Batman Returns [Post-Unique] Lun 11 Fév 2019 - 16:36 | |
| Ce devait une soirée de joie ; de plaisir, et de bonheur. Cela aurait dû être son grand moment – la fin de sa mission, l'achèvement de sa quête. Après bien des épreuves, des doutes, des échecs et des moments d'abandon... enfin. Enfin, cela en aurait été terminé – enfin, il en aurait eu fini avec cela. Enfin, Bruce Wayne allait se fiancer, et acter son orientation vers le bonheur. Enfin... Alfred Pennyworth allait atteindre son but, et marier son employeur ; son garçon, comme il le considère au fond de son cœur. « Hem. »Lentement, ses pas glissent sur les escaliers forgés dans la roche – et l'amènent à sa distance ; dans le sous-sol du Manoir Wayne. Dans ses souterrains. Dans ses fondations. Dans l'obscurité et les ténèbres. Dans le foyer de celui qui s'est emparé du garçon qu'il a élevé... et dont il espérait se débarrasser un peu, ce soir.Dans la Batcave. Où Alfred Pennyworth finit par arriver – après avoir organisé l'évacuation et les soins aux victimes de la Tour Wayne. Plusieurs heures sont passées, depuis l'anéantissement de la soirée des fiançailles de son employeur. Le jour va bientôt se lever, des dizaines de personnes sont encore à l'hôpital... mais seul le destin d'une personne l'inquiète, encore. Car la vie de Julie Madison va déterminer beaucoup de choses, il en a conscience. « Monsieur... ? » « Ici. »La réponse est sèche, rapide ; brutale. Alfred soupire discrètement. Il est trop tard, il le sent ; il est déjà trop tard, pense-t-il en s'approchant d'une zone précise de la Batcave. « Monsieur, l'évacuation de la Tour Wayne est terminée. Messieurs Damian et Duke ont fait au mieux, tandis que Monsieur Lucius Fox a enclenché les mesures de sécurité des Entreprises Wayne. Monsieur Jean-Paul Valley est intervenu également, et d'autres de vos proches ont réalisé des miracles. » « En effet. »Le vieil homme le rejoint – mais son employeur, son garçon ne se retourne pas. Dos à lui, le regard sombre, il... fixe quelque chose, qu'il tient entre ses mains.Un masque ; un masque de Batman, de son récent costume – qu'il voulait plus souple, moins agressif. Bruce soupire, et appuie fortement sur le masque ; la colère, la douleur irradient presque de lui. « Monsieur, avez-vous des nouv... » « Clark a été plus rapide que jamais. Il a dépassé mes propres estimations, pour rejoindre l'hôpital, et a même aidé aux premiers gestes ; il pourrait être médecin, et serait même un chirurgien très correct. Evidemment. Mais cela n'a pas été suffisant. »Il soupire, et secoue la tête. « Wesley Dodds a fait analyser le poison par Michael Holt, et des protocoles de soins sont enclenchés. La présence du Joker est confirmée, et... et il semble donc que je n'ai pas été le seul à feindre ma disparition. »Bruce ferme les yeux, et ses muscles se crispent. Il retient, soudain, sa respiration en sentant la fureur monter – et il les rouvre, subitement, quand il entend un craquement ; le masque. Le masque a cédé, sous sa colère. « Hum. » « Monsieur. »Alfred s'avance, et pose une main douce sur l'épaule de l'homme qu'il a élevé comme un fils ; comme son fils. « Elle... vit. A peine. Son organisme souffrait de plusieurs allergies, qui ont muté au contact du poison. Plusieurs organes sont touchés, et son cerveau... son cerveau a été endommagé ; lourdement. Elle est dans un coma si profond que les médecins ignorent même si quelqu'un pourrait l'en sortir, et... et elle... »Le souffle lui manque ; son cœur accélère. Les larmes viennent – mais sont retenues. « Monsieur, vous... vous pouvez. Vous avez le droit de vous laiss... » « Non. »La réplique est sèche, rapide ; brutale, une fois de plus. « J'ai... j'y ai cru. J'ai cru que je pouvais avoir cela – que je pouvais y avoir droit ; au bonheur. Je me trompais. »Bruce se détourne d'Alfred, et s'avance vers un autre coin de la Batcave. « J'aime... j'aimais Julie. Je l'ai aimé dès notre jeunesse, et je n'ai jamais cessé de tenir à elle depuis. Mes autres... expériences ont été intenses, mais Julie... Julie demeurait présente, dans mon esprit ; dans mon cœur. Revenu des étoiles, après... après la perte d'Helena et de Selina, après la perte d'Althea et de Diana, après même cette chère... bref. Après tout cela, j'ai cru... que le moment était venu. Gotham City pacifiée par Kate et les autres, la Justice League organisée, un monde plus sûr – et moi plus vieux. J'y ai cru. J'ai cru pouvoir bénéficier du bonheur... et je l'ai choisie. Ho, je l'aime... je l'aimais. Pas autant que d'autres, pas... pas forcément autant qu'il le faudrait, mais je l'aimais, et je sais qu'elle aurait fait mon bonheur ; notre bonheur. »Des dizaines d'arguments et de répliques viennent dans l'esprit d'Alfred ; mais il n'ose en prononcer aucune. La peur. L'appréhension, surtout. La douleur, essentiellement, de voir son garçon se replier autant ; sans rien pouvoir faire pour l'empêcher. « Je me suis trompé – sur tout. Sur elle, que je n'aurais jamais dû emmener dans mon univers. Sur cette ville, que je croyais en paix. Sur... moi, que je croyais prêt. »Il active un élément du Batcomputer, et une paroi s'ouvre pour révéler une nouvelle aile...... avec plusieurs armures et costumes, avec d'autres engins ; bien loin, bien différents même de sa garde-robe habituelle. « Monsieur, je... je vous en conjure, ne prenez pas de conclusion hâtive. » « Il n'y a rien de hâtif à considérer les faits, et à prendre les constats qui s'imposent. » « Monsieur, c'est... la douleur qui parle, pas vous. Après tout ce temps, v... » « Cela fait vingt ans que nous faisons cela, Alfred. Vingt ans, à Gotham... nous savons ce que valent l'espoir et les promesses. Après tout ce temps, combien y a-t-il encore de bons, autour de nous ? » « Monsieur... »Mais Bruce ne l'écoute même plus. Il passe devant ses armures – ses tenues les plus fortes, les plus terribles ; pour s'avancer vers un cocon spécifique. Vers une zone spéciale, laissée en jachère depuis des années. « Julie est comme morte. Le Joker est de retour. Le Pingouin a rôdé dans la soirée, et... et Ra's al Ghul est là, aussi. Vingt ans à Gotham, Alfred – et rien n'a changé. Je l'ai cru... mais je me suis trompé. »Il lève une main, active une ultime commande... et déclenche l'ouverture.Pour lui faire face ; pour le voir. Son costume. Celui qu'il a utilisé, jadis, quand il a dû pacifier la ville – celui qu'il portait, quand il a mené sa guerre contre le crime ; celui qu'il avait, quand le Batman n'était qu'une légende... et un croque-mitaine, pour les criminels. « Monsieur, je... doute que ça soit une bonne idée. » « Croire que Gotham était sauvée et que j'avais droit au bonheur était une mauvaise idée, en effet ; je l'abandonne. »Alfred ouvre la bouche – mais ne dit rien. Et il détourne les yeux. Il... a perdu ; il l'a perdu. Il comprend, amplement, la douleur qui étreint le cœur de son garçon, et la fureur qui l'emporte alors que la ville est menacée. Tous deux pensaient que tout était réglé, que cela irait mieux – ils se sont trompés. Cela peine Alfred ; mais cela fait exploser Bruce... qui en prend acte, et enclenche des mesures. Terribles, hélas. « Vingt ans à Gotham... et rien n'a changé. Moi non plus, alors. »Alfred se tourne – et le découvre, alors ; le redécouvre, en ouvrant la bouche de stupeur... et de peine.Le Batman. Dans son premier costume définitif ; comme avant, donc. Comme dans ses pires moments d'avant. « Moi non plus. »Le Chevalier Noir s'avance, et se détourne d'Alfred ; pour retourner dans la Batcave. Pour retourner aux affaires courantes... loin de celui qu'il faillit devenir, en début de soirée. Loin de Julie Madison. Loin du bonheur. Et au plus près du crime, de la violence et des malheurs – comme avant. Comme toujours !** * ** Un peu plus tard. Alors que chacun des proches de Bruce Wayne est rentré chez soi, alors qu'ils sont exténués après une soirée terrible, après avoir aidé à l'évacuation et fait au mieux... le repos leur est refusé. Car ils reçoivent une communication, via le système du Batman ; qui leur parle, donc. Sans douceur et sans chaleur, hélas. « Bonjour. En premier, je tiens à tous vous remercier pour votre activité, ces dernières heures. J'ai conscience que vous avez été surpris que je ne vous ai pas prévenus... mais je voulais que cette surprise soit positive, et source de joie ; cela n'a pas été le cas. Des dizaines d'invités demeurent en soins, mais l'analyse de Wesley Dodds, alias Sandman, et de Michael Holt, alias Mister Terrific, a permis d'espérer une issue positive. Tel... ne sera pas le cas de Julie Madison. Le Joker a été vu sur place, comme le Pingouin ; des rumeurs d'autres Vilains se font entendre, mais nous y reviendrons. Ra's al Ghul a laissé penser, aussi, qu'il est présent dans la ville depuis longtemps, sans que nous le sachions. Et Batgirl ainsi que Red Robin savent que des guerriers disposant d'un entraînement similaire au nôtre, avec la technologie d'Atom, nous ont attaqué. La situation ne peut perdurer. Batwoman, je te relève de ta mission de protéger Gotham City, et réaffirme mon souhait de te voir intervenir auprès de la Justice League. Je coupe tout contact avec le groupe, et j'espère que tu accepteras d'être la référence d'intelligence et de bon sens au sein de l'équipe. Robin se tiendra à ta disposition, si besoin. Batgirl, Red Robin, je vous demande de vous délocaliser à Ivy Town : poursuivez vos démarches auprès d'Atom, découvrez comment sa technologie a pu être volée – et remontez la piste de ces guerriers, pour les stopper. En toute prudence, et c'est pour cela que je souhaite qu'Orphan vous accompagne. Nightwing, j'ai conscience que tes circonstances personnelles sont spécifiques, et... je te demande de te concentrer dessus, ainsi que les projets de Koriand'r. J'entends que tu protèges Blüdhaven, pour que l'infection criminelle ne s'y étende pas, tout en restant occupé dans le centre-ville de Gotham City – la zone la plus sûre doit le rester. Signal et Azrael t'assisteront dans cette tâche. Red Hood, j'ignore si tu accepteras la communication, mais... j'ai eu vent de tes activités ; je ne les accepte pas. Si tu es prêt à agir positivement, selon mes règles ici... je suis prêt à tolérer ta présence. Réponds en ce sens, alors ; ou subis-en les conséquences. Ce message... ce message est autant là pour vous demander d'agir comme je le souhaite, mais pour vous prévenir également. Les bas-fonds sont à moi. Les zones dangereuses sont à moi. Les criminels, les Vilains sont à moi. La ville est à moi. J'entends la purger de ce qui la ronge – et j'entends le faire rapidement, directement ; efficacement. Je vous solliciterais, pour de l'aide mais aussi des conseils... mais je le répète. La ville est à moi. Soyez-en informés. Faites au mieux. Mais ne me gênez pas – et ne vous mettez pas en travers de mon chemin. » Le message s'arrête, alors. La Batfamily prend alors conscience des demandes de Bruce – mais de son nouveau positionnement, aussi. Bruce... est plein de douleur, après cette soirée ; et plein de rage, surtout. Mais... il ne se détourne pas d'eux, malgré cela. Pas entièrement, tout du moins ; il se contient, ou essaye de se contenir en tout cas. Ce qui est une bonne chose – et un motif d'espoir, en soi. Sûrement le seul, dans la furieuse quête de justice, de contrôle et de violence qui va s'enclencher ! |
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