Sans le Maître

Le vaisseau disparait peu à peu dans l’obscurité du ciel, un point lumineux qui s’éloigne jusqu’à n’être plus qu’une étoile parmi tant d’autres. Je le regarde, figé, incapable de détourner le regard, incapable d’accepter cette réalité. The Brain… mon maître, mon compagnon, celui pour qui j’ai tout sacrifié, vient de partir. Et moi, je reste là, seul sur cette Terre.

Les jours passent, et je continue d’attendre. Chaque matin, je me réveille avec l’espoir d’un message, d’un signe, d’une simple transmission qui me dirait qu’il va bien. Mais il n’y a rien. Le silence me dévore, et chaque seconde sans lui est une nouvelle blessure. Je me sens… inutile. Perdu.

Je me souviens encore de notre dernier échange avant son départ. Mallah, je dois partir avec Superman. L’alliance est nécessaire pour la survie de tous. Je te confie la base… Tu seras en sécurité ici. Il pensait vraiment que la sécurité était tout ce qui comptait. Mais il ne comprenait pas… il ne comprendra jamais.

Sans lui, la base est vide. Chaque couloir, chaque recoin semble hurler son absence. Les machines continuent de fonctionner, mais elles ne produisent que du bruit, un écho métallique de la solitude. La lumière froide des écrans ne fait qu’aggraver ce sentiment de vide. Tout est tellement… silencieux.

Je m'efforce de remplir mes journées. J'entretiens les systèmes, je m'assure que tout fonctionne. Mais chaque tâche est une torture. C’était lui qui donnait un sens à tout cela. Maintenant, ces gestes sont vides, mécaniques. Je suis un gorille super-intelligent, capable de prouesses techniques inimaginables, mais sans lui… je ne suis rien.

Je retourne parfois à l’endroit où le vaisseau a disparu, juste à l’orée du désert, là où la mer de sable s’ouvre sur l’horizon infini du ciel. Je m’assieds là, immobile, espérant qu’il réapparaîtra. Mais tout ce que je vois, c’est un ciel indifférent, sans réponse.

La nuit, le sommeil est difficile. Je ferme les yeux, et j’entends sa voix, ce ton métallique qui m’a accompagné durant tant d’années. Il m’appelait "mon cher Mallah", et même si je savais que ce n’était que des mots, je sentais qu’il y avait quelque chose de plus. Un lien. Un attachement. Mais aujourd’hui… il n’y a plus que le vide.

Je commence à me demander s’il reviendra un jour. S’il pense à moi, là où il est. Est-il en sécurité ? Superman est-il vraiment digne de confiance ? Je ne peux m’empêcher de douter. Et cette incertitude me ronge.

Les jours se transforment en semaines, et la lassitude s’installe. J’essaie de rester fort, mais l’absence devient de plus en plus insupportable. Je ne suis pas fait pour être seul.

Chaque jour qui passe, la même routine. Je me lève, j'active les systèmes de la base, je vérifie les moniteurs. Tout fonctionne parfaitement, comme si rien n'avait changé, comme si le maître était encore ici. Mais il ne l'est pas.

Je tente de me concentrer, de trouver un sens à ces actions. Peut-être que si je m'immerge dans le travail, la douleur s'atténuera. Alors je m'occupe. D'abord, les systèmes de sécurité. Je les améliore, perfectionne chaque détail, chaque angle mort. Mais tout cela n’est qu’une distraction.

Je décide de m'occuper de quelque chose de plus grand : réparer le simulateur d'entraînement que nous avions construit ensemble. C’était notre projet commun, un dispositif permettant de recréer n'importe quelle situation de combat. The Brain était fier de ce dispositif. Je me dis qu'il apprécierait que je le termine, même s'il n’est plus là pour le voir.

Les câbles, les circuits, tout cela me ramène à lui. Chaque pièce que je soude, chaque composant que je remplace me rappelle ses instructions, ses conseils. Précision, Mallah. La précision est la clé de toute création. Sa voix résonne dans ma tête, presque réelle. Je ferme les yeux un instant, espérant que ce souvenir le ramènera près de moi. Mais quand j’ouvre à nouveau les yeux, il n’y a que le silence. Je suis toujours seul.

Je poursuis néanmoins. Je me perds dans le travail, m'efforçant de ne pas penser à son absence. Mais c’est impossible. Même en construisant, même en travaillant, je ne peux m’empêcher de me demander : que fait-il à cet instant ? Pense-t-il à moi ? Et si… et si jamais il ne revenait ?

Je termine le simulateur. Il est parfait, fonctionnel. Mais quand je l'active, il ne produit qu'un environnement stérile, froid, sans âme. Tout comme la base, tout comme moi. L’idée d’utiliser cet appareil sans lui me semble insupportable. Alors je l’éteins.

Assis devant le simulateur, je regarde le vide. Ma seule compagnie est le bruit distant des machines et le murmure du vent qui s'infiltre dans la base. J'aurais tant aimé qu'il me laisse quelque chose, un message, un dernier mot. Mais il n'y a rien.

Je pourrais continuer à travailler sur d'autres projets, il y en a tant. Mais à quoi bon ? Tout ce que je fais est pour lui. Sans The Brain, tout cela est dépourvu de sens.

Les jours passent, et l’attente devient insupportable. The Brain est toujours dans l’espace, sans signe de retour. Pourtant, je sens qu’il reviendra. Il le doit. Mais je ne peux pas rester inactif, plus maintenant. Si je veux que le maître soit fier de moi à son retour, il faut que je prenne des initiatives.

Je me dirige vers la salle principale de la base, là où se trouve le super-ordinateur de la Brotherhood of Evil, un véritable bijou technologique que nous avons conçu ensemble. Ce n’est pas un simple outil : il peut analyser les profils de tous les métahumains et criminels répertoriés dans le monde. Avec lui, je pourrais recruter des membres pour renforcer la Brotherhood. Du sang neuf.

Je prends place devant le terminal, mes doigts puissants pianotant rapidement sur le clavier. L’écran s’illumine de milliers de données, chaque profil défilant à une vitesse folle. Des noms connus, des visages moins familiers. Mais je cherche autre chose, quelqu’un qui pourrait être utile à notre cause. Et c’est là que son nom apparaît : Tarpit.

Un criminel de Central City, ennemi récurrent de The Flash. Un homme transformé en une créature de goudron, capable d’emprisonner ses ennemis, résistant à presque tout. Ce pouvoir pourrait être un atout considérable pour la Brotherhood, surtout avec Flash hors de l’équation pour l’instant.

Je prépare ma rencontre avec lui. Les informations que j’ai récupérées indiquent qu’il se cache à Keystone City, dans un ancien dépôt abandonné. Un endroit parfait pour une créature telle que lui.


Quelques jours plus tard, je suis là, dans ce dépôt délabré. L'air est lourd de poussière et de l'odeur âcre de goudron brûlé. Je m'avance, mes pas lourds résonnant sur le béton craquelé. Tarpit n'est pas difficile à trouver. Au centre de la pièce, une masse informe de goudron noirâtre se soulève et se tord lentement. Il sait que je suis là.

« Qui es-tu ? » gronde une voix grave, émanant de la masse visqueuse.

Je m’arrête à quelques mètres de lui, le dominant de ma taille imposante. « Je suis Mallah. Je suis The Brain, le maître de la Brotherhood of Evil. Je viens te faire une proposition. »

Tarpit se redresse légèrement, son visage difforme apparaissant dans les replis de goudron. « Une proposition ? Pourquoi j’écouterais un gorille ? »

Je me retiens de répondre à cette insulte. Ce n'est pas le moment de s'énerver. « Parce que ce que je te propose, c’est une place au sein de la Brotherhood. Nous cherchons à recruter des membres puissants, capables de faire tomber des héros. Et toi, Tarpit, tu as ce qu’il faut. Ensemble, nous pourrions nous assurer que Central City, Keystone, et au-delà, tombent à nos pieds. »

Il reste silencieux un instant, ses yeux brillant d'un éclat sombre. « Tu crois que j’ai envie de m’allier à un groupe ? J’ai passé ma vie à me débrouiller seul, à me battre contre des héros comme Flash… Et ça n’a jamais marché. Pourquoi est-ce que ce serait différent avec vous ? »

« Parce que seul, tu es limité. Avec la Brotherhood, tu as des alliés. Des ressources. Un plan. Nous ne sommes pas comme ces autres groupes criminels. Nous frappons là où ça fait mal. Ensemble, nous sommes invincibles. »

Je peux voir qu’il réfléchit, pesant le pour et le contre. Ce n’est pas la première fois qu’il entend ce genre de discours, j’en suis certain. Mais il doit savoir que la Brotherhood est différente. Et que, sous ma direction, avec le futur retour de The Brain, nous serons plus puissants que jamais.

« J’ai vu ce que tu as fait à Central City. Tu as un potentiel énorme. Imagine ce que tu pourrais accomplir avec des alliés comme moi. »

Il reste immobile quelques secondes, puis finalement, un sourire tordu apparaît sur ce qui lui sert de visage. « D’accord, Mallah. Je marche. Mais je veux des résultats, pas des promesses vides. »

Je m'approche de lui, tendant la main. « Bienvenue dans la Brotherhood of Evil, Tarpit. Ensemble, nous allons changer la donne. »

Sa main visqueuse se pose dans la mienne, et malgré la sensation de goudron qui colle à ma peau, je sais que j'ai fait le bon choix. Tarpit sera un atout puissant. Et lorsque The Brain reviendra, il verra que je n’ai pas laissé la Brotherhood sombrer dans l’oubli.