ce premier passage sur la série Daredevil (168-191) confrontera le justicier aveugle à une terrible organisation secrète de ninjas - la Main - qui fomentent d'obscurs projets pour notre héros. Et puis, il y a LA création de Miller : Elektra, ennemie / amante de Daredevil, qui n'aura jamais été aussi puissante et poignante que sous la plume de son créateur !


Miller reviendra, d'ailleurs, à plusieurs reprises sur Daredevil et Elektra. Ce sera l'inoubliable arc "Born Again" (Daredevil n°227-233, avec David Mazzucchelli aux dessins, 1986), les Graphic Novels "Elektra lives again" (1991) et "Daredvil : Love and War" (avec Bill Sienkiewicz, 1986) ou la mini-série Elektra Assassin (avec Bill Sienkiewicz, 1986-1987).

Mais Miller n'est pas attaché qu'à Marvel Comics. Car chez DC Comics, il va également se distinguer avec deux personnages.

Le premier est Ronin (1983-1984), un samouraï de fiction qui interagit dans un monde futuriste et désabusé. Et c'est la première oeuvre de Miller, je trouve, qui en met réellement plein la poire. On y retrouve des pages et des pages de combat au sabre et la fascination toute propre de Frank Miller pour les mangas de samouraï (il contribuera à la publication aux USA - réalisant même les couvertures de l'édition américaine - du manga "Lone Wolf & Cub").

Le second est... sans grande surprise Batman. Décrire l'impact que Miller a eu sur Batman serait trop long. Mais quand on pense que de manière concomitante sortaient aux US "Watchmen" de Moore / Gibbons et "Dark Knight Returns" de Miller (1986), on se dit que cette année 1986 a été un sacré bon cru pour les comics ! D'ailleurs, "Dark Knight Returns" (qui fera l'objet de deux suites : l'une en 2001 et l'autre en 2015-2017) aura permis - à mon sens - de développer le personnage de Batman vers des histoires plus adultes, plus personnelles, lançant une sorte de Batmania chez les kids qui étaient devenus entre temps des grandes personnes ^^

Miller publiera également l'arc "Year one" (1987) narrant les premiers pas de Batman (avec l'exceptionnel David Mazzucchelli aux dessins).


Puis, Miller, comme beaucoup d'autres dans les années 90 c'est un peu éloigné des majors (DC et Marvel) pour aller travailler chez d'autres éditeurs sur des séries dont il gardait les droits. Il créera ainsi le personnage de Martha Washington (Dark Horse Comics), publiera "Hard Boiled" avec Geoff Darrow (toujours chez Dark Horse Comics) mais surtout... sortira "Sin City" que l'on peut considérer en tant qu'aboutissement de son oeuvre, avec son ambiance très stylisée, sombre, glauque et très "pulp" !

En parallèle, Miller a essayé de réussir à Hollywood : ça donnera les mauvais scénarios des médiocres Robocop 2 et Robocop 3... puis plus tard la réalisation (ou la co-réalisation) des films consacrés à "Sin City" (avec Robert Rodriguez) ou celui consacré au Spirit de Will Eisner !

Mais c'est quand même dans les comics que Miller est le plus fort...


... même s'il est décrié pour certaines prises de position : sa fascination pour les armes à feu, ses propos décousus sur la géopolitique font de Miller un auteur controversé. D'ailleurs, Alan Moore n'hésite pas à le pourrir : considérant son oeuvre récente comme empreinte d'une idéologie néfaste ^^

Soit. Il est vrai que dans "Sin City", les femmes sont souvent soit prostituées, soit manipulatrices, soit les 2. Il est également vrai que dans "Sin City", on met en avant de grosses brutes qui règlent tous leurs problèmes à coups de poings. OK.

A contrario, Elektra ou Martha Washington sont des personnages féminins forts et, pour cette dernière, exempte de tout caractère malsain.

Hum... Miller, auteur misogyne ?

Je crois, surtout, que Miller n'est pas un auteur subtil. Nous naviguons avec lui - clairement - dans un univers de BD qui ne prétend nullement révéler une vérité profonde ou coller à la réalité. C'est une oeuvre hyper-codée, un peu à la manière de ce que l'on trouve chez un Tarantino (il n'est d'ailleurs guère étonnant que pour adapter "Sin City", il ait fait appel à Robert Rodriguez, l'éternel complice de Tarantino).


Au-delà de la controverse, on retiendra l'extraordinaire vivacité du dessin de Miller - clairement inspiré par le style manga - qui - s'il perd par moments en précision - en fout plein les yeux. Je crois que seul un Paul Pope est capable de mieux transcrire que Miller cette idée de vitesse qui imprègne toute son oeuvre.

Ce qu'on vous recommande de lire :

- Batman : Dark Knight Returns (DC COMICS)
- Batman : 404-407 ["Year One"] (DC COMICS)
- Daredevil : 168-191, 227-233 (MARVEL)
- Elektra live again (MARVEL)
- Give me Liberty [Martha Washington] (DARK HORSE COMICS)
- Sin City : A Dame to kill for (DARK HORSE COMICS)

À savoir que, très New Yorkais, Miller a vécu comme une blessure intime le 11 septembre. Si on lie ça à une lutte contre le cancer (jamais officialisée, il est trop pudique, mais des photos le montrant décharné et affaibli ne trompent pas) et la rupture avec la femme de sa vie (Lynn Varley, coloriste sur beaucoup d'oeuvres), ça peut non pas excuser mais expliquer ses prises de position extrêmes.
Dont il s'est éloigné récemment, d'ailleurs. Avec son rétablissement, il a admis que des choses comme Holy Terror ne lui plaisent plus : il a dit ne rien regretter, mais ne plus être l'homme qui pouvait faire ça.
Un grand monsieur.

À mon avis, Moore lui est "supérieur" pour la diversité de ses thèmes. Miller est quasiment tout le temps sur le même propos : l'urbain et l'homme, beaucoup, mais surtout la détermination de l'homme acculé pour survivre. Moore a embrassé plus de thèmes, mais tous deux sont d'immenses créateurs.

A mon sens, Moore est quasiment hors compétition. Bien que fan de Frank Miller, pour moi Moore, il n'y a guère que Neil Gaiman pour (tenter de) rivaliser avec lui.

Miller, c'est surtout un graphisme - à mon sens - qu'on retiendra plus que ses histoires. Et pour moi, le sommet de Miller peut être par conséquent, très précisément, fixé à "Sin City : A Dame to kill for".

Enfin... niveau histoires, ça claque, hein ^^ Là, on parle de MONSTRES des comics, pas de Rob Liefeld ou de Dieu sait qui encore ^^

Je suis d'accord avec Mary sinon sur le fait que quand Miller ne dessine pas, il sait s'entourer de grands dessinateurs...


... David Mazzucchelli (là sur "Batman : Year one")...


... ou Dave Gibbons (là sur "Give me Liberty")...


... ou le trop rare Geof Darrow (là sur "Hard Boiled") !

Colleen Doran a cette particularité d'avoir commencé sa carrière extrêmement jeune ! C'est alors qu'elle est encore lycéenne et qu'elle n'est âgée que de 15 ans qu'elle commence à réaliser des illustrations pour une agence de publicité ! L'année d'après, elle se retrouve d'ailleurs à travailler sur Miss Fury, une héroïne des années 40, pendant quelques mois... avant de démissionner compte-tenu de la tournure un brin porno que tout cela prenait ! Doran confiera d'ailleurs qu'elle se sentait mal à l'aise d'avoir à dessiner des choses qu'elle ne pourrait acheter en toute légalité !


De toutes manières, l'essentiel de l'oeuvre de Colleen Doran n'est pas là : elle a déjà en tête les personnages de "A Distant Soil", son space-opera auquel elle consacrera la majeure partie de son travail.

Cette série fait une première apparition en complément du magasine Elfquest n°16 de 1983 avant que 9 numéros de "A Distant Soil" soient publiés par WaRP Graphics, la compagnie de Wendy et Richard Pini, les créateurs d'Elfquest...

... mais la série demeurera inachevée : les Pini ayant essayé d'arnaquer Doran en prétendant posséder les personnages qu'elle avait créés !

Qu'à cela ne tienne ! Privée de la possibilité de réimprimer son propre travail (car finalemet les Pini ne feront plus que revendiquer la propriété des planches réalisées chez WaRP et pas celle des personnages... je ne regarderai plus jamais leurs elfes de la même façon ^^) - et d'ailleurs ces 9 numéros ne seront jamais réédités - Doran recommencera sa série depuis le début en la redessinant (et en la rescénarisant) intégralement !

Deux TPB sortiront en couleurs chez Starblaze Graphics e 1987 et 1989 mais, là encore, Doran est déçue par le comportement de son éditeur qui - si mes souvenirs sont bons - "oublie" de la payer.

C'est finalement en auto-édition (Aria Press) que Dora pourra enfin publier convenablement (et en noir et blanc) sa série : 14 numéros sortiront entre 1991 et 1994, avant qu'IMAGE reprenne le flambeau à partir du n°15 (1996). La série sortira de manière erratique jusqu'au n°38 (2006) avant de connaître une très longue pause... jusqu''en 2013 où les numéros 39 à 42 sortiront enfin !


Mais "A Distant Soil" ça parle de quoi, que diantre ? C'est l'histoire de Jason & Liana Scott, deux adolescents - frère et sœur - qui ont d'impressionnants pouvoirs mentaux (télépathie, télékinésie ; Jason peut tuer avec son esprit quelqu'un, le débrancher ; Liana peut créer de gigantesques explosions - et bien plus encore comme le reste de la série le révélera...). Ils se sont enfuis de l'hôpital psychiatrique où ils étaient retenus - en tant que cobayes - par une organisation secrète. Pourchassée par cette dernière, en manque des produits qui leur permettent de canaliser leurs pouvoirs (un peu comme les psioniques dans Akira), Liana et Jason se retrouvent soudain... confrontés à des soldats extraterrestres qui tentent de les enlever !

Mais l'intervention d'un loubard (Brent), d'un flic (Minetti) et surtout d'un duo d'extraterrestres gentils - D'mer & Rieken - vont permettre à Liana d'éviter d'être kidnappée, contrairement à Jason.

Et à partir de là, on va suivre en parallèle les destinées de Liana et de Jason.

Liana sera ramenée chez le flic (Minetti, le flic italo-américain un peu bourru mais sympa) en compagnie du loubard (Brent qui dirige un gang et est un poil efféminé) et des deux extraterrestres. Rieken, l'un d'eux, va expliquer à Liana et aux autres de quoi il en retourne : il est ovanien, c'est à dire membre d'une race qui fait une consommation assez incroyable de mondes et d'esclaves, qu'ils arrivent à dominer en raison des pouvoirs qu'ont chacun des ovaniens et qui se manifestent à la sortie de l'enfance (tous sont télépathes). Du coup, ils assurent leur domination sur tout un tas d'autres races qui sont chargées d'exécuter les basses œuvres.

A la tête d'Ovanan, il y a l'Avatar, un ovanien qui tire son énergie phénoménale en canalisant celle de l'ensemble de son peuple. Avec ça, il peut, si ça lui chante, détruire une planète (une sorte d'Etoile Noire sur pattes en somme).

Autour de lui (et ce sont eux qui ont le pouvoir réel), il y a la Hiérarchie, un conseil composé d'une demi-douzaines d'ovaniens ultra-puissants et surtout ultra-pervers.


Il y a sur Ovanan une pratique que Rieken n'accepte pas : c'est la sélection. Tous les enfants doivent passer devant l'Avatar qui détermine si leur don est utile pour la société ou s'il est néfaste. Dans ce cas, l'Avatar tue l'enfant.

Et Rieken qui est - plus ou moins - en couple avec D'mer, un extraterrestre d'une autre espèce, ne peut tolérer le comportement qu'ont les ovaniens vis à vis du reste de l'univers, ni celui de la Hiérarchie vis à vis de son propre peuple...

... et c'est là où Liana entre en jeu : il lui révèle que son père à elle, Aeren, était un disrupteur (c'est à dire quelqu'un de capable de tuer par la pensée) et qu'il a du quitter Ovanan pour sauver sa peau... débarquant sur Terre, il avait rencontré une terrienne, qu'il avait aimé et épousé et dont il avait eu plusieurs enfants... dont Liana et son frère Jason.

Raison pour laquelle Liana et Jason ont leurs pouvoirs. Et raison pour laquelle les ovaniens ont emmené leur vaisseau géant dans le coin (une forteresse volante invisible aux radars) : ils veulent récupérer les deux enfants et notamment Liana qui a les mêmes pouvoirs que celui... de leur Avatar !

Bref, Rieken & cie vont devoir se trouver des alliés avant d'investir le Siovanan (le vaisseau en question) pour tenter de renverser la Hiérarchie. Ils récupéreront à ce titre une styliste-détective, un magicien-stylé, un écrivain russe en exil, un étudiant en médecine, un squatteur et... Galaad, fils de Lancelot, arrivé dans notre époque après avoir été aspiré par un vortex !

WOW. "A Distant Soil" est l'une de mes séries préférées, on l'aura compris. Pas de VF en revanche et c'est diablement dommage !


Bon, Doran a également illustré pas mal de choses, notamment une nouvelle de Neil Gaiman (Troll Bridge) et des couvertures de comics. On la retrouve dans deux épisodes de Sandman, l'un du terrifiant arc "A Game of You", l'autre dans le n°20 où Element Girl supplie Death de lui ôter la vie.

Il est également plus ou moins reconnu que Neil Gaiman s'est inspiré d'elle pour créer le personnage de Thessaly dans Sandman et Dave Sim - dans Cerebus - l'a gentiment caricaturée (ce qui est rare chez Sim).

Ce qui la caractérise - outre une sensibilité particulière dans l'écriture - est sa façon somptueuse d'assembler ses pages qui sont parfaitement fascinantes à contempler, le moindre détail, la moindre ornementation (à ce stade on peut parler d'ornementation, oui ^^) étant savamment travaillé !


Ce qu'on vous recommande de lire :

- A Distant Soil, 1-42 (Aria Press / Image Comics)
- A Distant Soil, 1-9 (WaRP Graphics)
- Sandman, 20 (DC Comics / Vertigo)

Diplômé d'une école de dessin, Bill Sienkiewicz - fan de Curt Swan et de Jack Kirby - est entré en 1976, à l'âge de 19 ans donc, dans le monde professionnel des comics en présentant son portfolio au directeur artistique de DC de l'époque, Vinnie Colletta...

... qui bien qu'intéressé par son travail ne trouva aucun comics sur lequel faire bosser Sienkiewicz qui - si son style n'avait pas encore atteint sa maturité - avait déjà un graphisme très particulier.

A la place, et c'est incroyable (alors que Sienkiewicz était en train de dire qu'il pourrait toujours bosser dans la publicité en tant qu'illustrateur), Colletta contacta Neal Adams qui contacta lui-même Jim Shooter alors... grand chef de Marvel !

Bref, c'est en poussant la porte de chez DC COMICS que Sienkiewicz s'est retrouvé à bosser pour Marvel...


... d'abord sur Moon Knight, le chevalier de la Lune, un justicier qu'il dessina à la manière de Neal Adams, un justicier qui - sous les crayons de Sienkiewicz - fut de plus en plus considéré comme étant le Batman de chez Marvel !

Bref, Sienkiewicz s'occupa de cette série de 1979 à 1983, ce qui est relativement impressionnant vu le turn-over actuel des équipes artistiques sur les comics !


Le style photo-réaliste "à la Neal Adams" jouera une fois un tour à Bill Sienkiewicz : l'atelier de ce dernier était voisin d'un très grand du photo-réalisme, Stan Drake (Juliette de mon cœur)... et quand à la mort de ce dernier, un journal spécialisé dans le comics (ça devait être le COMICS JOURNAL ?) passa un article hommage à Drake... il mit en illustration une case... du Moon Knight de Sienkiewicz !

Cette énorme coïncidence et erreur est racontée avec énormément de talent dans l'excellent "Alec" de l'excellent Eddie Campbell ("From Hell").

Bref, on l'aura compris, à cette époque tout roule pour Sienkiewicz : un job régulier et reconnu chez Marvel. En plus, dès 1979 il épousera l'une des secrétaires de direction de Jim Shooter !

Alors, qu'est ce qu'il est allé faire avec New Mutants...


... New Mutants, c'est le premier spin-off de X-Men : ce sont des ados qui viennent de découvrir leurs pouvoirs et qui sont - pour faire bref - réunis par le Professeur Xavier pour leur apprendre à devenir des mutants responsables. Bref, c'est l'équipe junior !

New Mutants, ce sera 17 épisodes plaisants dans lesquels on découvre l'équipe, on se bat contre les Broods, on voyage au Brésil et... je vous les recommande chaudement.

Et puis, au n°18, arrive Sienkiewicz et son nouveau style déconstruit et peint et... on n'aime ou on n'aime pas ^^

Personnellement, et en tant que fan de la première heure de cette série (que j'ai lu étant petite), le passage de Sienkiewicz sur la série est clairement son sommet : les sagas de "L"Ours-démon" et celle au sujet du fils autiste de Charles Xavier, quand les Nouveaux Mutants vont se retrouver prisonnier de sa tête sont inoubliables.

A l'époque, le magasine "Titans" qui publiait ce comics en France avait fait l'objet d'une avalanche de courrier de lecteurs soit admiratifs, soit fort mécontents du style de l'auteur (comme cela aura aussi été le cas pour l'arrivée de Miller sur "Daredevil" ou plus tard de Jae Lee sur "Namor"). Pire même ! L'éditeur LUG passera à la trappe de nombreux épisodes et caviardera les autres en retirant les scènes trop violentes, notamment sur la saga de "L'Ours-Démon".

Fichue censure ^^ D'autant plus que ces épisodes sont gigantesques !


Et depuis ? Sienkiewicz a quitté "New Mutants" en 1986 et a continué à faire du comics. On le retrouvera aux dessins de l'excellente série "Elektra Assassin" dont j'ai déjà parlé au sujet de Frank Miller (1986-1987), du Graphic Novel "Daredevil : Love & War" (1986). Il aura également signé en 1985 l'adaptation en comics du film Dune de David Lynch (avec Ralph Macchio au scénario).

Mais on ne retrouvera plus que rarement Sienkiewicz sur des séries régulières, Billy-the-Sink (comme Eddie Campbell le surnomme) faisant plus de l'illustration et de la couverture qu'autre chose (il dessinera même des cartes Magic the Gathering).

Dans ces derniers travaux remarquables, on retrouvera la série "Stray Toasters" qu'il faudrait que je lise un jour (1989), une adaptation de Moby Dick (1990, pas lu non plus), une bio de Jimi Hendrix (1995, un vrai chef d'oeuvre ! Avec un CD en bonus où Jimi Hendrix... joue de la guitare acoustique !) et surtout "Big Numbers" le Saint Graal des comics, signé avec Alan Moore et - malheureusement - inachevé (2 numéros publiés en 1990, un troisième inachevé que l'on peut trouver en scan [légaux] en ligne).


D'ailleurs quand on regarde "Big Numbers", j'ai l'impression de voir le comic-book le plus beau jamais dessiné.

Alors comment on passe d'un style photo-réaliste-sombre à la Neal Adams à des collages psychédéliques sur des crayonnés magifiques à la Dave McKean ? Tout simplement en étant Bill Sienkiewicz, descendant au passage de Henryk Sienkiewicz, auteur de "Quo Vadis" et... prix Nobel de littérature en 1905 !

Ce qu'on vous recommande de lire :

- New Mutants, 18-31 et 35-38 (MARVEL COMICS)
- Elektra Assassin, 1-8 (MARVEL COMICS)
- Voodoo Child: The Illustrated Legend of Jimi Hendrix (MARTIN I. GREEN)
- Big Numbers, 1-2 (MAD LOVE)