L'honneur est comme l'oeil: on ne joue pas avec lui [Lord Slade]

Le prince des Wayne n’avait guère apprécié l’idée d’être envoyé loin de son clan, de sa famille et, il fallait l’avouer, de sa mission dans le but de servir d’écuyer à un autre seigneur choisit par son père. Quand ce dernier avait annoncé à Damian qu’il devait passer par cette étape dans le but de « parfaire » sa compréhension de la chevalerie, le jeune garçon avait objecté qu’il doutait que cela soit nécessaire, mais avait néanmoins accepté de se soumettre à la volonté de son père… avec une certaine réticence néanmoins. Le voyage pour rejoindre le parrain qui lui avait été choisit, un seigneur mineur anglo-saxon dont le fief se situait dans la moitié nord de la Northumbrie mais qui restait loyal au roi Constantin d’Angleterre, se fit majoritairement sans histoire, bien que le jeune garçon passât l’essentiel de celui-ci de méchante humeur. Il se jura cependant qu’il obtiendrait le titre de chevalier en un temps record pour apporter prestige au nom qui était le sien… et clouer le bec à quiconque qui pensait qu’il n’était pas un successeur souhaitable à son père.
 
Le moins que l’on pouvait dire, c’est que pendant les quelques semaines qu’il avait passé aux côtés de son parrain, Damian n’avait guère rendus la tâche facile à celui-ci. Le fichu caractère du jeune Wayne rendait toutes interaction entre l’écuyer et son seigneur ardue. Bien que Damian acceptât de jouer le jeu dans une certaine mesure, accomplissant les devoirs liés à sa fonction, mais il se révélait être une vraie tête de pioche bornée lorsque son mentor tentait de lui apprendre quoi que ce soit. Damian ne comprenait pas l’intérêt de toutes ces règles qui ne faisait qu’entraver sa liberté d’action. Pourtant, le jeune homme essayait réellement de comprendre, mais le raisonnement derrière lui restait souvent complètement étranger. Les relations entre l’écuyer et son seigneur s’améliorèrent cependant rapidement à la suite de l’émergence d’un nouveau problème, les déprédations menées par le roi illégitime de la Northumbrie, Slade Wilson.
 
Ce dernier avait conduit son armée de mercenaire vers le nord dans l’objectif de mener une campagne de pillage. Le respect que le mentor de Damian n’était pas parvenu à obtenir par son rang ou son comportement, il le gagna en s’opposant à l’avancée des troupes de l’usurpateur. N’attendant pas que l’ennemi ne frappe à sa porte après avoir ravagé son fief, il se porta à la rencontre des troupes pour ralentir celle-ci et laisser le temps à ses sujets de se replier. Avec une troupe réduite, il refusait l’affrontement direct mais n’en gênait pas moins l’avancée des mercenaires pendant plusieurs jours permettant à son Fyrd* de s’assembler et à ses gens de chercher la sécurité. Et Damian pouvait respecter aussi bien ce talent tactique que ce désir de protéger son peuple, dès lors il s’engagea pleinement aux côtés de son mentor pour l’aider dans sa tâche... bien qu’il estimait parfois que son parrain n’allait pas assez loin dans ses méthodes.
 
Mais ces actions d’arrière-garde ne firent gagner que quelques jours. Vint ensuite le temps du siège. Le mentor de Damian possédait une butte fortifiée, si le bâtiment principal était en grande partie en pierre, le mur d’enceinte n’était constitué que d’une palissade en bois précédé d’un fossé. Une bien piètre forteresse face à l’armée qui lui faisait face. Les troupes de Slade était majoritairement constitué de mercenaire, pour la plupart des scandinaves bien qu’on puisse y trouver également des celtes venus d’Irlande, d’Écosse ou des royaumes Gallois, et une poignée de chevaliers Normand. Plus nombreux, plus expérimenté, plus équipé et bien plus féroces que les soldats et miliciens constituant la garnison du château, il ne fallut que trois jours pour que la première ligne de défense ne s’effondre. La motte elle-même tint une semaine de plus, en grande partie dût à la bravoure de ses défenseurs qui repoussèrent attaque après attaque avec l’énergie du désespoir.
 
La butte ne pouvait protéger la totalité de la population, Damian put donc voir le massacre qui s’ensuivit en contrebas lorsque leurs ennemis pénètrent l’enceinte. Bien qu’il fît de son mieux pour permettre au maximum de gens de venir se réfugier dans la butte fortifiée cela était loin de suffire. Son seigneur fit ensuite usage d’un passage secret qui conduisait derrière les lignes ennemis pour permettre au maximum de gens d’échapper à l’ennemi. C’est pour cela que la résistance se fit si opiniâtre, pour permettre au plus grand nombre d’éviter le destin que les soudards du roi Slade leur réservait. Même lorsqu’une brèche béante fut créée, ce fut un mur de bouclier résolut qui repoussa l’ennemi, mais cela signifiait aussi que le prochain jour serait le dernier. C’est alors qu’il demanda à Damian d’utiliser à son tour le souterrain pour s’échapper, refusant de laisser l’écuyer qui lui avait été confié partager son destin. Il resterait ici avec ce qui lui restait d’homme valide pour accomplir son baroud d’honneur et défié Slade en duel. Damian argua qu’en faisant cela, il signait son arrêt de mort et qu’il ferait plus de dégât à son ennemi avec attaque nocturne. Mais son parrain avait choisi la manière dont il voulait finir et s’y tint. Damian quitta donc le château à son tour, la mort dans l’âme… et déterminé à venger son mentor. Pas seulement par respect pour celui-ci, Damian le considérait comme un idiot, mais un idiot digne de son respect, mais aussi parce que cet homme avait de tout temps été un ami et allié fidèle de son père, et qu’il était hors de question qu’il reparaisse devant son père en lui annonçant avoir simplement abandonné son parrain sans chercher à le venger.
 
De loin, il observa l’armée de sa cible piller et brûler ce qui restait du château. Qu’importait si leur chef avait envisagé de l’investir, après tout le mal qu’ils avaient eut à le prendre, les troupes de Slade voulaient évacuer la frustration accumulée dans le pillage et la destruction… et probablement dans la cave à vin de feu le maitre des lieux. Damian n’avait pu assister au dernier acte, mais il préparait la revanche. Pendant les combats, il avait pu voir Wilson à l’œuvre, comment il se battait, comment il était capable de briser le plus solide mur de bouclier lui faisant face… et comment il récupérait inhumainement vite de ses blessures. Il ne pourrait pas seulement tenter de l’abattre de loin, son ennemi récupérait sûrement. Il allait devoir s’arranger pour le harceler, le pousser à faire une erreur qui l’isolerait suffisamment longtemps du gros de ses troupes pour qu’il puisse le tuer à coup sûr.  Et plus que tout, Damian tenait aussi à l’humilier.
 
Il attendit que l’armée de Slade quitte les lieux pour se rendre sur place et récupérer ce qu’il pouvait comme munitions et équipements. Ensuite, il partit à la poursuite de l’ost de son ennemi. Monté sur un cheval qu’il avait trouvé dans une ferme avoisinante, il n’eut aucun mal à rattraper l’ennemi et même à le précéder. Une armée en marche avance toujours à la vitesse du plus lent de ses membres, le voyage de retour du roi-mercenaire serait d’autant plus lents qu’il devait transporter son butin mais également que ses troupes avaient subit les blessures et la fatigues de ces derniers jours.
 
Pendant plusieurs jours, Damian harcela sans répit l’armée de sa proie. Non seulement Damian avait été formé par la Confrérie des Ombres mais les Wayne eux-mêmes étaient familier de la guérilla, des raids et des longues traques, il était donc parfaitement à l’aise dans sa capacité à monter des embuscades et à disparaitre tout aussi rapidement. Ses premières attaques furent dirigées contre les éclaireurs de l’armée, ceux qui s’assuraient que le chemin était sûr pour le reste de l’armée. Ils constituaient des cibles isolées, faciles, tout en aveuglant son adversaire qui ne saurait jamais ce qui l’attendait. Certes Damian ne pouvait être partout à la fois et ôter la vie à tout les hommes envoyés en reconnaissance, mais le simple fait d’inspirer la peu à l’ennemi était suffisant. Parfois, on retrouvait simplement leur cadavre sur le bord de la route, parfois, ce cadavre était mit en scène, toujours de manière visible et toujours avec un message de menace gravé à même la peau… souvent avec un œil manquant, toujours celui restait à Slade.
 
Très vite, Damian passa à la vitesse supérieure. Utilisant ses connaissances dans l’art de donner la mort, il empoisonna plus d’une fois les points d’eau sur la route de l’armée. Pour certains, il y jetait juste un cadavre pour la rendre impropre à la consommation, pour d'autres il versait parfois du poison très concentré pour que ceux qui la boivent soient affectés par les effets de celui-ci. Quand le terrain s’y prêtait, Damian menait parfois des embuscades directement contre l’ennemi, choisissant ses cibles avec soins et décochant une série de flèches. Toujours, celle-ci atteignaient leurs cibles à des endroits que leur armure ne couvrait pas. Damian se repliait ensuite alors que l’ennemi envoyait des hommes à sa poursuite, quand ceux-ci revenaient bredouilles, ils étaient toujours moins nombreux que ceux qui étaient partis. Damian en profitait toujours pour en abattre pendant la course-poursuite ou en assassiné. Toujours Damian échappait à ses poursuivants. Ses cibles n’étaient pas choisies au hasard, il visait régulièrement le porteur de l’étendard, parfois aussi un lieutenant du roi. Il tirait toujours des flèches d’empennage différents, pour donner l’illusion qu’ils étaient plusieurs à tendre ces embuscades. En au moins une occasion, il tendit un piège où il avait enterré sous des feuilles un grand nombres de chausses trappes sur la route qu’il avait au préalable empoisonné. Jamais Damian ne se révélait ouvertement, juste comme une ombre furtive, laissant le doute sur sa nature, sur s'il était seul ou plusieurs. Les rares guerriers de Slade qui purent le voir clairement, c'était qu'il était déjà trop tard pour eux.
 
Enfin, la nuit n’était nullement l’occasion d’un répit. Profitant de son talent et de son entrainement pour la furtivité, Damian infiltra plus d’une fois le camp de Slade. Il y menait des actions de sabotage, par exemple, affaiblissant les essieux des chariots transportant le butin, commençant des incendies ou simplement assassinant des gens au hasard, et le faisait même parfois en utilisant des armes volées à d’autres soldats. À aucun moment, il ne laissait de répit à l’ennemi, à aucun moment il ne semblait s’en accorder. Mais il continuait, attendant le moment propice où il estimerait que sa proie serait à sa portée.


*Fyrd = nom donné à la milice rassemblant les hommes libre pour la guerre dans la société anglo-saxonne.

La traque de Damian avait duré plusieurs jours, jamais il n’avait laissé de répit à l’armée de l’usurpateur. Les morts qu’il avait causés se montaient à plusieurs dizaines de victimes. Pas de quoi affaiblir durablement les effectifs de l’armée du roi illégitime de Northumbrie, mais néanmoins assez pour commencer à inspirer le doute dans le cœur de ces hommes pourtant endurcit par les horreurs de la guerre. Le fils du Mormaer* des Orcades était déterminé à continuer son œuvre. Mais il commençait à manquer de temps. Bientôt, le tyran aurait regagné son repaire qu’était la puissante cité de York. Si Damian pouvait encore s’essayer à l’y pourchasser, il en avait le talent nécessaire, ses chances de succès diminueraient drastiquement.
 
Alors qu’il observait attentivement les troupes du seigneur Slade Wilson s’affairer à monter leur campement, Damian ne put s’empêcher de porter la main au bracelet qu’il avait à son bras droit, un bracelet de métal orné de motif que lui avait remit son père quelques mois avant son départ. Un bracelet portant les symboles de son appartenance au clan Wayne et destiné à lui rappeler d’où il vient quant il serait au loin. Quelque chose dans l’air le rendait nerveux, et ce sentiment n’avait fait que s’accentuer au fur et à mesure qu’il poursuivait sa proie plus profondément sur les terres de cette dernière. Où que se porte son regard, il y avait quelque chose de lugubre en ces lieux, comme si un sombre pouvoir était à l’œuvre. Damian avait déjà été confronté par le passé à places dominé par un pouvoir maléfique, mais ici c’était plus subtile… les récoltes n’étaient pas mourante, les bois étaient certes sombres mais pas oppressant, la teinte de l’eau ne semblait pas souillée… mais où que ce porte le regard du jeune Wayne, il semblait qu’il y avait quelque chose qui clochait sur ces terres comme si le monde y était plus terne, plus froid.
 
Mais malgré le malaise qui le prenait aux tripes en ces lieux, le jeune Damian n’avait pas le temps de s’attarder plus sur cette sensation. Flattant l’encolure de sa monture, Damian la guida jusqu’à un point d’eau où elle pourrait se reposer avant d’en descendre. Elle avait bien mérité ce moment après tous les efforts qu’il lui avait demandé pour sa quête de vengeance. Lui-même commençait à ressentir les effets des privations, si les premiers jours avaient été aisé, cela faisait bien longtemps qu’il ne se reposait qu’à peine quelques heures par jours et qu’il ne mangeait pas à sa faim, il n’avait pas le temps pour ce genre de chose, il n’avait pas le loisir de baisser sa garde dans sa situation. Mais qu’importait, l’énergie que lui procurait son désir de vengeance lui servait de combustible et lui permettait de continuer à avancer.
 
Laissant sa monture derrière lui, Damian avança furtivement, se rapprochant du campement pour mieux l’observer, pour mieux déceler les failles des défenses de son ennemi. Cela différait des fois précédentes, trop de préparations étaient effectuer, des fortifications de fortunes étaient érigés… ils ne s’arrêtaient pas uniquement pour la nuit. Le jeune écuyer s’interrogeait. Pour toute l’hostilité qu’il éprouvait envers son ennemi, il ne mettait pas la stupidité au rang de ses défauts. Il savait que son armée était harcelé par un ennemi insaisissable, et pourtant au lieu de rejoindre la sécurité de sa forteresse, il faisait halte, lui offrant d’autant plus d’opportunités de le saigner. Sous le couvert de ses cachettes, Damian observait. Emmitouflé dans sa cape brun sombre, Damian faisait corps avec son environnement, veillant néanmoins à toujours se cacher à l’ombre pour parfaire son camouflage. Il observait la disposition des défenses érigé par les mercenaires, il les regardait les équipes envoyer fourrager dans la région pour ramener des provisions. Un sourire apparut sur le visage de Damian, même si ces bandes étaient plus nombreuses qu’à l’accoutumé, elles restaient à sa portée, avant la levée de la lune, l’armée de l’usurpateur serait encore délestée d’une demi-douzaine d’hommes. Sans perdre un instant, Damian se mit en action pour poursuivre sa sinistre besogne.
 
 
Lorsque le soir tomba, Damian s’infiltra dans le campement comme il l’avait fait chaque nuit auparavant. Comme à chaque fois, il en avait profité pour égorger une sentinelle, rapidement, sans un bruit. Il évoluait par après au sein du campement en évitant les sources de lumières, en restant aux aguets de toute occasions de portés un nouveau coup à son ennemi. Il pouvait entendre les discussions des guerriers. Si durant les premières nuits de sa traque, celles-ci tournaient principalement autour d’histoire de bataille, de vantardise, de discussions sur le butin, chaque nuit ces discussions se faisaient moins joyeuses. À présent, beaucoup étaient silencieux, certains parlaient des attaques… ils avaient peurs d’être les prochains. Damian était devenu tour à tour un gêneur, un salopard, un fou, une bande, une armée… et maintenant certains pensaient même qu’il était un être surnaturel, un esprit vengeur envoyé pour les faires répondre de l’un ou l’autre crime. Damian appréciait la sensation que lui procurait la peur de ses ennemis, mais ils n’étaient riens, juste des nuisances sur sa route, son objectif était leur chef.
 
Comme à chacune de ses visites du campement, Damian passa à proximité de la tente du roi. Chaque nuit, il avait passé du temps à observer la possibilité d’y assassiner son occupant, d’y espionner ce qu’il disait à ses lieutenants. Mais à chaque fois, il avait estimé que les huscarls de Wilson gardait trop étroitement leur maitre pour qu’il puisse s’y risquer. Mais cette nuit, sous la lune déclinante, il n’y avait nulle trace de la garde rapprochée du roi-illégitime semblait mystérieusement absente. Tout d’abord, le jeune prince pensa qu’elle devait accompagner son maitre ailleurs dans le camp, mais ce dernier était bien présent dans sa tente. Bien évidemment, Damian flaira un piège, c’était trop facile, trop évident… presque grossier. Mais d’autre part, Damian commençait à manquer de temps et d’énergie. La cité de York n’était qu’à quelques jours de marches et c’était-là la première véritable occasion que Damian avait depuis le début de sa quête de vengeance. Son instinct lui commandait d’éviter d’entrer, sa raison le recommandait d’attendre une autre occasion… mais il savait qu’il n’en aurait probablement pas d’autres. Il savait que s’il renonçait maintenant, il pouvait d’emblée abandonner la quête qu’il s’était confier et rentrer piteusement aux Orcades, à se réfugier sous la garde de son père. Ce ne serait certainement pas ainsi qu’il prouverait sa valeur.
 
Sa main se referma solidement sur le manche de son épée alors qu’il la dégainait. La lame n’émit pas un bruit, pas même un tintement alors qu’elle sortait de son fourreau. Lentement, précautionneusement, Damian avança, attentif à ne pas attirer l’attention, veillant à ne pas même laisser de trace derrière lui. Il pénétra dans la tente par l’entrée principale, si aimablement laissée ouverte. Son ennemi était là, devant lui, à sa merci. Damian retint la pulsion lui commandant d’attaquer sur l’instant, détaillant rapidement son adversaire, déterminant où il frapperait. Cet infime instant sembla suffire à sa proie pour qu’elle remarque sa présence. Aux paroles de son ennemi, Damian se tendit. Il avait beau savoir que son adversaire l’attendait, il n’avait pas anticipé qu’il serait capable de percevoir sa présence. Son grand-père l’aurait vertement corrigé pour avoir fait une erreur d’appréciation pareil.
 
-        Très aimable de votre part, Slade ap Neb**, n’en attendez pas autant de ma part.
 
Damian avança, lame aux claires. Il baissa sa capuche pour que son ennemi puisse enfin mettre un visage sur celui que le traquait depuis tout ce temps. Le prince du clan Wayne dévisagea son adverse avec ses yeux habités par cette lueur verte irréelle qui lui était caractéristiques. Il était encore jeune, son ennemi le dominait physiquement. Ci-et-là, des restes des tatouages tribaux typiques des guerriers pictes étaient encore visible, la majorité était caché sous la crasse ou avait été effacé. Bien qu’il ne leur accordât guère de vertus magique, Damian avait adopté cette pratique pour s’imprégné des coutumes des peuples vivant sous le règne de son père, celle-ci et de nombreuses autres. Damian était prêt au combat final, même s’il aurait préféré éviter un duel qui pourrait attirer la totalité des guerriers dans les environs compromettant ses chances de réussites. Il se demandait si Slade se souvenait l’avoir vu durant le siège, mais au fond que lui importait la réponse.
 
Bien que cela était contre-intuitif pour lui, Damian accorda néanmoins quelques instants à son ennemi pour prendre une arme. Sans un mot, sans tenter de cacher ses intentions meurtrières, Damian engagea le combat. Vif, précis, il attaqua Slade sans hésitations, sans trembler. Aucun des coups portés par le jeune homme n’était confié au hasard, toujours il cherchait à exploiter les failles de la défense de son ennemi, de les provoquer, toujours il visait avec précision un endroit qui aurait été mortel si le coup avait porté. Slade ne devait sa survie qu’à sa propre exceptionnel maitrise du combat… et seuls les meilleurs de ses hommes auraient survécut longtemps en duel contre Damian. Pour sa part, l’héritier du Seigneur des Orcades ne perdait pas de temps à essayer de contrer les attaques de son ennemi, sachant que dans une confrontation physique il serait désavantagé. Toujours, il refusait d’opposer une résistance à la lame de son ennemi, à chaque fois il se dérobait à elle avec agilité ou alors la déviait. Le jeune homme faisait étalage de toute sa connaissance dans le maniement de l’épée dans ce combat, jouant notamment sur l’handicape de son adversaire en attaquant par son angle mort, ou alors en changeant la main maniant son arme pour casser le rythme du combat.
 
Mais malgré tout, Damian restait jeune, impulsif et son ennemi terriblement expérimenté. Et Damian commit une erreur, une erreur de jugement qui lui valut de recevoir un coup qui le jeta au sol. Mais Damian était aussi vif, autant par son corps que son esprit. Il ne perdit guère de temps à attendre, il ne tenta pas de se mettre à l’abris ou à se relever. Gardant fermement son épée en main, il utilisa sa main libre pour dégainer l’un de ses couteaux qu’il jeta directement dans la jambe de son adversaire pour l’arrêter et si possible le blesser. Puis prestement, se releva d’un bond avant de repartir au combat. Toujours à la recherche d’un moyen de prendre l’avantage sur l’ennemi, il mena un nouvel échange de coup bref avant de détacher sa cape et de la jeter au visage de son adversaire pour lui ôter son champ de vision. La cape était lourde, épaisse, parfaite pour protéger son porteur de la rigueur du climat ou de certains coups… difficile à s’en dépêtrer aussi. Damian n’hésita pas un instant pour passer dans le dos de son adversaire et frapper.
 
-        Vous êtes redoutable vieil homme, je dois l’admettre. Mon parrain n’avait effectivement aucune chance contre vous.



* Mormaer: titre écossais désignant un seigneur régional souverain
** Ap : signifie "fils de" en gaélique, est utilisé pour parler de son lignage. "Ap Neb" veut dire "fils de rien" (plus exactement, fils du néant), par ces mots, on nie tout lignage à son interlocuteur.

Damian devait bien l’admettre, son adversaire était bien plus redoutable qu’il ne l’avait initialement anticipé. Qu’importait les techniques utilisé par le jeune homme, qu’importait le talent qu’il déployait… son ennemi était toujours parvenu à le contrer… et Damian avait la désagréable sensation qu’il ne donnait même pas tout ce qu’il avait. Bien que Damian soit parvenu, l’espace d’un instant, à porter un coup, même à prendre l’avantage, celui-ci ne dura pas. L’instant d’après, il sentit la terrifiante poigne de son adversaire se serrer autour de sa gorge, lui coupant soudainement la respiration et le soulevant jusqu’à ce que ses pieds ne puissent plus toucher le sol.
 
Le jeune guerrier était surpris de la force qu’exerçait son ennemi. Il avait pu constater celle-ci durant le siège, ayant régulièrement vu les exploits de son adversaire au combat, mais la sentir directement était autre chose. Une telle puissance n’était pas quelque chose que son ennemi devrait avoir, cela Damian en était sûr. Il connaissait parfaitement les limites du corps humain, il les avait étudiés, il les avait testées, il avait affronté de nombreux adversaire et arrivait assez précisément à estimer leurs capacités rien qu’en les regardant, y compris des individus qui ridiculisait le roi-mercenaire en termes de carrure. Et jamais auparavant quelqu’un avait à ce point excédé les estimations de prince de la Confrérie des Ombres, que ce soit en termes de force, de rapidité ou d’endurance.
 
Alors qu’il tentait vainement de se débattre pour échapper à l’emprise de son ennemi, celui-ci prit la parole. Même si certains compliments transparaissaient de son discours, celui-ci eut pour effet que davantage enrager l’enfant des Orcades au point que son regard sembla s’enflammer de l’intérieur. L’évocation de son parrain, le seigneur Cyril, de sa mort et de comment son ennemi allait s’emparer de tout ce qu’il possédait ne fit qu’attiser davantage les désirs de meurtre du jeune écuyer. À aucun moment, il n’avait lâché son épée, et à ce moment il trouva la force pour à nouveau la manier et tenter de frapper son adversaire… mais il n’en eut pas le temps. Avant même de finir de se mettre en position d’attaque, son ennemi ponctua son discours en le jetant à l’écart, l’envoyant finir sa course contre les pans de la tente qui s’effondra sur elle-même.
 
Damian devait réfléchir. Ce Wilson était bien plus fort qu’il ne l’avait escompté. Il avait perdu l’effet de surprise et si ses sens ne le trompaient pas, le reste du camp était alerté et un contingent de guerriers était déjà occupé à se rendre sur les lieux du combat. Il lui faudrait un miracle pour s’en sortir… mais il ne comptait nullement baisser les bras, qu’importait s’il devait y laisser la vie. Le principal fardeau qu’il portait à ce moment, c’est de savoir qu’avec sa mort, il mettait en danger nombre de projet de son grand-père… mais au moins espérait-il que son père n’aurait pas à avoir honte de lui.
 
Même sans les voir, Damian percevait la présence des autres guerriers. Il entendait leurs pas, les cliquetis du métal, le battement de leurs cœurs, leur souffle. Il sentait leur odeur, il ressentait dans les vibrations du sol leurs déplacement. Il était parfaitement capable de deviner leurs positions à chacun. Il fouillait dans les sacoches de sa ceinture pour trouver quelque chose d’utile et mit finalement la main sur certaines fourberies qu’il n’avait plus utilisé depuis qu’il avait été présenté à son père… mais qui pourrait peut-être encore se montrer efficaces le cas échéant.
 
Lorsque Damian se dégagea enfin de la tente, il n’attaqua pas immédiatement sa cible à vue. La situation avait bien évolué. Plusieurs guerriers attendaient aux côtés de son ennemi, d’autres entouraient sa position… mais aucun n’attaquait, obéissant à l’ordre de leur maitre. Néanmoins, l’apparition de Damian ne fut pas sans susciter certains commentaires dans les rangs… particulièrement parmi certains mercenaires écossais qui avaient reconnu certains des attributs que portait le jeune homme et qui semblait le désigner comme un membre du clan Wayne… et parmi les clans écossais de nombreuses légendes circulait sur le clan Wayne et la plupart s’accordait sur un point… mieux valait ne pas les avoirs pour ennemis.
 
Damian avait toujours l’épée dégainer dans sa main droite, prêt à occire le premier ennemi qui s’approcherait. Des couteaux dépassaient de son autre main, les lames de jet parfaitement équilibrée, plus qu’il n’en fallait pour ôter la vie d’un homme même en armure si envoyé correctement… et le jeune homme était très doué dans ce domaine. Mais surtout, Damian avait dissimulé une dernière surprise à son ennemi dans le bracelet de son bras gauche. Le visage du jeune homme n’affichait nulle peur, pas plus que la rage qui l’habitait juste quelques secondes auparavant, mais de la concentration. Sa position n’était pas loin d’être désespérée mais il refusait d’abandonné, et il se tenait prêt à l’assaut à venir. Il n’en restait pas moins provocateur.
 
-        Est-ce là tout ce que tu as à me proposer Slade ap Neb ? Je te traque, j’harcèle tes troupes, je ridiculise tes meilleurs hommes… je fais tout pour transformer ton voyage en enfer. Et maintenant que tu as enfin l’occasion de te débarrasser de moi, tu vas juste aller te réfugier auprès de tes guerriers ?
 
Damian s’était exprimé en Norvégien. Il avait appris la langue auprès des nordiques sujet de son père et n’avait pas tardé à parfaitement la maitriser. Il s’était exprimé dans cette langue qui était celle de nombre des guerriers de l’ost du roi-mercenaire, et probablement celle du roi lui-même. Il tenait à provoquer directement ses ennemis, a remettre autant en question le courage de leur chef que leurs compétences. Le respect des hommes était une chose importante pour les chefs de guerre, le perdre revenait à se mettre dans une situation difficile. Soit Slade répondait au défi pour prouver qu’il ne le craignait pas… et ainsi tombait dans le piège de Damian. Soit certains de ses hommes désireraient se venger pour mourir sous sa lame, pouvant ainsi offrir une ouverture au jeune Wayne pour s’échapper. Il resserra sa poigne sur ses armes. Même si son ennemi venait de lui mettre une solide raclée, Damian refusait de s’avouer ainsi vaincu.

Les paroles prononcées par le roi-mercenaire ne firent qu’attiser l’ire de Damian. Il raffermit sa prise sur la poignée de son épée en anticipant ce qui allait se passer. Son ennemi se réfugia derrière l’excuse qu’il ne l’estimait pas digne de lui et lâcha ses sbires à son encontre. L’héritier du clan Wayne pesta et se prépare à se défendre alors que les guerriers du roi-illégitime de Northumbrie. Les premiers à se jeter dans la bataille furent plusieurs des gardes du corps lourdement protégé du souverain, brandissant leurs haches et leurs épées. Damian projeta les trois coutelas de jets qu’il avait préparé d’un seul geste sec de sa main gauche. Deux guerriers s’écroulèrent sur le sol pendant que le troisième fut épargné de ce sort par sa cotte de maille… juste pour être cueillit d’un coup d’épée rapide du jeune écuyer.
 
Mais ce premier échange ne changeait rien à la donne. Le camp entier était sur le pied de guerre, toujours plus de combattants s’emparaient de leurs armes et convergeait sur sa position. La maitrise de l’épée de Damian lui permit d’aisément venir à bout de plusieurs adversaires trop impétueux, mais où que son regard portait, il voyait ses opportunités se réduire, aussi bien pour ce qui était de prendre la fuite que de tenter un dernier assaut contre sa proie. Alors qu’il embrochait un autre adversaire vêtu d’une simple tenue de cuir, qu’il identifia comme un Northumbrien à son parlé, la main gauche de Damian libéra les quelque petits sachets qu’il avait dissimulé dans son bracelet. Il s’agissait d’un vieux tour de la Confrérie des Ombres, contenant de manière concentrée du sable et du verres pilés, jeté à la figure d’un adversaire elle pouvait l’aveugler et même blesser durablement ses yeux à l’impact… une fourberie qu’il avait initialement réservé pour le chef de cette horde. Dans la formule initiale, une décoction de poison y était ajoutée pour que celui-ci s’infiltre dans les plaies causées aux globe oculaires de la victime, mais cela faisait trop longtemps que Damian possédait ces sachets sans renouveler la décoction… aussi avait-elle perdu son effet. Mais lorsqu’un nouveau groupe d’ennemi se jeta sur lui, Damian n’hésita pas un instant à leurs jeter au visage ces sachets. Très vites, leur vision se brouilla et la douleur s’empara d’eux, s’écroulant sur le sol en se tenant les yeux. Ils auraient été des proies faciles, mais le membre du clan Wayne avait des menaces plus pressantes qui s’accumulaient de toutes part.
 
Le style de combat de Damian différait grandement de ceux de ses ennemis, il ne misait pas sur sa force brute, il frappait rapidement et avec précision. Il se déplaçait constamment pour éviter d’être prit en tenaille, mais cela n’était pas toujours possible. Même s’il s’était lancé dans une danse de mort où il passait avec grâce et vivacité d’un adversaire à l’autre, il ne pouvait compenser son infériorité numérique écrasante… tout juste parvint-il à sécurisé ses arrières en arrachant des mains d’un ennemi sa torche et la jetant sur les débris de la tente pour la faire s’enflammer… mais cela ne durait qu’un temps. Il se battait toujours l’épée à la main, il dégaina également son Sgian Dubh*, une lame entièrement noire posséder par de nombreux guerriers écossais des hautes-terre, une marque d’honneur et surtout la source de nombreuses rumeurs chez leurs ennemis. On disait que ces lames étaient magiques, qu’elles buvaient les âmes de ceux qui avaient la malchance de périr par leur fil, que les blessures qu’elles infligeaient ne guérissaient jamais complètement. Qu’importait ce qui était vrais ou non dans ces récits, Damian l’utilisait à présent comme arme secondaire, la plantant dans le cou d’un chevalier Normand dès l’instant où elle sortit de son fourreau.
 
La transe meurtrière de Damian dura presque une dizaine de minutes, mais même s’il était rapide, agile, meurtrier, il encaissait pas moins les coups. Il avait beau être un combattant d’exception, même lui ne pouvait venir à bout d’une armée entière. Alors qu’il commençait à montrer des signes de fatigues évident, il avait déjà ôté la vie à plus d’une dizaine d’adversaires… et incapacité largement le double. Il n’avait plus le temps d’anticipé les attaques de ses opposants, ne pouvant qu’agir à l’instinct. Finalement, son épée finit par se coincer dans un bouclier en bois… le bref instant où il tenta vainement de la récupérer suffit pour qu’un autre ennemi, Gallois à son cri, lui assène un violent coup à l’arrière du crâne. Si Damian parvint à le repousser d’un puissant coup de pied, il savait maintenant qu’il arrivait à la fin.
 
Il peinait même à garder l’équilibre. Il repoussa encore une nouvelle attaque lorsqu’un adversaire l’empoigna solidement dans le dos pour tenter de le soumettre. Damian prit alors appuis sur lui pour se soulever et ensuite poussa violement avec ses jambes sur un autre ennemi arrivant par devant ainsi renverser les deux adversaires et se libérer. Plongeant la main dans son carquois, bien inutile jusqu’à présent, Damian en sortit une flèche dont l’empennage était jaune… rappel pour lui quels projectiles il avait enduit de poison. Sans hésiter, il la planta profondément dans son adversaire avant de se relever. Sa résistance continua encore une poignée de minutes, durant lesquels il parvint encore à l’exploit d’arracher l’arme des mains de l’un de ses adversaires. Mais finalement, ce qui devait arriver arriva. Et Damian s’écroula inconscient, épuisé et complètement sonné. Il était complètement couvert de sang et de boue. Sa volonté désirait poursuivre le combat, mais son corps de ne suivait plus. Ce fut finalement une puissante frappe avec la hampe de la lance de l’un des Huscarl de Slade qui acheva de lui faire perdre connaissance… non sans qu’il faille rappeler à l’ordre plusieurs des mercenaires que le roi Wilson concernant la consigne claire qui était de le capturé en vie.

 
Le voyage jusque York fut particulièrement pénible pour le jeune homme, mais il l’encaissa sans broncher. D’abord inconscient, il dût faire les derniers jours trainer à l’arrière d’un cheval. Mais à aucun moment, malgré sa défait, le jeune homme ne se départit de sa fierté. Quand il fut clair que nulle pitance ne lui serait donné, il n’émit aucune réclamation… préférant mourir que donner cette satisfaction à son ennemi. Durant tout le trajet, il conserva le silence, ne répondant aux quolibets qui lui étaient lancé par le silence et le mépris… et parfois par un regard assassin qui en cloua le bec à plus d’un… tous savaient de quoi il était capable s’il se libérait. Même lors de halte, Damian ne semblait pas daigner se reposer, se contentant de s’asseoir et d’observer les environs, comme à l’affût de quelque chose.
 
Finalement, ils atteignirent la ville de York. Ancienne cité d’Eboracum, dont les vestiges romains en pierres se mêlaient aux constructions en bois des anglo-saxon et des nordiques venus occupé les lieux par après. Même les puissants remparts de la ville avaient connu des jours meilleurs… bien que les trous dans les fortifications aient été comblé, un œil attentif comme celui du jeune assassin pouvait facilement faire la différence. Mais il n’aurait pas l’occasion de visiter les lieux plus avant, car cette arrivée à la forteresse du roi-illégitime signifiait pour lui un séjour dans les geôles du souverain de la ville.
 
Malgré l’indignité des lieux, Damian n’émit nulle plainte. Dans les ténèbres, il médita sur son échec, il ragea intérieurement sur son incapacité à faire honneur à sa famille, sur la déception qu’il serait pour son grand-père et sur l’imprudence qui l’avait mené à ce point. Mais rapidement ses pensées se concentrèrent à trouver un moyen de s’échapper d’ici. Au bout de plusieurs jours dans plongé dans la crasse et la noirceur, Damian fut tirer de son cachot pour plusieurs séances de tortures. Mais là encore, il refusa de se laisser briser, ne prenant la parole que pour faire montre d’insolence envers ses tortionnaires. Damian avait été formé à supporter bien pire que cela, il connaissait des moyens bien plus horrible d’arracher la vérité à un homme que ceux auxquels il était soumis, en fait, les connaissances qu’il avait acquises au sein des ombres pour torturer un homme ridiculisaient celles posséder par les bourreaux travaillants pour son geôlier. Quand il était seul dans sa cellule, entraver par de lourdes chaines, Damian passait l’essentiel de son temps à méditer, lui permettant d’ignorer les privations, de permettre à son corps et à son esprit de récupérer et ses sens de capter autant de chose que possible à l’intérieur et à l’extérieur de la cellule. Il faudrait encore longtemps au seigneur de cette ville avant que l’héritier des al-Ghul ne daigne ne serait-ce que répondre à une de ses questions… et encore Damian envisageait bien d’être partis bien avant-cela.  

 
Cela dura plusieurs jours avant que Slade ne sembla se lasser de tout cela et vint directement voir Damian dans son cachot. Bien qu’il dût se protéger les yeux de la lumière vive de la torche, le jeune homme eut un sourire mauvais en le voyant, comme s’il savourait à l’avance ce qu’il lui ferait une fois qu’il se serait échappé. Plusieurs cadavres de rats se trouvait rejeté dans certains coins de la cellule. Même entraver et plonger dans le noir, le jeune homme était parfaitement capable de repérer les rongeurs et de les attraper pour ensuite les tuer à main nue. Il ne le faisait pas systématiquement, juste aux plus agressif, ceux qui se sentaient suffisamment téméraire pour envisager de le mordre. Ceux-là, Damian n’avait pas hésité à les tuer rapidement pour instiller la crainte dans le cœur de leurs semblables et qu’ils gardent une distance raisonnable avec lui. Pour le reste, leur présence ne le dérangeait pas, il lui arrivait même de leur offrir le pain dont il ne voulait plus, établissant une entente avec eux.
 
Dès l’instant aussi où il avait entendu les pas dans le couloir, Damian avait aussitôt planqué son crochet dans l’interstice entres deux blocs du mur. Il avait récupéré ce morceau lors d’une des séances de torture et le conservait depuis dans l’optique que cela l’aide à se libérer. Ce n’était pas gagné car il était loin de valoir le matériel qu’il transportait dans ses sacoches… une partie était issue de certaines techniques utilisé par son clan… mais d’autres venaient directement de la Confrérie des Ombres. Ces derniers étaient souvent en morceaux et n’avaient d’utilité qu’une fois assemblé correctement. Mais Damian devait faire avec.
 
Quand sa vue fut enfin accoutumée à la lumière, il défia à nouveau Slade du regard. La haine brûlait dans ses yeux alors qu’ils promettaient milles morts à son adversaire quand il s’échapperait. Il écouta ce que son ennemi avait à lui dire. Les comparaisons avec son fils, les promesses de le faire plier, ses soupçons quant à son identité… que du vent que tout cela. Damian cachait à peine son mépris.
 
-        Tst, tu es pathétique. Ne me prend pas pour plus stupide que tu ne l’es Ibn al Kalb**. Comment pourrais-tu avoir envoyé une demande de rançon à mon géniteur si tu doutes même de mon appartenance ?
 
Si Wilson lui avait fait part de ses soupçons, c’est qu’il était assez certains que Damian faisait partie du clan Wayne, mais qu’il essayait également d’en obtenir la confirmation de la bouche de son prisonnier en le provoquant. Damian ne lui donnerait pas ce plaisir d’autant plus qu’il savait pertinemment que même si son interlocuteur avait envoyé cette demande de rançon, il y avait très peu de chance que le messager aie matériellement eut le temps de faire l’aller-retour. Sans compter que si le roi-mercenaire tenait à ne pas perdre de la crédibilité dans ses menaces, il avait intérêts à être sûr de bien détenir celui qu’il pensait. Damian crachat de la salive imprégnée de son sang vers le borgne qui lui faisait face.
 
-        Si ton fils est mort pour toi, et que tu ne considères que son sacrifice était stupide, alors tu as raison. Ton fils à probablement sacrifier son existence en vain car tu en semble bien indigne. « Peu d’actes sont plus nobles qu’un enfant se sacrifiant pour ses parents, aucun acte n’est plus ignoble qu’un parent sacrifiant ses enfants ». Tu t’y reconnais, fils de thrall*** ? Un fils mort au combat qui semble te décevoir, une fille disparut mystérieusement… quel sort réserves-tu à ta dernière ? Dans tous les cas, le seul conseil que je puis te donner est de profiter des derniers moments qui te restes avec elle. Depuis ma cellule, j’ai entendu le chant des corbeaux, ils attendent le festin à venir… et ils sont particulièrement friands des yeux.
 
Il s'agissait clairement d'une menace, sauf que ce n'était pas claire de qui était la personne visée. S’agissait-il directement du roi ou de sa fille ? Damian préférait laisser son interlocuteur dans le floue, même si dans son esprit il était déjà clair qu’il n’était pas intéressé par l’idée de s’en prendre à une gamine pour les méfaits de son pourri de père. Du sien, il ignorait qu’elle serait la réaction, il serait tout aussi capable de se soumettre aux demandes de Slade pour assurer la sécurité de son rejeton que de lever ses armées pour en exiger la restitution. Aussi savait-il que Slade n’aurait pas intérêt à le tuer. D’ailleurs, bien que le corps de Damian montrât nombres de traces de blessures dût au combat et aux mauvais traitements, un nombre bien plus grand d’entres elles n’étaient déjà plus que des souvenirs, si bien qu’après les séances d’interrogatoires que Damian était sensé avoir subit, on aurait dit qu’il se remettait plutôt bien.


* Sgian Dubh = signifie littéralement "lame noir" en gaélique. Les guerriers écossais avaient l'habitudes de se battre, durant l'antiquité et le début du moyen-âge, avec des lames non-polie leur donnant un aspect noir sources de crainte auprès de leurs ennemis. Par la suite, le terme fût utilisé pour désigner un couteau faisant partie intégrante des tenues traditionnel écossaises.


**Ibn al Kalb = "fils de chien", en arabe

  
***Thrall: terme utilisé pour désigner un esclave dans les sociétés scandinaves.

Le seigneur des lieux sembla dans un premier temps ne pas être atteint par les paroles du pinacle de la lignée des al-Ghul. Il toisa le jeune homme qui lui rendit son regard avec toujours la même lueur de défis brillant dans son regard émeraude. Même maintenant, même ainsi enchainé au fond d’un cachot sombre et humide, à la merci de son ennemi, le jeune homme ne semblait pas éprouver de peur, ni même de crainte pour ce que son ennemi pourrait lui infliger.
 
-        Mon père m’as appris que ton engeance n’était jamais aussi courageuse que quand elles pensent ne rien avoir à craindre. Il m'a aussi été enseigner que c'était le moment où ils étaient le plus vulnérable.
 
Son illégitime interlocuteur prit alors un tabouret pour s’installer plus près de lui… dangereusement près diraient certains aux vues de la capacité à tuer qu’avait démontrer le jeune homme. Il était clairement à porté d’attaque mais Damian n’en fit rien. Il pourrait se jeter sur lui et tenter de l’égorger à coup de dents. Il pourrait tenter de lui crever l’œil qui lui restait… il pourrait le faire de tellement de manière différente mais le jeune homme apprenait de ses erreurs. N’importe qui d’autre aurait été une proie facile pour le jeune écuyer… déjà l’un des tueurs les plus redoutable du monde connu, mais pas lui. Le roi Wilson avait démontré des capacités impressionnantes durant son combat avec Damian, ce dernier apprenait de ses erreurs et savait qu’avec un tel ennemi, il n’aurait aucune chance de l’atteindre dans la situation actuelle. Il lui fallait une meilleure occasion
 
Damian s’était d’ailleurs interrogé sur son adversaire. Celui-ci l’avait vraiment dominé durant leur duel. Pas forcément au niveau de la maitrise des armes où Damian s’estimait d’un niveau semblable, mais physiquement incontestablement. Réflexe, force, endurance… dans tout ses domaines le roi-mercenaire avait fait montre de capacité qu’il n’aurait pas dût avoir, il n’aurait pas dû lui être à ce point supérieur. Même son père ne le surpassait pas autant durant leurs combats d’entrainement, et pourtant il était l’un des rares adversaires à pouvoir le surpasser au combat. Wilson n’avait pas de caractéristique qui pourrait indiquer qu’il était une sorte de guerrier Berserkir, un combattant se laissant dominé par la folie mais en échange d’une incroyable puissance au combat… il n’avait pas l’air de posséder de pouvoir magique non plus. Il restait la possibilité que la magie provienne de son équipement, mais Damian avait la sensation que c’était autre chose.
 
-        Peut-être est-ce simplement tes mercenaires qui sont pitoyable au point de se laisser surpasser par un enfant.
 
Bien que lorsque Slade impliqua qu’il pouvait être « le fils de personne » les yeux de Damian s’étrécirent, le jeune resta obstinément silencieux. Il ne voulait pas en révéler trop sur l’identité de son camp pour ne pas mettre celui-ci en situation fâcheuse… et ce même s’il savait pertinemment que ce serait le moyen le plus sûr de s’en sortir avec un minimum de dommage. Mais il refusait de plier à la volonté de son ennemi. Lorsque les paroles de Slade évoquèrent les potentiels connaissance en matière de torture du jeune homme, un rictus mauvais apparut sur le visage du fils du Mormaer des Orcades. Il avait effectivement été formé à savoir infliger la douleur à l’ennemi, pour lui arracher la vérité ou pour faire un exemple, mais aussi à y résister. Son record personnel est d’avoir réussit à maintenir dans un état d’agonie un traitre à la Confrérie pendant trois semaines. Les techniques utilisé par les hommes du roi-illégitime étaient frustres, sans imagination. Il soupçonnait que la prochaine étape soit plus psychologique… mais une règle qu’il avait apprit était que pour faire craquer un prisonnier, il fallait le priver de routine. L’esprit humain était quelque chose de solide s’il avait l’occasion de se préparer. Empêcher qu’une monotonie s’installe épuisait les défenses mentales de la victime et rendait son esprit et sa volonté vulnérable à la confrontation car n’ayant pas le temps de se blinder en préparation de celle-ci. Technique extrêmement efficace sauf contre ceux qui étaient capable de discipliner ce même esprit.
 
Mais finalement, le guerrier borgne choisit une approche plus directe. À la grande surprise de Damian, Slade le traina jusqu’à lui, à quelques centimètres de son visage. Il pouvait sentir la respiration de son ennemi, il le vit sortir sa lame et l’approcher de ses yeux. Mais le jeune prince ne frémit pas, continuant à défier son ennemi d’un regard mauvais, proférant des malédictions silencieuses à son interlocuteur.
 
Soudainement, son ennemi sembla changer d’avis et de cible. L’attrapant par la main droite, il l’a tiré à lui sans que Damian ne puisse opposer de résistance, puis d’un coup net sectionna son majeur et son annulaire au niveau de la deuxième phalange. Le jeune homme, malgré la surprise, serra les dents tentant de juguler la douleur, mais douleur qui était bien là. Alors qu’il mobilisait les ressources de sa volonté pour ne pas se laisser submerger par la douleur, Damian eut une réaction instinctive. Dès l’instant où Slade eut finit ses menaces, il encaissa un violent coup de boule vicieusement donné par le jeune homme, droit dans son visage. Des représailles bien maigre en comparaison de la perte de ses doigts, mais néanmoins un acte de défis ouvert.
 
-        Tu viens de sceller ton sort, Wilson !! Et tu supplieras les Nucklavee* d’emporter ton âme dans leur enfer sous-marin pour t’en libérer.
 
La perte de ces doigts était un coup rude pour Damian, s’il pouvait utiliser ses deux mains avec la même habilité, la perte de deux doigts représentait un handicape certains, mais surtout une blessure dont il ne pourrait récupérer, un symbole de la défait qu’il avait encaisser face à son ennemi. Il se tenait la main, la regardant un instant. Il pouvait sentir en lui la magie du lazare, la magie des al-Ghul, celle qui l’avait façonné, être à l’œuvre. Il lui faudrait un certain temps pour complètement cicatriser, mais ce serait vite fait. Son regard émeraude sembla s’embraser de l’intérieur davantage, soulignant encore plus la teinte non-naturelle de ses yeux, alors que la magie contenue dans son corps était à l’œuvre pour soigner celui-ci. S’il faudrait une bonne dizaine de minute pour que la blessure se résorbe complètement, il était d’emblée sûr que malgré la lame rouillée, malgré l’environnement dans lequel il se trouvait, il ne développerait pas d’infection ou de gangrène.
 
Mécaniquement, il porta ses deux plaies à son visage, repassant sur les tracés de peinture de guerre depuis longtemps effacé, utilisant son propre sang comme peinture. Il se redressa le regard plein de haine et de mépris pour son interlocuteur.
 
-        Tu te prends peut-être pour un seigneur, Wilson. Mais tu n’es rien d’autre qu’une bête qui se prend pour un être humain car doué de parole et parvenant à faire illusion sur ton apparence. Je sais comment fonctionne ton engeance. Tu penses avoir l’étoffe d’un grand roi, mais tu ne laisseras qu’un royaume de ruine et de cendre à ta descendance. La seule loyauté que tu arrive à inspirer se situe dans la peur que tu inspires, mais cela restera une fondation fragile et éphémère sur laquelle bâtir un héritage. Au finale, la seule surface de terre sur laquelle ta famille règnera ne sera que l’étendue de la fosse commune anonyme dans laquelle vous serez jeté et oublié.
 
Damian avait parlé avec hargne. Il savait que par son acte, Slade se faisait d’emblée l’ennemi du clan Wayne, et probablement aussi de la Confrérie des Ombres. S’ils s’étaient trouvés dans la zone d’influence de l’organisation, les jours de Slade se seraient compté sur les doigts de la main avant que lui et tout son lignage ne soient exterminé pour s’en être prit à un al-Ghul. Sur les iles britanniques par contre, l’influence de la Confrérie restait faible, mais suffisante pour causée bien du tracas au roi-illégitime de Northumbrie.



* Nucklavee: démon du folklore des Orcade ressemblant à un cavalier fusionné avec son cheval. Ils sont les porteurs dans leurs sillages des tempêtes et de la peste et l'une des créatures les plus maléfique des légendes écossaises.

L’héritier du clan Wayne était parfaitement conscient que son action d’éclat de tout à l’heure l’avait mis dans une situation encore plus périlleuse, mais il était néanmoins parfaitement satisfait d’avoir ainsi put montrer à son ennemi qu’il était encore en mesure de lui faire mal. Il avait clairement senti sous l’impact de son front les os du nez de son interlocuteur se briser et le comportement de Slade montrait clairement que la douleur pouvait l’atteindre. Cependant, le jeune homme sentait également que son adversaire prolongeait les choses à desseins, même s’il ne saisissait pas encore dans quel but. Jusqu’à présent, même si l’écuyer avait tenter de faire preuve de prudence pour ne pas donner de renseignements sur l’identité de sa famille à son geôlier, il ne notait pas qu’il donnait indirectement des indices à son ennemi dans ses paroles.
 
Mais le roi-illégitime ne tarda pas à reprendre son interrogatoire. Repoussant Damian d’un coup de pied à la tempe, le jeune homme fut rejeté contre le mur de sa cellule, lâchant à peine un grognement de douleur. Il luttait pour garder sa contenance, les coups de son ennemi n’étaient encore rien, mais il tenait toujours contre lui sa main dont deux doigts avaient été raccourcit. Les provocations de l’aspirant-souverain reprirent de plus belle, dans cette joute verbale qui se tenait entre eux deux. Mais Damian n’avait que faire des menaces de son ennemi, il ne le craignait pas même dans sa situation. Ses yeux s’écarquillèrent cependant légèrement en constatant que la blessure qu’il avait infligé à son tortionnaire était déjà en train de guérir. Même lui, qui avait été imbus des pouvoirs de la magie des al-Ghûl ne récupérait pas aussi rapidement. Définitivement, son ennemi ne pouvait pas être humain, en tout cas pas un simple mortel. Une information que le jeune guerrier ferait bien de garder à l’esprit.
 
-        Moi, les miens et tout mes ancêtres ont de tout temps atteint la grandeur et ce depuis des siècles. Toi, tu n’as qu’été conçu dans la fange et éduqué qu’à tuer, piller et violer… et encore, seulement si tu ne rencontre pas trop de résistance. Tu sais peut-être te battre, mais cela s’arrête là.
 
 La voix de Damian était moins audible qu’auparavant. Le jeune homme commençait à accuser les coups qu’il recevait et le roi-mercenaire avait plutôt la main lourde. La douleur le faisait parler entre ses dents mais sa hargne n’en demeurait pas moins vive. Ce fut à ce moment qu’il dût encaisser un coup de poing brutale porter par son interlocuteur à son visage et qui l’envoya s’écraser violemment contre le sol. Il avait pourtant vu le coup arrivé, mais entre ses entraves et la vitesse de son ennemi il n'avait rien put faire pour s’en prémunir. Au choc reçut par le coup de son ennemi vint s’ajouter celui de son crâne contre la pierre, puis celui de la botte de Wilson s’écrasant contre son crâne. La vue de Damian commençait à se brouiller, ses sens à le trahir. Il avait du mal à se concentrer, à penser même. Il sentait même des nausées le prendre. Les coups de la brute le dominant étaient en train de lui faire perdre conscience.
 
-        Tst… tu as ... vue tellement courte ...Wilson. Tu attribues… tes pensées… à d’autres. Incapable … raisonner autrement. T’es vieux…  crépuscule de ta… misérable exi…stence. Ton règne… pas assuré…. Personne se battra…pour ta progéniture. Pas un roi… une pâle caricature.
 
Il avait du mal à respirer, mais continuait à défier Slade. Il sentait le goût de son propre sang dans sa bouche. Les coups de Slade avaient probablement été plus dur qu’il ne l’avait pensé initialement. Il sentait les chaines se tendres, tirer sur ses membres, déchirant sa peau alors qu’il était aux limites de la liberté de mouvement qu’elles lui autorisaient. De même qu’il sentait la pression exercée sur son crâne. Damian tenta de rassembler sa volonté pour continuer à défier son ennemi, relevant la tête du mieux qu’il pouvait pour plonger son regard émeraude dans celui de son tortionnaire. Bien qu’il avait même de la peine
 
-        Tu as pu expérimenter… ce que je savais…faire. Et je ne suis qu’un… enfant. Veux-tu vraiment te faire ennemi… des autres… ?
 
D’un coup, Damian sentit des contractions et des spasmes le prendre. Les nausées n’avaient fait qu’empirer alors qu’il essayait de parler. Il toussa plusieurs fois avant que d’un coup un vomissement surgit de sa bouche. Au contenu gastrique qu’il venait de rejeter se mêlait le sang qui perlait de sa bouche depuis déjà plusieurs minutes.
 
-        En fait… j’espère vraiment que tu finiras… par savoir… qui je suis, Wilson. Nous n’oublions…jamais….Nous ne pardonnons … pas. Et quand tu…sauras. Tu craindras, l’idée…même de croiser notre route. Tu craindras… chaque ombre… tel un dan…ger. Chaque bruit… comme ann…onciateur de… ta fin. Nos armées…balayeront ton pathé…tique royaume. Tu croiseras peut-…être le fer…mais sans jamais… espérer l’emporter.
 
 
Damian aurait volontiers poursuivi sa tirade de menace… mais il commençait à tourner de l’œil pour de bon. Dans ses paroles, il n’avait pas évoqué le clan Wayne, bien que provoquer le courroux de celui-ci serait déjà un problème pour le roi-illégitime de Northumbrie déjà aux prises avec le royaume d’Angleterre. Mais Damian pensait bel et biens aux al-Ghûl. Si les Wayne étaient liés aux règles de l’honneur et à la raison d’état, les al-Ghûl eux n’auraient de cesse à ce que sa mort soit venger. Et tous les coups seraient permit. Finalement, les yeux de Damian commencèrent à se fermer, il était en train de lutter pour ne pas tourner de l’œil, mais l’inconscience le guettait.

Alors qu’il était étendu face contre terre, sentant la puanteur de ses vomissements et ressentant la dureté et la froideur du sol, Damian luttait pour rester conscient. Les coups du Roi-mercenaire l’avait durement sonné et il peinait à suivre ce qui se passait. Cependant sa fierté et son entêtement refusaient de le laisser céder devant son ennemi. Malheureusement, il n’avait pas encore suffisamment sombré dans l’inconscience pour ne plus être capable de distinguer les paroles de Slade. Celles-ci rallumèrent la haine qu’il éprouvait pour son interlocuteur, bien qu’il ne soit plus en état de la déverser. Mais cette haine était d’autant plus vivace qu’il y avait un fond de vérité dans ces paroles… il avait été arrogant. Il ne répondit pas alors qu’il commençait vraiment à sombrer dans l’inconscience, il ne perçut même pas le moment où le roi-illégitime avait quitté la cellule. Finalement, Damian sombra dans l’inconscience. Cela était peut-être pour le mieux pour son amour-propre, ça lui donnait une opportunité pour ne pas céder à la tristesse qu’il éprouvait d’avoir ainsi échouer… sur toute la ligne.
Pendant la période d’isolement qui suivit, Damian ne resta pas inactif. Il continuait à préparer son évasion. Mentalement, il se souvenait parfaitement de la disposition des lieux dans la forteresse, mais aussi en ville… du moins pour la partie auquel il avait eu accès pendant qu’on l’emmenait vers le donjon. Il savait reconstituer l’itinéraire et avait même quelques alternatives pour le moment où il s’échapperait. Mais pour cela, il devait déjà sortir d’ici, et cela s’avérait plus compliqué que prévu. Le crochet qu’il avait volé pourrait certes lui permettre de se détacher de certaines de ses entraves, mais il conclut vite qu’il ne serait pas suffisamment solide pour forcer les serrures de toutes ses chaines… et en détacher avant de pouvoir partir ne ferait qu’alerter ses geôliers. En cela, la solitude était difficile à supporter, pas tant qu’il ne la supportait pas, il avait appris à supporter de telle situations bien longtemps avant de rejoindre son père, que par le fait qu’elle ne lui offrait pas d’opportunités de faire évoluer se situation. Il avait conservé les deux doigts qui lui avaient été arraché, c’était sans intérêt, mais Damian ne tenait pas à ce qu’ils soient dévorés par les rats.
 
Par la suite, Damian eut droit à de nouvelles séances de tortures, où ses tortionnaires rivalisaient de cruauté et de brutalité pour tenter de le briser. Damian soupçonnait même que les sbires du maitre des lieux devaient tenir des paris entres eux sur qui parviendrait finalement à le faire craquer. Jusqu’à présent, peine perdue. Damian restait impossible à briser, qu’importait les supplices qui lui étaient infligés, il résistait, il refusait de concéder quoi que ce soit à ses tortionnaires. Ayant passé des années à discipliner son corps et son esprit, la résistance à la torture de l’écuyer restaient impressionnante et il refusait toujours de répondre aux questions… bien qu’il eut en grande partie cesser d’insulter les hommes de Slade, lui-même ne trouvant plus d’amusement à le faire. Mais ces séances restaient la meilleure occasion qu’il avait de voler du matériel, bien qu’il ne puisse rien dérober qu’il ne pourrait par la suite cacher, devant se contenter de petits objets. En une occasion, il faillit parvenir à s’emparer de la clé.
 
Lorsqu’il était rejeté dans sa cellule, Damian en profitait pour récupérer. La magie du Lazare permettait à son corps de guérir rapidement, y compris des brûlures. Les privations de nourritures étaient plus gênantes car si les techniques de méditations apprises par le jeune homme lui permettaient d’en partie compenser ces carences et surtout de ralentir l’affaiblissement de son corps, elles ne pouvaient empêcher son corps de s’affaiblir. Dans ces moments de solitudes, Damian continuait à s’entrainer pour se maintenir en forme, seulement quand ses sens l’assuraient qu’aucuns gardes n’étaient dans les environs immédiat pour s’en rendre compte. Il travaillait aussi sur la manière dont il allait partir d’ici et comment il ferait payer à Slade son « hospitalité ».
 
Lorsqu’il méditait, il envoyait souvent ses sens et ses pensées vers la petite fenêtre qui dominait sa cellule. Il avait déjà tenté d’y grimper. Autant les chaines de ses poignets étaient assez longues pour qu’il puisse s’y agripper, mais celles de ses chevilles étaient trop courtes pour qu’il puisse s’y hisser et donc voir par elles le monde extérieur. Mais cela n’avait pas empêcher Damian de plusieurs fois tenter l’exercice ne serait-ce que pour sentir un peu d’air frais ou la caresse du soleil… il avait même presque hâte que la pluie se mette à tomber… d’ici deux jours maximum s’il avait bien sut lire les mouvements du ciel. Mais même sans pouvoir regarder à l’extérieur, Damian entendait assez bien les différents sons rythmant la vie du château pour avoir souvent une assez bonne idée de ce qui s’y passait.
Ce jour-là, il entendait les rires des enfants qui jouaient ensemble. Cela était des plaisirs auxquels Damian était lui-même peu familier, il avait longtemps grandi à l’écart des autres enfants et même quand il avait rejoint son père, il n’avait eu que peu de goûts à participer à ce genre de passe-temps puérile, préférant s’entrainer, apprendre des affaires du royaume de son père… et en découvrir les secrets pour le compte de la Confrérie des Ombres. En général, Damian pensait avoir assez peu de patience avec les gosses.
 
Soudain, alors qu’il était en train de méditer, une ombre fugace se fit dans le peu de lumière pénétrant dans sa cellule. L’instant d’après, un objet tomba brutalement dans sa cellule, rebondissant avec fracas sur le sol et faisant soudainement fuir de panique les rongeurs qui jusqu’à présent se contentaient de regarder le prisonnier à une distance respectable. Quand l’objet intru cessa sa course, Damian l’observa. Il s’agissait d’une balle, probablement fait avec une vessie de porc et un peu de cuir. Il se souvenait avoir déjà vu des enfants jouer avec ce genre d’accessoire dans le domaine de son père, bien qu’il ne s’était jamais intéressé à la chose.
 
Il ne fallut pas longtemps pour que d’autres bruits attirent son attention. Quelqu’un approchait, probablement un enfant aux vues du peu de vibration que ses pas faisaient. Une tête se fit voir à la fenêtre de la cellule. Damian n’avait même pas à lever la tête pour le savoir. Il voyait son ombre éclipser le peu de lumière qui entrait dans sa cellule, il entendait le gémissement de surprise qu’elle émit quand elle aperçut sa silhouette dans les ombres. L’espace d’un instant, il pensa que cette seule vue aurait suffit à venir à bout du courage de la gamine… mais elle ne partit pas. La surprise passée, elle retourna à la fenêtre et commença à parler… essayant d’attirer l’attention de Damian. Probablement dans l’espérance qu’il lui rendrait sa balle.
 
-        Qui es tu ? Toi qui te permets de cacher le peu de lumière qui me reste !
 
Il n’avait toujours pas daigné lever la tête pour regarder la fillette qui lui avait parlé. La voix de Damian était dure, probablement plus qu’il ne l’aurait lui-même voulut. Il n’avait qu’une envie, celle d’envoyer paitre cette gamine. Cela lui apprendrait à faire attention à ses affaires. De plus, il n’avait nul désir de se montrer aimable à quiconque habitait ce château où il était retenu prisonnier, torturé et humilié. Mais d’un autre côté, Damian s’en voulut. Après tout, cette gamine n’y était pour rien dans sa situation… elle serait peut-être même le seul contact amical qu’il aurait avant longtemps.
 
-        Pardonne-moi, petite. Je n’aurais pas dû élever ainsi la voix. Mais cet endroit à tendance à me rendre de méchante humeur.
 
Damian daigna finalement lever les yeux pour regarder en direction de la petite fenêtre. Il eut du mal à bien distinguer les traits du visage de son interlocutrice, mais il distingua qu’elle avait des cheveux blancs, une caractéristique assez inhabituelle pour une enfant. Cela lui fit immédiatement penser à son tortionnaire, bien qu’il ne puisse en être sûr, et il se demanda s’il n’avait pas affaire à la fille de celui-ci. Damian avait connaissance de l’existence de la petite dernière du roi-illégitime, mais ne l’avait jamais vu en vrais. Le jeune homme pointa du doigt l’endroit où se trouvait l’objet des convoitises de l’enfant.
 
-        C’est ça que tu veux ? On va essayer de te le récupérer avant qu’un rat ne décide de le boulotter.
 
Damian se leva. Le cliquetis des chaines se fit alors entendre quand il mit à bouger. Sur plusieurs endroits de son corps, les blessures qui lui avaient été infligés par les divers séances de tortures étaient visibles, refermé, mais visible néanmoins. Même une enfant pouvait probablement se figurer que ces traces étaient issues d’évènements douloureux. Finalement, Damian s’abaissa, le plus que ses entraves lui permettaient. Mais le ballon avait roulé trop loin pour que le prisonnier puisse l’atteindre. On pouvait entendre l’effort que fournissait Damian pour récupérer le ballon, le son des chaines qui se tendaient et le crissement du mur qui les retenait.
 
-        Je suis désolé, gamine. Mais je crains bien qu’elle ne soit trop loin pour moi. Peut-être si tu pouvais me trouver quelque chose pour l’atteindre.

Le moins que l’on pouvait dire, c’est que Rose avait du caractère. Cela amusait assez l’héritier des Orcades que cette fillette ose ainsi lui répliquer du tac au tac. La plupart des autres enfants se seraient contenter de s’encourir pour se réfugier dans les jupons de leurs génitrice, mais pas elle. Cette fille aux cheveux blancs osait non seulement rester sur place, mais même osait répondre. En temps normale, Damian n’aurait certainement pas eut ce genre d’appréciations, ayant d’habitude assez peu de patience pour l’insolence à son encontre, mais il s’agissait probablement de la première personne depuis longtemps à l’aborder sans avoir de mauvaises intentions à son égard.


Néanmoins, même s’il appréciait cette rencontre, le prisonnier ne se départait pas pour autant de sa méfiance naturelle, refusant de baisser les défenses qu’il avait ériger pour résister aux supplices qui lui étaient infligés. Il restait vigilant, essayant de ne pas en révéler trop à sa petite interlocutrice. Cependant, en jouant bien son coup, Damian pouvait espérer recruter une informatrices placer à l’extérieur des murs de sa cellule… ce qui pourrait s’avérer utile. L’aspirant chevalier captif n’aimait pas vraiment l’idée d’ainsi manipuler cette fille, mais il devait mettre toutes les chances de son côtés s’il voulait pouvoir sortir de ce cachot sombre et humide.


Il s’avéra également que la jeune fille était d’un naturel curieux, ne tardant guère à poser une série de question au jeune homme alors qu’il était occupé à tenter de récupérer son jouet. Damian conserva le silence sur la question de son identité. Cela faisait des jours qu’il résistait aux interrogatoires de ses geôliers qui cherchaient justement à lui arracher ce genre de renseignements pour le compte de leur maitre. Les scéance d’interrogatoire et de tortures n’étaient certainement pas une partie de plaisir, mais dans une certaine mesure, Damian les préférait aux moments où il était à l’isolement… au moins elles pouvaient lui offrir des opportunités à saisir. La seconde question était par contre moins sensible.

«  Le maitre des lieux, à l’évidence. » déclara-t-il sombrement.


L’information était moins sensible certe, mais le jeune homme ne pouvait cacher l’aigreur qu’il ressentait. Et c’était tout juste s’il était parvenu à dissimuler la haine qu’il éprouvait en ce moment pour le Roi-Mercenaire. Du coin de l’oeil, le jeune homme observit avec attention la réaction de son interlocutrice s’interrogeant sur les sentiments qu’éprouvait la fillette. Il soupçonnait qu’il s’agissait de la propre fille de Slade, mais il n’en était pas sûr. Et qu’importait la réponse à cette question, il était important qu’il définisse si son interlocutrice était loyal ou non à son ennemi avant de se risquer plus avant. Il avait cepenant déjà noter qu’elle se référait au seigneur de ce royaume par son titre… ce qui semblait indiquer l’existence d’une distance certaine entre cette enfants et le roi-illégitime de Northumbrie.


Quant à la dernière question, Damian n’eut pas l’occasion d’y répondre, occupé qu’il était à tenter de récupérer la balle que son interlocutrice et ses camarades avaient perdu dans sa cellule. C’était peut-être mieux ainsi car il n’était pas sûr de comment formuler sa réponse concernant les raisons de son incarcération. Il n’en avait guère honte, mais tout serait dans la manière de le dire, et il ne connaissait pas encore assez la gamine pour établir son potentiel lien… et sa loyauté, avec le roi-illégitime de Northumbrie. Elle ne tarda d’ailleurs à revenir avec une branche comme Damian lui avait demandé.


« Il faudra bien... »


Alors que Damian tendait la main, faisant cliqueter les chaines qui l’entravaient, pour récupérer la branche, une voix puissante et familière se fit entendre. Une voix que le jeune homme pouvait facilement reconnaître et qui faisait immanquablement naitre en lui des envies de meurtres. La voix du maitre des lieux, son geôlier, son tortionnaire. Un rictus apparut sur le visage du jeune captif. Une voix qui s’adressait à la jeune fille aux cheveux blancs et qui lui intimait l’ordre de s’éloigner immédiatement.


« Ainsi tu t’appelles Rose. Je constate qu’on a en commun la capacité de mettre en rogne ce type. »


Il s’avérait donc que ses soupçons étaient justifiés, il avait bien affaire à la petite dernière de la famille de son ennemi. Et pour le peux qu’il pouvait en juger, le maitre de la Northumbrie ne semblait pas la traiter spécialement bien. Entre la manière qu’il avait à la rabrouer et le fait que Rose ne semblait même pas appeler par un terme plus familier… tout cela en disait long sur le type de relation qu’ils entetenaient. Tout cela ne faisait que renforcer Damian dans sa conviction que le seigneur Slade n’était rien d’autres qu’une brute épaisse trop ambitieuse pour son propre bien.


Damian garda néanmoins la branche que Rose lui avait trouvé et s’appliqua à récupérer la balle. La branche constituait un outil adéquat pour cette tâche. Il se fichait fondamentalement de la réaction de son geôlier. Si celui-ci punissait Damian pour avoir aider Rose, il ne ferait que s’aliéner sa propre fille contre lui. Il ne fallut guère longtemps à Damian pour récupérer l’objet des convoitise de Rose. Malgré son état d’affaiblissement, Damian tendit la balle en direction de la fenêtre pour que Rose puisse la reprendre.


«  Tien, amuses toi gamine. »

Damian parvenait à percevoir les tensions entre la fille et le père rien qu’à la froideur du ton de Rose. Il avait rapidement soupçonné cette fillette qui lui parlait d’être liée par le sang à son geôlier, mais il en avait désormais la confirmation. Visiblement, le roi-illégitime n’était pas le genre de père à avoir de l’affection à ses enfants. Peut-être que cela pourrait être utiliser à l’avenir mais tel n’était pas sa priorité.


Même s’il conserva son calme, alors qu’au-dessus de sa cellule, il pouvait percevoir la brutalité du traitement que le roi-mercenaire infligeait à son enfant, son mépris pour cet homme n’en était que davantage accrut. En partie parce que cette fillette avait été la première à faire preuve d’un peu de considération à son égard depuis son arrivée dans ces cachots. Mais surtout parce qu’il n’aimait pas le comportement que Slade adoptait envers celle qui était sensé être son enfant. Il semblait n’avoir pas plus de considération pour elle que pour ses serviteurs alors que le même sang coulaient dans leurs veines. Cela ne faisait que renforcer l’image de barbare, de bête enragée, que le jeune homme avait de son tortionnaire. Cela ne faisait que le renforcer dans son désir de lui nuire. Finalement, son ennemi vint se tenir devant la fenêtre de sa cellule, abattant son ombre imposante sur la seul source de lumière du prince captif. Finalement, il lui adressa de nouvelles menaces, jurant que la faim et la soif finiront par le faire craquer.


« Tst. Tu commence à manquer d’imagination vieil homme ? Envois moi donc tes bourreaux, j’aurai un ou deux trucs à leurs enseigner. »


Damian défiait ouvertement son tortionnaire du regards, plantant ses yeux émeraudes dans le regards du maître des lieux. Le désir de meurtre à l’encontre du borgne illumine par moment les yeux à la teinte irréelle du jeune homme. Il ne cherche pas à faire mystère de la haine qu’il éprouve pour son ennemi.


Mais il était tout aussi évident que les mauvais traitements, qu’il subissait depuis des jours maintenant, commençaient à prélever leurs tributs, l’affaiblissant. Si son entraînement pour résister à la douleur et aux privation, sa volonté qui refusait de se brise, son endurance naturelle et les capacités de récupérations que lui offrait la magie du Lazare courant dans ses veines faisaient qu’il supportait cette épreuve mieux que beaucoup d’autres, il n’en restait pas moins qu’il s’affaiblissait. Les marques sur son corps semblaient cicatriser plus difficilement, ses traits étaient tirés par la fatigue et probablement par certains manques alimentaire. Il ne montrait cependant toujours pas de signe de maladie.


Mais malgré tout, le jeune homme n’avait rien perdu de sa fierté, de son entêtement ou de sa hargne. Il pensait que Slade Wilson commençaient à manquer de moyens alternatif pour le faire plier s’il en était réduit à compter sur la faim et la soif pour le faire plier. Mais Damian ne comptait pas lui accorder ce plaisir. Il pouvait encore tenir plusieurs jours. Ses techniques de méditations pouvaient l’aider à récupérer et préserver ses forces.


Alors que la silhouette du roi-mercenaire s’éloignait du champ de vision du jeune homme, celui-ci maugréa plusieurs imprécations à l’encontre de cet homme, de ses larbin et de ce château. Ensuite, Damian se rassit dans son coin, dans une position de prostration, l’un des rares instant de faiblesse qu’il s’accordait. Bien que silencieux, des larmes de rage coulaient sur ses joues. Il se reprit rapidement, car cela ne ferait qu’accélérer sa déshydratation, mais la vérité était que Damian commençait à craindre la possibilité qu’il ne soit pas en mesure de s’échapper. Qu’il finisse par s’affaiblir avant d’être en mesure de quitter ce lieu oublier par Dieu.




La nuit tombée, Damian était passé à l’action. La situation était loin d’être idéale, mais il avait peut-être déjà trop attendu. Il avait espéré rassembler de quoi s’assurer des succès de son évasion, mais attendre davantage serait courir le risque qu’il finisse trop affaiblit pour espérer s’échapper. Même sa capacité à guérir rapidement de ses blessure semblait moins performante qu’à l’accoutumé, son corps finirait probablement par craquer avant son esprit.


D’ailleurs, même sur cet aspect, il sentait la fatigue s’accumuler. Il rêvait de plus en plus de retrouver les Orcades, le fief de son père. Il se souvenait davantage du son des vagues déchaînées se fracassant contre ses inquiétantes falaise, le vent salée venu de la mer envahissant les cours du château de son clan, les nombreuses langues et dialecte différents qu’il pouvait percevoir en se promenant sur le domaine de son père, les chevauchées aux côtés de la meute de chien qu’il avait personnellement dressé… sa famille aussi. Parfois, ses souvenir le menait plus loin, sous le soleil de son enfance en orient, dans la splendeur des cités bordant la mer méditerranée, le souvenir de sa mère était alors omniprésent. Il n’avait plus revu sa génitrice depuis qu’elle l’avait confier à la garde de son père, et elle lui manquait parfois.


Il ne pouvait cependant en aucun cas se permettre de sombrer dans la nostalgie, dans cet état de dépression qui ne manquerait pas de compromettre ses chances d’évasion. De plus, l’idée même que son ennemi puisse retirer, à défaut de renseignements, la satisfaction d’être parvenu à le briser était une puissante motivation pour le pousser à l’action. Il avait déjà été mutilé dans sa chair, il n’était plus à cela prêt.


Alors que l’obscurité s’était abattu, que la clarté de la lune et des étoiles constituaient désormais la seul source de lumière pour le jeune homme quand un nuage ne venait pas les dissimuler, il passa à l’action.


Alors que la ville de York et le château du roi-mercenaire sombrait dans la quiétude du sommeil nocturne, les sens de l’Héritier de la Confrérie des Ombres avaient ses sens en alerte. Il notait les bruits de la nuit, le cris des animaux nocturnes, le son des gardes faisant leurs rondes, les chants lointain de quelques badauds imbibés, les ronflements du gardien des cellules qui se sentait autorisé à se reposer les yeux un long moment…


La main de l’écuyer se porta dans quelques fissures dans les murs et sol pour en retirer quelques crochets et tiges métallique qu’il avait put subtiliser durant les séances de tortures. D’une main experte, il commença à les tordre de manières à leur faire adopter une forme qui pourrait permettre le crochetage des bracelets le maintenant prisonnier. C’était un travail demandant de la minutie, surtout qu’il n’avait pas eut l’occasion d’en récupérer autant qu’il ne l’avait espérer. Sa marge d’erreur était infime, il ne pouvait se permettre de gaspillé ses maigres ressources dans des échec. L’une après l’autre, les serrures de ses chaînes cédaient… mais il en était de même pour ses outils improvisés et ce sous le regards de quelques compagnons rongeurs poilus qui étudiaient avec curiosité le comportement du prisonnier. Le jeune homme maudissait silencieusement la piètre qualité de ce fer ainsi le manque de visibilité. Il n’avait réussit qu’à se libérer les poignets et il ne lui restait plus qu’un seul crochet.


Alors qu’il tentait de se libérer la cheville gauche, Damian s’arrêta soudainement, l’oreille aux aguets. Il percevait un bruit de pas léger… beaucoup trop pour l’un des soudards aux ordres du roi-illégitime de Northumbrie et définitivement pas ceux dudit maître des lieux. Le jeune homme était intrigué, malgré l’acuité de ses sens, il n’arrivait pas à mettre un visage sur ces pas qui se rapprochaient. Cela ressemblait à ceux d’un enfant. Il entendit les pas se rapprocher sans qu’il ne puisse comprendre ce qu’un enfant viendrait faire ici si tard le soir et si proche des cachots où le roi-mercenaire enfermait et brisait ses prisonniers.


Finalement, il entendit une voix qu’il reconnu immédiatement. Celle de la fille de son ennemi, la fille avec qui il avait échanger quelques mots plus tôt dans la journée. Damian se releva silencieusement pour la fixer, depuis la pénombre, quelque peu interdit, mais ne parvenant pas à trouver de raison expliquant la présence de la fillette ici. Il était cependant peu probable que Slade envoi sa propre progéniture pour tendre un piège au prisonnier.


« Je suis là… et tu vas t’attirer des ennuis si on te surprend à me parler. Que veux-tu ? » Les paroles du jeune homme n’étaient pas spécialement chaleureuse, mais aucunement agressive ou hostile. Il était simplement méfiant.


Rose se tenait à la fenêtre de la cellule, elle avait les vêtements qu’elle avait revêtu durant la journée, mais avait changé de coiffure, détail qui surprenait un peu le jeune homme. Elle lui révéla qu’elle était venu car elle voulait l’aider.


« Pourquoi ? »


La question était sincère, Damian ne voyait pas ce que Rose avait à gagner en lui venant ainsi en aide. De manière générale, le jeune homme était peu accoutumé à l’idée que des personne qu’il ne connaissait pas lui vienne en aide sans vouloir quelque chose en retour. Damian s’approcha de la fenêtre, fixant sa petite interlocutrice pendant quelques seconde avant qu’elle ne reprenne la parole. Elle demandait effectivement quelque chose en échange. Elle expliqua à Damian son rêve, le fait qu’elle aimerait un jours rencontrer sa sœur. Le petit fils du Démon était un peu dubitatif, mais les visions prophétiques étaient quelque chose qui arrivait parfois, bien que dans ce cas, il ne saurait dire si s’en était bien un où s’il s’agissait d’un simple espoir onirique d’une fillette qui savait avoir une grande-sœur perdue ? Il ne saurait le dire, mais son instinct lui disait que, peu importait la vérité, Rose était sincère.


Damian tendit la main pour prendre doucement l’aiguille que la fille de son ennemi lui avait tendus. Il ne dit mot, pesant ses solutions. Il pourrait très bien se contenter de dire à Rose ce qu’elle voulait entendre puis disparaître sans se sentir tenu par sa promesse. Mais il ne désirait pas trahir la confiance de cette petite fille qui l’aidait en prenant d’immense risque. Même si le père de Rose n’en venait pas à la soupçonner, l’évasion d’un prisonnier qui l’avait ainsi défié ne manquerait pas de le plonger dans des abîmes de fureur. Rose pourrait quand même en partir. Le regard émeraude de Damian passa de la fillette aux cheveux blanc argentés à l’aiguille qu’elle lui avait donné. Finalement, son visage se redressa à nouveau pour faire face à Rose.


« Je te le promet, petite. » dit-il solennellement.


Sans hésiter un seul instant, Damian utilisa l’aiguille pour s’entailler la main, laissant son sang s’écouler de sa plaie. Il tendit ensuite sa main vers Rose, la faisant passer par la fenêtre et laissant quelque gouttes du liquide écarlate couler sur le sol.


« Par ce sang qui coule dans mes veines, ce sang qui me viens de mes ancêtres, ce sang que je verse durant batailles et épreuve, je te fais le serment que si je sors de ces cachots, je ferai tout pour que tu puisse rencontrer ta sœur. Si elle peut être retrouvée, alors je le ferai. Que ce sang versé soit une preuve de mon engagement, que la marque qui en résultera serve à me souvenir de ce serment. »


Damian venait de pratiquer un serment du sang. Jadis, il s’agissait d’une promesse lourde de conséquence car il ne pourrait pas s’en délier, à aucun moment. Dans les temps jadis, ce genre de serment n’était utilisé que pour les plus grands serments, ceux impliquant une vengeance ou pour que deux guerriers se jurent loyauté éternelle en devenant frère de sang. Damian resta silencieux en attendant que Rose accepte son serment avant de se concentrer sur la façon de se détacher de ses liens. Cette aiguille était de bonne facture, elle pourrait supporter les manipulations que l’écuyer aurait à faire pour se libérer.


« Que peux-tu me dire sur ta sœur ? Concernant sa disparition, il court un nombre de rumeurs innombrables. Pour traquer sa piste, j’aurai besoin d’en savoir autant que tu pourras m’en apprendre. »


Se délestant de ses entraves, Damian écouta ce que la petite fille pouvait lui en dire. Il enregistrait les informations qu’il pouvait, et ce même s’il ne comptait pas faire que cette traque prenne le pas sur ses obligations en tant que membre de la lignée des al-Ghûl et du clan Wayne. Il ne lui resterait par la suite qu’à crocheter la porte de sa cellule ce qui serait une formalité. Ensuite, retrouver son équipement. Cette étape rendait son évasion incroyablement plus périlleuse, mais il y avait trop de choses dans celui-ci que Damian refusait de laisser entre les mains de son ennemi. Ensuite, il ne resterait qu’au jeune noble à se frayer un chemin jusqu’en dehors de York et fuir aussi loin que possible avant que l’alerte ne soit donnée. Mais il restait une chose qu’il devait demander à Rose.


« Je vois cependant un problème. Si c’est en mon pouvoir, je retrouverai ta sœur. Mais il me sera difficile de vous faire vous rencontrer. Je ne vais pas simplement me pointer ici avec ta sœur en espérant que ton père n’en profite pas pour me refaire goûter à son « hospitalité ». »

Depuis la fenêtre de sa cellule, malgré la pénombre de la nuit, Damian pouvait remarquer sans réellement de problème l’anxiété de sa jeune interlocutrice. Les raisons étaient aisé à en deviner, car elle craignait probablement la réaction de son père si celui-ci découvrait ce qu’elle faisait. Après tout, elle ne faisait rien de moins que libérer l’un des ennemi du seigneur des lieux. Ramenant sa main à lui après que Rose l’aie bander avec un morceau de tissu arracher à sa propre robe, Damian observa un instant sa dextre*. Ses yeux s’illuminèrent un bref instant dans le noir de sa cellule pour cicatriser la plaie, si bien qu’à la lumière, le tissu serait probablement à peine imbibé de sang. La fillette n’avait visiblement pas compris la signification du geste du jeune homme, ni sa portée, elle n’avait pas accepté son serment par ignorance… mais l’héritier des Orcades s’estimait néanmoins lié par sa promesse. Mais cela impliquait également certains risques pour elle.


« Tu as raison, petite. Je n’ai pas de temps supplémentaire à perdre. Cependant, l’autre solution pour que tu rencontre ta sœur au plus vite, serait que je t’emmène la chercher avec moi. Avant de partir, je dois récupérer mon équipement. Donne moi un lieu de rendez-vous, si je t’y trouve, on ira la chercher ensemble. Sinon, je t’y laisserais un gage que je reviendrai. »


La proposition de Damian était… inhabituelle pour lui. D’un point de vue pragmatique, si prendre Rose avec lui dans son évasion pourrait lui offrir un otage, elle compromettrait surtout ses chances de succès. D’une part parce qu’elle le ralentirait, de l’autre parce que le Roi-Mercenaire ne reculerait devant aucun effort pour récupérer sa dernière enfant. Mais le jeune noble tenait réellement à tenir la promesse faite à cette gamine qui encourait les pires risques en lui venant en aide. De plus, l’éloigner de ce barbare présenterait certains avantages. Le premier étant que si son évasion réussissait, il épargnait à Rose le risque de subir de mauvais traitement face au courroux de son père. Le second était d’un point de vue pratique, s’il parvenait à retrouver la grande sœur de Rose, la rencontre entre les deux sœurs en serait grandement facilité, Damian n’ayant qu’une confiance très limité en la capacité de la princesse disparue à empêcher son père de s’en prendre à nouveau à lui… et lui-même n’étant pas sûr de pouvoir se retenir de tenter d’exercer un vengeance s’il se retrouvait en présence du roi-illégitime de Northumbrie. Enfin, le dernier avantage serait d’à la fois enrager son geôlier au-delà de toute mesures mais aussi d’affaiblir davantage sa position en lui faisant perdre son dernier enfant. Mais dans tout les cas, Damian ne comptait pas faire cela au dépends de la princesse aux cheveux argentés.


L’assassin s’attelât immédiatement à crocheter la lourde serrure de sa cellule, tout en écoutant l’éventuel réponse de son interlocutrice. Bien qu’affaiblit, il gardait une grande maîtrise de ses mouvements, la perspective renouvelée de retrouver sa liberté le galvanisait, réveillant son esprit et rendant force à son corps malgré cette période interminable de privations, d’isolement et de mauvais traitements. Lorsque le mécanisme archaïque de la cellule céda, Damian l’ouvrit avec précaution, se réfugiant dans les ombres de l’escalier menant à un couloirs éclairé par des torches. Prenant le temps d’habituer sa vue à cette nouvelle luminosité, il inspecta le passage. En avançant il pouvait voir les autres prisonniers grâce aux judas présent soit dans les murs, soit directement à la porte. Ils étaient toujours prostrés dans leurs cellules, certains gémissant encore, perdant tout espoir.


Avançant avec précaution, n’émettant aucun bruit, le jeune homme avança jusqu’à la salle de surveillance. De l’intérieur, il entendait en émaner un ronflement rauque. D’un coup d’œil, il vit que le geôlier dormait au lieu de monter la garde. Il ne s’agissait pas du gardien en chef de cette prison, le geôlier et bourreau personnel de Slade, Lyle de Bolton**. Un être sadique issue d’une ville sur la frontière nord du territoire du maître de York, un individu qui avait été pour beaucoup dans les difficulté rencontrer par le jeune homme pour s’échapper et qui avait presque toujours participer aux séances de tortures qui lui avaient été infligé. Damian aurait bien aimé régler ses comptes avec cet homme, mais il devrait se contenter de ce gardien, un simple membre de la garde du château, mais qui n’avait jamais manqué une occasion de le brutaliser et de l’insulter. Inutile, incompétent, mais avec assez de cruauté pour faire un garde-chiourme passable.


S’infiltrant dans la pièce, Damian profita du sommeil de sa victime pour s’approcher. Mettant la main sur des chaînes prévu pour entraver un prisonnier de passage, il passa silencieusement dans le dos du garde trop imbibé de bière pour que ses sens puissent le sauver. Puis, utilisant les chaîne comme garrots, il enserra la gorge de son ennemi, et serra de toute ses forces, écrasant la trachée de sa victime, empêchant un quelconque son d’échapper de sa gorge tout comme l’air d’y entrer. Alors que le garde ne prenait que conscience du danger, Damian le fit tomber de sa chaise et le maintenait contre le sol, mettant son poids pour entraver les éventuels mouvements que son opposant pourrait faire pour s’échapper. Damian maintint sa prise malgré les vaines tentative de son ennemi pour se libérer, il serra, il serra encore, jusqu’à ce que le garde perde connaissance. Il maintint encore son étreinte pendant une minute ou deux pour s’assurer de la mort de son adversaire… bien qu’il aurait probablement été bien plus cruel de le laisser en vie pour subir les conséquences de son échec, Damian devait éviter que l’alerte ne soit donnée trop tôt. Crachant sur le cadavre, le jeune homme se remit au travail.


Réinstallant sa victime sur sa chaise, dans une position faisant penser qu’il était assoupi, Damian s’empara ensuite du seax*** de son ennemi ainsi que des clés de la prison. Un bref instant, Damian observa les autres cellules, il pourrait libérer les autres prisonniers de ces cachots, mais il n’en fit rien. Ils ne feraient que compromettre sa propre évasion et la plupart étaient de toute façon trop faible pour l’aider, même comme diversion. Une fois qu’il eut quitter les cachots, Damian lança le trousseau de clés de retour dans la salle du gardien… toujours pour gagner quelques précieuses secondes supplémentaires avant que l’alerte ne soit donnée.


L’arme à la main, ses sens aux aguets, son esprit analysant la situation et son corps tout entier prêt à réagir à la moindre menace, Damian s’élança dans les couloirs du château de York. Même dans son état de faiblesse actuel, Damian restait un maître assassins, parfaitement capable de se fondre dans les ombres en silence et à échapper à la vigilance de gardes qui, le plus souvent, ne s’attendaient de toutes façon pas réellement à rencontrer de menaces durant leurs rondes. Qui serait assez stupide pour tenter de s’en prendre au terrible maître de York ? Damian avançait sans faire le moindre bruit, son passage n’étant souvent rien de plus qu’un simple souffle d’air. Ses déplacement étaient maîtrisés, se déplaçant d’un couvert à l’autre sans être vu. S’il avait été en meilleurs forme, Damian aurait sans nulle doute put provoquer une hémorragie parmi les effectif de Slade… mais il ne pouvait s’y risquer.


La progression du jeune homme était laborieuse, il ne pouvait se permettre de rater son coup… car il n’aurait probablement pas d’autres occasions. La prudence lui dicterait de trouver un moyen de fuir aussi vite que possible. Mais le jeune homme refusait de laisser son équipement derrière lui. Certains de ses objets étaient important à ses yeux, comme son poignard et son épée, d’autres ne devaient pas rester entre les mains de son ennemi car issue de la confrérie et le Roi-mercenaire ne devait pas en découvrir les secrets… pas plus que ceux du clan Wayne. L’ouïe du jeune homme restaient à l’écoute des paroles des gardes et des serviteurs… guettant des infos qui pourraient lui être utile.


Il avait apprit dans une conversation que le Roi-mercenaire avait envoyé des hommes sur les terres du clan Wayne pour en savoir plus. À leurs tête, un vétéran de nombreuses campagnes, un mercenaire venu de l’est qui était connu pour son efficacité brutale et sa bestialité. Plus apte pour les raids devant inspirer la terreur que pour la récolte d’informations, mais qui obéirait néanmoins à ses ordres. D’autres gardes se plaignaient que la séances d’entraînements du lendemain serait diriger par un certain Lawrence, un instructeur particulièrement zélée. Des informations intéressantes sur les différents lieutenants de son ennemi, mais inutile en l’état. Jusqu’à ce qu’il croise la route de deux servante discutant de leur soirée. L’une d’entre elles parlant du fait qu’elle revenait d’avoir apporté de quoi se sustenter à un certain Isherwood, visiblement une sorte d’armurier, qui allait encore travailler toute la nuit dans son atelier à comprendre des objets étranges et mystérieux sur instruction de son seigneur. Il y avait fort à parier qu’il s’agissait de son équipement.


Cela lui faisait donc un indice mais il ignorait où se trouvait cet atelier. À priori, ce serait en souterrain, en un lieu où les flammes de la forge ne brûleraient pas les charpente et assez loin de l’ennemi pour protéger les réserves d’armes d’un tirs d’armes de siège chanceux. Mais cela pouvait encore être vaste comme zone à fouiller, et il n’avait pas toute la nuit.


C’est alors que la chance lui sourit à nouveau. Entendant un bruit venant d’un couloir voisin, Damian se réfugia derrière un con de mur. Il y vit un chevalier d’un certain âge avancer torche à la main. Damian l’identifia comme étant Wintergreen, le bras droit du roi-illégitime de Northumbrie… d’aucun dirait également qu’il était son âme. Mais dans son autre main, le conseiller tenait un objet que Damian reconnut immédiatement : Rouge-Gorge, son épée. Même si elle était dans son fourreau, le jeune homme pouvait parfaitement reconnaître la garde de sa propre lame.


Suivant Wintergreen depuis les ombres, celui-ci le mena jusqu’à une pièce reculée du château, une pièce qui ressemblait fort à un atelier où nombres d’armes, de pièces d’armures, et d’autres équipement étaient exposés aux côtés d’outils divers et varié. Un homme travaillait, éclairé par la lumière d’un torche vacillante. Les sens de Damian l’alertèrent immédiatement, cet homme était peut-être plus qu’il ne semblait être, il ressentait de manière diffuse la présence de magie en ces lieux.


« Belle soirée sir Isherwood. Je vois que vous êtes toujours plonger dans des abîmes de perplexités faces aux objets que le seigneur Wilson vous a chargé d’identifier.»
« Oh, c’est vous Wintergreen. Mes excuses je ne vous aie pas entendus rentrer. Votre piste a-t-elle été fructueuse ? »
« Pas autant que je l’aurais espéré je le crains. Nous avions déjà déterminé que le prisonnier appartenait à une noble lignée et était probablement originaire d’au-delà du mur d’Hadrien****, voir même de celui d’Antonin*****. J’ai passé la journée à interroger nos mercenaires écossais, notamment sur le clan Wayne car c’est vers celui-ci que nos soupçons nous ont porté. » expliqua le conseiller en déposant l’épée de l’héritier des Orcades sur l’établi.


Alors que Damian se faufilait dans l’atelier, passant de table en table, observant avec attentions les mouvements de ses proies… il s’interrompit soudainement à la mention du nom de son clan. Les recherches de son ennemi étaient bien plus avancée qu’il ne l’avait craint.


« Je n’ai pu en retirer aucune certitude concernant l’identité de ce pauvre garçon qui croupit dans nos geôles. Mais concernant le clan Wayne, celui-ci semble inspirer une certaines craintes à nos Scots. Beaucoup d’histoires, un certains respects parfois réticents… mais ils sont d’accord sur une chose, il ne vaut mieux pas avoir le clan Wayne pour ennemi. Quant à la lame, pour vérifier tes soupçons, je suis aller demander un deuxième avis. Elle est d’excellente qualité, et belle et bien constitué de fer météoritique. »
 « Pour une lame de cette qualité, le prisonnier doit être un membre haut-placé. Peut-être même l’héritier. Mais ce qui m’intrigue, ce sont ces équipements que nous avons retrouver dans ses affaires, un certains nombres d’entre eux ne ressemblent à rien de ce que j’ai pu voir jusqu’à présent : des bracelets avec des lames intégrées à l’intérieur, des potions comme je n’en avais jamais vu, et même certains outils dont j’ignore l’utilité... » exposa-t-il en montrant l’un desdits objets à Wintergreen.
« Entre ça et les étonnantes capacités de récupération dont il a... »


Ce fut à ce moment précis que Damian passa à l’action. Surgissant depuis les ténèbres comme lion bondissant sur sa proie, il plaqua contre la table Isherwood qu’il assomma ensuite d’un coup sur le crâne avec le manche du Seax qu’il maniait. La seconde d’après, laissant le corps inconscient d’Isherwood glissé sur le sol, il se porta contre Wintergreen. Le vieux chevalier avait déjà la main sur sa propre épée, prêt à dégainer, mais avant qu’il ne puisse sortir la lame de son fourreau, le tranchant de Seax de Damian se trouvait sous sa gorge pendant que la main droite de Damian s’était solidement refermé sur la garde de l’épée de Wintergreen. Le regard du jeune homme en disait long sur ses intentions, si Wintergreen tentait quoi que ce soit, il n’hésiterait pas un instant à l’égorgé.


« J’ai entendu dire que vous êtes homme d’honneur, Wintergreen. À se demander comment un être comme votre soi-disant roi à put s’attacher vos services. » chuchota Damian, même si le ton de la phrase impliquait qu’il n’attendait pas de réponse à cela.


Wintergreen ayant relâcher sa main de la poignée de son épée, pour signifier qu’il ne tenterait pas de répliquer, Damian la dégaina à son compte.


« Mettons directement les règles du jeux. Appelez la garde, mentez-moi ou tenter quoique ce soit. Et c’est votre collègue qui en paiera le prix. » fit-il en plaçant la point de la lame de Wintergreen au niveau de la jugulaire du corps inanimé d’Isherwood. Il lui suffirait d’un instant, d’une simple pression pour ôter la vie de sa victime.
« Vous n’êtes pas homme à mettre votre vie avant celle des autres, et je n’ai pas le temps de vous faire une démonstration de ce que mes outils peuvent faire. Donc soyons direct. J’ai pour mission de retrouver la trace de la princesse Joséphine. J’ai entendu nombres de rumeurs au sujet de sa disparition, mais j’aimerais entendre votre version. Répondez-moi honnêtement, et vous et votre collègue aurez la vie sauve, vous avez ma parole. »Chuchota-t-il toujours.


Une lueur mauvaise brillait dans le regard d’émeraudes du jeune homme. Même s’il n’avait rien contre Wintergreen et l’autre type, ils étaient des serviteurs du seigneur Slade… et rien que pour cela, des cibles légitimes à ses yeux à cause de la haine qu’il éprouvait pour cet homme. Mais il espérait ne pas avoir à en arriver là. D’une part, parce qu’il répugnait à tuer des hommes honorable, de l’autre parce qu’il avait clairement perçut dans les parole de Rose, quand elle avait évoqué son oncle Wintergreen, qu’elle tenait à ce vieillard.


« La rumeur la plus persistante dit que le Diable en personne l’a emporté. Sur votre honneur, est-ce le cas ? »


Tout les sens de Damian étaient en éveil, guettant le moindre signe que son interlocuteur chercherait à lui mentir, de si des ennemis approchaient de sa position. Il n’avait pas beaucoup de temps, dès qu’il aurait les infos dont il avait besoin, il assommerait son interlocuteur, récupérerait son équipement puis filerait aussi loin que possible de cette ville maudite.


« Et si vous vous posez là question. Non, je ne veux pas de mal à la princesse. Mes griefs sont contre votre maître, pas contre sa progéniture. Contrairement à lui, je n’ai pas goût à m’attaquer à plus faible que moi. »

* Dextre: la droite, plus souvent pour parler de la mains droite.
**Version médiv de Double-Tour
*** Seax: couteau à un seul tranchant, aussi appelé Scramasaxe, dont la lame fait autour de 50cm. Il s'agissait de l'arme emblématique des anglo-saxon, certains chercheurs estimant que le terme saxon est directement dérivé de cette lame.
****Mur d'Hadrien: fortification marquant la limite entre la Bretagne Romain et la Bretagne Barbare. Correspond plus ou moins à la frontière entre l'Angleterre et l'Écosse.
*****Mur d'Antonin: autre ligne de fortification marquant l'avancée la plus lointaine mené par les Romains en Écosse, à peu près au niveau d'Edimbourgh.

Alors que Wintergreen répondait, Damian n’avait pas relâcher son emprise d’un iota. La lame du Seax qu’il avait volé au gardien caressait toujours la gorge de son interlocuteur, pendant que l’épée qu’il avait dérobé à Wintergreen menaçait toujours la gorge d’Isherwood. Le jeune homme était attentif, pas seulement aux réponses du bras droit de son ennemi, mais aussi aux expressions de son visages, aux positionnement de ses mains, à sa respiration, aux clignements de ses yeux… tout les éléments qui pourrait lui indiquer que cet homme lui mentait où s’apprêtait à tenter une action stupide.


Heureusement, stupide il ne semblait avoir oublier l’être et il obtempéra. Après un instant d’étonnement quant à la nature des question du prisonnier, Wintergreen confirma les histoires qui étaient chuchoté au coin du feu. Slade avait bien fait un pacte avec le Malin en échange de quelque chose, s’il devait hasarder une supposition, cela avait à voir avec les capacités exceptionnels dont le roi-mercenaire faisait preuve qui dépassait de loin celle d’un humain normale. Les sourcils du jeune hommes se froncèrent alors qu’il réfléchissait aux implications des paroles de Wintergreen. Soit ce soi-disant roi était un idiot, soit un faible pour s’abaisser à passer un pacte dont sa propre progéniture aurait à en payer le prix.


« J’ai un avantage sur ton maître, je ne suis pas lui. » asséna-t-il avec un mépris non dissimulé.


Sur ces paroles, l’ancien captif retira la lame de la gorge du corps inconscient d’Isherwood… et utilisa le pommeau de celle-ci pour assommer Wintergreen d’un coup sur la tempe… après tout, il ne leur avait promis que la vie sauve. Les deux hommes gisant sans connaissances à ses pieds, Damian ne perdit pas de temps pour récupérer ses affaires. Son épée, ses armes, ses équipements spéciaux… tout pour les revêtir.


La phrase qu’il avait dit à Wintergreen avant de l’assommer n’était pas seulement une illustration du mépris qu’il éprouvait pour son geôlier, mais aussi un fait. S’il y avait bien pacte démoniaque, et que le roi-illégitime était l’un des contractant, il pourrait essayer autant qu’il pouvait il était improbable qu’il parvienne à récupérer sa mise. Tel était souvent la nature de ce genre d’accord… à moins de renoncer à la totalité de ce qu’il avait gagner par ce pacte ou d’offrir quelque chose qui aurait encore plus de valeur aux yeux du Démon, la seul chance pour la liberté de la fille du roi-illégitime passait par une intervention extérieur… et même là ce ne serait pas une quête dans laquelle il devrait se lancer à la légère. Même avec l’entraînement et l’éducation qu’il avait reçut, même avec la longue tradition du clan Wayne d’affronter les créatures issus des plus sombres ténèbres… ce serait du suicide d’y aller à l’aveugle.


Ce fut à ce moment qu’il entendit un cri retentir. Il n’en était pas sûr à cet instant, mais cette voix lui disait quelque chose. Finissant de s’équiper, il se mit en route en direction de l’endroit d’où avait provenu le hurlement. Continuant sa progression à pas feutrée, profitant de la pénombre et du camouflage qu’offrait l’épais tissus sombre de sa cape, il avança jusqu’à pouvoir constater ce qu’il avait déjà deviner. Il vit Rose, en fâcheuse position entre les mains de son géniteur.


En temps normale, le choix rationnel serait de la laisser derrière. Intervenir compromettrait ses chances de quitter cette ville maudite, mais plusieurs raisons le poussait néanmoins à considérer l’idée de passer à l’action. Pour commencer, il était redevable à Rose. Elle avait prit des risques immenses pour lui venir en aide et risquait à présent d’en payer le prix. Ensuite, quoi qu’il en pense, le maître de York était loin d’être une simple brute sans cervelle. Le Roi-mercenaire n’aurait aucun mal à faire le lien entre le comportement de sa fille et sa disparition. Et enfin, le fils du Mormaer des Orcades brûlait de jouer la revanche avec son geôlier… mais différemment cette fois.


Sans perdre un instant, Damian se prépara. Il sortit une fiole contenant un liquide visqueux de couleur jaune translucide et en versa sur plusieurs de ses couteaux de lancer. Ce fut à ce moment que la principale blessure que lui avait infliger son tortionnaire se rappela à son bon souvenir. Les deux doigts qui avaient été sectionné dans sa main droite, il ne pouvait pas utiliser celle-ci pour lancer ses projectiles sans risquer que certains dévient de leur trajectoire. Bien qu’étant parfaitement ambidextre, il avait toujours eut l’habitude de lancer de cette main, mais pour cette fois, il devrait le faire de l’autre, jusqu’à ce qu’il se soit entraîné. Mais cela ne signifiait pas que sa dextre serait inutile dans ce combat.


Le jeune noble profita de la pénombre et du fait que sa cible avait pour l’instant son attention détourner pour avancer. Il se rapprochait, utilisant toutes ses compétences et son talent pour qu’aucun son ne s’échappe alors qu’il approchait. Si son ennemi se doutait de sa présence avant qu’il ne frappe, il était finit… il n’avait pas réussit à le vaincre en duel en possession de l’essentiel de ses moyens, ce n’était pas après son séjours prolonger dans les cachots de York qu’il serait en mesure de le vaincre à la loyale.


Dès qu’il fut assez près pour être sûr de ne pas manquer son coups, le jeune homme passa à l’action, d’un geste, il projeta les quatre poignards qu’il tenait dans sa main. Conformément à son attente, le sifflement des lames fendant l’air alerta son adversaire, mais s’il se retourna pour faire face au danger, il ne pouvait esquiver l’attaque sans risquer que sa dernière progéniture. Les couteaux, en tout cas la plupart, se plantèrent profondément dans le roi-illégitime. Les lancés n’avaient peut-être pas été aussi précis qu’il ne l’aurait voulut, mais il avait sut jeter ses armes de manière à ce qu’elles aient un léger retard l’une par rapport à l’autre… rendant leur parade malaisé. Sans laisser le temps à son adversaire de se reprendre, Damian fonçat vers lui, toujours dissimulé dans les ombres, jetant de sa main droite une fiole sur son ennemi. Celle-ci contenait un puissant narcotique issue d’un mélange de différentes plantes opiacée. La fiole se brisa au pied de son adversaire, libérant sa substance et surtout les vapeurs dont la simple inhalation suffirait au guerrier borgne à voir ses réflexes grandement ralentit, ses pensées s’embrouiller.


Passant un chiffon au préalable humidifié sur son visage pour se protéger des émanation, Damian se jeta sur le roi-illégitime. Il évita de justesse la contre-attaque de son ennemi, un coup qui aurait put l’étaler au sol s’il l’avait encaisser. Il fallait l’avouer, cette esquive tenait moins aux talents de combattants de Damian qu’à l’affaiblissement des capacités de son ennemi. D’une part, le narcotique avait engourdit son adversaire, mais de l’autre le venin d’Echis* dont les poignard de Damian avaient été enduit soigneusement. Ce serpent originaire d’Égypte produisait un venin particulièrement apprécié par le tueurs de la Confrérie des Ombres. D’autres serpents produisait un venin plus toxique ou violent, mais celui de l’echis restait létal même pour un homme et surtout était très virulent, ne mettant que quelques minutes à faire effets. Profitant de l’ouverture qui lui était offerte, Damian dévoila la lame dissimulé dans l’un de ses brassards et la planta dans le bras qui tenait de son ennemie de manière à ce qu’il lâche Rose.


Se tenant toujours le chiffon devant le visage, se baissant pour se soustraire à un puissant coup d’épée d’un Slade de plus en plus désorienté par les effets du poison, le jeune homme n’avait pas le temps de poursuivre le combat… bien que cela le démangeait. Jetant quelque chose dans la torche la plus proche, un nuage de fumée en émergea, cachant à la vue de tous tout ce qui se passait en son sein. Attrapant une Rose passablement groggy par l’effet des narcotique, il s’élança en direction des écuries. Il n’était qu’une question de minutes avant que l’alerte ne soit donnée… mais il doutait que le Roi-mercenaire soit en mesure de les poursuivre lui-même maintenant que le venin était dans son sang.


« Ne t’inquiète pas pour lui, petite. Je doute d’avoir la chance d’être débarrassé de lui. »


Alors qu’il s’élançait sur le cheval qu’il avait voler aux écuries du château en direction des portes, ouverte pour accueillir le retour prochain d’une patrouille. Il aurait aimé rester pour en finir avec le roi-illégitime de Northumbrie, mais cela lui coûterait probablement la vie. Il pouvait toujours se consoler en sachant les journée de souffrances qu’aurait à endurer sa némésis avant que son corps n’évacue le poison. Le venin de l’echis était particulièrement virulent, et la dose que Damian avait introduit dans le système de Slade aurait été suffisant pour terrasser un destrier… mais les capacités surnaturelles du Roi-mercenaire faisait dire à l’héritier des Orcades qu’il n’avait pas finit d’entendre parler de celui-ci et de ses méfaits.


Mais son évasion constituerait déjà une belle vengeance, une humiliation pour le maître des lieux. Pour les jours de souffrances qu’il avait subit dans les cachots de son ennemi, ce dernier souffrirait le brûlure du poison pour des jours entiers. Pour les doigts qu’il lui avait tranché, il libérait la dernière enfant de son adversaire de l’influence néfaste de celui-ci. Alors qu’il quittait le château de York, veillant sur une Rose qui peinait à restée consciente, Damian se dirigea vers la ville. Derrière lui, il entendait que l’alarme était donnée, ça allait bientôt fourmiller de gardes et autres larbins du Roi-mercenaire à leur recherches. S’approchant du Ouse**, le cours d’eau séparant la cité en deux, Damian descendit de sa monture et aida Rose à en faire de même avant de lancer la monture au galop en direction de la porte de la cité la plus proche pour faire diversion.


« Quoi qu’il arrive petite, accroche toi bien. » dit-il en rabattant la capuche de Rose sur la tête de cette dernière, histoire de dissimuler sa chevelure blanche qui constituait un élément très repérable dans la nuit noire.


Le jeune homme avait envisagé plusieurs itinéraires d’évasion depuis qu’il avait été enfermé. Mais de tous, celui qu’il s’apprêtait à faire était probablement l’un des derniers choix qu’il aurait fait. Malheureusement, les autres options étaient actuellement compromise par le fait que son évasion était à présent connue. L’une des seuls options qui leur restait consistait à utiliser le courant de l’Ouse pour quitter la ville par l’un des seuls accès qui ne pourrait être scellé. Les personnes sachant nager étaient loin de former le gros de la population, même parmi ceux vivant sur les côtes ou près de voies navigables, aussi cet itinéraire ne serait probablement pas celui auquel penserait le gros de la garnison. Damian faisant partie de cette minorité de personne capable de nager, y ayant été initié durant sa jeunesse dans l’empire Byzantin***. Mais tel n’était pas forcément le cas de Rose encore affecté par le narcotique. Aussi, Damian décida de la prendre sur son dos et de l’attaché avec une corde. Il devrait faire attention à ce qu’elle aie accès à l’air de manière régulière… ce qui compromettait encore ses chances de s’en sortir.


L’agitation gagnait en intensité dans les rues de York alors que les hommes du roi-illégitime de Northumbrie poursuivaient leurs recherches des fugitifs. Damian se glissa alors dans l’eau, doucement pour éviter d’attirer l’attention. Il pouvait sentir le contact gelé des eaux de l’Ouse toucher sa peau, refroidir son corps, et au passage offrir un réveil désagréable à Rose, mais il poursuivit sa progression néanmoins. Son équipement le gênait tout comme le fait d’avoir à surveiller que Rose ne se noie pas. La progression était lente, méthodique, il s’arrangeait pour laisser le moins de traces possible de sa présence. Quand il le pouvait, il refaisait surface à l’ombre d’une barque ou d’un bateau, ou alors sous un quais de bois s’il n’était pas trop occupé, pour reprendre son souffle et permettre à Rose d’en faire de même. Cette dernière commençait à grelotter, mais affrontait néanmoins l’adversité avec courage. Et elle avait intérêt à en avoir à revendre car pour les jours à venir le confort serait un luxe qu’ils ne pourraient s’offrir.


Une chose qui facilitait cependant leur fuite, c’était le courant de la rivière qui était leur allié. Celui-ci se dirigeant vers le sud, Damian et Rose pouvaient se laisser porter pour économiser l’énergie. Ce qui était bienvenu étant donné que Damian commençait à sentir la lassitude le gagner. Entre les privations et mauvais traitements de ces derniers jours, les efforts qu’il devait fournir et le froid de l’eau dans laquelle ils se trouvaient… tout cela commençait à prélever un tribut sur l’endurance du jeune noble.


Finalement, au bout d’un temps interminable, Damian et Rose parvinrent à quitter la cité par la voie maritime. Ils durent néanmoins attendre d’être suffisamment éloigner de la ville et de trouver un endroit hors de vue pour enfin rejoindre la rive. Tout deux étaient trempées jusqu’à l’os, frigorifié après un bain de minuit prolongé, mais ils ne purent se reposer que quelques minutes avant de se remettre en route, le temps pour le fils du Mormaer des Orcades de reconnaître le terrain.


« On doit se remettre en route. On essaiera de se procurer une monture quand on se sera suffisamment éloigner de York, mais en attendant, il faut que ton père disperse autant que possible ses forces avant qu’il n’aie la moindre idée de la direction dans laquelle nous sommes allés. On va devoir avancer en évitant les principaux axes… »


Damian s’arrêta soudainement de parler. Il avait tendance à oublier que son interlocutrice était une gamine de 7 ans qui venait de tout abandonner derrière elle pour accompagner un individu qu’elle connaissait peu, tout cela parce qu’elle avait eut un rêve où celui-ci venait en aide à la grande-sœur qu’elle n’avait jamais connu. Damian soupira un coup. Il n’était pas à proprement parlé doué pour rassurer les gens. Il tapota légèrement la tête de Rose, bien que son expression faciale fut loin d’être chaleureuse. On pouvait y lire la fatigue qui commençait à prendre ses droits malgré la lueur déterminée qui habitait encore son regard.


« Je ne vais pas te mentir Rose. Les prochains jours vont être difficiles, même très difficiles. Et pour ce que ça vaut, tout ce que je peux te promettre c’est que je veillerai sur toi jusqu’à ce qu’on aie retrouvé ta grande sœur. En route, nous aurons au moins l’occasion pour t’apprendre à te battre avec un couteau. »


La démonstration qu’avait offerte Rose sur son maniement des armes courtes laissait quelque peu à désirer. Mais la proposition de Damian n’était pas forcément innocente, dans les jours qui arrivaient, il n’aurait pas autant d’autonomie qu’il ne le voudrait et donc il fallait que Rose soit, dès que possible, en mesure de se débrouiller. Mais pour commencer, ils devaient s’enfoncer dans les bois pour s’éloigner de la route… si possible trouver un endroit où ils pourraient se reposer en sécurité, mais Damian comptait avancer autant que possible tant que l’obscurité régnait en maître… quitte à devoir porter la fille de son ennemi.


« Dernière chose à mettre au point, petite. Si les hommes de ton père arrivent à nous mettre la main dessus… officiellement je t’ai emmené contre ton gré. Dans tout les cas si je suis capturé, je ne pense pas que Slade me laissera vivre, toi t’as peut-être encore une chance de t’en sortir sans trop de dommages s’il croit que tu n’as rien à voir là-dedans. »


Damian ne croyait pas son ennemi assez stupide pour gober cela, mais s’il n’avait ne serait-ce qu’un doute là-dessus, Rose pourrait espérer… en tant que sa seul enfant, éviter une punition trop sévère. Mais il allait s’arranger pour qu’ils n’aient pas besoin d’en arriver là. Alors qu’ils s’enfonçaient dans les bois en direction du Sud-ouest, leurs vêtements encore trempées, Damian faisait attention à trouver le moyen d’effacer leurs traces.

*Echis: serpent de la famille des vipères, très présent en égypte où il est appelé le serpent des pyramides. Il s'agit de l'une des espèces les plus dangereuses à cause de la virulence de son venin (et la rapidité de celui-ci pour entrer en action) mais aussi à cause de son agressivité.
** Ouse: Rivière traversant la ville de York du nord vers le sud
***: à l'époque Romaine, l'apprentissage de la natation faisait partie du cursus des citoyens romains. Son successeur, l'empire byzantin, ainsi que les villes-états italiennes ont, semble-t-il, garder cette habitudes d'éducations, du moins pour ses familles patriciennes.