[Mexique] Narcos [ Degaton / Polaris ]

Le Mexique était de ces pays frappés au coeur même de leur Histoire. Une Histoire faite de violence et d'un rapport à la mort qui pouvait surprendre les plus occidentaux des observateurs, souvent moins souple dans leur regard. Et quel regard pouvait se vanter d'une rigidité plus grande que celle de Degaton ? Le Mexique fêtait la mort ? Il allait alors vivre des moments mémorables...

Un rayon brûlant du Soleil vint frapper contre la monture noire de ses jumelles. Dans sa tenue militaire habituelle malgré la chaleur, l'auto-proclamé maître du temps observait un convoi somme toute banal dans cette région. Transporteurs, mules, colonne punitive, simple défilé de touristes, bien malin qui aurait pu voir dans ces véhicules autre chose que des questions. Mais la police ne les arrêtait pas, les douaniers détournaient le regard et les villages éparses par lesquels ils passaient faisaient comme s'ils ne voyaient rien.

Une colonne fantôme qui ne laisserait de trace que les sculptures de leurs pneus que nulle police scientifique ne viendrait analyser. La poussière déplacée irait se reposer plus loin, comme si elle aussi ne tenait pas à être impliquée dans cette affaire.

Les scorpions grouillaient dans ce désert et les narcotrafiquants s'agitaient. L'annonce de Luthor avait été un déclencheur magnifique. Les criminels les plus ambitieux s'activaient et ceux bien implantés dans leur business model confortable commençaient à voir leur quiétude s'étioler. L'Ordre établit leur convenait, après tout, ils étaient nichés en son sein, avait corrompu voir éliminé la dissidence classique et devenaient presque un Etat dans l'Etat, lové dans son ombre. Que feraient-ils lorsque leur pantin tomberait et que leur cachette révèleraient leurs faiblesse au reste de la société ? Perspective amusante. Ce qui avait été s'apprêtait à ne plus être.

Un individu s'approcha de Degaton. L'un de ses précieux "Enfants".

- Ai-je bien identifié le convoi Voyageur ? demanda-t-il avec respect.

- Mission accomplie, le gratifia le chef militaire.

Le défilé de véhicules se faufila alors dans le relief montagneux pour rejoindre, quelques minutes plus tard, l'entrée d'une imposante propriété qui avait le bon goût de ne pas paraître luxueuse de prime abord, mais le téléphone satellite utilisé par un type en chemise ouverte et la silhouette des voitures qui s'alignaient dans un garage qui se fermait ne laissaient aucun doute sur la richesse qui devait s'y nicher. Un peu de discrétion ne faisait jamais de mal.

Le criminel quitta ses jumelles et ordonna à son homme de se replier. Degaton avait des négociation à entamer dans très exactement une heure dans le passé.

Il se dématérialisa pour apparaître non loin d'une villa de narcos et se posa dans la végétation alentour pour attendre. Per aimait être en avance, cela lui permettait de pouvoir prendre le temps de réfléchir, lui qui pourtant, n'en manquait jamais. Sa cible était avant tout les Etats-Unis, mais le monde s'offrait depuis l'annonce de la Legion of Doom à quiconque était assez habile pour forger les plus belles alliances et le Mexique, tout comme le Canada et la Russie représentait une zone tampon des plus intéressantes pour quiconque voulait s'attaquer à l'Oncle Sam. Luthor voulait un monde de prédateur, Degaton en serait le tyran.

Oui, faire tomber l'Amérique serait un jeu complexe mais gratifiant, il ne fallait cependant rien laisser au hasard.

Soudainement, l'emballement. Des cris, des coups de feu, le grincement caractéristique du métal dans l'on contraint à froid. Le téléphone de Degaton se brouille.

Le militaire se lève et s'époussette le pantalon alors qu'il se redresse. Autant être présentable pour une première rencontre.

Le Docteur Polaris s'était évadé depuis peu et reprenait du service. Degaton en avait lu quelques lignes dans les journaux qui seraient imprimés dans quelques semaines, mais pas question pour lui d'attendre plus longtemps. Les capacités de ce dernier étaient trop précieuses pour être laissées en pleine liberté sans qu'il puisse en tirer profit, l'heure n'était plus aux actions isolées. Pour frapper fort, il allait falloir frapper à plusieurs.

Degaton reprit ses jumelles et put observer l'habileté de l'individu et son irascibilité. Ne pas aimer la défaite ou l'échec était une bonne chose.

Le voyageur temporel appuya sur un bracelet qu'il avait au poignet et matérialisa son disque de lévitation temporel, autant soigner son entrée.

Lévitant à sa façon, le chrono-fasciste s'approcha du lieu de la bataille, à proximité de la fameuse piscine où flottaient quelques cadavres.

- Docteur Polaris je présume, commença-t-il avec les bras croisés dans le dos, mettant ainsi en valeur les brassards frappés de son narcissique "D" qui surplombaient les manches de sa veste noire, tout en affichant une attitude non agressive Per Degaton vous salue.

Son disque lévitait à présent à quelques centimètres du sol. Le dictateur en devenir observait la scène en connaisseur de massacres et l'appréciait en conséquence, hochant de la tête et effectuant quelques mous impressionnées de ses lèvres.

- Je n'irai pas pas quatre chemin, lança-t-il de but en blanc. Puis regardant autour de lui, nos cibles communes seront dans quelques heures à leur point de rendez-vous aussi Docteur Polaris, viens-je vous proposer une alliance.

Il laissa un court blanc après cette annonce un brin abrupte, mais ils auraient l'occasion de mieux se connaître en affrontant les cartels et en fondant les prémisses d'un Empire Millénaire.

- Je sais où vont vos trafiquants, le chemin qu'ils empruntent et l'heure à laquelle ils vont atteindre leur rendez-vous. Mais je n'ai pas la force de frappe suffisante pour les mettre à genoux seul. Mais...

Il montra alors de ses deux bras l'étendu du massacre de la villa.

- Ce ne semble pas être votre cas docteur, compléta-t-il avec un sourire carnassier.

C'était étrange de discuter dans le reflet Viking de sa personne. Polaris était un criminel selon le coeur de Degaton, un type dangereux, capable du pire, mais qui avait un levier : l'argent. Or, Degaton, lui, aimait le contrôle, il aimait le pouvoir ; et si l'argent faisait un morceau de chemin avec la domination, elle ne faisait pas tout. Ils pourraient s'entendre, tant que Per laisserait à ce combattant électromagnétique de la place pour épancher sa violence. Un homme qui pourrai parfaitement faire son affaire pour conquérir le monde. Qui sait, peut-être un gouverneur capable de nettoyer les frontières de son Empire...

Polaris voyait sa part du gâteau et songeait ensuite au partage. Il se voyait sans doute déjà seul dans cette association, profitant du commerce de la drogue à son unique avantage et le Mexique n'était pas une zone que le tyran temporel se sentait de dominer ou contrôler, sans parler de la perte de temps. Accepter un 50/50 aujourd'hui c'était finir par ne plus rien avoir tant il ne désirait pas particulièrement s'investir dans le commerce. C'étaient 50 pourcents qu'il finirait par perdre. Mais il valait mieux attendre de voir comment cette opération finirait pour renégocier certains termes du contrat. Il ne releva pas les problèmes de pronom, Degaton vivait dans un monde où c'était chacun pour soi à qui avait le pouvoir.

- Une stratégie intéressante, autant utiliser les ressources et les réseaux déjà en place plutôt que de toute recommencer et de semer le chaos dans les cellules locales, commenta-t-il en stratège. Une purge des lieutenants les plus ambitieux et les plus proches des anciens chefs sera cependant sans doute nécessaire, mais nous gèrerons, j'imagine, chacun notre commerce à notre envie.

C'était une acceptation tacite du contrat en même temps qu'une réflexion sur ce dernier. Prendre le contrôle d'une organisation revenait à changer la tête et saigner un peu les éléments les plus remuants et résistants au changement.

- Voilà une négociation comme je les aime : tranchante et rapide, lança-t-il avec malice. Va pour une "amicale" concurrence de la drogue dans le Mexique... pour commencer.

Descendant de son disque pour rejoindre une table aux abords de la piscine, Degaton sortit de sa veste une carte pliée annotée de différentes marques militaires. Visiblement dans la région, le tyran ne s'attaquait pas qu'aux cartels, ou en tout cas de nombreuses marques n'étaient pas liées à des trajets de drogues ou des localisations de villa, certaines indiquaient des sites de fouilles.

Il la déplia avec soin, ignorant un temps son interlocuteur, regarda sa montre puis releva la tête vers le Viking lévitant.

- Nous sommes à heure -1.30 du rassemblement des cartels. Grâce à nos moyens de transport, voir ma capacité à translater dans le temps, cet élément ne devrait pas être un problème, expliqua-t-il.

De sa carte, il tira un fin papier orné en filigrane d'un aigle impérial français sur lequel était anachroniquement dessiné les environs d'une villa. Il la tendit à Polaris.

- Vous avez l'avantage de connaître le pays mieux que moi ; nous sommes à peu près aussi expérimentés en traque de Narcos l'un que l'autre. Je puis faire venir en renfort 5 hommes armés au besoin sur un point de chute défini, le quand importera peu. Voici les alentours de leur lieu de rencontre, en dessous vous avez le plan de route qu'ils suivent avec le nom des patelins et zone géographiques qu'ils traversent. On peut voir qu'ils quittent un moment les tracées de la route civile.

Tout ceci était pour Degaton une opération militaire, une opération qui s'incluait dans un grand tout et qui ne souffrait que la dose nécessaire d'improvisation. En tant que voyageur temporel, il pouvait recommencer cette opération à l'envie, mais malgré ses dons et sa technologie, il continuait de penser que le temps était précieux et la satisfaction de vaincre en un coup était plus gratifiante, comme aux échecs.

- Naturellement, s'il faut des survivants, l'opération sera un peu plus complexe, indiqua-t-il, laissant comprendre qu'il avait initialement prévu une extermination en règle de cette racaille et son remplacement sans ménagement, quitte à déclencher une véritable guerre civile au Mexique. Mais pas impossible. De toute façon les narcotrafiquants les plus importants seront calfeutrés, peut-être même s'exfiltreront-ils, c'est une option qui pourrait se révéler intéressante pour les piéger. Un assaut rapide pour donner le change, ils s'enfuient et nous attaquons leur cortège, à moins que nous agressions leur convoi avant qu'ils n'atteignent leur rendez-vous.

Il regarda sa montre.

- Heure -1.14, lança-t-il. Des propositions ou suggestions ?

Une porte claqua et l'homme, teint halé buriné par une vie de crime et de labeur, souleva difficilement son visage tuméfié. Les bruits de bottes indiquaient que ses bourreaux revenaient. Un sceau d'eau glacé le fit crier. On lui tira les cheveux en arrière et il gémit en essayant de faire le point sur le plafond qu'on lui faisait admirer et les pauvres tubes fluorescents qui noyaient la pièce dans une lumière sépulcrale.

Il entendit quelques mots en latin et des ricanements.

- P....pitié... supplia-t-il comme à chaque fois.

- Tes chefs se réunissent dans une villa, recommença l'homme qui semblait toujours mener les interrogatoires et ignorer superbement ses suppliques.Tu connais l'adresse.

L'homme résistait depuis une semaine, mais tout semblait se perdre en lui. Il avait entamé des prières et des litanies incompréhensibles, la faim, la soif, la fatigue, les drogues qu'on lui avait injectées paraissaient sur le point de l'achever tout à fait.

- Une adresse, une localisation, encouragea l'individu avec une voix plus douce.

La porte s'ouvrit de nouveau et une douce odeur emplit les lieux. Il entendit le bruit d'un plateau que l'on posait à proximité de sa chaise. L'odeur était divine. Du poulet, des épices, sans doute également l'odeur d'une sauce. De la salive inonda sa bouche. Il se mit à tousser. On lui relâcha la tête.

Il vit alors effectivement un repas de roi dans trois plats sous cloches transparentes. A côté, une vision désagréable : Per Degaton, dans sa tenue noire frappée de son emblème versait un verre d'eau, comme l'on aurait servi de l'or liquide.

- Tes chefs ne se battent pas une minute pour toi, continua l'homme en saisissant le verre.ils ne pensent qu'à leur profit et leur intérêt. Un mois... voire plus, je perds moi-même le compte, et ta disparition ne les inquiète pas, au contraire, ils te cherchent pour trahison. Ils te cherchent pour te punir.

L'homme trmeble sur sa chaise.

- Allons, je ne te demande pas de me dire qui de ta famille tu veux voir mourir en premier...

Des larmes commencèrent à ruisseler de nouveau alors que son corps semble se résigner. Degaton but son verre d'eau avec soin et se jeta ensuite sur la chaise avec une brutalité qui fit sursauter sa victime.

- Une adresse ! Une localisation ! répéta le tyran.Et tu quittes cet endroit.

Les lèvres de l'individu s'entrouvrirent et il s'abandonna au prix d'un repas...


Degaton observait et écoutait son interlocuteur comme s'il menait un entretien d'embauche. Nichol était un homme qui avait un objectif en tête et y avait soigneusement réfléchi. Il était de ces hommes qui n'avaient guère le choix qu'entre réussir ou chuter dangereusement, à l'inverse de Per qui avait la chance de pouvoir recommencer, à chaque fois, une nouvelle expérimentation, jusqu'à la fin des temps, jusqu'à ce qu'une Crise vienne bouleverser l'univers...

- Certes, admit-il lorsque Polaris développa les atouts des cartels qu'ils allaient affronter tout en expliquant son ancienne influence en ces lieux.

Puis le viking développa. Il savait ce qu'il voulait certes, mais aussi ce qu'il ne voulait pas et son intention était clairement de les piéger comme les rats qu'ils étaient. Les tunnels étaient une valeur sûre, Degaton ne dénombrait plus le nombre de fois où il dut lui-même, lors de la seconde guerre mondiale en arpenter pour fuir ou se déplacer discrètement. Savoir que ses ennemis en disposait était précieux. Il aurait pu dès lors partir dans le futur, ou le passé et enquêter, mais l'occasion de jauger les facultés de Polaris et leurs capacité à se coordonner l'un avec l'autre était trop tentante.

A la fin de l'exposé de son interlocuteur, Degaton reprit la parole.

- Explosifs, armement d'assaut et corps-à-corps, lista-t-il pour les compétence de son escouade. Il sera dans leur corde de nous assister pour l'une et l'autre des équipes nécessaire.

Son groupe n'aurait rien d'ostentatoire cependant, inutile de sortir ses cartes maîtresses si rapidement, il préférait les réserver pour des poissons plus menaçants.

- L'approche est raisonnable. Nous allons donc avoir besoin d'un force de frappe suffisante pour les effrayer de l'intérieur mais aussi avoir de quoi se débarrasser leurs hommes une fois sortis.

Il leva la tête et observa l'actuelle villa, songeur.


La porte s'ouvrit dans un craquement lugubre. Deux hommes en noir traînaient un type en chemise ouverte et pantalon usé pour le plaquer sur une chaise et l'attacher.

- Espèces de ... hurla-t-il avant de se faire violemment frapper au visage.

- Garde ta salive pour le Voyageur, cracha un de ses ravisseurs.Concentre-toi plutôt sur cette putain de villa.

Et les deux hommes de sortir en verrouillant la porte. Il se redressèrent alors en saluant leur supérieur qui passait devant eux accompagné de deux autres Enfants. Ce dernier fit déverrouiller une pièce voisine de ses installations, là y croupissaient un autre homme, un vieillard sous perfusion.

La porte se ferma sur la silhouette autoritaire du chef. Les deux enfants marchèrent quelques instants et d'une nouvelle salle sorti leur chef qu'ils saluèrent de nouveau. Dans la pièce reposait trois hommes, qui venaient d'achever de mémoire les plans d'une demeure où ils avaient travaillé. La cellule sentait encore la poudre et il faudrait nettoyer rapidement le sang pour que la pièce soit rapidement réutilisable.

Le couloir orné de ces multiples portes donnait directement sur un sas étrange avec un verrou temporel et un planning qui indiquait la date de provenance des détenus et si les pièces de cette étrange geôle étaient libres.

Dans le dos des deux fascistes qui mettaient à jour le tableau, leur chef apparut et entra dans une nouvelle pièce. Un autre Degaton sortit plus loin. Ainsi le Voyageur régissait-il ses salles d'interrogatoire.


- Nous prendrons deux Tireurs d'Elite pour l'extérieur, annonça-t-il à Polaris.Cela changera un peu la composition de l'équipe prévue à la base mais rien d'insurmontable. Il me restera trois hommes capables de mener un assaut de l'intérieur et de piéger si besoin les issues de secours : garage, porte arrière, tout ce qui paraîtra nécessaire pour assurer que la bataille va dans le bon sens.

Il porta une main sur la carte qui rappela son attention. Son gant noir fit une trajectoire circulaire.

Le mieux sera donc de les acculer contre cette grille de sortie, histoire qu'ils aient l'impression de pouvoir sortir, d'autant que l'aire sera relativement bien dégagée pour des tireurs positionnés ici et... ici.

Son gant virevoltait sur la carte tandis que son interlocuteur sirotait une boisson. On sentait que la guerre et son Art étaient un plaisir que savourait le voyageur temporel. La géographie, les cartes, les plans, tout ceci n'était bon que pour la guerre, les combats et le sang.

- Pour qu'ils évitent de partir vers cette zone qui ne serait pas à notre avantage, il faudra que le commando infiltré se trouve dans cette aile, c'est suffisamment éloigné des garages et dans un niveau intermédiaire. Comme nous ne savons pas où se trouvent les entrées de leurs tunnels ni les cheminées d'accès, il faudra être mobile, nous serons obligés de prendre cette option et de frapper vite.

Il se redressa alors et regarda sa montre, une nouvelle fois, puis se tourna vers Polaris. Degaon fixa sa boisson.

- A la fin de cette opération et si elle est un succès, nous aurons l'occasion de trinquer avec du champagne français, annonça-t-il, laissant présumer qu'il y aurait des discussions à cette occasion.

Per voyait déjà son drapeau flotter sur ce territoire et il entendait pouvoir y avoir un allié digne de confiance.


Heure -3.0.

Le cortège n'était pas encore parti. Dégaton, posté à l'abri des regards observait aux travers de jumelles le portail temporel qui s'ouvrait dans ce qui semblait être un bureau peu utilisé, le genre que l'on prenait pour se détendre et s'isoler un peu. Trois de ses hommes apparurent et firent un premier état des lieux. Puis repartirent. Un autre portail s'ouvrit dans une autre pièce et ils firent de même dans ce qui était une salle de massage, clairement pas utilisée pour l'heure et qui ne le serait sûrement pas pendant l'entrevue des cartels.

Le petit manège dura ainsi une trentaine de minutes. Les failles s'ouvraient et se refermaient régulièrement, permettant un premier repérage physique des lieux. Mais la présence des gardes s'intensifia au fur et à mesure.

A heure -2.30, Degaton put sélectionner une destination pour faire surgir ses troupes, marquant sa carte des lieux tracée récemment.


Le vieillard qui reposait dans son lit eut un mouvement de recul.

- Va-t-en, exhala-t-il avec un fort accent mexicain.Je n'ai rien à te dire espèce de fumier.

Degaton marcha calmement vers le pousse-seringue qui se situait près de l'homme et l'arrêta.

- Les morphiniques semblent te donner du courage vieille carcasse, commenta le Voyageur.

L'homme se raidit, comme pour essayer de rassembler ses forces contre les douleurs qui allaient revenir. Degaton tira une chaise et se posa à proximité de l'homme. Il déploya une carte devant lui, des lieux que l'homme reconnaissait, dans ses lointains souvenirs.

- Votre chère villa, décrivit son tortionnaire, ne te reste plus qu'à me dire où vous vous réunissiez.

Le ricanement de l'homme le fit expectorer des glaires.

- Tu... tu crois vraiment que...

Une main gantée vint lui étreindre douloureusement un bras.

- Allons, ne dis rien que tu pourrais regretter de suite, j'ai d'ailleurs une surprise pour toi qui pourrait te faire très plaisir.

Per se leva et alla frapper deux fois à la porte. Un de ses enfants tenaient une femme bâillonnée et ligotée, en larme et le front en sang. Le vieillard se raidit. Cette femme d'à peine vingt ans, il la reconnaissait, c'était sa... sa... sa fille ? Mais elle avait facilement 50, 60 ans à présent. Il crut à un subterfuge, mais cette voix qui sanglotait son surnom derrière ses entraves lui retournait le coeur.

- Que... comment ?

- Degaton n'a pas de frontière vieillard agonisant, déclara-t-il dans l'ivresse de son propre pouvoir. Puis, sortant une arme à feu et la plaquant contre le crâne de cette fragile progéniture.Maintenant, retourne sur cette carte et dis-moi précisément où vous vous réunissiez et pourquoi...


Heure +0.30.

Les voitures étaient stationnées, les chauffeurs attablés ensemble dans un coin du garage et leurs voitures soigneusement alignées, prêtes à partir si nécessaires.

Les chauffeurs plaisantaient et s'échangeaient des photographies de conquêtes d'un soir.

Un portail s'ouvrit dans un cagibi proche. Un homme, brun, cheveux court, le regard sévère quitta le local et nota soigneusement les modèles, les plaques et les éléments distinctifs des véhicules, accompagné de clichés, puis repartit dans son placard pour retrouver son chef.


Quelques heures plus tôt, des Enfants de Degaton furent disséminés dans le Mexique pour piéger un maximum des véhicules avant qu'ils ne quittent leurs premiers garages.

Ces préparatifs dûment terminés, Degaton reposa ses jumelles et l'un de ses sbires lui parla.

- Ai-je bien identifié le convoie Voyageur ? demanda-t-il avec respect.

Un sourire mauvais naquit sur le visage du chef.


A coté de la piscine récemment investie par les deux criminels, Degaton, fort de ses préparatifs, sembla prendre une décision.

- Je prendrai la tête de la cinquième colonne, je vous laisserai les deux tireurs embusqués, actuellement nous sommes à heure -0.46 de leur point de chute. Pour le transport, je vous laisse le choix : vos propres moyens et nous convergeons à heure +0.45 à cet endroit, pointa-t-il sur la carte, et vous récupérez le commandement de vos deux unités ou nous y allons directement par le Flux du Temps.

Il montra de son pouce son disque lévitant.

- Instantané, même si perturbant la première fois. J'effectuerai pour ma part un crochet pour coordonner mes équipes, ce qui ne devrait même pas être perceptible pour vous.

Il laissa alors à Polaris le temps de choisir son mode de transport.

- J'oubliais... fit-il en sortant de sa veste une carte et un boîtier télécommandé. Voici un plan approximatif des lieux, "au cas où" et une télécommande qui vous permettra de faire sauter les véhicules.

Degaton ferait prochainement un saut dans le temps et reviendrait dans une cellule où un homme famélique lui livrerait une adresse, un chef de gang vieillissant et quelques autres victimes puis il irait dans un casier récupérer un dossier complété par des voyages qu'il ferait plus tard mais qui s'étaient déjà réalisés et pourrait lancer tous les préparatifs qui mèneraient à ce moment précis.

Le temps s'était adapté, il s'adapterait de nouveau et au cœur de ce paradoxe, deux criminels allaient entamer le braquage du Mexique...

- Je n'aurais pas mieux dit, répondit Degaton en remontant sur son disque.

Le Voyageur se dissipa dans la grande trame de l'espace-temps.


Degaton et trois de ses hommes lourdement armés apparurent dans la silencieuse salle de massage, stratégiquement placée à l'arrière du bâtiment et dont une large baie vitrée située plus loin permettait d'avoir une vision directe sur les jardins et surtout la zone où les cartels ne devaient en aucun cas se rendre.

Soudainement, des cris et des coups de feu. Les quatre hommes se mirent alors en position d'assaut. Dehors, les deux snipers couvraient l'avancée de Polaris et éliminaient en avance les quelques premiers renforts qui osaient tenter de le contourner.

Dans le bâtiment, c'était le branle-bas de combat, on criait en mexicain des ordres et le mobilier semblait soudainement se renverser, chaises, fauteuils, portes qui claquent. Le concert des rats pris dans leur souricière. Des gardes se déployèrent à l'arrière, bien en vue. D'un geste de la main Degaton ordonna leur exécution. Les lourdes armes à plasma du XXIIIème siècle vaporisèrent la baie vitrée et transpercèrent les frêles gardes qui ne purent pas même hurler. La végétation touchée se mit alors à flamboyer dans des gerbes violacées.

On hurla de nouvelles directives. Deux "enfants" ouvrirent la porte de leur local, un restait en arrière à surveiller et Degaton, au milieu du groupe, savourait ce moment délicieux. L'adrénaline, le déroulement d'un plan soigneusement préparé.

["Là, des..."] commença une voix.

En deux tirs il n'y eut pas de fin, mais de nouveaux coups de feu répliquèrent. La pierre des murs voletait par rafale et la porte ne fut bientôt plus qu'un lointain souvenir. Le groupe d'assaut jeta une grenade aveuglante, Polaris voulait ses ennemis vivants, il avait fallu s'adapter. Nouveaux cris, une détonation, des gémissements et des pas de courses anarchiques. Les deux enfants de Degaton s'engouffrèrent dans la brèche et mitraillèrent sur les corps en vue. Degaton suivi. Des balles sifflèrent près de lui. Il se tourna et arrosa dans un rire sadique ses adversaires. C'était cela vivre !

Le reste fut une véritable promenade. Leurs adversaires quittaient les lieux par la sortie voulue. Parfait. La démonstration de l'arrière-cour semblait les avoir calmé de choisir ce lieu. Soudainement : explosion. Les véhicules n'étaient plus qu'un lointain souvenir. Polaris semblait avoir fait bon usage de leur piège.

Le groupe d'assaut avait effectué, en parfaite coordination avec leur allié de circonstance, leur mission. Il n'y eut bientôt plus de bruit.

- Nettoyer les dernières poches, ordonna le fasciste qui voyait par une fenêtre son allié léviter près de leurs cibles. Nous allons ouvrir les négociations.

Degaton appuya sur un bouton de sa montre et son disque temporel apparut près de lui. Soigner ses entrées, toujours. Il disparut dans le Flux du Temps et réapparut aux côtés de son magnétique camarade de lutte.

- Il semblerait que vous soyez maintenant prêts à nous écouter, ajouta Degaton à la réplique de Polaris. Puis, écartant les bras, il leur lança. Entendez-moi chefs de gangs et de cartels, vous êtes les spectateurs du début d'une grande création ! Ce n'est pas la fin d'une époque, la fin du crime organisé tel que vous l'avez connu. Non, il s'agit de son évolution naturelle, de sa digne continuité. Vos méthodes ont fait leurs preuves, vos organisations sont des fondements sur lesquels bâtir une structure plus grandiose encore. L'année de tous les espoirs nous est ouverte !

" Les temps ne sont plus aux ententes cordiales, aux associations volontaires, aux fédéralismes. Les gouvernements sur lesquels reposent vos bénéfices, vos couvertures et vos cercles d'influence sont sur le bord de l'implosion et si vous ne vous réorganisez pas, vous finirez emportés dans la tourmente, contraint d'être les remplaçants de vos ennemis d'hier, d'agir comme des seigneurs féodaux. Et bientôt viendront les justiciers en quête de leur soi-disant "Ordre" et de leur "Justice". Les boucliers d'hier ne seront plus ! Les règles du capitalisme ne seront plus là pour vous protéger de la prédation criminelle qui va bientôt balayer le monde !

" Rien de tout ceci n'est inéluctable cependant. Vous avez grandi dans l'ombre du Mexique, nous allons vous permettre d'en être des maîtres absolus... Oui, à temps terribles, mesures terribles ! Le Docteur Polaris et moi-même, Per Degaton, avons pu vous mener dans cet état de captivité en moins de cinq heures. Imaginez ce qui nous est possible en une journée, une semaine, un mois, une année, une vie !"

Il fit une pause en observant cette masse qui était à ses pieds, son visage exprimait une sévérité et une conviction inébranlable. Ses mains volaient dans les airs et l'orateur qui avait appris des plus odieux manipulateurs de masses fixait tour à tour chaque être qui se trouvait en contre-bas, comme s'il était prêt à leur bondir dessus.

- Reste à savoir où vous désirez être : dans l'avenir ou le passé ! Le Docteur Polaris et moi-même entendons nous séparer vos empires et régner. Vous pouvez rester et nous suivre dans la marche triomphante qui nous attend ou refuser et attendre la prochaine fête des morts pour que l'on se souvienne de vous. Ceux qui nous suivrons auront des règles, des devoirs, un cadre ! Mais aussi notre protection, nos moyens et demain, bien plus que les marchés qui furent les vôtres.

" Les temps changent messieurs, les accompagnerez-vous ?


Ses deux poings se posèrent lourdement sur ses hanches. Tout était dit, dans les grandes lignes, restait à voir qui oserait leur tenir tête maintenant. L'on pouvait sentir chez le dictateur en devenir une envie de sang et de démonstration, sa posture les défiait d'oser mettre en doute le moindre de ses propos.

Et là, au sein de la masse de grands trafiquants rassemblée, quelqu’un applaudit. Grand, costaud. Cheveux d’un noir profond coupés courts, petite barbe et Ray-Ban sur le nez. Il porte une veste noire et une chemise blanche sans cravate aux premiers boutons dégrafés ce qui laisse apparaître son torse velu.

“Magnifiquement exécuté, j’aime cette efficacité. Tout ce qui vient d’être dit aussi, ...”

Il sourit en dévoilant sa dentition intactes mais quelque peu jaunies. Et s’il n’a pas la tenue que Per Degaton peu lui avoir connu au cour des longues années où ils purent se croiser, le voyageur temporel reconnaîtrait certainement cette voix. John Nichol ouvre ses mains dans son dos, celles ci se faisant parcourir d'arcs électriques. Il prépare son attaque car il sent l'embrouille.

“...Mais je ne me vois pas vous laisser vous partager un tel empire.”

Les autres Narcos le regarde, surpris par le défi qu’il leur lance. Mais çà en galvanise certains, Polaris peu le voir dans leur regards. L’entendre dans leurs murmures. Ils ont un berger à suivre dans leur folie de leur résister, très bien. Faisons en un exemple à ne pas suivre! Suspendu dans les airs non loin de Degaton sur son disque Nichol le coupe avant qu’il ne continue plus loin son petit discours.

“Il nous fallait justement un exemple!”

Il rapproche alors devant lui ses deux mains et un éclair en jailli, filant droit vers le récalcitrant. Mais au lieu de le carboniser instantanément sur place il y eu un flash blanc d’une grande intensité, une lueur éblouissant toutes les personnes présentes. Polaris vit l’éclair qu’il avait envoyer revenir vers lui et le frôler pour frapper l’arbre à quelques mètres, enflammant celui ci. Sur le sol plusieurs hommes étaient couchés les mains sur la tête, encore sonné par l’impact de électricité en plein milieu de la masse amassée là.

Il se tient au milieu de cette masse apeurée, Vandal Savage. Excalibur à la main parcourue d’électricité. la paire de lunettes noires qu’il avait enlevée dans l’autre.

“HAHAHAHhaha!!!”

Il rit alors quelques instants en regardant Polaris tenter d’utiliser ses pouvoirs pour attirer à lui cette épée magique qui lui résiste puis tourne ses yeux vers Per Degaton.

“Per. Après toutes ces années où nous nous rencontrons. Tous ces masques que j’ai porté, ces époques où nos regards ce sont croisés. Cette Injustice Society que nous avons fondés, ensemble...vous régneriez sur l’Empire de la drogue sans moi?”

Il sourit alors avec ce charme de prédateur qui le caractérisait. Une présence animale éminemment plus magnétique que celle exercée par John Nichol bien qu’il n’ai aucun pouvoir en lien avec cela. Vandal Savage était quelqu’un de charismatique oui, et il travaillait à dominer le monde dans l’ombre depuis longtemps, bien trop longtemps pour se faire dérober une activité si lucrative sans broncher.

Les opérations qui se déroulaient sans accroc étaient exceptionnelles, celle-ci ne dérogea pas à la règle. Si les Cartels furent faciles à piéger et à contraindre, il s'éleva dans la masse une voix. Terrible et puissante, du genre que Degaton prenait à la fois plaisir et déplaisir à entendre. Plaisir car c'était une voix avec laquelle il avait déjà travaillé par le passé, déplaisir car c'était précisément une voix avec laquelle il avait déjà travaillé.

Polaris prit logiquement les devants, il ne reconnaissait sans doute pas l'individu. Per se tint coi pendant qu'un arbre se faisait soigneusement foudroyer par temps clair, serrant la mâchoire pour conserver un peu de calme même si une ombre passe dans son regard. Vandal était le genre d'ennemi que l'on aimait loin de soi et surtout occupé sur d'autres fronts. Brillant stratège, menace avérée pour le monde et surtout pour quiconque cherchait à en acquérir le contrôle. Marcher sur la planète Terre s'était marcher sur le terrain de jeu de l'éternel.

Degaton, les mains dans le dos, écouta son ami/ennemi parler et brandir une épée légendaire, réprimant une mou de surprise désagréable. Vandal savait définitivement toujours s'équiper avec soin. Un sourire s'étira sur le visage de marbre du tyran temporel, le sourire qui signifiait "Bien joué, tu as mon attention, discutons un peu".

Vandal, commença Per avec le ton de celui qui salue une vieille connaissance, heureux de constater que le temps n'affecte pas votre force ni votre détermination.

Le genre de propos qui ne coûtaient rien et qui laissaient entrevoir que l'on ne se fermait pas les portes de la négociation, après tout, nous ne sommes pas de bêtes, n'est-ce pas ? Et un conflit entre une association Polaris / Degaton face à Vandal Savage risquait de finir tragiquement sans leur permettre de rien gagner de part et d'autre à part s'affaiblir face à des justiciers pour le moment désorganisés. Degaton n'entendait pas laisser passer l'occasion de réaliser ses ambitions.

- De bons souvenirs, compléta-t-il aux évocations de l'immortel Savage. La question me semble pour le moment toute rhétorique. Reste à savoir ce qui pourrait éviter l'oblitération de nos espoirs réciproques.

La situation était déplaisante, mais hélas nécessaire ; il aurait été surprenant que le monde puisse être conquis sans passer par le jeu diplomatique des intérêts divergents. Un Triumvira était une structure instable, pratique pour contrôler des sous-fifres, mais dangereuse lorsqu'il s'agissait de se partager le pouvoir, mais c'était mieux que rien et repoussait à une date mieux définie un affrontement plus organisé. Commencer à trois, vaincre à deux contre un et finir le dernier, Rome en avait illustré plus d'une fois la triste mécanique.

- Je pense que nous pourrions tous les trois trouver matière à une association "lucrative". Je pense que vous serez le "porte-paroles" des autres, compléta-t-il. Rentrons à l'intérieur pour en discuter, loin des oreilles indiscrètes.

Il pointa du menton les quelques chefs de cartels sans la moindre influence dans ce jeu de pouvoir. Ces individus que Vandal pouvait soumettre, Polaris pouvait massacrer et que Degaton pouvait littéralement effacer de l'Histoire n'était rien. L'heure n'était plus aux simples mortels et aux humains basiques, l'heure était aux méta-conquérants. Les trois hommes représentaient une force de frappe conséquente, capable de se partager le monde dans ce qui serait un véritable Yalta de l'ombre...

- Qu'en pensez-vous Docteur Polaris ? demanda Degaton à son allié de circonstances avec un regard qui signifiait clairement "qu'a-t-on à perdre ?".

[HRP]Arf, je l'attendais pas celui là ![/HRP]

Polaris était un meneur d'hommes quoiqu'il en pense. Il avait le sens tactique et la compréhension instinctive de ce qui permettait de se faire respecter rapidement sans trop humilier. Le genre de type qui pouvait, dans une armée monter jusqu'au grade de Colonel, mais pas plus. Il était trop attaché au contact humain, jamais il n'aurait l'étoffe ou l'ambition d'un meneur à grande échelle. Et c'était tant mieux, la concurrence dans la domination du monde était déjà trop nombreuse au goût de Dégaton et il avait besoin de mains exécutrices efficaces.

Il ne rajouta aucun mot au discours de son allié et se contenta de se concentrer sur Vandal Savage, son vieil ami. Per s'assit et observa la décoration qu'il jugeait du plus mauvais goût, du tapage d'individu enrichi trop rapidement et qui se croyait malin d'associer tout ce qui faisait "chic" et "snob". Gestionnaires dégénérés, songea-t-il en observant un tableau encadré de deux vases sans rapport.

Puis sa tête se tourna vers le verre que lui tendit l'immortel. Degaton était du genre à trinquer aux victoires et ne dédaignait pas les alcool lorsqu'ils avaient de la valeur à ses yeux et à ses papilles. Il écouta Vandal narrer la raison de sa présence. Sans enlever ses gants, l'homme aux cheveux rouge analysa la robe de son vin. Très belle couleur.

La tirade que lui servit son interlocuteur arracha un sourire à Degaton qui était en train de sentir sa boisson et de profiter du bouquet, nul doute que ce vin serait meilleur en le laissant un peu à l'air libre.

Le tyran reposa donc son verre en connaissance de cause.

- L'un de tes agents, une "écervelée" ? s'étonna-t-il tout d'abord. Les choses changent. Au temps de l'Injustice Society, nous n'avions pas ce genre de problème... la discipline régnait même si nous étions tous des génies dans nos domaines et que les motifs pour nous écharper étaient légions . Que se passe-t-il donc Savage ? Du chaos chercherais-tu à générer de la nouveauté ? C'est dans l'air du temps, je te le concède, mais je te vois mal en gérant d'une petite start-up "disruptive" et innovante. J'espère que cet agent a eu un cours de discipline... Arrêter un réseau de drogue ? Pas le genre de la maison pourtant.

Il pouffa. Degaton n'était pas dur dans ses propos, au contraire, ils étaient emprunt d'une certaine nostalgie. Un âge d'Or de leur criminalité, l'époque où les associations de criminelles tenaient. L'époque où les justiciers étaient organisés mais fragiles. Il marqua un profond soupir.

- Et te voilà à profiter d'une "opportunité" ? Comprends-moi bien, improviser et avancer en utilisant ce que la conjoncture offre, ce que tu as fait brillamment, je n'ai pas grand chose à en redire, mais je ne puis m'empêcher de penser...

Per reprit son verre et le fit légèrement tournoyer pour s'assurer que le goût puisse être homogène.

- ... est-ce tout ce que la Secret Society of Evil a à t'offrir ? Est-ce là le fruit de tes récents efforts ?

Les propos n'étaient pas anodins et nul doute qu'ils ne flatteraient pas son interlocuteur, mais les deux hommes se connaissaient de longue date et n'avaient pas pour habitude de tourner autour du pot, leur temps était infini, mais ils l'usaient toujours à bon escient. Les courbettes et les ronflantes formules de politesse était l'affaire des petites frappes. Lui n'était pas simplement venu se partager trois plantations et deux villas, comme l'avait parfaitement souligné Polaris en filant la métaphore sur Yalta. Il était là pour se projeter et si Vandal avait des griefs contre lui, il n'hésiterais à les lui balancer en pleine tête. Le privilège des vieilles relations.

Per porta alors le vin à sa bouche et en prit une gorgée. Il était délicieux. L'immortel était en train de mettre Polaris sur le banc de touche et le reléguer en deuxième division sans même prendre de pincette. Petit malin, essayait-il de mettre un terme à la possible alliance des deux criminels ?

- Comme tu le dis si bien Vandal, nous nous connaissons de longue date. Plus sans doute qu'aucun autre criminel nous n'avons passés autant de temps l'un avec l'autre, à nous croiser et à nous rencontrer dans nos projets. Et nous savons tous deux que moins la concurrence est rude et plus nous avons de chance de vaincre. Polaris ici présent n'est pas un conquérant à notre mesure et nul doute que cela est la meilleure garantie pour sa survie entre nos ambitions. N'en prenez pas ombrage Polaris, c'est un fait.

" Il nous faut des hommes pour tenir le terrain Vandal, des hommes fiables, pas des "écervelés", et s'ils sont animés par d'autres desseins que les nôtres, il nous revient de les faire converger. C'est la différence entre nous et les Sivannah, les Mister Mind et les Luthor. Nous sommes des dirigeants Vandal. Ensemble, et nous le savons, nous pourrions tenir le monde entre nos mains.

" Polaris ici présent veut de l'argent, il veut profiter du temps qu'il lui est imparti ? Qu'à cela ne tienne, qu'importe ce réseau de drogue au fond ? Brasser de l'argent ? Est-ce que toi Vandal, ou même moi allons perdre notre temps à cette micro-gestion ? Tu mettras à terme une personne de confiance. Et j'en ferais de même, voire même en notre collègue ici présent s'il y trouve de l'intérêt...

Les choses avaient le mérite d'être dites et sa proposition venait de tomber : la part de Degaton dans les affaires mexicaines contre une vassalité. Mais la question irait plus loin. Comment se découper le marché et ensuite, le monde ? Il reprit une gorgée de vin.

Degaton S’étonna que Savage laisse ses agents indisciplinés faire sans les remettre à leur place. Celui ci se resservait un verre de vin.

“Rien n’est écrit nous le savons tout les deux. Des comportements qui n’existaient pas hier mais deviennent légion aujourd’hui ne seront pas forcément demain. Je ne l’ai pas recadrée car je sais qu’elle casserait le cadre. J’ai besoin de ses pouvoirs et peu importe par quels moyens.”

Polaris en buvait lui aussi quelques gorgées en écoutant attentivement. Il avait entendu parler de cette SSE sans l’avoir rejointe, mais apparemment l’Immortel y avait du mal à se faire entendre. Fragile tout çà, c’est bon à savoir. Il est en position de faiblesse dans la négociation et malgré le fait qu’il essaie de faire appel au bon vieux temps en s’adressant à Degaton celui ci ne semble pas dupe.

Mais Degaton le rabaisse lui aussi même s’il demande de ne pas en prendre ombrage, et John Nichol prend sur lui. Il plonge ses yeux noirs dans ceux du rouquin sans rien dire mais n’en pense pas moins. Un jour...un jour je vous ferais regretter de me prendre pour une bille.

Il entend la suite du discours de Degaton et porte le vin à ses lèvres lui aussi. Si le voyageur temporel rappelle qu’il n’a pas leur niveau il sait lui trouver des qualités, des qualités qui en feraient un bon lieutenant. Et surtout il propose habilement que Savage accepte qu’un homme comme lui gère les cartels pour eux.

Tant d’argent. L’un des commerce les plus lucratif du monde, comment ne pas accepter en contrepartie quelques rabaissements en mettant sa fierté de coté? C’est facile pour Polaris, il en est tout a fait capable. Alors il le fait.

“Je connais bien ce pays, ses faibles lois et sa criminalité. Je serais parfait pour ce poste.”

Ajoute t’il derrière Degaton sûr de lui comme à un entretien d’embauche chez Google. Vandal pose sa main sur sa barbe noire et plisse les yeux pour bien le regarder. Per…”je vois ce que tu fais” pense t’il. En faiseur de roi tu créerais une situation de dépendance du magnétiseur de service envers toi.

“Hum...oui j’ai mieux à faire que brasser de l’argent. Comme toi Per.”

Il sourit en dévoilant ses dents usées.

“Mais cet argent est capital pour mes projets, et je ne manque pas d’hommes pour le gérer à ma place. Si certains me pensent fini ou mal entouré ils se trompent lourdement et le paieront très cher.”

Tant la JSA, Checkmate, Luthor, Black Adam ou...Per Degaton et Polaris. Il regarde les deux hommes tour à tour.

“Et je ne vous connait pas assez pour vous confier cette gestion Polaris. Alors voilà ce que je propose. Je prends un tiers des affaires mexicaines car j'ai besoin de plus d'argent et de passer mes marchandises venant d’ Amérique du sud. Libre à vous de vous arranger sur les deux tiers restants, sur qui gère quoi et comment. Mais la SSE gérera ma part, même minoritaire.”

Il finit de verser la bouteille dans les verres présent, elle est désormais vide.

“Je garde les plantations du sud du pays et vous celles du centre et le réseau pour passer la drogue aux Etats Unis. Je vous laisse le soin d'arroser le congrès du Mexique pour avoir tout l’état à votre botte. Changez même la politique du président si vous le voulez, il n’aura d’autre choix que de vous obéir si vous tenez tous les leviers du pays.”

Il prend alors son verre pour l’approcher de celui de Polaris.

“Qu’en dites vous?”

Celui ci trinque avec lui.

“Que l’accord me conviendrait.”

Vandal Savage approche alors son verre de celui de Degaton avec le regard pétillant.

“Et toi Per?”

HJ:

Spoiler:

[HRP] Plusieurs choses : je n'avais pas répondu à ta question plus haut : Oui, c'est une excellente surprise, parler avec un immortel ça vous rajeuni Et pas de problème pour achever notre sujet.[/HRP]

Vandal... Vandal... Vandal... jamais les deux hommes ne tomberaient d'accord sur tout et le présent Degaton ne comprenait pas comment accepter que deux personnes, dont l'un de ses agents puissent ainsi outrepasser ses prérogatives. Mais enfin, il était mieux de savoir qu'il disposait dans son entourage d'agents perturbateurs et potentiellement perturbé. Les faiblesses de l'ennemi potentiel étaient toujours bonnes à connaître.

- A ta guise Vandal, répondit-il, laissant entendre par cette réponse lacunaire que c'étaient ses affaires mais qu'il n'approuvait pas entièrement. Mais le temps sera ce que nous en ferons.

Polaris n'avait visiblement pas aimé se faire rabaisser. Qu'attendait-il réellement ? Que les deux immortels le prennent comme un égal alors qu'il ne se jouait ici qu'un gambit pour eux et une opération fructueuse pour lui ? Le docteur était un homme de talent, mais un homme avec une date de naissance et une date de mort. Degaton n'était pas toujours fin psychologue mais c'était un stratège, comme Vandal qui n'était à son tour pas aussi dupe envers l'offre de Per. Il se jouait plus qu'un orgueil ici. C'était le début du découpage du monde.

Puis Savage enchaîna sur les ressources qui lui restaient. Une manière pour lui de continuer de peser dans cette négociation et ne pas trop laisser de terrain à son immortel interlocuteur.

- Honni soit qui mal y pense, compléta Degaton en reprenant une gorgée de vin. Je t'ai vu tant de fois te relever qu'en la matière je te crois sur parole. Mais oui, les Temps changent et notre temps est venu. Je suis las Vandal de voir cette planète et toutes ces Nations débiles guerroyer en vain tout en s'inclinant face à des extraterrestres, des corps de policiers galactiques et autre méta-humains. Darkseid est passé et les fondations de toutes ses sociétés s'ébranlent. Jamais la brèche n'aura été aussi grande et autant camouflé par de vains efforts politiques. Les Justiciers et les Sociétés ne seront plus jamais les mêmes.

" Mais je refuse de tout abandonner entre les mains de Luthor et sa Legion. Or, si nous nous affrontons, il récupèrera les restes de nos querelles et nous serons bien démunis face à sa menace.

Degaton leva donc son verre à la suite de Polaris et il trinqua avec Savage.

- Aussi vais-je accepter ce découpage qui me sied. Ta SSE dirigera tes opérations. Mais n'oublions pas que Luthor a joué son va-tout en laissant planer le choix du chaos ou de la mort. Mais le chaos serait notre mort et il ne revient pas à ce sous-produit de businessman de nous prendre notre part. Lorsque viendra l'heure des comptes, j'entends bien m'offrir sa tête sur un plateau et celle de tous ceux qui auront l'audace de le suivre dans sa folie.

Les choses étaient dites. Degaton entendait conquérir ce qui lui faudrait pour mener à bien sa guerre contre Luthor et entendait par là signifier à l'immortel un pacte de non-agression. Le tyran temporel se tourna ensuite son verre vers Polaris avec un regard déjà rempli de visions triomphantes de ses armées, de ses "Enfants" et enfin un monde digne de lui... à son image !

- La conquête du monde vient de commencer.

Et il trinqua avec le magnétique criminel.

Vandal Savage trinque avec Per Degaton. L’accord est scellé, du moins pour une bonne partie de l’Amérique Centrale. Le Neandertal sourit quand il parle de Luthor.

“Nous avons exactement les mêmes vues concernant Luthor Per. Je me réjouis que tu ne fasse pas partie de la foule qui s’empressent de le suivre comme l’antéchrist.”

Puis Degaton trinque avec Polaris qui a un sourire a peine moins mauvais que celui de Savage. Le Voyageur Temporel dit que la conquête du monde vient de commencer, Vandal s'esclaffe en cherchant des yeux une autre bouteille.

“Ce n’est pas la première pour moi.”

Gengis Khan, Jules César...une nouvelle conquête du monde. Comme toujours il espérait que ce soit la finale. Et comme toujours...il échouerait.

“J’entend bien que nous y parvenions messieurs.”

Répondait Polaris qui lui ne voyait pas Luthor comme un ennemi, contrairement à eux. Il était au contraire complètement d’accord avec l’entrepreneur, qui sur tant de points était un modèle dans le monde des affaires...et comme vilain. Mais il ne le dirait certainement pas aux deux hommes avec qui il avait négocié aujourd’hui car ils ne semblaient pas le porter dans leur cœur. Qu’a cela ne tienne il s’associerait avec eux le temps qu’il faudra, et quand Lex Luthor viendra sonner la fin de la récréation...il saisira peut être l’opportunité.

HJ:

Spoiler: