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Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées

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Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Jeu 24 Oct 2019 - 17:48




Ça cognait, comme des petits marteaux sur un xylophone désaccordé. Une sensation désagréable, comme si le chant sous-jacent de la vie était soudainement dissonant, grotesque. En vérité, soudainement n’était pas le terme. Le jeune homme se sentait comme groggy depuis déjà quelques semaines. Quand il souriait, ça collait aux dents, c’était pâteux, comme si on l’avait forcé à avaler un bonbon doucereux et amer à la foi…

Joh-Jo n’avait pas été d’une grande aide en la matière, se contentant de hausser ses plumes ébouriffées, d’un air supérieur. « Vous les humains vous êtes bien trop compliqués à suivre. Quand tout va bien, il faut absolument que vous alliez fourrer votre bec tout mou dans des trucs qui servent à rien et qui sont pas comestibles… »

« pouah, dégueu…. » commenta finement Tim, devant son bol de Lucky Charms… Pour le coup, il les touilla avec sa cuiller, remarquant avec une incroyable acuité comme elles se désagrégeaient dans le lait… Il se leva, s’étira, regarda dehors. Il y avait un joli soleil, mais pourtant Tim n’en tirait nulle joie.

Il se jeta dans son canapé, mis son casque sur les oreilles, avec un bon vieux trip hop, qui le mettait dans le moove habituellement lorsqu’il allait skater…Bof… Tout juste passable.

« Bon cette fois, yen a marre, je suis envouté ou une connerie du genre… ! ». Il balança son casque sur le pouf qui n’avait rien demandé à personne, et se leva de nouveau, énervé.
La tête de Joh-Jo fit pratiquement un 360 degré, sourcils de plumes levés, et le regarda de travers, ce qui lui donna un air comique, qui ne fit pas plus rire que ça le jeune magicien.
Celui-ci fit de la place, rapidement, sur le sol, et poussa le tapis d’un goût douteux du bout du pied. Il attrapa une pleine poignée de Lucky Charms, et se mit à tracer un pentacle, formant l’œil de vérité au centre avec les Lucky CHarms les plus lumineuses.

« Mais enfin ! Et le respect alors ? ! Tu trace un charme de révélation avec des céréales bourrées de sucre et à moitié désagrégées par le lait ? ».

Tim haussa les épaules, il avait déjà fait pire… Et puis au moins, connaissant les goûts de l’autre emplumé, son pentacle ne risquait pas de finir boulotter par son volatile attitré. Grosse erreur qu’il commit la, tout ensuqué qu’il était depuis des semaines… Le pentacle était parfait, et l’œil aussi. Mais les entrelacs formés par les céréales n’étaient pas très solides, et aux bords un peu flous… La ou aurait dû se trouver des murs, les piliers de la réalité symbolisés, il y eut donc la place pour des ouvertures, de minuscules fissures insignifiantes.

Insignifiantes sauf pour les âmes en détresse, à l’affut du moindre rayon de lumière. La vérité n’en manquait pas.
Ainsi, alors que Tim tombait à la renverse et qu’une lumière blafarde se déversait dans son repaire, il fut bouleversé de voir une silhouette d’une jeune fille et un visage qui se dessina et qui semblait porter toute la misère du monde.

« C’est t.. Toi qui rodais autour de moi et de ma maison ? »
En guise de réponse, la jeune fille spectrale se mit à refaire avec une certaine conviction le cri d’Edvard Munch, prouvant s’il en était besoin la détresse dans laquelle elle se trouvait.
Nul son ne sortit, mais les verres qui trainaient sur la table de la cuisine se brisèrent et il en eut été de même avec les fenêtres si Tim ne les avait pas encouragés à rester de marbre… ce qu’elles firent, littéralement, obstruant de fait toute lumière venant de l’extérieur. Agacé, car cela ferait un autre problème à régler, Tim se releva.

Les lieux n’étaient plus nimbés que de la lumière blafarde émanant de l’invité d’honneur.
« Qui est-tu ? Que veux-tu ? » . Tim savait se faire comprendre de n’importe qui. C’était dans sa nature.

Ainsi la jeune fille lui montra des scènes très difficilement soutenables, ou elle se faisait torturer. C’est en l’observant de plus près qu’il vit des symboles, des runes gravées sur sa peau. Il ne les connaissait pas, ce n’était donc pas un langage à proprement parler. Il aurait pu chercher dans ses livres, mais il y avait sans doute plus simple… Quoique potentiellement plus ennuyeux.

Constantine n’était pas vraiment ravis qu’on le dérange. Il fallait que ça en vaille la peine… Mais il y avait trop de symboles se rapprochant de ce qu’il avait pu voir sur ou autour de son ami…. Tim le considérait comme son ami, mais ce n’était pas forcément réciproque. C’est juste que, de tous ceux qui l’avaient mis sur la voie de la magie, Constantine avait été le plus honnête, sans arrière-pensée…
Il avait son numéro de téléphone, mais John n’était pas forcément joignable de cette façon…. A la place, il alla chercher le paquet de clopes qui trainait dans son tiroir. Tim ne fumait pas… Mais il avait trouvé qu’enchanter un paquet de clope pour appeler Constantine n’était pas dénué d’un certain humour et d’une certaine poésie.

« Bon toi, tu reste la.. »
fit-il à la fille… « pas littéralement hein… juste pour le moment »…. Il se méfiait avec sa magie… Il alluma sa clope, pris une grosse bouffée, et souffla le mot « Constantine » dans la fumée, y insufflant de sa propre magie… Il vit la fumée prendre un chemin de traverse, et sourit à l’idée que quelque-part, avec un peu de chance, elle finirait devant celui qu’il cherchait, mimant dans les fumerolles la scène à laquelle Tim venait d’assister. Des images valaient mieux qu’un long discours… Il n’avait pas de whisky, ni de bourbon… Mais il lui restait des bières plutôt potables dans le frigo. Il en sortit deux….






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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Lun 28 Oct 2019 - 12:02

L'Enfer, ou le plan qui se construisait comme tel, fonctionnait avec des règles tantôt simplissimes, tantôt d'une complexité toute féodale où conflits, trahisons, alliances et paix sonnaient comme les différentes étapes d'une grande fresque épique. Sauf qu'il n'y avait pas de preux chevaliers et de princesses à sauver, mais des démons qui s'écharpaient sur le véritable sens des mots "pouvoirs" et "domination" et où la moindre énergie était employée à écraser son ou ses voisins. C'était somme toute un plan tout entier fait pour l'étude la plus approfondie sur les guerres, d'un territoire envahi à une simple âme volée, tout était prétexte aux déchaînements les plus violents.

Heureusement, dans cette étrange situation de conflit perpétuel, certaines règles simples tenaient, notamment celle des âmes. En Enfer, l'âme est une monnaie, en tant que carburant de sorts puissants et de rituels apocalyptiques, la quantité d'âmes tourmentées acquises par chaque entité surnaturelle était autant d'influence et de pouvoir qu'il amassait, source de respect, mais aussi de convoitise. Aussi prenait-on grand soin de ses réserves, que l'on ne gardait jamais toute entière en un même "lieu", à moins d'être le maitre absolu des lieux.

Anton Arcane était du genre prudent avec ses âmes, en partie parce qu'il n'était pas le démon le plus puissant. Il prenait grand soin de les raffiner lui-même et s'il lui arrivait d'en attraper parfois une dizaine, il avait l'esprit et les pratiques d'un orfèvre. Là où de plus puissants démons en fauchaient comme les blés, récupérant du bon grain, mais aussi de l'ivraie (une âme non corrompue de prêtre par exemple), lui profitait de la moindre occasion pour marteler d'horreur ses victimes et les mettre dans l'état idoine où elles lui seraient très utiles.

Il avait une petite réserve en enfer, histoire de dire qu'il était dans la compétition mais en montrait le moins possible aux autres démons, mieux valait ne pas trop attirer l'attention sur lui. Il préférait en réalité, le reste du temps, maudire divers endroits avec des artefacts "enchantés" par ses soins pour servir de réceptacle, des coffre-forts ésotériques en quelque sorte.

Il lui fallait, de temps à autres, refaire des enchantement, retracer des symboles cabalistiques, changer des encens, voire augmenter la puissance selon les nouvelles âmes qu'il avait besoin de stocker. L'avantage de l'occultisme de haut niveau restait qu'il n'était pas toujours nécessaire de se déplacer pour vérifier ses coffres, sauf cas exceptionnels.

Naturellement, toutes ces précautions n'empêchaient pas les âmes de vagabonder dans le monde, bien au contraire, cela générait des flux et des reflux magiques - généralement camouflés par les serrures occultes - mais aussi et parfois, des fantômes errants sans grande capacité d'interaction avec leur environnement. Les âmes étaient déjà profondément blessées par leurs tourments, et elles étaient scarifiées par un passage au travers des maléfices de protection. Seuls des occultistes ou des magiciens particulièrement versés dans les arts démoniaques ou avec de bonnes connaissances sur le fonctionnement de la magie noire pouvaient espérer les régénérer suffisamment pour leur donner assez de corps et d'énergie et ainsi converser avec elle.

L'âme qui s'était matérialisée aux abords de la demeure de Tim Hunter était une jeune femme qui avait mis près de trente ans à se défaire de ses premiers liens. Cette force de caractère avait précisément jadis plu à Anton qui s'était entichée d'elle. Sa pauvre propriétaire ne sut cependant pas apprécier tous les dons que l'Avatar de la Nécrose avait pu lui offrir.

L'effort qu'elle déploya pour montrer ses sévices à Tim Hunter allaient sans doute l'aider à obtenir de l'aide, mais elle avait réclamé beaucoup d'énergie, assez pour activer un sort d'Arcane.

Ce dernier, assis dans son bureau de l'Asile d'Arkham lisait consciencieusement le dossier d'un patient qui allait recevoir en sa compagnie un petit traitement de sismothérapie. Lorsqu'un sifflement qu'il était le seul à entendre lui indiqua que l'on avait violé sa propriété.

Il repoussa sa chaise et se leva alors. Un apprenti sorcier qui avait joué trop près de chez lui ? Un démon en quête d'âmes de qualité ? Un rival qui cherchait à lui faire do tort ? Dans tous les cas, c'était le genre d'acte qui n'acceptait pas de clémence.

Verrouillant sa porte de bureau, Anton songeait qu'il devrait sans doute renforcer ses "coffres", avec l'Asile d'Arkham il aurait bientôt une arrivée massive, pas question de devoir jouer les banquiers-suisses tous les trois jours. D'un geste précis il alluma deux bougies, une rouge et une violette, sortit un crâne humain et se taillada la main gauche pour y faire couler du sang dessus.

Les deux orbites du crâne brillèrent et l'occultiste ressenti le lieu. Les sous-sols de sa vieille demeure familiale, scellée avec les os de sa propre mère, assassinée un jour de curiosité mal placée. Une porte pourtant solide, l'attachement du sang étant fort, mais il aurait sans doute dû peaufiner les détails, surtout avec les forces qu'il y avait entreposée. Il prononça deux mots d'une langue oubliée et les ombres de son bureau s'épaissirent. Une âme était fragilisée. Il lui manquait... la volonté... il restait quelques bribes... peur... angoisse... des souvenirs plaisants encore...

Petite garce, songea l'occultiste en ouvrant les yeux. Ulva Bakke, une norvégienne rencontrée lors d'un voyage dans son pays glacé. Solide, volontaire, elle avait été une bonne guide pour lui et son expédition, ainsi qu'un bon réconfort... il se souvenait encore de ses cris dans la neige. Elle s'était beaucoup débattue et il avait mis trois mois pour la torturer avec ses arts. Pas question de la laisse lui échapper.

Heureusement pour lui et malheureusement pour elle, c'était une âme marquée par un sort très particulier qu'un bon occultiste saurait à coup sûr démasquer : une marque démoniaque personnelle. Le genre de sceau que l'on applique avec soin, comme lorsque l'on marque un lingot d'or.

Il se saisit du crâne et prononça son nom démoniaque suivi d'une litanie entêtante. Un temps durant le crâne se modifia pour se voir superposer les traits de Ulva Bakke. Il y eut une odeur de cigarette... la vision fugace de céréale de gamins... le tintement de deux bouteilles... Puis rapidement un oiseau, un jeune homme... une brume insondable aussi et bientôt une adresse.

Le crane redevint un simple crane, les bougies s'éteignirent, les ombres se dissipèrent. Anton ouvrit les yeux et fronça les sourcils.

- Me voilà en appétit... exhala-t-il dans un souffle rauque.

Le temps de rassembler quelques Un-Men et il irait rendre Justice...

[HRP]
Anton vous a localisé petits voleurs. Je vous laisse le temps de papoter un peu quant même, soyons role-play Wink
[/HRP]
John Constantine
Non-joueur
John Constantine
Non-joueur
Inscription : 17/08/2019
Messages : 588
DC : RAS
Situation : Officiellement mort, commence lentement à ressurgir
Localisations : L'Oblivion Bar - La Maison du Mystère
Inventaire : Un paquet de cigarette, un briquet, un trousseau de clef, de la poudre aux yeux, un couteau suisse et de multiples craies.

Depuis récemment, une seringue de sang infusée de magie démoniaque très fortement semblable à celle Trigon.
Shadowpact
Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Jeu 31 Oct 2019 - 18:32



Le taxi s'éloigna dans un ronflement de tous les diables, manquant de faucher un étudiant un peu trop tête en l'air au virage au bout de la rue. La banquette arrière était chargée d'une discrète odeur âcre, et le chauffeur avait pendu un minuscule pendentif à son rétroviseur. Une vieille photo, dans un cadre en forme de coeur un peu usé. Constantine renifla. C'était le taxi le moins cher qu'il avait trouvé, et le chauffeur s'était avéré être un type plutôt agréable, mais il était quand même content d'en être sorti. Qui écoutait du Céline Dion à longueur de journée dans cette partie du monde ?

Le thaumaturge remonta le col de son trench-coat et se mit à déambuler sur le trottoir. Le soleil lui chauffait doucement le dos, quoi que l'air froid empêchait de se croire tout à fait en été. Il aimait bien ce genre de temps, mais à l'instant son esprit n'était pas tout à fait à la météo. Il avait reçu un message de fumée et d'images, alors qu'il sortait acheter de quoi manger et des réserves de cigarettes. Des images qui ne l'avaient pas véritablement rassuré, du reste.
Il n'avait rien contre Tim Hunter. Il l'aimait bien, à vrai dire. C'était un garçon brillant, définitivement destiné à de grandes choses. Mais lors que Constantine avait vu les images et commencé à comprendre ce qu'il se passait, il s'était précipité le plus vite possible chez le binoclard. Oh, il n'était jamais venu. N'avait jamais été invité. N'avait jamais reçu de cartes, ou d'indications pour trouver la maison des Hunters. Pourtant, il savait parfaitement où elle était.

Le Britannique grimpa sur le perron, et sonna à la porte. Il jeta un coup d'oeil vaguement négligent aux alentours, l'air d'observer le quartier. Passé quelques instants, il sembla satisfait. Tout avait l’air tranquille, pour le moment. Personne dans les environs directs, c’était déjà ça de gagné. La maison avait l’air en relatif bonne état (… a une ou deux fenêtres de marbre près). Constantine prit une courte inspiration : il était arrivé en premier. Tant mieux. Il y avait peut-être moyen d’éviter à la situation de partir trop vite en cacahuètes.
Lorsque la porte s’ouvrit sur Tim, le britannique lui adressa un large sourire et s’engouffra presque de force dans le bâtiment.

- ‘Jour Tim. Met un coup de clef, tu veux ?

Constantine déboula dans le salon comme si il était chez lui, visiblement à la recherche de quelque chose de spécifique. Le moins que le Britannique puisse dire, c’était certainement que le jeune homme avait un style très particulier. Il n’était pas au-dessus des bidouillages magiques et de ne pas tout faire exactement selon la tradition, mais même John Constantine ne se serait pas risqué à un pentacle de révélation tracé avec des Lucky Charms à demi-grignoté. Il aurait eu raison, du reste : si Tim Hunter s’était contenté d’un tracé à la craie, il risquerait moins sa peau à l’instant. A défaut, il fallait admettre qu’il avait un sacré culot, et qu’il n’avait pas froid aux yeux.
Le magicien s’approcha plus lentement du cercle. Du coin de l’oeil, il vit le familier de son hôte s’envoler d’une étagère pour se rapprocher de son maître. Il n’y prêta pas attention. La silhouette qui flottait au centre du dessin rituel était humanoïde. Féminine, l’air épuisée, paniquée, et tremblante. Sa peau était marquée de symboles occultes spécifiques et étrangement familiers qui déclenchèrent vaguement une alarme dans la tête du Britannique (mais qu’il n’écouta qu’un peu trop tard).

L’air était à la guerre d’influence dans les Enfers, et une très large part de cette influence passait par les âmes de chacun. Se retrouver avec une âme errante dans son salon n’était d’office pas bon signe, par les temps qui courraient. Rares étaient les âmes qui se retrouvaient perdues dans les limbes : tout le monde récupérait le moindre bien qui pointait son nez spectrale sur le marché, Enfers et Cieux confondus. Si un spectre avait réussi à trouver son chemin par accident chez Tim Hunter, c’était soit qu’il avait fuit une chemin de trafic, soit qu’il s’était enfuit des griffes de quelqu’un, soit que c’était une victime de choix et que les trafiquants d’âmes (ou les démons en mal d’âme-our) ne tarderaient pas à lui tomber dessus. Presque par réflexe, Constantine tendit la main à la recherche d’une quelconque trace pouvant lui indiquer d’où venait le spectre.

-Nom d’un chien!

Le thaumaturge retira brusquement sa main comme si il s’était brûlé. Non seulement Constantine avait senti un sigil marquant l’âme, mais il l’avait reconnu. Son regard retomba sur les symboles sur la peau de la morte, puis vers son visage. Pendant un bref instant, son regard se para d’un fragment d’horreur et d’une once de compassion.

-… Je ne dirais pas non à une bière, murmura-t-il.

Évidemment. C’était Tim Hunter, dont il était question. Qu’il ait intercepté/volé une âme « sans faire exprès » était un scénario possible, si il l’avait volé à un démon (ou un nécromancien) moyennement efficace à son boulot. Une menace relative, dans l’absolu, incapable de veiller sur ses propres possessions. Constantine jeta un regard à son hôte, et une petite lueur amusée lui passa dans les yeux.

-Anton Arcane, c’est un nom qui te parle ?

Le spectre frémit, dans le cercle. Le Britannique lui lança un regard en biais. Son cerveau s’était mis en marche, et carburait à toute vitesse.

-Avatar de la Nécrose. Nécromancien et occultiste de talent. Et, actuellement, participant impliqué dans la guerre civile infernale. Il eut un geste de tête dans la direction du spectre.C’est à lui.

Lentement – très lentement – quelque chose commença à prendre forme dans l’esprit du thaumaturge. Un début de plan. Voir Arcane débouler sur le pas de la porte avec un ou deux zombies n’était qu’une question de temps : il fallait agir vite.

-Je pense qu’on va avoir besoin de la lier à quelque chose de plus mobile qu’un cercle en céréales au milieu de ton salon. Une bouteille ferait l’affaire.
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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Ven 8 Nov 2019 - 12:42




L’âme, l’esprit ou la créature ou quoi que ça pouvait être, semblait épuisé. Depuis son cri qui avait valu à Tim la perte de 2 vases et d’un verre, et le gain de deux fenêtre en marbre, très atypiques mais pas très pratiques, il fallait bien l’avouer, elle n’avait pas dit un mot ou même gémit. Elle était presque dans un état larvaire, ou cataleptique. Elle bougeait, cependant, et son attitude et ses expressions indiquaient clairement qu’elle souffrait et qu’elle était, de plus, inquiète.

Tim s’y connaissait plus en démon et en fées qu’en fantôme ou en âme… Il avait eu, une fois, l’âme d’un ange qui l’avait investi, comme un virus, mais il s’en était débarrassé, au grand déplaisir de l’ange Enoch, en question. Heureusement pour lui, il savait Constantine plus calé que lui en la matière et il espérait que son message de fumée lui soit parvenu. Rien n’était sur en matière de magie, d’autant plus la magie de Tim qui était un peu fluctuante et chaotique.

Lorsque Constantine se présenta, entra dans l’appartement et lui demanda de fermer à clef, le jeune prodige ne se fit pas prier et obéit comme un enfant pris la main dans le bocal de confiture. Cela lui faisait bizarre, car même s’il connaissait bien son vis-à-vis, ce dernier n’était jamais venu chez lui. Il avait presque honte de l’avoir comme invité. Son appartement sur terre était banal, très américain moyen. Il imaginait l’antre de Constantine de deux façons. Soit un sanctuaire plein d’artefacts et de mystères, il l’avait entendu parler de sa maison particulière. Soit un endroit cool avec de l’alcool, des bouquins louches et surement beaucoup de trucs funs. En tous les cas, bien loin de la banalité du lieu présent. Bien sur, son antre personnel à l’école Blanche, ou en Arcadie était bien plus en symbiose avec une fierté timide mais grandissante du jeune magicien…

Comme à son habitude, Constantine semblait prendre la mesure des lieux avec une acuité impressionnante. Il eut tôt fait d’inspecter le pentacle de Tim, haussant un sourcil surpris. Le jeune magicien se sentit un peu penaud, sur ce coup la… Il avait l’habitude de prendre la magie avec une certaine légèreté qui frisait parfois l’insolence, mais comme il lui était déjà arrivé de le dire, tant qu’on ne lui disait pas que c’était impossible ou que ça ne se faisait pas, il le faisait, point… En fait il en était à ce demandé si, en matière de magie, plus il en apprenait, plus il se limitait. Des lignes, des runes, des pentacles, il fallait le faire d’une certaine façon, avec les bons instruments, les bons matériaux… Cela lui semblait limitait, et, en même temps tout à fait logique… Qu’il était dur de marcher sur ce chemin tout en voulant s’en écarter…

Tim sursauta au moment ou Constantine pesta, sa main lui brulant presque, visiblement… Merde ! ça avait l’air sérieux et dépassait probablement la petite malédiction dont il supposait être la cible. Il lui tendit la bière demandée, tout ouïe, et réfléchit un moment à la question de son ami.

« je ne connais pas ce nom.. » et pourtant une sorte d’alarme, impérieuse, stressante, semblait avoir trouvé intéressant de sonner dans son estomac, sa tête et son cœur… Cela ne pouvait signifier qu’une chose : cette entité, ou cette personne devait être importante dans le domaine mystique, pour que son fameux « sixième sens » se déclenche… Pour autant, le nom lui était toujours inconnu et il était trop tard pour faire une recherche de vrai nom, vu l’urgence de la demande de Constantine.

Une guerre infernale… Oui, ça en revanche il en avait entendu parler, il l’avait sentit, chuinter dans les ombres, comme une menace…
« une bouteille.. oh… OH ! » il se précipita dans le bureau foutoir de son père, qui n’était plus que l’ombre de lui-même et vivait des jours gris en maison spécialisée. Il y avait des journaux, de la poussière, mais aussi des bateaux en bouteille. Une fois, son père et lui en avait créé un, mais il n’y avait eut aucune joie. Le bras arraché de son paternel était un vrai problème…..
Il revint avec son trésor, une sublime caravelle enfermée dans une bouteille de vieux whisky, d’une rare transparence…

Tim souris à Constantine, qui pensait surement bien des choses, mais laissait souvent une grande liberté à son protégé….

Le jeune magicien s’assit en tailleurs, non loin de son pentacle en céréales, la bouteille posée sur ses genoux. Il fixa avec intensité la caravelle, laissant son sens magique investir sa vision. Il fut comme happé à l’intérieur de la bouteille, du moins c’est l’impression qu’il en eut, et se retrouva sur le bastingage, la mer étrange flottant autour de lui. Le bateau tanguait, il y avait de l’embrun, et le ciel étrange, diffracté dans le verre, était mordoré, vert, et bleu, selon les fantaisies de la bouteille. Il eut même l’impression de se voir en train de se regarder en train de se voir…..

Avant d’avoir trop le vertige à cause de cette mise en abîme, il procéda aux ajustements… Souriant, il fut assez fier de sa trouvaille pour compliquer la tâche à quiconque voudrait prendre cette pauvre âme. Au lieu de se contenter d’enfermer l’âme en bouteille, il alla graver un pentacle entouré de runes féériques sur le plancher de la cabine du capitaine. De la il jeta une sorte d’ancre, qui vint se planter spirituellement dans le monde extérieur, au creux de son piège de céréales… Il sentit l’âme s’y accrocher, et tira de toutes ses forces mystiques. L’âme de la jeune fille fut happé dans la cabine, et tim lui sourit : il lui indiqua le gouvernail. Tant qu’elle serait dans cette cabine, sur ce bateau, elle pourrait diriger son chemin spirituel, et éviter d’être happée de nouveau de force. Quiconque voudrait la reprendre devrait venir sur le bateau, et ne serait ainsi plus en territoire de force.

Tim revint à lui et commenta sobrement :
« elle est dans la cabine, et elle dirige le gouvernail de sa propre mer des âmes… »
Pourvu que Constantine ne lui dise pas que c’était impossible. Tant qu’on ne lui disait pas, il pensait qu’il pouvait faire ça….






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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Mar 12 Nov 2019 - 8:44


Un vent mordant et désagréable balayait la ville comme une exhalaison cadavérique. Les arbres et leurs feuillage agonisants se balançaient tristement, s'abandonnant tragiquement à ce souffle morbide. Le Soleil et ses pâles rayons filtrés par une couche sirupeuse de nuages aux allures fongoïdes essayait de donner à ce malheureux décor des teintes plus heureuses, mais ne parvenait dans ses vains efforts qu'à obtenir des teintes pastels exécrables où le gris semblait vouloir largement prédominer.

Les rues étaient désertes, à part un facteur mal payé enserré dans assez de couches de vêtements pour peiner à se maintenir sur sa vieilles bicyclette, un coureur invétéré et une vieille dame aussi robuste qu'un chêne noueux qui promenait une parodie de chien.

Quartier tranquille. Perspective à la romaine, comme si l'Amérique, par ce biais, s'était cherchée un passé, une Histoire. Un mensonge comme tant d'autre. Les pneus d'un véhicule crissèrent dans ce décor tout à la fois mélancolique et sublime. De l'autre côté de sa fenêtre tâchée de sang, Anton Arcane observait défiler les maisons et les haies parfaitement taillées jusqu'à ce qu'une rue bouleverse ses observations. Comme si un coin de Gotham s'était perdu dans cet amoncellement de maisons dignes de catalogues, il apparut certaines propriétés plus originales. Masures et architectures à l'anglaise se battaient face à des structures tantôt plus moderne, tantôt plus ancienne, à la limite du néo-victorien.

Dans le creux de sa main, Arcane portait une étrange amulette faite d'un crâne de corbeau orné de tiges de cuivres et d'une gemme d'Améthyste corrompue dans une forge du Purgatoire, le genre d'outil pratique pour suivre une piste magique, alliant nécromancie, lithomancie, mécanique et puissance démoniaque, autant dire une marque du docteur Arcane pour qui aucune limite n'était sensée bloquer ses recherches occultes.

Les orbites vide du corbeau s'étaient mises à briller plus fort et le maître eut tot fait d'ordonner l'arrêt de son véhicule.

L'appendice insectoïde de l'un de ses Un-men avait activé dans un suintement glaireux les pédales, le volant et le frein à main.

La demeure qu'indiquait le talisman était deux portes plus loin, mais nul n'était nécessaire d'intervenir avant d'être au complet.

La grand-mère promeneuse observa l'étrange voiture aux vitres sales se stationner sur le trottoir, au mépris de la signalisation. Mais ici, la tranquillité et la paix régnait, pas question de laisser cela passer, avec bienveillance naturellement. Elle s'approcha avec son caniche et frappa à une fenêtre, son seul reflet lui répondit tout d'abord.

Puis, bris de glace, un aboiement. Du haut des fils électriques qui surplombaient la scène, des pigeons s'envolèrent. Une suspension gémit. Fin de l'intermède.

Et tandis que les lourdes mâchoires de l'une de ses créatures profitait d'un canidé comme repas, Anton observait les alentours. De sa fenêtre, il ne voyait presque rien, mais l'occultiste ressentait. Les magiciens visionnaient, les sorciers exploraient, lui, comme les autres experts extérieurs à la magie elle-même, pouvait percevoir de subtiles résurgences, le tout démultiplié par ses sens démoniaques.

Ulva Bakke, ou ce qui restait de son âme meurtrie était dans la zone. Anton pouvait sentir le parfum si caractéristique de ses larmes mystiques et de ses hurlements résiduels. Qu'il était délicieux de sentir cet air embaumé par ces effluves souffreteuses...

Lorsqu'il ouvrit sa portière, laissant de lourds filets de sang s'écouler sur la chaussée et ruisseler jusqu'au caniveau le plus proche, Anton prit une profonde inspiration.

Le médaillon pendant aux côtés, les yeux indiquant d'un fin filet violacé une direction, l'occultiste put enfin mieux détailler le lieu de sa prochaine intervention. Demeure de famille sur terrain en friche.

L'occultiste enleva le manteau qu'il avait pris, maintenant poisseux de sang et tira de la poche intérieure un sifflet taillé dans une corne de démon mineur baigné dans le sang d'une vierge il y avait de cela près de vingt ans, une pièce merveilleuse et qui s'enchantait sans problème grâce à ce traitement - tant que vous ne pratiquiez pas dessus de la magie "blanche".

Il souffla dedans. Les chiens ne réagirent pas, les habitants ne pouvaient l'entendre, mais toutes les créatures liées par Anton à son sceau occulte purent l'entendre. Autant dire ses Un-Men. Il le rangea soigneusement dans une poche de son pantalon. Pour l'occasion, l'occultiste n'avait pas de déguisement, pas de costume encombrant : un manteau, une chemise, un pantalon. Nul besoin de chaussure, elles glissaient dans le sang. Nul besoin de masque, il savait que pour récupérer son bien il devrait sans doute combattre et inutile de gaspiller trop de matière première.

Les deux créatures qui l'avaient escorté jusqu'ici s'extirpèrent du véhicule, non sans difficulté tant leur corpulence semblait peu adaptée aux véhicules humains. Des bubons de chair s'échappaient de la carcasse comme des ballons flasques, leurs puissantes jambes qui avaient déformés le bas de caisse provoquèrent un grincement sinistre en sortant. Des mains humaines renforcées par mutations démoniaques pendant au bout de bras plus articulés que prévus ou des excroissances d'hexapodes achevèrent le tableau. L'une des deux créatures, badigeonnées du sang de leur repas sur le pouce stridula légèrement tandis que l'un de ses yeux réduit à un ocelle psimatique contemplait les alentours.

Leur maître observait le ciel. Avant de quitter son bureau, il avait "programmé" deux autres de ses créations pour le rejoindre au moment idoine. Elles avaient suivi le trajet de leur maître, l'effectuant de bonds en bonds réguliers, au son du sifflet maudit. A présent, Anton entendait bien leur faire jouer leur rôle.

Des bourdonnements désagréables vrillèrent un instant le ciel et un cri ou deux de maisons voisines indiquaient que le docteur Arcane n'entendait pas agir dans la plus grande discrétion. Il se pencha sur son manteau et en extirpa deux feutres ; des armes entre ses mains rachitiques.

Il glissa le tout dans une poche et claqua la portière de sa voiture qui rendit un son spongieux écœurant. Deux ombres se posèrent à côté de lui. Deux formes mi-humaines/mi-insectes avec de larges ailes composées de membranes luisantes. De leurs gueules déformées suintait une bave sirupeuse qui générait une odeur épouvantable. Leurs mains atrophiées avaient laissé place au développement d'étranges pattes semblables à celle de mille-pattes, mais proportionnées à la taille d'un homme adulte. Des opisthosomes arachnéens déformaient leur bassin et surgissaient comme deux poches chitineuses qui spasmaient régulièrement. Des horreurs au goût du scientifique malade qui les avait composé, modifié, fait muter avec patience et soin.

Le moment d'assouvir l'envie de sang d'Arcane s'avançait.

Bien entouré, le nécromant s'avança en direction de l'étrange maison et d'un geste du bras, il indiqua à ses deux monstruosités ailées de partir en éclaireur.

Les deux Un-Men se perchèrent alors sur le toit avec lourdeur, arrachant quelques tuiles au passage et commencèrent à sécréter une substance baveuse de leur abdomen qui leur permit, comme des araignées, de descendre le long des murs pour trouver les voleurs.

Décidé, Arcane s'avançait vers l'avant de la demeure avec ses deux créatures et commença à dessiner le long de la porte d'entrée des runes pour empêcher un petit malin de s'enfuir par là. Ci fait, un Un-men la défonça d'un coup de poing bien placé. Anton resta dans l'encadrement.

- Vous avez une chance de réparer votre erreur, mentit-il.Ma clémence ne tient qu'à votre reddition.

L'une de ses créature volantes stridula alors, indiquant qu'elle avait perçu du mouvement dans la maison.

La chasse commençait...

[HRP]
- Anton est avec deux Un-Men à l'entrée de la maison.
- Deux Un-Men sont sur une façade de la demeure à la recherche de vie et ont trouvé quelque chose.
- Au plaisir !
[/HRP]
John Constantine
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John Constantine
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Shadowpact
Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Lun 25 Nov 2019 - 18:23



Comment Hunter avait réussi son tour de force, le magicien ne savait pas trop. A vrai dire, il ne voulait pas vraiment savoir – ils n’avaient pas vraiment le temps pour un débat thaumaturgique en règle. Il tendit la main pour récupérer la bouteille.

-Excellent. Maintenant, dans l’idéal...

Constantine se coupa en milieu de phrase et releva la tête. Il aurait juré avoir entendu un bruit. Quelque chose comme un crissement de pneu. Le silence lui répondit. Peut-être l’avait-il simplement imaginé. Il était un chouïa à cran et n’était peut-être pas l’homme le plus à l’abris d’une crise de paranoïa à l’instant.

-C’est quoi, la pièce la plus loin de la porte d’entrée et de la façade ? Avec un sol sur lequel je puisse dessiner.

Nouveau bruit. De verre brisé, cette fois-ci. Le thaumaturge pivota lentement, aux aguets. Il fit quelques pas prudent en direction de la fenêtre, essayant d’être le moins visible possible depuis la rue. Pour une raison obscure, imaginer Anton Arcane dans une voiture lui paraissait étrange. Cela semblait bien trop courant pour être approprié. Le bon docteur avait sa suffisance stylisée de nécromant fou démoniaque, et l’imaginer au volant d’une Twingo était bien trop à côté de son esthétique habituelle. Il avait une sorte de goût – de là à dire que les mandibules et les organes à vif étaient de bon goût, il y avait encore tout un univers. Paradoxalement, le voir arriver à dos de dragon mutant l’aurait peut-être plus rassuré. C’était, du reste, fortement moins probable.

La rue était quasiment vide, et à raison. Il y avait effectivement une voiture de garée de travers, sur le trottoir, à proximité de la maison. Une silhouette s’affairait près d’une portière arrière. Constantine déglutit. Arcane ne lui avait pas spécifiquement manqué, à vrai dire. De sa peau froissée aux ongles morts, le nécromancien suintait par tous les ports d’une énergie que le Britannique préférait garder loin de ses sinus. Soma sema, si vous voulez. Mais chez le démon, c’était pousser le vice un peu trop loin.
Les autres portières de la voiture s’ouvrirent violemment, comme si ce qui les manœuvraient essayait de les défoncer plutôt que de les pousser. Constantine laissa échapper un sifflement.

-Bordel.

Arcane était un des rares occultistes qui pouvait à l’occasion se targuer de subtilité. Loin des habituels lanceurs de tempêtes de feu et autres porteurs de robes à paillettes, sa magie pouvait se montrer insidieuse, retorse, un-orthodoxe. Il avait prouvé plusieurs fois que quelques runes soigneusement dessinées et une préparation rigoureuse pouvait s’avérer diablement plus efficace que un casque brillant et des éclairs de magie pure. D’une certaine façon, Constantine admirait la maîtrise dont il pouvait faire preuve : c’était un occultiste d’un genre qu’on ne croisait plus beaucoup, dans les rues ou dans les ombres. Il avait donné ses heures de gloires à l’adjectif « retors ».
Aujourd’hui n’était clairement pas une de ses heures. Deux monstruosités s’extirpèrent difficilement de l’habitacle du véhicule, lequel gémit copieusement en réponse. C’était deux homonculi de chair difformes, façonnés par un artiste fou (qui semblait plus à l’aise avec des feutres, aujourd’hui). Même depuis la fenêtre, le thaumaturge apercevait des organes palpitants – et sûrement plus véritablement humain – à travers leur peau diaphane. L’une des créatures était encore barbouillée de sang, et on aurait probablement pu voir le processus de digestion quelque part au milieu de ce qui lui servait de thorax. Constantine ne broncha pas (ou alors qu’un peu : au mieux retroussa-t-il le nez). Il y eu un vrombissement, quelque part dans la rue, puis deux choses s’écrasèrent de chaque côté de Arcane. 4 Un-Mens. Un nécromancien. « Facile » grinça intérieurement le Britannique. La troupe se mit en branle, avançant d’un pas décidé (et plus ou moins harmonieux) vers la façade de la maison. Constantine pivota vers Tim. Réfléchir. Réfléchir vite. Et agir, surtout.

-A l’étage, vite!

Il leur fallait un endroit pour se retirer. Affronter Saruman et les fantasmes personnels de Lovecraft de front aurait été suicidaire (et soyons honnêtes, très franchement moins lucratif). En bas, il y eu un gros bruit suivit d’une pluie d’éclats de bois. Espérer qu’un battant de porte face le poids face aux bonhommes en pâte à modeler de Arcane était peut-être un peu trop demander. Il y eu un autre bruit au-dessus de leurs têtes. Constantine marmonna une injure, et jeta un œil vers les fenêtres de la façade.

- Vous avez une chance de réparer votre erreur, tonna Arcane depuis le rez-de-chaussée. Ma clémence ne tient qu'à votre reddition.

Bonne blague, ça. Quelque chose s’agita au niveau des vitres donnant sur la rue. Constantine se jeta en avant et eut juste le temps de voir une des monstruosités ailées de Arcane se jeter contre le carreau avec de claquer violemment la porte – pour se précipiter vers la pièce que Tim lui avait désigné pour se cacher.
Il leur fallait se barricader. Bloquer la porte. Pousser des meubles devant, allumer un cierge, bref, gagner du temps. Constantine, plongea la main dans sa poche et tira un bâton de craie, puis s’approcha du Merlin en devenir. Ce n’était pas son premier rodéo… mais tout de même. Pour une raison obscure, le thaumaturge avait de l’affection pour lui. Ce n’était plus le petit garçon qu’il avait initié au bordel monumentale qu’était le monde occulte, mais il ne pouvait pas juste le larguer devant une tripotée de Un-Mens et s’attendre à ce qu’il reste tout à fait de marbre.

-Tim. J’ai un plan. Mais je vais avoir besoin que tu me fasse confiance – et surtout, que tu ne tiques absolument pas devant Arcane. Il est accompagné de satanées saloperies, mais ça ira – elles ne pourront pas te toucher si tu me fais confiance. D’accord ?

Qu’il soit d’accord ou non, Hunter comprendrait à l’instant même où Constantine mettrait son sort à exécution – et il l’arrêterait à ce moment là si vraiment il n’allait pas dans son sens. Un simple cercle de protection. C’était son seul plan. Un cercle, tout droit tiré des dessins du roi Salomon, servant de protection aussi physique que magique ou psychique. C’était un diagramme magique grossièrement simple, sorti du premier manuel de rituel pour pseudo-magiciens, à d’infimes variations près. Une courbe légèrement infléchie par-ci, un trait un peu plus court par là… autant de minuscules détails que même Tim ne serait probablement pas en mesure de remarquer. Constantine avait fait en sorte que très peu de personnes (pour ne pas dire aucune) soit capable de les remarquer, mais Arcane était un occultiste au pouvoir toujours grandissant et remarquablement pleins de surprises. C’était un jeu très risqué.
Constantine allait tracer, à la craie, un simple cercle de protection. Dedans, il attendrait avec la bouteille. Dehors… il laisserait Tim et les Un-Mens.

hrp:
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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Mer 18 Déc 2019 - 18:19




C’est un peu tendu que Tim attendait le verdict de celui qu’il considérait comme son mentor, totalement inconscient des dangers qui commençaient à roder, cliqueter, dégouliner, gronder et fomenter dans les ombres.

Constantine se figeât. Du coup Tim se figeât. Constantine parla, et tim lui répondit, trop heureux de ne pas avoir à lui demander ce qui se passait. Son mentor n’avait pas sa pareille pour deviner à l’avance les ennuis magiques, et le jeune Merlin lui enviait beaucoup ce don, qui lui aurait évité bien des déboires et lui aurait surement mis du plomb dans l’aile.

« oui ! »… Le jeune homme ne voulait pas perdre de temps à discutailler et tentait de rester efficace, même sous la pression… . Quand le verre, sans doute une vitre, se brisa, Tim sursauta, à cran. Il sentit immédiatement son cœur de magie brute se déclencher, et du se forcer à le canaliser pour qu’il ne parte pas dans toutes les directions, au risque, encore une fois, de créer un double de lui-même qui serait en charge de la partie « panique » de Tim. Hors de question, merci bien.

Mais son ami avait vu quelque chose. Et Tim détestait ne pas savoir, il était aussi curieux que sa chouette qui, présentement, avait décidé de se planquer dans un coin sombre entre deux livres. Alors il fit l’erreur fatale de céder à sa curiosité. Pointant ses son index et son majeur vers son regard, comme un triangle formé avec ses deux doigts, puis vers la silhouette de Constantine, dans une sorte de parodie de « je te vois, je te surveille », il les repointa de nouveau sur lui, partageant le temps d’un instant la vision de son collègue. Grosse erreur ! Les horreurs difformes qui étaient sorties de la voiture ressemblait à des morceaux qui auraient été mâchouillés par un géant avant d’être recraché sur terre, dans le seul but de nuire. Et elles avaient l’air sacrément douées pour ça.

C’est donc sans dignité mais avec Energie que le jeune mage couru à l’étage comme le lui suggérait Constantine.

La voix du maître des horreurs résonna comme une injonction, et n’eut été la présence rassurante de Constantine, peut être y aurait-il cédé. Une craie à la main, la magie particulièrement efficace et retorse de son mentor allait prendre place.

-Tim. J’ai un plan. Mais je vais avoir besoin que tu me fasse confiance – et surtout, que tu ne tiques absolument pas devant Arcane. Il est accompagné de satanées saloperies, mais ça ira – elles ne pourront pas te toucher si tu me fais confiance. D’accord ?
Un frisson parcouru son échine, mais il releva le menton, comme par défit, et fit « oui » de la tête, déglutissant pour se donner une constance. Il ne comprenait pas comment il atteindrait un tel effet. Mais il sentit tout de suite concrètement comment cette magie agissait et l’utilisait en tant qu’élément, comburant, garde-fou et vecteur… Il n’en menait pas large, sa vie étant en jeu, mais il n’avait pas vraiment le choix en la matière.

Le grenier était « so cliché », mais il était idéalement situé, surtout pour Tim qui se sentait beaucoup plus d’accointance avec l’air et le bois que la terre et le feu… Il ne pouvait plus reculer. Il campa fermement sur ses deux jambes. Si son sang devait couler, il saurait en profiter, comme en Arcadie lorsqu’il avait guérit ses terres natales en saignant abondamment. Mais si on pouvait éviter d’en arriver la, il ne disait pas non…

Une des créatures se posa, reniflant suspicieusement et décrivant des arcs de cercle autour d’eux, attendant visiblement son maître. Ce dernier ne se fit pas attendre longtemps. Bon sang ! Il avait beau avoir promis de tenir bon, il était pratiquement terrorisé… Mais pas sans ressource.

Serrant la mâchoire, il attendit presque calmement le premier coup. Il se doutait que tôt ou tard les protections de Constantine seraient testées… Et donc sa propre force vitale qui leur était liée.





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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Lun 23 Déc 2019 - 11:09

A son injonction, point de réponse. A peine quelques bruits, des pas, des frottements. Les stridulations toujours vives de ses créatures volantes. Autant dire que le démon avait eu un peu de temps, assez pour qu'il se pique de curiosité pour cette vieille demeure poussiéreuse. L'escalier qui montait vers les étages était naturellement engageant, mais une porte entrouverte attisa la malsaine attention d'Anton.

Il la poussa légèrement, une sorte de buanderie/débarras, avec tous les accessoires. Lessives liquides ou en poudre, adoucissant, bicarbonate, cristaux de soudes... mais qui utilisait encore cela ? Il porta la main au paquet, les petits flocons qu'il contenait ne firent pas de petit éboulement, l'humidité semblait avoir fait son oeuvre, tout était aggloméré en un tas compact qu'il fallait concasser soit-même. Du linge s'entassait ça et là. Des vêtements oui, mais pas d'adulte, d'adolescent peut-être ? Arcane se saisit d'un bidon de lessive liquide, plissa les yeux de plaisir et repartit vers l'escalier. Tant de bois... tant de matière périssable... Et ces produits chimiques à portée de main...

Le Docteur tira de son imperméable un feutre de couleur noire. Il écrivit sur la première marche une série de symboles avec la rapidité de l'habitude et traça un trait du dernier caractère jusqu'à la rambarde, qu'il remonta de la pointe. Puis, montant avec légèreté, il traçait une belle ligne sur l'appui-main. Parvenant à l'étage, il descendit le poteau et termina son petit manège en écrivant une nouvelle séries de symboles, mélangeant alchimie, écritures démoniaques et incantations de la Nécrose. Si une créature vivante passait par dessus ces derniers ou cherchait à emprunter ce bon vieil escalier en bois, il provoquerait son pourrissement accéléré. Une petite mesquinerie qui éviterait la fin prématurée à l'entretien qu'il prévoyait.

Un main de nouveau fourrée dans son imperméable ouvert, le regard inquisiteur, Anton paraissait faire un état des lieux sortant, comme un propriétaire qui chiffre la facture à dresser auprès d'un locataire particulièrement revêche. Il découvrit une table de petit-déjeuné où un bol de lait dormait dans la plus parfaite quiétude et à côté... Un symbole simple, élémentaire mais composé avec une rare désinvolture et surtout... des... céréales ?! D'un geste sec de la main, il balaya ce symbole ignoble, cette insulte, ce défi qu'on lui posait. Alors quoi ? On le narguait avec ça ! Un symbole mineur tracé avec des aliments industriels bourrés d'hydrates de carbone et d'acides gras saturés et qui avait arraché l'une de ses âmes !

La froide colère qui montait en lui se saisit du paquet de céréales restantes. Le carton pressa contre le sachet plastique intérieur et émit un crissement désagréable. Le Docteur entendait faire payer cela... Il lut avec soin la composition et ricana. Il balaya tout ce qui se tenait sur cette vieille table et traça un cercle alchimique au centre. Il posa le paquet à l'intérieur et dessina sur ce dernier trois symboles, il fit de même avec la lessive liquide.

- Verrel Nek... Thonrren Val... Elixiris Vitae... Mundi Necrosia..., lança-t-il.

Aussitôt, la peinture du feutre se mit à bouillir et marqua le bois, les symboles alchimiques du paquet se mirent à danser. Une odeur de souffre émana des céréales et la lessive émit un bruit évanescent. Il avait prévu un autre usage pour elle mais l'improvisation régnait en maître désormais ; puisque l'on se moquait de lui, il aurait le dernier éclat de rire...

Il récupéra d'un geste vif ses deux accessoires. Les stridulations de ses Un-Men en chasse l'appelaient vers le grenier. Ses deux autres créatures eurent ordre de rester dans cette pièce, visiblement la principale de ce lieu de "vie".

Le Docteur Arcane prit son temps pour monter, appuyant sur chaque marche grinçante avec le plaisir sadique de celui qui fait monter avec délectation la tension de son arrivée, jouant sans vergogne avec l'atmosphère électrique de sa présence. Ses ennemis n'avaient pas paniqués avec fracas, n'avaient pas hurlé, mais peut-être avaient-ils ce désagréable pincement au coeur qui rendait les secondes éternelles et l'attente abominable.

La porte qui menait au grenier était fermée. Un premier coup d'épaule ne débloqua pas la situation. Que cela était puéril et mesquin... Une porte ? Pour le plaisir, il gratta le long de l'ouverture avec ses ongles durcis par la mort et les fournaises du Tartare. Le son rendu fut à la hauteur de ses espérance, un longue grattement boisé et organique...

Il aurait pu utiliser son feutre, ses Lucky Charms transmutés, ses Un-Men, mais, parfois, il fallait offrir un peu de spectaculaire à ses adversaires, une dose de théâtralité. Il posa donc une simple main sur le bois et senti, au ralenti, l'essence des Verts couler dans ces planches ensommeillées. Vernies certes, mais toujours respirantes, toujours pulsantes, quelque part... La porte trembla légèrement tandis que l'énergie de la Nécrose s'immiscait dans l'entrelacement des fibres végétale. Depuis la paume du semi-démon, la matière devint noire et s'effritait lentement. Puis, selon des arabesque grotesque, les planches qui formaient la porte se gondolèrent, se rabougrirent et devinrent un mucus infâme et malodorant. La poignée tomba dans un bruit infecte dans cette masse putride. Quelques vis roulèrent...

Et Anton ne fut pas déçu... Un gringalet à lunettes qui se tenait devant un...

- Monsieur Constantine, lança le docteur Arcane avec le ton du directeur d'école qui découvre le garnement un peu farceur en pleine faute. Je ne vous aurais jamais soupçonné une telle audace...

John Contantine, le genre d'ennui qu'Anton aurait préféré éviter, mais aussi un défi que l'orgueilleux occultiste ne pouvait décemment pas refuser. Louvoyante créature qui suivait son propre code moral et sa propre absence d'ambition précise, Constantine était un adversaire, un vrai. Pas un magicien qui ne comprenait rien à la moitié de son pouvoir, pas l'un de ses impétrants de la dernière génération qui considéraient l'étude et la patience comme des pertes de temps. Non, c'était un roublard, un menteur, le genre qui avait compris que dans un monde de règles, celui qui parvient à les esquiver et les plier sans trop se faire taper sur les doigts allait loin. Hélas, il prenait un malin plaisir à être déplaisant, toujours au travers d'un chemin que l'on pensait sûr. Arcane ne put s'empêcher de sourire, soulevant ses lèvres meurtries pour révéler une dentition carnassière et des gencives noircies.

L'occultiste posa ensuite son regard effroyable vers le jeune Tim et prit une profonde inspiration, sentant en ce jeune homme une puissance remarquable. Les lourdes créatures ailées se posèrent près de leur maître.

- Quant à vous jeune homme, je n'ai pas l'heur de vous connaître...

Il eut un soupir de dépit avant de reprendre vers Constantine.

- Je ne prétends pas comprendre ce qui a bien pu vous motiver une telle sottise. Je sens toutefois un fond de regrets en vous...

Son regard tomba sur le cercle de protection et il agita son paquet de Lucky Charms en réfléchissant. Contantine était aussi fiable qu'une boussole en carton lorsque venait le temps de lire son jeu et l'occultiste ne pensait pas une seconde pouvoir passer une protection de ce genre aussi facilement, à moins que son opposant ne bluffe...

- ... et des traces de circonspections qui me font comprendre que vous avez peut-être tardivement compris votre erreur ...

L'enfant était hors du cercle... Le plus compétent des deux à l'intérieur, son âme à la main dans une simple bouteille avec une maquette ridicule. Anton laissa s'installer un léger blanc. Il s'autorisa alors à marcher dans la pièce, observant tantôt le cercle, ses interlocuteurs, et la petite bouteille où l'on avait visiblement mis son âme à l'abri. Nouveau soupir. Le cercle était fait de craie, quelle déception, on aurait pu espérer d'un occultiste comme Constantine qu'il use d'un matériel plus adapté mais bon, la craie était au moins neutre, elle offrait une certaine stabilité, même si elle n'entrait en synergie ni positive ni négative avec un rituel.

Revenu devant la porte, il versa une ligne de céréales entre lui et le jeune Tim. Leur odeur était normale pour celui qui n'était pas au fait des fines flagrances alchimiques d'une transmutation camouflée. Puis il jeta négligemment le reste dans un coin de la pièce. D'abord à gauche, puis à droite. Ces deux gestes ne servaient à rien, mais ils ajoutaient à l'étrangeté de son comportement. Le paquet vola ensuite par dessus son épaule.

- Permettez..., déclara-t-il avec son fort accent roumain en débouchant la lessive liquide.

Puis il tint son bidon d'une main, comme une menace senteur lavande pour les néophytes, senteur nécrosée pour les experts.

Maison en bois, sol en bois... Un cercle de protection à première vue mineur mais une ordure retorse à l'intérieur qui l'invitait non pas à le percer, mais à provoquer la désintégration du sol en bois qui l'entourait. Il aurait aimé être violent, dévastateur, montrer sa force, mais Constantine avait berné trop de démons pour être combattu de façon aussi frontale. Si la lessive transmutée touchait les céréales, Anton provoquerait l'érosion de la matière xyline jusqu'à ce ce que grenier tombe en lambeaux à l'étage du dessous. Ses pouvoirs de la Nécrose lui auraient permis de le faire à main nue, mais pas aussi vite que son mélange, pas de façon aussi spectaculaire et surtout pas en lui laissant les mains libres...

- Maintenant, rendez-moi cette âme, monsieur Constantine, ordonna-t-il en perdant son sourire moqueur. Ne m'obligez pas à devenir inconvenant...
John Constantine
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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées Lun 23 Déc 2019 - 20:28



Le docteur Anton Arcane était un spécialiste de l’horreur à une échelle mondiale, pour ne pas dire planaire. Son esprit malade avait été le berceau de nombreuses monstruosités – dont certains spécimens se traînaient dans les recoins de la pièce, attendant passivement un ordre de la part de leur maître. Sa magie toute entière était une incroyable déformation des arts premiers, tout en symboles biscornus, transmutations difformes et rituels sanglants. Affronter sa joyeuse clique demandait généralement des tripes bien attachées et assister à ses rituels d’un bout à l’autre exigeait un sang froid rare. Même les simples effluves de sa magie, qui envahissaient progressivement le grenier, pouvaient s’avérer inconvenantes pour les magiciens délicats.
Constantine nota cependant dans un coin de sa tête que l’un des trucs les plus horribles qu’il ait vu parmi les collections d’Arcane restait probablement le sourire qu’il affichait à l’instant. Le sourire satisfait d’un être qui ne s’estimait pas tant en danger mais plutôt pris dans un jeu intéressant - à la manière d'un chat invité par des souris particulièrement idiotes à déverrouiller un piège dans lequel elles ce seraient coincées. Ce qui, soyons honnête, était précisément le cas.

Le magicien, toujours sans lâcher sa bouteille, tira une cigarette de son paquet et la percha au coin de ses lèvres, jugeant l’avatar de la nécrose du regard. Il ne cilla pas, ne jura pas, ne bougea pas. Il alluma simplement sa clope, l’air remarquablement imperturbable.
« ... Fait chier ». Arcane l’avait déjà tendu en montant les escaliers – il avait prit bien trop de temps pour arriver à l’étage, ce qui signifiait qu’il tramait quelque chose en bas (quelque chose que Constantine ne ressentait pas depuis l’étage et sur lequel il n’avait aucune informations). Puis il était monté, en prenant son temps. Il avait désintégré la porte à mains nues. Et il s’était pointé armé d’un paquet de Lucky Charms.
Oh, John Constantine n’était pas stressé. Il n'était jamais stressé. Pourtant, il avait eu le temps de griller une cigarette avant l’arrivée du nécromant, et il venait tout juste de s’en rallumer une. D’extérieur, il n’avait pas l’air stressé – intérieurement, il n’en menait pas large.

Du point de vue d’un néophyte, le petit jeu entre céréales et lessive du docteur n’avait rien de très impressionnant. Pour Constantine (et probablement pour Tim) la menace était évidente. Si la lessive touchait les céréales, le plan du thaumaturge tombait à l’eau – du moins, son début pitoyable d’embryon de plan. La chute leur casserait probablement quelque chose – et dans la seconde qui suivrait, les créatures d’Arcane leur tomberait dessus. Assez littéralement. Le Britannique prit une bouffée de tabac, et planta son regard dans celui d’Arcane. Il ne semblait pas spécifiquement effrayé, ou même touché par la démonstration (claire) de force de l’occultiste.
Cela faisait quelques temps qu'il avait appris à n'avoir peur que pour lui, dans sa tête, et jamais visiblement.

- Je suis moyennement fan des explications de tours de magie, mais j’imagine que dans ce genre de circonstances cela s’impose.

Constantine leva la main dans laquelle il tenait le minuscule bateau en bouteille, la brandissant dans la lumière grise qui tombait de la lucarne du plafond. Il ne leva pas la main bien haut, à peine plus haut que sa tête.

- Ton âme est là-dedans. Je suppose que t’avais deviné.

Le regard de Constantine se porta vers le bateau, négligemment. Aux limites de son cercle, rodant bruyamment autour de lui, le magicien ressentait la présence des Un-Mens terriblement attentives au moindre de ses faux pas. Il se savait en train de marcher sur un fil tendu au dessus d'un abysse de crocodiles mutants ramenés à la vie par une magie malsaine, et pourtant il avançait quand même. C'était l'histoire de sa vie, après tout.

- Joliment scellée, d’ailleurs – mais j’imagine qu’un verrou de talent n’est qu’un autre jeu pour toi. C’est pas mon œuvre, mais je m’incline, le sort est remarquablement exécuté.

D’un geste de la tête, il indiqua Tim – laissé seul, en dehors du cercle de protection, face à Arcane et ses Un-Mens.

- C’est lui, l’artisan de la cage que je tiens dans la main. Mon œuvre, c’est le cercle au centre duquel je me tiens.

Constantine baissa la bouteille. Nouvelle bouffée de tabac. Il fallait ménager ses pauses, prendre son temps - et surtout, surtout, faire croire qu'on avait la situation bien en main.

- J’avais pas grand-chose pour en faire une barrière solide face à ton art. Donc je l’ai lié à la force vitale de mon compagnon d’infortune.

Le Britannique ne cillait pas. Il ne souriait pas non plus, d’ailleurs. Il semblait juste énoncer des faits, tranquillement, l’air un chouïa négligent. Sur un ton froid et calme. Pas du tout comme si il était à deux doigts de tomber entre les griffes de l’un des plus grands psychopathes du monde magique. Pourtant, une conséquence logique se dessinait dans son discours nonchalant – il voulait en venir quelque part, et il prenait quelques détours pour ménager son effet. Chacun son tour, sous les projecteurs.

- Résultat des courses : il meurt, mon cercle disparaît… et inversement. Mon cercle disparaît, il meurt. Et si il meurt, sa prison magique n’aura plus de bases solides. Et si elle n’a plus de fondations convenables, elle s’effondre. Sur ta propriété – la détruisant au passage, j’imagine.

Si Tim mourrait, les protections de Constantine s’effondraient dans la seconde. Ça, c’était vrai. Le reste, en revanche… Que l’intérieur de la bouteille s’effondre à la mort de Tim n’était pas absurde, quoique incertain. Que l’âme volée soit détruite par l’implosion de la bouteille était sûr. Mais que Tim meurt si le cercle de Constantine venait à disparaître était un pur mensonge, fondé sur du probable.
Le magicien n’avait rien dit à Tim à ce sujet. La simple étude des énergies du cercle ne permettait pas de savoir avec certitude si il disait vrai – et l’étude des symboles demanderait probablement trop de temps et de revérification pour être fiable. Nouvelle bouffée de tabac. Avec un peu de chance, le nouveau Merlin paniquerait assez pour offrir de la crédibilité aux dires du thaumaturge ; avec beaucoup de chance, Tim tiendrait sa langue et ne dirait rien de stupide qui pourrait perturber le plan improvisé du magicien.

- Je doute que tu sois passé à côté du potentiel de notre ami ci-présent. C’est un vrai soleil magique. Pour être parfaitement honnête, j’ignore à quel point le sort en bouteille que j’ai en main, là, est complexe : mais si je devais faire une supposition, je dirais que si il venait à s’écrouler, les répercussions se ferait sentir jusque dans ta réserve d’âme. Simple supposition de ma part.

La réputation de Constantine jouait un jeu dangereusement ambivalent, ici. Le sacrifice de ses proches et le mensonge étaient deux éléments tout à fait caractéristique de son traditionnel modus operandi, a fortiori lorsque acculé contre un mur. Restait à espérer que Arcane pencherait du côté qui permettrait aux deux Britanniques de rester en vie.
Le magicien consuma un peu plus sa cigarette, puis se redressa, clope au bec et main dans la poche. Alors - et alors seulement, un bout de sourire sarcastique se pointa sur son visage. Oh oui. Constantine avait l'air d'avoir prévu son coup à l'avance, avec brio et efficacité. Il semblait sans remord, sans soucis et prêt à un pari fou pour obtenir ce qu'il voulait. En vérité, ça faisait 10 bonnes minutes qu'il improvisait en roue libre - et quelque chose, très loin en lui, était terrifié par ce qui pourrait bien lui tomber dessus à l'issue de cette rencontre.

- Bref. Maintenant que c’est dit, toujours motivé pour désintégrer le plancher ou on peut parler affaires ?
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Re: Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées

Lucky Charms, Cigarettes et âmes damnées
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