« Doux souvenirs d'enfance » ft. Raven

_____Deux ans depuis ma résurrection, le temps file mais les emmerdes sont toujours là. Deux ans que je vis dans un cauchemar, pensant que ma situation ne pouvait pas être pire, pour finalement plonger tête baissée dans un autre. Lorsque je suis revenu d’entre les morts, une partie de mois n’étaient pas revenu. Mes pouvoirs ont changé, devenant beaucoup trop puissant et j’ai été pendant un long moment atteint d’amnésie. Je ne savais pas où j’étais, où je me trouvais, ni les personnes qui étaient autrefois mes amis. Je n’étais même pas parvenu à reconnaitre mon propre père à l’hôpital. Tout le monde a senti que quelque chose n’allait pas mais personne n’était capable de comprendre la cause précise de mon mal.

J’ai été entouré, ils s’étaient tous passé le mot. Du petit personnel médical aux jeunes justiciers, aucun n’était parvenu à trouver une réponse à mon mal. A cette époque, je m’étais isolé pour éviter de causer du tort à la population, dans un des refuges d’une jeune équipe de super-héros, en plein cœur de San Francisco. J’ai perdu le contrôle de ce parasite mental pour me rendre compte qu’il avait troubler le mental de beaucoup de civils innocents. Les justiciers m’ont arrêté à temps, je me suis senti coupable un long moment. Pour que je ne sois pas envoyé en prison, j’ai accepté un compromis avec les autorités. Ils m’ont prescrit des neuroleptiques puissants, additionné à des antidouleurs et des neuroleptiques pour m’empêcher d’utiliser des pouvoirs, des médicaments qui m’avaient entrainé dans un état quasi léthargique. J’ai fini par adopter une certaine addiction à ces médicaments, une addiction qui demeure encore aujourd’hui.

J’étais désespéré, prêt à tout pour comprendre ce qui était en train de m’arriver. J’en suis arrivé à prendre contact avec John Constantine, un homme peu fréquentable mais mon dernier espoir. C’est lui qui m’a mis sur la piste du démon. Il s’appelle Amy, ancien Président des enfers banni par Trigon qui s’est retrouvé à marchander pour survivre. Nos âmes étaient reliées entre elles, impossible de nous séparer sans me tuer.

Mes pouvoirs ont toujours attiré les convoitises des vilains et les rumeurs ont commencé à se répandre. Avec plusieurs tranquillisants dans les veines, j’étais inoffensif pour les civils, mais vulnérable. Un homme en a profité, Degaton. Cet odieux personnage était parvenu à instaurer une dictature fasciste dans toute l’Europe et pour la maintenir, il avait besoin de bras. Ses soldats m’ont enlevé et m’ont confié entre les mains d’un nécromancien, Anton Arcane. Entre ses mains, j’avais vécu les pires sévices. Ils savaient que j’aurais préféré mourir que d’utiliser mes pouvoirs sur des vies innocentes, ils voulaient Amy. Ils ont mis deux mois avant de le réveiller, deux mois de sévices qui m’auraient détruit psychologiquement encore aujourd’hui si je n’étais pas devenu amnésique. J’avais très peu de souvenir de cette période, seul les marques sur mon corps m’aidaient à me rappeler de cette sombre période. Je ne savais pas si c’était une bénédiction ou une malédiction d’avoir développer une amnésie traumatique. Peu importe, je savais que j’avais fait du mal.

Presque sept mois plus tard, j’ai réussi à m’échapper de cet enfer. Malheureusement, ma réputation n’a jamais été aussi bas. Une fois avoir posé le pied sur le sol américain, j’étais devenu l’ennemi public numéro un. Je venais à peine de reprendre le contrôle de mon corps qu’il me fallait de nouveau fuir. J’étais poursuivi par les autorités, jugé pour crime de guerre et de nombreuses accusations que je ne préférais pas énumérer. Un malheur n’arrivant jamais seul, j’étais également poursuivi par des ennemis de mon parasite, Amy, des démons engagés pour assassiner leur ancien collègue.
J’errais sans fin, sans foyer à la recherche d’un miracle. L’odeur démoniaque a fini par ramener John Constantine à mes côtés qui m’a proposé un refuge, la Maison des Mystères, sa demeure mystique, incapable à localiser, une opportunité que je n’ai pas pu refuser. Je suis resté chez lui pendant plus d’un an. Entre les cadavres de bouteille de bière, il m’apprenait à contrôler mes pouvoirs psychiques, à contrôler mes émotions et ceux d’Amy, à rester maître de mon corps. Entre temps, Ray Palmer avait retrouvé ma trace et m’avait proposé de rejoindre son académie pour renforcer mon entrainement et être entouré de professionnel mystique. Avec les autres élèves, ce n’était pas rose tous les jours. Malgré le discours de Palmer, beaucoup avait du mal à me tolérer, je les pardonnais presque. Ils ne savent pas toute l’histoire…

Au moment où je pensais avoir la tête hors de l’eau. Waller à débarquer avec son équipe de super-vilains, la Suicide Squad pour m’arrêter. Elle s’en était prise à toute la Justice Academy, mais avait échoué. Pour l’arrêter, il a fallu mettre au courant les autorités américaines. Ray était parvenu à les convaincre de ne pas m’envoyer en prison, mais je devais être jugé pour mes actes.

Cella fait quelques jours que je suis coincé à l’Academy. Mon réveil a sonné, j’ai ouvert les yeux sans savoir pourquoi je devais sortir de mon lit. Je suis dans un établissement scolaire, mais je ne pouvais plus assister aux cours. Cela faisait partie des nombreuses conditions pour ne pas finir au fond d’une cellule. J’ai rampé hors de mon lit avec une certaine nonchalance. Ma chambre est un bon en bordel, j’enjambe la pile de vêtement pour rejoindre la salle de bain. Les quatre murs de la chambre et la porte d’entrée sont marqués par de nombreux symboles mystiques, un verrou magique empêchant Amy de s’évader s’il prenait le contrôle de mon corps.
Je me suis tourné vers le miroir de la salle de bain pour le petit rituel du matin. J’observais les nombreuses marques que m’avaient laissé mon démon cette nuit. Difficile de contenir la force mystique d’une créature démoniaque dans le corps d’un être humain. Il finissait toujours par créer des hématomes et, dans le pire des cas, des fractures aux extrémités. J’ai une tronche horrible, un corps meurtri, j’ai grimacé avant d’ouvrir ma boite à pharmacie. Elle est pleine à ras-bord d’anxiolytique, neuroleptique, antidouleur et antipsychotique. Quelques boites sont tombées dans le lavabo, putain. J’ai grogné, impossible d’organiser cette armoire pour que tout rentrer. J’ai attrapé la première boite d’antidouleur pour prendre trois gélules et un neuroleptique, plus une pulsion qu’une nécessité. Les bracelets métalliques qui étaient restés toute la nuit sur mes poignets avaient la réputation de bloquer mes pouvoirs psychiques. J’ignore s’ils en étaient réellement capables, je n’ai pas essayé de jouer au petit malin.

J’ai essayé d’être un minimum présentable pour ma promenade matinale. J’avais encore le droit de sortir un peu prendre l’air, mais je devais limiter mon incroyable marathon aux endroits peu fréquenté. Il y avait un homme devant ma porte, un soldat engagé pour surveiller mes moindres faits et gestes. Oui, je ne me suis jamais aussi senti épié qu’en ce moment. Je suis sorti de ma chambre, il m’a dévisagé du regard.

« Je veux simplement me promener. » signais-je. Heureusement, ils avaient sélectionné quelqu’un de compétent pour comprendre mon langage. « Tu veux me tenir la main ? » J’essayais de garder mon sens de l’humour, même si la situation ne s’y prêtait pas vraiment.

« Ne joue pas au plus malin. » rétorqua-t-il froidement mais restant à sa place. « Je t’ai à l’œil. »

« Je sais. »

Je me suis doucement éloigné. Il me suit de loin. De toute évidence, même si je tapais mon meilleur sprint, je ne pourrais pas le semer. En plus des nombreuses précautions, j’avais eu aussi le droit au coup du traqueur sous ma peau. Il pouvait donc se permettre de s’éloigner de moi pour fumer sa clope en me poignardant dans le dos avec son regard revolver. Peu importe, j’ai essayé d’ignorer tout ses tracas pour me focaliser sur l’une de mes seules sorties du jour. Plus tard, peut-être que j’aurais un peu de temps pour fumer mes derniers grammes d’herbe magique.

_____Mes yeux se baladèrent par-dessus mon épaule, je vérifiais mécaniquement qu’il ne me suivait pas. En fait, je savais qu’il n’allait pas me laisser seul bien longtemps, mais je savourais ces quelques minutes de tranquillité. Il m’observait de loin, en bas des escaliers extérieurs qui menaient à mon petit appartement. J’ai essayé de m’éloigner un peu plus en accélérant un peu le pas. Je connaissais cette cour un peu excentrée de l’académie, elle n’était que très peu fréquenté, surtout pendant ces horaires-là. Les étudiants étaient tous en cours pendant que je faisais l’école buissonnière sans le vouloir. Ma scolarité était un peu à part avant que les autorités me tombent dessus. J’avais le droit à des cours privés avec Jason Blood, quelques cours d’entraînement avec les autres étudiants. Hors de l’académie, je passais un peu de mon temps en compagnie de John qui partageais ces petites astuces pour m’apprendre à contrôler le démon qui partage ma vie.

J’ai senti une présence m’observer ou alors que je me pensais seul au monde. Je n’étais pas très attentif au monde qui m’entourait. Les médicaments diminuaient ma concentration sans que j’en prenne réellement conscience. Mon regard est resté vide quelques secondes supplémentaires avant de se balader vers la présence.
Mon sang ne fait qu’un tour, je l’ai directement reconnu. Des femmes comme elle, il n’en existe pas. Je me suis arrêté en pleine balade pour me tourner vers elle, clignant rapidement des paupières comme pour m’assurer que ce n’était pas un rêve. Raven était là, juste devant moi et je sens mon rythme cardiaque s’accélérer. Je suis resté immobile quelques secondes, inexpressif, sous le choc. S’il ne s’agissait pas d’un rêve, mon cerveau avait besoin d’un peu de temps pour être certains que ça ne soit pas un effet secondaire de mes médicaments.

Doucement, je me suis rapproché d’un pas vers elle. Je me souvenais de tout, je n’étais qu’un gamin, un adolescent qui arrivait à peine à se faire une place parmi les Titans. J’ai fini par me faire apprécier par tout le petit groupe, Dick est devenu mon meilleur ami. Raven, elle, avait gardé une place toute particulière dans mon cœur. Elle était là dans les moments de faiblesses, j’ai fait de mon mieux pour lui rendre la pareille. Je voulais qu’elle se sente bien à nos côtés, je voulais le meilleur pour elle, mais le destin en avait décidé autrement.

Après quelques secondes, je ne pouvais plus cacher ma joie. Un large sourire se dessinait sur mon visage, mes yeux radioactifs pétillaient. A défaut de pouvoir communiquer avec mes cordes vocales, j’étais devenu assez expressif. Cela faisait combien de temps ? Deux ans, peut-être même trois que je ne l’avais pas vu. Elle m’a aidé à revenir d’entre les morts, je lui dois beaucoup. Je me retiens de la prendre dans mes bras, elle n’aime peut-être pas ça. Heureusement, avec le temps, j’avais développé de nouveaux moyens pour communiquer avec mon entourage, sans qu’ils s’efforcent à apprendre une nouvelle langue pour moi.
Mon téléphone, dernière cri possédant un émetteur subvocal, retranscrivant mes pensées directement dans ses hautparleurs. La voix n’était pas complètement parfaite et me donnait parfois des airs de robot humanoïde, mais j’avais presque l’impression d’être normal avec ce petit appareil.

J’avais tellement de chose à lui dire. Dès que je suis parvenu à calmer mon excitation de la revoir, j’ai repensé à ce qu’elle pouvait se dire dans un coin de sa tête. Elle devait probablement culpabiliser pour ce qui m’était arrivé. Peut-être qu’elle n’était pas revenue à cause de ce qui était arrivé, à cause de

« Raven ! Si je m’attendais à te voir ici ! » Le téléphone marchait plutôt bien. « Ça fait tellement longtemps… T’imagines pas à quel point je suis heureux de te voir ici. Tout va bien ? » Je prends le temps de la regarder un peu plus en détail. Les années ont passé, mais elle est toujours aussi merveilleuse. « J’avais entendu des rumeurs concernant un nouveau prof mais je ne voulais pas y croire. C’est dingue… »

Malheureusement, il y a quelqu’un, dans cette cour qui n’est pas heureux de croiser Raven. Il est là, je l’avais presque oublié. Il se terrait dans un coin de ma tête, observant à travers les yeux la fille d’un homme qui l’avait privé de tout. Je pouvais ressentir cette colère qui l’animait, une colère qui me bouffait de l’intérieur. En partageant la même âme, nous partageons mutuellement nos émotions, nos peurs, parfois même nos souvenirs. Avec John, j’avais fini par apprendre à différencier les émotions du parasite au mien.
J’ai essayé d’ignorer sa rage, son mépris à l’égard de Raven. Il ne l’avait probablement jamais croisé de son vivant. Elle n’est pas digne de confiance. C’est la fille d’un lâche. Tue-la ! BRISE SES OS. Je l’entendais me hurler dessus dans un coin de ma tête. Mes paupières sont froncées, j’ai senti une douleur désagréable au fond de mon crâne. J’ai reculé d’un pas, massant nerveusement le haut de mon crâne avec l’une de mes mains. Bon sang, il n’allait jamais me foutre la paix celui-là ?!

« Désolé je… j’espère que tu ne l’entends pas. »

_____J’aurais aimé pouvoir répondre à ses questions, mais Amy avait une fâcheuse tendance à gâcher mes retrouvailles avec mes amis d’enfance. Lorsque sa rage devenait incontrôlable, la migraine devenait difficilement supportable. C’est à ce moment-là que j’ai regretté de ne pas avoir pris des antidouleurs, en prévision. Les médicaments étaient censés calmer sa présence, mais sa colère était si puissante qu’elle surpassait tout ceux qui se mettait en travers de sa route. Je pensais que ça serait l’histoire de quelques secondes, mais ses émotions négatives étaient trop grandes pour que je les contienne. Bientôt, je serais incapable de discerner mes émotions des siennes et l’idée de m’en prendre à Raven me rendait malade.
Alors que je tentais vainement de calmer les migraines en me massant le crâne, j’ai pu entendre un croassement familier entre les cris de rage d’Amy. J’aurais reconnu ce bruit entres milles. Je me souviens de cet oiseau, il n’était qu’un bébé à l’époque où Raven l’avait adopté. Pour la blague, je lui avais donné un prénom ridicule, j’étais jeune et terriblement taquin à l’époque. Je suis certain qu’elle avait gardé le nom que je lui avais donné pour me faire plaisir. Avec le temps, et ma disparition soudaine, elle avait peut-être trouvé le temps de lui trouver un meilleur prénom.

J’ai reculé d’un pas, en prévention. Si je devais faire du mal, elle devait se tenir prêt. Je n’étais pas assez concentré pour la prévenir. Tout d’un coup, j’ai redressé mon regard et ses yeux ont croisé mes pupilles radioactives. J’ai senti une aura traverser de part en part mon esprit pour s’engouffrer au fond de mon subconscient, une zone inatteignable pour le commun des mortels. L’espace de quelques secondes, j’ai ressenti un léger soulagement avant de le sentir disparaître complètement de ma tête. Mon regard s’est perdu, c’était comme si je venais de perdre un morceau de moi, un morceau toxique. Cela faisait bien longtemps que je ne m’étais pas sentis seul dans ma tête, une sensation agréable mais qui m’était étrangement peu familier depuis ma résurrection.

« Ouah… c’est… » Je ne parvenais pas à retrouver les mots, j’étais encore un peu égaré, j’avais peut-être besoin de quelques secondes de plus. « C’est… bizarre. »

Raven avait probablement puisé beaucoup d’énergie. Je la sens vacillante, un peu honteuse d’être entrer dans ma tête sans mon consentement. Je ne pouvais pas lui en vouloir, elle voulait m’apaiser d’un mal qui me bouffait depuis plus d’un an maintenant. Après avoir récupérer une partie de mes esprits, j’ai posé avec hésitation, ma main sur son épaule, près à la rattraper si elle perdait l’équilibre. Malgré l’aide qu’elle m’avait apporté, elle s’en voulait toujours d’avoir réagit au quart de tour, je me devais de réagir.

« Non… Non tu n’as pas mal agi, je t’assure. » J’ai laissé échapper un sourire amusé. « D’habitude, c’est moi qui rentre dans la tête des gens sans prévenir. C’est le karma qui me rattrape ! »

C’était bien ce qui m’avait couté la vie. A l’époque où Raven se sentait au plus mal, j’ai voulu lui apporter mon aide en rentrant dans son esprit. Malheureusement, je fus accueilli par son père, Trigon. La suite, les Titans la connaisse, moi aussi, j’ai préféré perdre la vie, demandé à mon propre père de m’achever, plutôt que de laisser ce démon faire du mal à mes amis, à des vies innocentes, grâce à mes pouvoirs. Ces tristes souvenirs venaient de traverser mon esprit, ce n’était pas vraiment le moment de ressasser le passé.

« Je… je ne l’entends plus. C’est comme si j’étais enfin seul dans ma tête, c’est… incroyable. Merci. » J’ai laissé échapper un sourire avant de revenir au vif du sujet, son état de santé. « Ça va ? tu as besoin de quelque chose... quoi que ce soit... Je veux dire… ce que tu as fait, ce n’est pas rien. »

Ces pouvoirs n’étaient peut-être pas comme les miens. Mes capacités psychiques puisaient dans mon énergie vitale. A la fin d’un combat contre le crime, j’avais toujours besoin de piquer ma sieste dans le salon de la tour des Titans. J’essayais de travailler un peu mon endurance à la Justice Academy. J’ai profité de ce moment de répit pour me tourner vers le corbeau de Raven, posé sur l’épaule de sa maîtresse. Bon sang, qu’est ce qu’il avait grandi.

« Hey toi, ça fait longtemps. Comment vas-tu ? » Je n’étais pas un grand ami des animaux contrairement à Beast Boy, mais celui-là semblait m’apprécier. Avec l’un de mes doigts, je me permets de caresser les plumes de ses ailes. « Je n’ai pas pris le temps de m’excuser pour le nom ridicule que je t’ai donné. Peut-être que je t’en trouverais un autre plus décent, un jour. »

Finalement, au bout de quelques minutes, le temps que nous puissions nous remettre de nos émotions, j’ai repensé aux questions que m’avait posé Raven avant qu’Amy nous interrompe. Ray ne lui avait probablement pas fait le topo sur ma situation, peut-être qu’elle ignorait que j’étais présent à la Justice Academy. Le directeur voulait probablement éviter que tout le monde soit au courant de ma présence dans l’académie. Ça, c’était avant que les autorités ne me mettent le grappin dessus.

« Je vais bien, même si j’ai connu mieux, je ne peux pas mentir là-dessus. J’ai… » Je finis par glisser les manches pour faire apparaître les bracelets métalliques, censés me priver de mes pouvoirs, j’ignore si elles étaient si efficaces que ça. « … quelques problèmes avec le gouvernement américain, européen, et peut-être dans d’autres pays je… j’ai vraiment connu mieux. »

Ouais, ça n’avait pas l’air, comme ça, mais j’étais vraiment dans la merde. J’avais quelques personnes derrière moi pour m’aider à construire un dossier solide pour ma défense, je risquais gros. Il m’aurait fallu des heures pour expliquer tout ce qui m’était arrivé depuis qu’elle m’avait ressuscité. Lorsque j’ai rouvert les yeux, je ne l’avais pas reconnu, j’étais devenu complètement amnésique, ça a dû lui faire mal.

« Je suis… un élève sans en être un. Je fais plutôt l’école buissonnière ou l’école du soir. » J’ai laissé échapper un petit rire silencieux. « Je suis devenu un peu trop vieux pour faire mes devoirs. Je viens à certains cours d’entrainement et j’ai le droit à des cours particuliers avec Jason Blood ou avec d’autres professeurs. Je… depuis que je suis revenu à la vie, mes pouvoirs sont devenus beaucoup trop puissant. J’ai eu beaucoup de mal à les gérer. Je fais des choses que je n’étais pas capable de faire quand on était de simple gosse c’est… à la fois fascinant et terriblement terrifiant. »

Mon regard s’est ensuite retourné, d’un coup, vers le vigile qui devait me surveiller. Il ne s’était pas douté de ce qu’il s’était passé quelques minutes auparavant, heureusement. Il semblait peut-être certains que je ne pouvais pas utiliser mes pouvoirs. Toutefois, je pouvais sentir son regard perçant me transpercer de loin. Je pouvais déjà m’estimer chanceux qu’il me laisse un peu de liberté pour respirer et parler avec les professeurs de l’académie. Si Raven avait été considéré comme un élève, il aurait probablement réagi au quart de tour.

« Lui c’est… un cadeau des autorités, en plus de mes super bracelets. Il est là pour me surveiller, jusqu’au jour du procès. Là il est tolérant car tu es un professeur, mais je n’ai malheureusement pas le droit de parler à beaucoup de monde ici. J’ai le droit à 2heures de promenade par jour, d’habitude je les passe ici, à dessiner ce qui m’entoure, mais aujourd’hui, je n’étais pas d’humeur à dessiner les mêmes arbres depuis une semaine et demie. » J’ai essayé de détacher mon regard du sien, c’était difficile. « Je suis accusé de choses horribles, ils ne m’aiment pas vraiment. »

_____Je n’aurais probablement pas dû la toucher. J’ai posé ma main sur mon épaule pour veiller sur elle, lui donner mon aide. Je la sentais chanceler, je voulais simplement bien faire, j’avais peut-être été trop rapide, oubliant que Raven n’aimait pas le contact physique. Malheureusement, il était déjà trop tard lorsque je me suis rappelé ça. Elle eut un mouvement de recul, je fis de même quelques secondes plus tard. Je voulais m’excuser, lui dire que je ne voulais pas faire ça, mais je ne parvenais pas à trouver les bons mots. Je suis resté muet, le visage rongé par une culpabilité qui déformait légèrement mon visage. J’ai placé mécaniquement mes mains devant mon corps en signe d’excuse, ignorant si ça suffirait. Je me suis senti bête, stupide à ce moment-là.

Je l’ai laissé s’asseoir brutalement sur le sol, ignorant comment agir dans cette situation. Elle avait peut-être besoin d’un verre d’eau ? Quelque chose à manger ? Non, elle m’assurait que tout allait bien, j’ai essayé de la croire, mais mon regard était légèrement suspicieux. Finalement, pour qu’elle ne se sente pas seule, j’ai fini par la rejoindre, posant mon cul sur la pelouse, à mon tour. J’ai croisé mes jambes, m’installant confortablement pendant que le corbeau de Raven me refaisait une coupe. J’ai essayé de lever mes yeux pour observer l’animal perché sur ma tête. Malheureusement, ma nuque n’était pas assez souple et je risquais de le faire tomber.
Au bout d’un moment, il a fini par se trouver un autre perchoir. J’ai profité qu’il soit à ma hauteur pour le caresser de nouveau avec l’un de mes doigts. Oui, je suis également très heureux de le voir. Revoir des personnes qui m’étaient chères me faisaient chaud au cœur. Je ne pouvais pas imaginer mieux au milieu de ce chaos. J’ai fini par laisser échapper un autre sourire.

« Par terre, ouais, on est mieux là, nan ? » Ce soulagement que Raven m’avait donné, je savais que ça serait temporaire, une question d’heures. « Ça ne fait rien, je savourais ces quelques heures de tranquillité. » Mes yeux se tournèrent vers l’oiseau qui essayait de capter mon attention. « Promis mon grand, la prochaine fois, je te ramerais quelques fruits, comme avant. »

J’ai fini par lui expliquer une partie du chaos qu’était ma vie. Même si je n’ai pas les dons d’un empathe, je pouvais sentir cette culpabilité à travers elle. Je ne voulais pas qu’elle se sente coupable de tout ça, elle n’aurait rien pu faire pour empêcher tout ça. Je sais qu’elle s’en voulait pour ce qu’il s’était passé avec Trigon. Ses excuses signifiaient tant de chose à la fois, je ne savais pas par quoi commencer. Je suis resté muet, l’espace d’un instant, d’une respiration.

« Ce qu’il s’est passé, avant ma mort… Ce qu’à fait Trigon, tu ne pouvais pas le prévoir. Je voulais simplement t’aider, je pensais être assez fort pour me protéger de lui. S’il y a quelqu’un qu’il faut blâmer, c’est moi. Tu n’as pas à t’en vouloir pour… tout ça. Je ne veux pas être la source de tes maux. »

Tout raconter me prendrait probablement des heures. Si elle est prête à m’entendre raconter les pires souffrances que j’ai enduré, je le ferais. Malheureusement, je craignais que ça renforce sa culpabilité. Je préférais garder ça au fond de moi, attendant qu’elle pose les bonnes questions pour lui donner des éléments de réponse, morceaux par morceaux.

« Ouais, un procès. Quand j’ai réussi à m’enfuir pour retourner au pays, je ne me suis pas rendu directement. J’ai fui, pendant plus d’un an. J’ai eu peur, j’avais besoin de temps, d’aide pour me créer une défense solide. Je me suis caché et… ils ont fini par me rattraper il y a quelques mois. Je vais bientôt avoir le droit à un procès. Je suis l’un des rares qu’ils ont réussi à capturer donc… ils ne vont pas se priver. »

Mes yeux se baissent pour se tourner de nouveaux vers ces bracelets métalliques énigmatiques. Je suis sûr qu’avec un peu d’effort, je pourrais générer un bouclier psychique malgré leur présence. Mes batteries se videraient peut-être un peu plus vite mais elles ne sont pas suffisantes pour me retenir. Si cette technologie ne pouvait pas me contenir, je n’imaginais pas le jour où Amy se réveillera. Ma chambre était bien mieux équipée pour l’emprisonner que ces ridicules bracelets.
Raven me connaissait, je n’étais pas le monstre que les tabloïds essayaient de vendre. J’aurais préféré me donner de nouveau la mort que d’être contraint d’utiliser mon pouvoir contre des vies innocentes. Ce qui intéressait Degaton et ses sbires, c’était surtout le démon qui me possédait. Il était plus facilement manipulable que moi.

« Oui, c’est lui qui a fait tout ça. Je ne le dédouane pas pour autant mais je sais qu’il a été forcé par un nécromancien. Il m’a torturé pendant des mois jusqu’à ce que le démon daigne prendre ma place, il a pris son temps. Malheureusement, je ne sais pas vraiment ce qui lui ont poussé à faire. Nous partageons nos émotions mais nous avons une mémoire différente. » J’ai marqué un temps de pause, juste pour ne pas laisser cette même culpabilité me ronger. « Il y a un dossier dans le bureau de Palmer. C’est un rapport qu’il a récupérer des archives de l’ancien régime. Ils regroupent toutes mes actions à leur côté. Il a torturé, manipulé mentalement, volé. Le nécromancien visait les mages, il a détruit tant de vie… » J’ai avalé ma salive, comme pour retenir mes émotions. « Je n’ai pas ouvert ce dossier, je n’ai pas pu. » Un nouveau silence « Cet homme, ce nécromancien Anton Arcane, il m’a fait tellement de mal qu’on a dû m’arracher des souvenirs hors de ma mémoire pour que je puisse retrouver ma santé mentale. Je ne serais pas en état de faire quoi que ce soit si… s’ils étaient resté dans ma tête. Ces souvenirs sont toujours dans un coin de ma psyché, scellés. Peut-être qu’un jour… je me sentirais prêt à affronter ce passé. »

_____Raven était persuadé qu’elle aurait pu faire quelque chose pour me venir en aide, elle semblait en être certaine. Je ne doute pas de ses capacités, encore moins de ses pouvoirs qui s’étaient montré, jusqu’à maintenant très efficace. Je n’avais malheureusement pas les mots pour la réconforter, lui dire que tout allait bien, qu’elle n’avait pas à s’en vouloir, que les évènements se sont enchaînés si vite qu’elle n’aurait probablement pas pu me venir en aide. Je ne voulais pas la voir culpabiliser à cause de moi.
Malheureusement, le mal avait déjà été fait, et les réponses à mes propos ne faisaient que confirmer mes craintes. Elle s’inquiétait pour moi, pour ce qui était arrivé jusqu’à maintenant. Je ne sais pas vraiment de quelle partie foireuse de ma vie elle parlait, je ne sais pas si je voulais le savoir, ou si j’avais peur de rentrer dans le vif du sujet. Raven s’est perdu dans ces mots, mais je suis parvenu à la comprendre. Quand on est incapable de communiquer comme n’importe quel être humain, on apprend à écouter les gens qui nous entoure et on apprend à les comprendre plus que n’importe qui.

« Je sais que ce n’est pas ce que tu as voulu dire, Raven. J’ai compris ce que tu essayais de dire. » J’ai essayé de la rassurer autant que je le pouvais. « Merci, tu fais déjà beaucoup pour moi. Tu… tu as fait plus que beaucoup de mage qui ont essayé de m’aider jusqu’à présent. Tu es vraiment très puissante. »

Les mots de Raven me vont droit au cœur, mais lorsqu’elle parlait d’amitié, je ressentais une légère frustration qui me broyait l’estomac, un sentiment que je ne comprenais pas. Si, peut-être que je le comprenais en fait, mais que je préférais me voiler la face. C’était un déni, la peur de mal faire, de ressentir quelque chose de plus fort sans que cela sot réciproque. Je n’ai pas oublié ce qu’il s’était passé il y a des années, ce qui m’avait couté la vie, mais ce n’est rien à côté de la culpabilité de Raven et de ce qu’elle a dû vivre pendant tout ce temps. Je devais refermer cette plaie, rentrer dans le vif du sujet.

« Raven, tu n’as pas à t’en vouloir pour ce qu’il s’est passé. Tu ne pouvais pas prévoir que j’étais une cible pour ton père. Tout ce que je voulais, c’était que tu ne souffres plus. J’aurais fait n’importe quoi pour t’aider et… je sais que si c’était à refaire, je le referais. »

Si j’arrive à gérer un démon comme Amy, j’arriverais peut-être, un beau jour, à gérer un démon aussi puissant que Trigon. Il paraît qu’il gère les enfers maintenant, c’est de la rigolade ? Non, je ne devais pas sous-estimer mes adversaires. J’avais encore besoin d’entrainement. Mes pouvoirs étaient puissants, mais je n’étais pas encore à leur hauteur. Amy avait des facilités que je n’avais pas. Je crois qu’avec le nombre de médicaments que je m’avais ingurgité, je ne pourrais pas générer un bouclier pendant plus de dix secondes sans m’évanouir. Toutefois, ce n’est pas pour autant que j’étais sincère dans mes propos, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour qu’elle soit en paix.

« Tu… tu m’as tellement manqué. » j’essaye de mettre des mots sur mes émotions, mais j’ai l’impression que ce n’est pas assez. Je suis pourtant meilleur que ça, quand il s’agit de séduction. Malheureusement, face à elle, je semblais perdre mes moyens. « Je… je ne voulais pas qu’on te fasse du mal. J’étais jeune mais j’étais sincère dans ma démarche. Je voulais t’aider tu, je… je tiens beaucoup à toi. »

Je la sens se rapprocher de moi, doucement, je suis resté immobile, sans la brusquer. Elle a rapproché ses mains sur les miennes, je me suis laissé faire, même si ma peau s’était légèrement rougit à son contact. Je sais qu’elle n’est pas une grande fan du contact physique, elle fait beaucoup pour moi. J’ai senti ces mouvements hésitants, ce n’était pas dans ses habitudes.
Elle finit par me proposer de m’épargner des souffrances, les angoisses que le procès me procurait, les peurs, les traumatismes qui me hantaient jour et nuit. C’était une offre tentante, même si je savais que les pouvoirs de Raven avaient un prix, et qu’elle devrait ressentir ce que j’endure émotionnellement. Je ne pouvais pas faire ça, la laisser souffrir de nouveau pour essayer de m’apaiser. Doucement, sans geste brusque, j’ai légèrement levé mes mains pour les enrouler tendrement autour des siennes.

« Ce que tu proposes est très généreux de ta part… mais… je ne peux pas te laisser souffrir pour moi. Je veux dire, oui, je serais heureux d’être soulagé de tout ce mal mais, si je veux espérer avoir une vie normale et tourner la page, je dois vivre ses émotions et les surpasser. Ça fait partie de la vie et je ne veux pas que tu souffres encore une fois à cause de moi. Raven je… » Je crois que je t'aime

_____Beaucoup pensait que c’était simple pour moi de dévoiler mes sentiments, de jouer carte sur table. Je n’ai pas honte de mes émotions, mon handicap m’a appris à les exprimer. C’est un moyen comme un autre de communiquer avec les autres. Malheureusement quand je faisais face à Raven, c’était une autre histoire, ma gorge s’est resserrée. Mes pensées n’étaient pas parvenues à sortir de ma tête, je ne savais pas si c’était une bonne chose ou non à ce moment-là.
Raven est une empathe, elle savait ce que je ressentais et je suis malheureusement certains qu’elle a sentis mon corps s’affoler, mon cerveau paniqué et mes sentiments broyer mes boyaux. Pas besoin d’être un grand observateur pour voir que mes sentiments l’ont perturbé. J’ai levé les mains, j’étais dépassé par ce qui était en train de se passer. Mon premier reflex aurait été d’entrer dans sa tête pour l’apaiser, l’aider à contrôler mes émotions, les retirer de son esprit. Même si je doutais de l’efficacité de mes bracelets, je ne pouvais pas me permettre d’utiliser mes pouvoirs alors qu’une paire d’yeux était en train d’observer mes moindres faits et gestes.

« RAVEN ! Tu… »

Je n’ai pas le temps de répliquer, posant ma main sur une des épaules inertes de la jeune femme. Mon cœur accéléra son rythme cardiaque, la panique avait commencé à gagner tout mon corps. Le cri stridant du corbeau me brûlait les tympans, générant un début de stress que je ne parvenais pas à contrôler ni à comprendre. C’est un comportement que j’avais remarqué depuis que je suis revenu d’Europe, le bruit soudainement bruyant était devenu une source de stress, sans que j’en comprenne réellement la raison.
J’ai réussi à ignorer ce stress, inquiet pour Raven. J’ai reculé d’un bon lorsque j’ai vu cet être, beaucoup plus imposant que moi me faire face. Mon subconscient s’est senti obligé de se défendre. Mon visage était défiguré par la terreur, une peur que je ne suis pas parvenu à contrôler. Par reflex, mes pouvoirs se sont activés et une aura verte commençait à apparaître sur le bout de mes doigts. Je ne cherchais pas à attaquer cette étrange créature, je cherchais seulement à me protéger d’elle. Mon subconscient était parvenu à générer un début de bouclier psychique en utilisant beaucoup d’énergie vitale. Une forme commençait à se dessiner autour de mes mains avant de disparaître soudainement.

C’est la voix de Raven, ce n’est qu’elle, alors pourquoi ai-je paniqué ? Je me suis senti bête, stupide d’avoir eu peur de mon amie. J’ai l’impression de ne plus être dans mon état normal, d’être devenu un peu trop sensible au stress. Il paraît que c’est l’une des conséquences de mon vécu avec Arcane, quelque chose que je ne peux pas faire disparaître. Je devais le vaincre par moi-même. Malheureusement, ne pas connaître l’origine de ses troubles ne pouvait pas arranger les choses.
Heureusement pour moi, j’avais retrouvé un semblant de calme dès que j’avais entendu cette voix familière qui me réconfortait. Toutefois, je ne peux pas m’empêcher de me sentir coupable de ce qui venait d’arriver.

« Je suis désolé… C’est moi qui ai fait ça ? Je ne t’avais jamais vu faire ça avant. »

J’ai observé quelques instants le corps inerte de Raven avant de passer ma main sur les plumes de Zbruh pour le calmer un peu, à mon tour. Après quelques minutes de stress intense, mon rythme cardiaque était redevenu normal, mais mes mains tremblaient encore. J’ai ressenti une fatigue soudaine, comme si je venais de courir un marathon. Je peux désormais conclure que ces bracelets anti-pouvoir ne sont pas aussi efface que les autorités le pensaient.

« Tu as sentis mes émotions, n’est-ce pas ? Je… je sais ce que ça m’a couté mais… je n’ai pas réussi à chasser ça de mon esprit. »

_____Contre toute attente, j’étais parvenu à retrouver un semblant de calme, lorsque je fus certains que personne ne pouvait me faire de mal. C’est un progrès comme un autre, gérer mes émotions n’est plus aussi simple avec l’affaire Degaton. Ce n’est pas la première fois que j’angoissais pour quelque chose que je n’arrivais pas à identifier. C’était probablement l’une des rares fois ou j’étais parvenu à reprendre le contrôle de mes peurs, à les surmonter.
J’ai laissé échapper un petit sourire gêné lorsqu’elle s’est senti responsable de cette crise de panique. Non, elle n’avait pas besoin de ressentir cette culpabilité. Ce n’est pas elle qui m’effrayait, qui peut avoir peur de son amie ? Raven ne peut pas me faire de mal, je le sais et c’est ce qui permettait à mon rythme cardiaque de retrouver un comportement normal.

C’est la première fois que je pouvais voir la projection astrale de Raven, je ne pensais pas en être capable jusqu’à maintenant mais elle est bien là. Elle me fait une petite démonstration, avec des gestes calmes et rassurant qui empêche mon corps d’avoir une autre crise d’angoisse. Je n’ai pas peur, non, pas après avoir compris que ce n’était pas une menace.
Je suis également capable de sortir de mon propre corps pour parcourir autant de distance que je le souhaite avec ma projection astrale, ou plutôt mon âme. C’est un pouvoir que mes ennemis ne connaissent pas, très utile pour l’espionnage.

« Je ne savais pas que tu pouvais faire ça… ou plutôt c’est la première fois que je peux voir cette forme c’est… c’est si étrange. »

Je l’ai laissé me traverser de part en part, sans éprouver le moindre stress. Je suis habitué à foncer tête baissée dans le corps des personnes qui croisaient mon regard, je n’avais pas de mal à comprendre ce qui était en train de m’arriver. J’ai vraiment cru que mon corps allait mal réagir face à l’inconnu mais la présence de Raven et ses mots avaient empêché une seconde catastrophe. Elle fait également mention de mon garde du corps. Celui-là, je l'avais presque oublié. J'ai jeté un coup d'oeil derrière moi pour vérifier qu'il était toujours là. C'était naïf de ma part de croire qu'il allait disparaître et me laisser tranquille. Il est là, toujours là mais heureusement pour moi, il n'avait pas remarqué que ces petits bracelets étaient relativement inefficace face à mes pouvoirs psychique. Ironiquement parlant, les médicaments que je prenais remplissaient un meilleur rôle.

« Ouais, il a un protocole très strict il paraît. Heureusement, il n'a pas vu mes pouvoirs. Il est peut-être trop loin. Tu sais, avec toutes les accusations que je me traine, je ne devrais même pas être là. Je suis... chanceux, si on peut le dire. »

Je lui ai laissé le temps de retrouver ses esprits, essayant de contenir mes propres émotions pour éviter qu’elle ne soit à nouveau perturbée. Mes exercices de méditation sont parfaits pour ce genre de situation. Elle ouvrit doucement les paupières, je lui tendais la main pour l’aider à se redresser calmement mais elle préférait observer le ciel. J’ai hésité quelques instants avant de la rejoindre, m’allonger à ses côtés pendant qu’elle se confiait.
Je n’ai jamais cherché à cacher mes émotions, je ne suis pas Batman mais Raven lisait en moi comme un livre ouvert exposé dans un musée. Je ne pouvais rien lui cacher, encore moins ce type d’émotions, difficilement contrôlable.

« Ce n’est pas entièrement ta faute, tu sais… » J’ai levé les yeux pour observer mes doigts encore tremblants. « Ce qu’il s’est passé en Europe m’a transformé en bombe à retardement. J’ai l’impression que chaque bruit, chaque mouvements brusques me génèrent un stress que je n’arrive pas à contrôler. J’ai la sensation que tout le monde veut ma peau, que je dois sans cesse restés sous mes gardes pour ne plus souffrir physiquement. Il… Arcane, il m’a brisé et je n’arrive pas à recoller les morceaux. »

Raven fait aussi référence à d’autres émotions qui me traversaient l’esprit, mes sentiments amoureux. Elles les connaissaient depuis longtemps mais ils n’avaient clairement pas disparu malgré les années et les évènements que j’avais traversé. Cette longévité l’avait surpris et elle n’avait pas besoin de finir sa phrase pour que je comprenne. Doucement, je me suis redressé pour recroqueviller mes jambes et les encercler avec l’un de mes bras, observant les alentours tout en oubliant pas de jeter un rapide coup d’œil sur mon gardien qui n’avait pas remarqué mon petit coup de folie, heureusement pour moi.

« Raven… tu n’es pas responsable de ce qui est arrivée. Ton père s’est servit de moi à travers toi. Je ne te mets pas cette affaire sur le dos, je suis bien placé pour savoir que tu n’es pas ton père. Ce que je ressens pour toi…. Je n’ai pas réussi à le faire disparaître. C’est… toute la sincérité. Je serais capable d’affronter mille démons pour toi peu importe ce que tu décideras. Je peux gérer une crise d’angoisse, la faire disparaître en quelques minutes mais je ne peux pas faire disparaître ses sentiments que j’ai pour toi. »