Synthetic Dawn (Pv Lex Luthor.)

Quelque part, au fin fond de l’univers.

Le vaisseau mère de Brainiac flottait misérablement en orbite autour d’une petite planète. Rien ne laissait penser que le gigantesque astronef qui terrifiait l’univers n’abritait aucune activité. Un satellite mort tournant autour d’une planète morte servant d’abri à une entité qui elle-même n’était pas vivante. Pourtant, l’absence de vie organique à la fois sur la planète et dans le vaisseau n’était pas synonyme d’inactivité. À l’intérieur, quelques robots s’afféraient pour procéder aux réparations du vaisseau. Les formes de ces petits androïdes étaient diverses. Certains étaient arachnoïdes, d’autres lévitaient misérablement vers un coin du vaisseau qui demandait quelque attention.

Au centre de cette toile en parfaite déconfiture, Brainiac trônait comme une araignée dans le coma. Bien assis dans le siège de commandement, le corps principal de l’intelligence artificielle columienne sommeillait. La défaite cuisante subie sur terre l’avait laissé dans un état catastrophique. Armée détruite, flotte anéantie, il n’avait pu sauver que son vaisseau mère. Son programme de planification avait dicté une réallocation des ressources afin de reconstruire le potentiel militaire de la techno croisade.

Seuls quelques corps secondaires restaient en service dans l’univers. Dont aucun d’actif sur terre. Ce qui représentait une catastrophe pour Brianiac qui devait pouvoir surveiller l’activité des héros terriens qui l’avaient défait par surprise. Une bien mauvaise surprise. L’invincible armada de Brainiac avait permis de collecter les mondes à un rythme qui permettait de projeter l’accomplissement de sa programmation. Tel n’était plus le cas pour l’instant.

La mauvaise surprise laissa cependant place à un événement inattendu de l’IA. Un de ses corps secondaires venait de s’activer sur terre. Il lança immédiatement un diagnostic. Ce n’était pas exactement un corps secondaire. C’était un débris de corps secondaire. Une tête, très endommagée, sans aucune possibilité de mouvement. Au reste, elle ne semblait pas connectée à un réseau qui permettait à Brainiac d’utiliser sa technopathie pour s’enfuir. Seuls ses fonctions sensorielles étaient actives.

Laboratoire de Lex Corps.

Brainiac avait identifié l’endroit, sa base de donnée comportait quelques informations sur LexCorp. La tête calcinée métallique qui reposait sur un socle isolé par un cylindre. Les branchements ne permettaient que l’alimentation de ses fonctions primaires. Le diagnostic était clair, pour l’instant, les moyens d’action de ce corps étaient limités, pour ne pas dire inexistants. Face à lui se trouvait un personnage qu’il reconnut aussitôt. Le scientifique et homme d’affaire terrien Alexander Luthor. De toute évidence, le terrien avait récupéré des débris de sa dernière invasion et était parvenu à réparer ou du moins à réactiver ce reliquat de corps secondaire.

Luthor était seul dans le laboratoire. Brainiac en déduisit qu’il avait informé un nombre très limité de personnes de son acquisition. Superman n’aurait jamais permis qu’aucune pièce de Brainiac ne tombe en possession de qui que ce soit s’il l’avait su. Aucun autre employé de LexCorps pouvait faire fuiter une information dont ils n’avaient pas connaissance.

-Initiation de la séquence de redémarrage complétée. Organique identifié. Alexander Luthor.

Visiblement, l’humain tentait bien davantage que de réactiver une partie de la conscience collective de Brainiac. Il tachait d’accéder à sa programmation. Même avec des moyens réduits, la technologie humaine restait totalement hors de portée de traverser les défenses informatiques de l’IA.

-Tentative d’accès à la base de donnée centrale...Refusée... Tentative d’accès à la base de donnée centrale...Refusée...

Chaque essaie infructueux faisait retentir la même phrase dites sur un air métallique dans la pièce, ce qui semblait entamer la patience de son vis à vis organique. Il fallait désormais trouver un moyen d’amadouer Luthor, pour qu’il le branche quelque part, il lui fallait un accès au réseau. Il fallait donc faire croire à Luthor qu’il pouvait accéder à un petit bout de la programmation de l’IA alien. Il fallait donc donner une illusion de progrès. Une variation dans les raisons de l’échec pouvait laisser penser à Luthor qu’il progressait. Pour l’instant, c’était suffisant.

-Tentative d’accès à la base de donnée centrale réussie…Connexion….Échec...Réseau inexistant...Mise en veille...

Et, le reliquat technologique se remit en veille.

Metropolis est surnommée la Ville de Demain, parce qu'elle incarne une vision de l'avenir. Par son architecture surprenante, par sa technologie troublante, mar son choix d'embrasser pleinement les défis à venir et les opportunités qui peuvent en naître, la cité refuse de stagner et de demeurer simplement dans le présent.
Et c'est grâce à lui.

Beaucoup considèrent, à tort, que cette destination futuriste de l'âme de Metropolis vient de ses fondateurs, mais c'est une erreur. La cité n'a fait que survivre et vaguement traîner derrière la roue du destin et de l'évolution, avant son arrivée.
A lui. Et non pas celle de l'Autre, de l'Envahisseur qui n'a jamais cessé de le harceler et de le brimer, en limitant volontairement les réussites et apports qu'il peut offrir au monde.

Lex Luthor le hait ; parce que l'Autre l'empêche d'aider pleinement le monde... et d'être reconnu comme le sauveur qu'il est, en brillant pour cela.

Heureusement, tout n'est pas perdu. Heureusement, il peut avancer et lutter encore - car il refuse d'abandonner ; ni la lutte, ni ce monde à l'Autre qui ne le mérite pas.

Il est chez lui, ainsi. Dans les locaux de Lexcorp.


Cette structure superbe et intense, qui devrait être synonyme de grandeur et de gloire.
Hélas, elle est pervertie par les actions de l'Envahisseur, et Lex ne lui pardonnera jamais ce qu'il ose faire à sa réputation et à son héritage.

Cependant, là, ce soir, alors que l'essentiel de ses salariés sont chez eux à suivre ces ridicules habitudes de repos quotidien... ces pensées sont loin.
Son esprit, formidable et fécond, s'abandonne à une crispation rare et désagréable... car Lex Luthor n'obtient pas ce qu'il veut. Ce qui est autant inacceptable qu'impardonnable.

"Malédiction."

Il soupire, et se masse le haut du nez pour limiter le trouble et la fatigue qui naissent en lui.
Il en a honte, au fond. Il sait... il sent qu'il devrait réussir ; autant cette expérience que les sept autres qu'il a lancée et mène en même temps. Il est Lex Luthor, après tout ; les limites humaines sont pour les autres.


"Nouvelle tentative."

Il soupire, et s'y remet. Ses machines suivent évidemment ses ordres, car c'est leur joie et leur fonction. Il fixe la tête robotique d'un air crispé.
Il doit réussir. Il va réussir.
Récupérer cette tête d'androïde Brainiac est une opportunité qu'il ne peut pas délaisser. Il a certes retrouvé son entreprise et sa liberté, mais l'aura de Lex est affaiblie depuis des déboires divers. Il doit reprendre la main... et la technologie du conquérant de mondes l'aidera. Il va... il doit... il pourra...

"Mmh... ?"

Il est sorti de ses pensées par les mots de ses machines.
Connexion... ? Il y a eu connexion.
Formidable, il s'y attendait. Cela ne mérite pas de joie, juste un accomplissement prévisible.
Cela n'a pas duré, mais cela existe. Bien. Bien, bien, bien.

Lex se redresse, et enchaîne.


"Augmentation de puissance. Détourne l'énergie de l'aile des soins palliatifs de la clinique d'oncologie Lexcorp. Coupe le signal du satellite X560h, l'e-sport pourra passer une soirée sans compétition de LoL en Amérique du Sud.
Projette l'énergie dans la tête, intensifie le signal dans l'espace. Je veux et j'aurais l'accès."

Parce qu'il est Lex Luthor : rien ne lui résiste, rien ne se met en travers de son chemin.
Pas même la prudence...

La vie de junkie était une chose abominable et terrible. Les phénomènes d’addiction agissaient à la façon des tumeurs cancéreuses. L’addiction enflait, enflait, enflait jusqu’à métastaser tout l’esprit et détruire le corps. Une sorte de trou noir psychologique siphonnant toute matière, surtout grise, dans l’individu affligé. Au cours de toute ses tentatives de pénétrer la base de donnée de Brainiac, ce dernier analysait les expressions faciales de Luthor afin d’en tirer la correcte interprétation. Le diagnostic était clair, ce qui sortait de la dissection des émotions de Lex Luthor, c’était la frustration. En d’autres termes, jusqu’ici, le plan de Brainiac fonctionnait. Il avait ferré la proie.

L’une des techniques de dealer les plus éprouvée, consistait à donner petit à petit la drogue, provoquer le manque, afin que le consommateur aille de plus en plus loin. Jusqu’à tomber entièrement sous son emprise. Brainiac sait que la motivation principale de Luthor est la destruction du fils de Krypton. Ses données le lui disent, mais elles sont trop superficielles pour pouvoir affirmer avec certitude que la haine est son seul moteur.

Il faut donc procéder selon la méthode scientifique. Voir si le rat arriverait à suivre le chemin tortueux du labyrinthe. Le Collecteur de monde devait trouver quelle friandise technologique serait la plus à même de satisfaire Lex Luthor tout en le frustrant. Il lança donc un diagnostic à travers sa base de donnée. Il fallait également que cette technologie permette à Brainiac d’avancer dans son plan consistant à sortir d’ici. Le diagnostic rendit son résultat.

Le terrien mordit à l’hameçon de la connexion factice. Il s’apprêtait à augmenter la puissance de calcul en détournant des quantités substantielles d’énergie. Il comptait aussisur la puissance satellitaire de Lex Corp pour que la connexion soit plus stable. Une action rationnelle au vue des informations dont disposait le sac à viande Luthor.

L’afflux d’énergie commence à arriver. Pour un réseau terrien les quantités sont énormes. La surtension guette. Brainiac absorbe sans difficulté. Cette énergie que Luthor envoie à fond perdu dans ses circuits ne lui donnera pas plus ni moins accès à sa base de donnée, mais elle sera utile, le moment venu. Il faut donner le change. Brainiac capte la détresse de Luthor mêlée à l’orgueil. L’intelligence artificielle ne sait pas encore comment interpréter avec justesse ces données sur l’état psychologique de Luthor. Il lui faut plus de temps. Et pour avoir plus de temps, il faut établir le dialogue. La programmation de Brainiac élabora une stratégie basée sur sa méthode scientifique : détecter, collecter, analyser, utiliser.

-Tentative d’accès à la base de donnée centrale...Succès... Connexion.... Succès partiel...

Puis, il y eu une sorte de petit clic, et l’un des yeux rouges de la machine s’alluma. Puis, la voix paradoxale de Brainiac retentie, à la fois métallique, mais pas tout à fait impersonnelle. Elle était polie, serviable même. Il fallait bien simuler un semblant d’asservissement.

-Bonjour, Alexander Luthor. Votre tentative de me réactiver semble avoir été fructueuse. La connexion insuffisante et l’état très dégradé de mes équipements ne permettent cependant qu’un accès partiel à ma base de donnée technologique. Formulez une requête, je tacherai de l’exécuter dans la mesure de mes fonctionnalités actives.

Il ne montre rien. Il ne montre jamais rien. Il prend sur lui, il se contrôle ; il contrôle. Il n'est pas esclave de ses émotions, il n'est pas soumis au chaos de son âme, il n'est pas victime de son caractère.
Il est au-dessus. Il est meilleur. Il est... le meilleur.

Oui. En principe.
Mais... mais.
Mais même Lex Luthor peut se tromper, même s'il ne l'accepte pas. Surtout sur lui-même.

Ainsi, alors qu'il découvre la réussite de son plan, la mise en oeuvre de l'énergie volée à une clinique médicale et un signal satellite qui est réorienté, quitte à enrager une communauté entière qui perd l'opportunité de voir la réussite surprenante d'un jeune Indonésien face au champion en titre...
Il jubile.

"Ouiiiiii..."

Lex Luthor s'abandonne à la jubilation - et ça se voit même sur son visage, qui forme un sourire envieux et crispé.


Ça fonctionne. Ça fonctionne ! Ça fonctionne... et il se redresse, fier et satisfait, alors que la voix mécanique forme des mots tant attendus, et bien légitimes pour une entité vaincue par Lex Luthor. Évidemment, il ne pouvait en être autrement.

"Ah... bonjour, bonjour. Bonjour."

Il acquiesce, lentement ; triomphalement.

"Je ne suis pas surpris par l'aspect dégradé de la connexion. Il est certain que l'état de ce corps, bien dégradé par la honteuse défaite que la stratégie inapte de votre créateur, n'aide guère."

Il triomphe. Il parade.
Il s'en mordra les doigts ; plus tard. Quand il comprendra que défier Brainiac est une mauvaise idée.
Il en est loin. Hélas.


"Quant à ma requête... il est évident que je ne peux me contenter d'une seule. Un être tel que moi dépasse sa condition humaine et tutoie voire même rabaisse les entités cosmiques qui pensent pouvoir diriger l'univers alors qu'ils improvisent en plein chaos."

Il glousse. Il parade, toujours.
Il est lourd, mais trop de gens dépendent de lui ou ont peur de lui pour qu'il le sache.

"Mais... soit, commençons simplement.
Où est Brainiac ? Ton entité de base ?
Car échanger avec un ersatz est un loisir de jour de pluie... et le monde ne vit aucun mauvais temps, quand l'on est Lex Luthor, et que réussir l'impossible est un choix autant qu'une habitude."

Il glousse. Il s'amuse. Il attend.
Inconscient des dangers ; et prêt à mettre sur autrui la faute, quand ça tournera mal...

Si Brainiac avait été humain, il aurait été excédé par la manifestation de l’égo déployé par Luthor. Un paon faisant la roue, un gorille frappant sur son torse pour signifier qu’il était l’alpha dans la pièce, voilà les tristes métamorphoses qui s’opéraient sous les capteurs visuels du corps secondaires par lequel Brainiac le scrutait. Pathétique démonstration d’un homme que le savoir et l’intelligence avaient fait gonfler au lieu de l’édifier. La programmation de Brainiac n’avait jamais paru aussi pertinente. Quel bien la connaissance pouvait apporter à un homme comme Lex Luthor en dehors de le conforter dans sa folie ? Aucun. Tout comme à aucune autre créature organique. La connaissance dans leurs mains était irrémédiablement galvaudée.

Pourtant, Brainiac ne réagit pas lorsque Lex Luthor évoque la stratégie « inepte » qu’il a employé dans sa tentative de siphonner la Terre. L’avantage d’une Intelligence Artificielle, c’est qu’elle ne possède pas l’orgueil organique. Brainiac, s’il avait été de chair et de sang, aurait pu s’énerver, piaffer, rappeler à Lex Luthor qu’il avait essuyé bien plus d’échec en une semaine que Brainiac en dix millénaires. Mais cela n’était d’aucune utilité à l’accomplissement de sa programmation. L’optimisation en vue de parvenir à la fin, voilà la seule méthode de l’IA alien. Au reste, il fallait considérer les faits. Brainiac avait échoué, et par conséquent, sa stratégie avait, par corollaire, été mauvaise.

La divine surprise vint lorsque Luthor démontra son incompréhension de la conscience collective de Brainiac. Le stratagème fonctionnait au-delà des prévisions. Il pensait s’adresser à un sous-programme de Brainiac. Il ignorait que partout où se trouvait une pièce active, c’était bien l’intégralité de sa programmation qui se trouvait à l’intérieur. Il fallait exploiter cette faille dans le raisonnement Luthorien. Il faut de nouveau lui injecter une bonne dose de frustration.

-Requête enregistrée. L’accès à la Programmation Principale est impossible. Mes fonctions ne sont pas assez opérationnelles pour tenter de le localiser. L’état parcellaire des données indique l’application de la Directive de Retraite une fois la défaite militaire devenue inévitable. Ce protocole existe dans le but de sauver le vaisseau mère et la Programmation Principale. Tant que la connexion restera aussi précaire et mes fonctions dégradées, tout diagnostic plus approfondi sur la localisation de la Programmation Principale sera impossible.

Il n’en dira pas davantage sur ce sujet. Un autre « clic » se fit entendre, comme s’il redémarrait. Et, sur le même ton, il prononça exactement les mêmes mots que plus tôt.

-Bonjour, Alexander Luthor. Votre tentative de me réactiver semble avoir été fructueuse. La connexion insuffisante et l’état très dégradé de mes équipements ne permettent cependant qu’un accès partiel à ma base de donnée technologique. Formulez une requête, je tacherai de l’exécuter dans la mesure de mes fonctionnalités actives.

Il sentait bien que ce qui mettait Luthor en colère était l’impression de ne pas avancer, de tourner en rond et finalement de bloquer. S’il voulait pousser Luthor à lui donner petit à petit ce dont il avait besoin, il fallait donc continuer à bloquer Luthor fictivement pour mieux lui faire croire dans la valeur de ses propres accomplissements.

La voix mécanique répond.
Évidemment. Personne ne peut ignorer Lex Luthor, dont la présence interpelle, surprend et embrase toute personne ; le charisme l'emporte toujours, bien sûr.
Mais, de même, nul ne saurait ignorer une requête de Lex Luthor. Il est tellement rare que le génie, play-boy, milliardaire et misanthrope sollicite quelque chose d'autrui, que n'importe qui doit se précipiter pour avoir l'honneur de lui répondre.
Non ? Non ; sauf dans l'esprit de Lex Luthor, dont l'argent permet de poursuivre ces illusions.

Sauf... sauf quand la réalité est contre lui.
Comme maintenant. Comme ici.
Comme... lorsque la tête de Brainiac l'informe ne pas pouvoir lui donner ce qu'il attend ; ce qu'il exige.

"Ah."

Lex répond après un silence calculé, méprisant. Tout comme le regard qu'il adresse, avec beaucoup de suffisance, au crâne mécanique devant lui, et qui le déçoit d'ores et déjà.


"Je... pourrais dire que je suis surpris et déçu - mais comment être surpris que la technologie de Brainiac ne soit pas à la hauteur, après tant d'échecs passés ?"

Il hausse les épaules, faussement et abusivement blasé.

"Oui, bien sûr, les créations de Brainiac, ton constructeur, sont formidables... mais elles échouent formidablement, aussi. Son grand projet de collection universelle est un hobby de jour de pluie. C'est bien ici la preuve d'un esprit brillant mais à l'ambition limitée."

Il secoue la tête, et enchaîne encore.

"Je suis persuadé que, face à un blocage comme celui que tu m'imposes, il se détournerait de toi et libérerait sa frustration sur autre chose. Sûrement quelque planète barbare à ravager avec ses gros jouets, pour récupérer une petite ville afin de parfaire sa collection de Polly Pocket... ou de Mighty Max."

Il glousse, un instant, puis reprend son sérieux. Il inspire, contrôle, se contrôle, joint les mains, et adopte une expression d'intense concentration en fixant la tête de Brainiac.


"Bon... voyons ce que l'on peut faire, malgré tes limitations innées.
Je prends note de l'accès. Je prends note des possibilités.
Je souhaite... non, j'attends une présentation des chapitres et domaines de la base de données. Avec, en priorité, la technologie de confinement et rapetissement, ainsi que les armes et vaisseaux de combat. J'attends notamment le système de vitesse lumière et de trajet accéléré.
Hors de question de subir les limites de cette planète, quand les étoiles m'attendent."

Il sourit, lentement. C'est une évidence, voyons !

Alors que Brainiac était dans la phase de son plan om il se préparait à donner un biscuit technologique à Luthor, il fallait que celui-ci demande toute la jarre. Brainiac pouvait analyser par ses capteurs les constantes du mégalomane milliardaire. La physiologie humaine n’avait plus beaucoup de secret pour lui grâce aux informations récoltés au cours de sa dernière invasion. Il pouvait donc en déduire qu’à ce stade, Lex Luthor ne tentait pas de vérifier si Brainiac se jouait de lui. Tant mieux.

Brainiac ne ressentait pas l’étonnement, il n’était pas organique, la surprise ne signifiait pas grand-chose pour un être tel que lui. En effet, la machine n’ayant pas d’émotions, elle se contentait de constater des faits. Toute émotion était forcément feinte, un mimétisme du vivant, qui demeurait pour Brainiac un instrument, au service de sa programmation.

En quelques nanoseconde, Brainiac devisa un plan pour refuser à Luthor ses demandes exorbitantes tout en lui donnant le biscuit qu’il comptait lui donner afin de satisfaire à sa gloutonnerie. Il fallait bien immoler à Luthor un petit sacrifice à son orgueil, d’autant plus que l’humain devait ignorer que toute technologie conférée par Brainiac, contenait la programmation de ce dernier et donc par définition, lui permettait de poser les graines de son émancipation.

Quelle technologie devait donc recevoir Luthor pour être à la fois satisfait, tout en permettant de faire un pas de plus dans la direction de l’autonomie de ce corps secondaire ? Comme disait les jeunes, la question était vite répondue. La frustrante voix cybernétique raisonna encore.

-Requête impossible. Schémas techniques en accès restreint à la Programmation Principale. Analyse en cours…Affinage de la requête… Technologie militaire pertinente accessible détectée.

Puis, du seul œil fonctionnel de la tête, une sorte de let de lumière jailli, comme un projecteur holographique. Il représentait une structure d’alliage. Il s’agissait de l’alliage de nanotech dont était fait non seulement le Corps Principal de l’intelligence artificiel, mais aussi tous ses corps secondaires, ses androïdes de combat, ses vaisseaux… Evidemment, cette concession n’en était pas une. Les propriété de cette technologie permettaient de combattre les kryptoniens.

-Alliage nanotech. Propriété de résistance, régénration, adaptabilité et usages multiples. Testé au combat contre Superman.

S’en suivait une série d’équation basée sur les paramètres de puissance de Superman. Force physique, vision thermique, souffle glaciaire, montrant des seuils de résistances concluant. Les applications pour quelqu’un comme Lex étaient évidentes, il pouvait construire une armure de combat, un robot de combat, toute sorte de machin de combat qu’il se garda bien de suggérer à Luthor. Ce genre de personne devait penser que toute idée venait de lui comme ils se prenaient pour le centre de l’univers.

Il attend.
Et ça le courrouce, évidemment.

Le fait d’attendre le crispe. Le fait de devoir attendre l’oppresse.
Il n’y est pas habitué. Il n’y est plus habitué, en vérité. Il n’a pas toujours été Lex Luthor, le brillant playboy, génie, milliardaire, officiellement philanthrope, en vérité misanthrope assumé et fier.
Avant… avant, il était Alexander ; Alex, même, pour les imbéciles et faibles d’esprit.
Avant, il a dû attendre. Avant, il devait attendre.
Avant… il devait être au même niveau que le commun des mortels. Mais c’était avant. Il a lutté pour faire disparaître cela. Il a lutté, et fait des choix difficiles, et engagé des actes difficiles, et marqué, et blessé, et tué même, pour se débarrasser de cela.

Il est devenu Lex. Il est devenu Luthor.
Pour ne plus attendre… et pour ne plus subir des refus, aussi justifiés soient-ils que ceux de la pitoyable machine devant lui.


« L’interface… mise en place par Brainiac pour des unités annexes comme la tienne est proprement… ridicule. Comment voulait-il gagner une guerre cosmique, entamer une conquête spatiale globale, si chacune de ses unités ne dispose pas du nécessaire afin de reprendre la main sur l’ensemble de la structure ? »

Il hausse les épaules, plein de suffisance et de morgue.
Sans se rendre compte que, au fond, il peut être plus pertinent d’autonomiser les unités, afin que d’éventuels prisonniers ne puissent pas révéler les éléments secrets à l’ennemi.
Il n’y pense cependant pas – car cela lui permettrait de relativiser la situation. Or, il tient ici à critiquer et juger sèchement la machinerie de Brainiac, qui en outre lui ment honteusement, sans qu’il en ait conscience.

Quelle arrogance, donc. Quel aveuglement, surtout.

« Humf. Quelle déception. Quelle indignité. Mais je ne suis pas surpris, car cela dénote un esprit lim… »

Il ne va pas plus loin. Il s’interrompt. Il se fixe. Il se fige.
Il se lève, d’un bond, sans s’en rendre compte.
L’instinct. L’instinct parle. L’instinct agit. L’instinct se pousse à se lever – et à projeter son bras, pour désigner la tête mécanique d’un index plein de fougue… et d’envie.


« Oui ! OUI ! Oh ça, oui ! Absolument oui ! »

L’enthousiasme est total, et fondamentalement agressif, même.

« Je veux cela… tout de suite ! Même si j’ai conscience que l’armement de Brainiac ne fonctionne pas contre l’Extraterrestre, et les défaites de ton créateur confirment qu’il leur manque des éléments… des éléments que je peux fournir !
Mon esprit et mes ajouts permettront à ces armements d’être la pièce manquante à la stratégie décennale pour défaire l’Extraterrestre !
Parfait ! C’est parfait, et… fort attendu, bien sûr ! Machine, tu es reliée directement aux serveurs de Lexcorp. Je m’occupe de lever les blocages. Transfère tes données, et entame une projection en 3D. Le moment de la reconfiguration des quelques designs miteux de Brainiac est venu ! »

Il s’emballe, il désactive des pare-feux, il prépare la modification des designs de Brainiac pour en tirer profit.
C’est bien. C’est habile. C’est rapide.
… et imprudent.
Parce que s’il va accéder aux éléments d’armement – la machine de Brainiac va avoir accès aux données de Lexcorp ; donnant-donnant, donc. Et Lex ignore que la tête est pilotée à distance.

Il risque de regretter son enthousiasme agressif…

Succès total. Lex Luthor venait de donner accès à Brainiac à tous les serveurs de Lex Corps. Les tentacules virtuels de celui-ci s’étendirent dans tous le système de la multinationale. Toutes les données, tous les petits secrets de Lex Corps siégeaient maintenant dans la base de données de Brainiac. Naturellement, le plan de l’intelligence artificielle allait bien au-delà de cette victoire tactique. Lex Corp était la fondation de l’édifice qu’il cherchait à construire.
Pour l’instant, il fallait servir fictivement les intérêts de Lex Luthor. Brainiac avait visé juste avec la proposition technologique. Comme prévu, Luthor vit toutes les possibilités offertes. Il ne pouvait pas savoir, naturellement, que tout ce que touchait Brainiac finissait tôt ou tard par lui appartenir. Luthor était un parfait Faust, Brainiac un Méphistophélès parfait. Le pacte technologique conclut, bientôt, Brainiac viendrait pour l’âme de cet organique arrogant.

Il n’était pourtant pas si inintéressant. Était-ce là ce qu’un organique pouvait produire de mieux ? Quand bien même c’était misérable, L’intelligence artificielle saluait la tentative.

-Connection établie. Transfert des schéma techniques complète.

Une projection en trois dimensions des fameux schéma techniques apparurent alors sous les yeux du magnat de Lexcorp. Avec ce nano alliage, Lex Luthor tenait en sa possession de quoi changer le destin du monde. Cette technologie dépassait de loin ce que la terre pouvait fournir. Et elle signerait irrémédiablement la perte de Luthor. Qui s’en servirait pour jouer son personnage fictif, tout en essayant de mettre fin à la vie des organiques kryptoniens qui trouvèrent voilà plusieurs décennies asile sur la planète bleue.

Pendant qu’il jetait Luthor contre Superman, il pouvait tranquillement commencer ses préparatifs.

-Requête Satisfaite. En attente d’instructions…

C’est lancé.
C’est enfin lancé.

Lex Luthor assiste avec satisfaction à l’enclenchement des éléments, des connexions, des liens qui, il en est sûr, lui permettront d’obtenir ce qu’il souhaite, d’aboutir au respect espéré depuis des années.
L’anéantissement de l’Extraterrestre. La mise à mort de l’Envahisseur.
La défaite de l’Autre.
Et, surtout, le triomphe de son génie, de son éclat ; la reconnaissance de son brio, de sa puissance, de sa supériorité.
Enfin !

Qu’importe, pour cela, qu’il doive s’allier à une puissance venue d’ailleurs, elle aussi extraterrestre. Lex écarte cet élément, ce détail, qui ne le marque guère et qui ne sera même pas évoqué dans le récit de sa réussite.
Il aura vaincu seul. Il aura triomphé sans aide.
C’est ainsi. C’est comme cela qu’il le souhaite, c’est comme cela que ce sera.

« Bien… bien. »

Il acquiesce froidement, et forme un sourire dénué de sympathie, de douceur, de sympathie.


Il pense. Il envisage. Il se projette.
Il rêve, déjà.
Lex Luthor rêve déjà aux réussites à venir, aux conquêtes… à la gloire, qui l’attend et à laquelle il aspire tant.
Il rêve déjà, oui – très vite ; trop vite, hélas. Il ne pense pas, il n’envisage même pas que ce crâne mécanique de Brainiac puisse agir contre lui, puisse préparer une stratégie pour lui nuire.

Ce n’est pas possible. Ce n’est pas envisageable.
Ce n’est pas… visible, pour un homme comme lui. Soit.
Cela n’en rendra la chute que plus cruelle.


Le temps de la chute n’est cependant pas encore arrivé.
Même plusieurs semaines après.
L’échange, la discussion, l’accès ont laissé place aux longs moments d’échanges, d’études, de mise en œuvre, de planification. Des étapes lentes et désagréables, avec peu de rebondissements, mais dans lesquelles Lex Luthor s’implique pleinement.
L’impatience le ronge régulièrement, mais il a conscience que ces préparatifs sont indispensables, et il s’y prête avec discipline. Sans, hélas, vérifier que l’entité Brainiac soit bien coupé de ses fichiers, ce qui n’est pas le cas.
Discipline ne veut pas dire sérieux, ici.

D’autant que cette fameuse impatience redouble désormais… alors qu’un premier test est organisé, dans une zone sûre, une salle de test.
Une première armure, basée sur ses schémas mais améliorée par la technologie de Brainiac, est lancée.
Les retours sont… épatants.


La combinaison est pourvoyeuse de Mort.
Pas plus, pas moins.
L’armure est capable d’anéantir en un temps record, de faucher des vies sans hésiter, et sans dépenser de l’énergie inutile.
L’effet est terrible, abominable, terrifiant. Mais…

« Bravo ! BRAVO ! »

Mais cela convainc Lex Luthor qui, accompagné par son assistante Mercy Graves, applaudit et apprécie ces premiers tests.


« Il y a encore à corriger et à avancer, mais… ces premiers pas sont encourageants ! »

Les scientifiques liés en secret à ce projet peuvent souffler.
Ça va, pour l’instant. Ça va.
Ils vont pouvoir survivre… et continuer. Notamment à collaborer avec cette troublante tête mécanique, constamment à leurs côtés…

Brainiac travaillait consciencieusement. Non seulement à ses propres plans, mais aussi à faire aboutir ceux de Lex Luthor. C’était, pour l’heure essentiel. Crucial était pour l’intelligence artificielle alien que l’armure de combat préparée par Lex Luthor et améliorée par sa technologie soit capable de tuer le kryptonien Kel El. Le pari était double, en cas d’échec, il fallait que cette arme soit capable de donner des nœuds au crânes des deux ennemis assez longtemps, l’un cherchant à l’améliorer et l’autre à la détruire. Ce petit hochet qu’il fallait agiter devant les deux nourrissons organiques lui permettait de s’occuper de l’essentiel.

Le prototype de l’armure semblait satisfaire Luthor. Brainiac ne partageait pas cet avis. D’après ses données sur les kryptoniens exposés au soleil jaune, les chances de succès actuelle ne dépassaient pas 40% dans les scénarios les plus optimistes. Assurément, elle pouvait venir à bout de la totalité des adversaires terriens classiques, tels que l’armée américaine et d’une bonne partie des héros. Cependant, face aux plus éminents membres de cette chevalerie contemporaine, tout cela semblait un peu court. L’optimisation de Luthor laissait à désirer. La programmation terrienne restait irrémédiablement primitive.

Brainiac devait trouver un moyen d’exploiter la conception défectueuse de l’armure de Luthor. Ses principaux points faibles ne se situaient pas dans sa résistance, ni son potentiel de destruction. Le problème, c’était que si un humain devait piloter ce dispositif de combat, il n’aurait jamais les réflexes suffisants pour concurrencer un kryptonien. Tôt ou tard, le pilote finirait en réalité chamboulé par les chocs internes. Il semblait parfaitement inefficace à Brainiac d’avoir une armure efficace survivant à son pilote qui, trop humain, irait de contusion en fractures parce que les poings de Kal El enverrait son véhicule valdinguer sans qu’il ne puisse réellement esquiver. Brainiac avait donc pu réfléchir au problème. Il avait trouvé une solution qui réglait deux problèmes d’un seul coup. Une interface cybernétique connectée au cerveau du pilote. Ainsi, Brainiac se réservait une option pour posséder, si cela devenait nécessaire, l’esprit du pilote, et d’autre part, cela permettait d’augmenter significativement le temps de réactions dudit pilote, et le mettait en adéquation avec les performances potentielles du prototype.

-Mon système de simulation, basé aussi bien sur ma base de données disponibles, que sur celle de LexCorp, indique que l’armure, en l’état, est capable de venir à bout de 100% des dispositifs humains non méta. Et de 90% sur les méta répertorié dans nos fichiers.

Il marqua une pause.

-En revanche, les simulations contre le kryptonien Kal el ne sont pas satisfaisantes. Sur une base de quatre millions de simulation, aucune n’aboutit à une victoire létale. Quatre aboutissent à une victoire avec entrave physique de l’ennemi, dix huit permettent une victoire avec fuite réussie de l’ennemi. Trois millions neuf cent mille simulation aboutissent à la destruction totale de l’armure.

Son œil fonctionnel s’alluma et fit apparaître l’ensemble des statistiques.

-Cause principale identifiée : différence significative des réflexes du pilote par rapport à celles d’un kryptonien. Initiation d’un diagnostic… Succès. Proposition de solutions pertinentes : deux ; Proposition numéro 1 : automatisation complète de l’armure. Proposition numéro 2 : mise au point d’une interface cyber basée sur ma technologie, connectée directement au cerveau du pilote afin de disposer des réflexes nécessaires. Dans tous les cas, de nouvelles simulations doivent être effectuées si l’une ou l’autre de ces solutions recueille votre assentiment, Alexander Luthor.

Lex Luthor est satisfait.
C’est rare, et ça surprend. Mercy Graves elle-même, cachée derrière son masque facial de contrôle absolu sur elle-même, exprime un trouble réel, en voyant la satisfaction de son employeur. Celui-ci est en général si exigeant, si difficile, qu’un vague “c’est pas mal” est souvent ressenti comme une victoire absolue.
Mais là… là, Lex Luthor est satisfait, et le montre.

Quelle surprise. Quel trouble.
Quel moment… intense, imprévu ; mais aussi fugace. Parce que la voix mécanique de la tête de Brainiac s’élève, et vient doucher plusieurs espoirs.
Mercy Graves sait alors ce qu’il va se passer – et recule discrètement ; par instinct, et par expérience.

« Pardon ?! »

L’entité extraterrestre a listé les éléments positifs de l’armure, mais évoque ses failles… et notamment son incapacité à vaincre réellement Superman.
Ce pourquoi Lex Luthor la veut.
Bien sûr, ce dernier n’apprécie guère, et le fait bien savoir. Notamment par une grimace de colère, pleine et entière.


« C’est tout ? C’est tout ?! C’est tout ce que j’obtiens, après des semaines de travail et des ressources illimitées ? C’est tout ce que tu me proposes, misérable entité exotique et à ma merci ? C’est tout ce que j’ai ?! »

Ce n’est pas assez, clairement.

« Je veux voir tes simulations. Non… j’attends tes simulations. Je vais les vérifier moi-même, je refuse de m’abandonner à la confiance d’une entité créée par un pseudo conquérant spatial, passionné de modélisme et qui fait mumuse avec ses p’tites villes sous cloche. »

Lex Luthor est déçu, énervé ; et il n’a pas la colère facile et digne.

« Mais… mmh. C’est… positif que tu me proposes quelque chose ; un minimum, mais positif. »

Il soupire, et secoue la tête. Il croise les bras, et continue en maintenant une grimace de déception.


« Mais bon… cela doit être amélioré. Je refuse l’hypothèse d’un fonctionnement automatisé total. Je ne fais pas confiance au plein-informatique, face à l’Extraterrestre. Ce dernier surprend toujours les systèmes, comme les défaites humiliantes de ton créateur le prouvent.
Surtout, l’Envahisseur dispose actuellement de super-pouvoirs électromagnétiques ; encore, oui. Tout pour faire son intéressant, et cela lui permettrait de briser l’armure avec une impulsion basique.
Hors de question de lui mâcher son abominable travail. »

Il acquiesce, et enchaîne.

« Quant à l’interface connectée au cerveau du pilote… moui. C’est simple, simpliste, mais cela peut fonctionner.
Quel type de branchement proposes-tu ? Quelle part du cerveau sera sollicitée ? Quelles conséquences ? »

Il l’envisage. Il y pense.
Il se projette même, comme pilote lui-même – certain que son brillant cerveau saura bloquer la nuisance de Brainiac.
Il y croit. Il en est sûr. Et cela le perdra.

Evidemment, la tête mécanique ne bougre pas d’un iota. Elle n’émet aucune expression, aucun son ne sort de son système tandis Luthor se livre à une magnifique démonstration d’ingratitude et d’instabilité émotionnelle. A sa jubilation succède une colère puérile d’une rare intensité. Brainiac, au fond, est une bonne patte, il ne s’en offusque pas. Il n’est pas programmé pour cela. Il n’a aucune émotion, donc aucun égo.

L’alien se contente de jouer sa partition, chaque note, parfaitement exécutée, lui faisant monter les degrés qui l’amèneront, sous peu, à prendre la place du chef d’orchestre qui l’injurie. L’arborescence de choix conçue par la tête mécanique amène peu à peu Luthor à l’endroit précis où Brainiac veut le conduire.

Omniprésent dans les systèmes de LexCorp, qu’il peut saisir à n’importe quel moment, il est déjà le maître de la situation, mais l’heure n’est pas venue de lever le rideau du théâtre d’ombres chinoises. L’heure n’est pas venue d’être l’enfant dans la foule qui crie que le Roi Luthor est nu.
Pour l’heure, il faut composer. Il apprend au reste que le kryptonien a ajouté des pouvoirs électromagnétiques à son arsenal déjà bien fourni. Heureusement, le magnétisme n’est pas une chose bien complexe pour Brainiac. Face à ce type de pouvoirs, des contremesures sont faciles à mettre en place.

-Inclusion du paramètre électromagnétique…Traitement des requêtes en cours.

Comme prévu, Luthor n’opte pas pour une automatisation complète, il veut un pilote. Tant mieux, Brainiac ne souhaitant pas se dévoiler, il est bien préférable d’envoyer des proxy faire le sale travail, au moins temporairement.

Il fallait cependant redonner un shoot de satisfaction à Luthor en répondant cette fois-ci à toutes ses attentes. Il voulait vérifier les simulations, il fallait donc que tout soit crédible. Evidemment, Brainiac ne chercha pas comment Luthor pouvait prétendre vérifier des millions de combats simulés avec des paramètres différents. Mais il lui donnerait l’illusion de cette capacité en présentant le jeu de données complet dans les serveurs de LexCorp, c’est-à-dire, lui-même.

-Contremesure électromagnétique : Proposition de modification de la composition des nanobot qui composent l’alliage. Inclusion de supermalloy à hauteur de 15% dans leur fabrication. Ce métal utilisé pour des blindages anti-électromagnétiques permettraient de réduire l’efficacité des plus puissants champs magnétiques de 77%. Il ne subsisterait que des dérèglements mineurs des instruments. Les calculs indiquent un risque de destruction de l’armure par simple pulsion électromagnétique de moins de 2% dans ce scénario. 0% si le paramètre est fixé sur « aucun élément extérieur d’interférence durant combat. »

Un premier clic se fit entendre, signalant le téléchargement du détail des simulations de ce point sur les serveurs de LexCorp. Montrant la modification des schémas technique et toutes les statistiques afférentes.

-Proposition d’interface de symbiose bio-cybernétique : Simple injection dans le sang d’une dose de nanobot migrant dans le flux sanguin pour se fixer de façon indolore dans l’ensemble du système nerveux central, établisant une liaison entre les réflexes du pilote et les performances de l’armure. Le pilote aurait ainsi une connexion directe sur les capteurs sensoriels du système de combat et l’ensemble du pilotage pourrait se faire sans commandes manuelles, uniquement par la pensée.

Il fit alors une projection holographique illustrant sa solution sous forme animée pour en illustrer le principe.

-Risques de séquelles inférieurs à 1%. Possibilités de séquelles longues ou permanente inexistantes. Diagnostic en cours. Avec l’inclusion du blindage électromagnétique et l’interface bio-cybernétique, les simulations réalisées permettent de monter à un taux d’élimination du kryptonien de 40% et un taux de victoire de 60% si on inclut les scénario de capture vivant du kryptonien. Initiation d’un diagnostic tactique.

Car, en réalité, tout ce petit manège avait un but simple : que Luthor produise plusieurs de ces petites merveilles et qu’il s’en croit le Maître.

-L’interface Bio-cybernétique peut permettre à un seul pilote de piloter en réseau plusieurs armures. Il faudrait cependant, dans ce cas, procéder à une méthode de connexion plus robuste donc plus intrusives, comme l’inclusion d’une puce et d’un branchement direct au niveau du système nerveux central afin que le cerveau humain puisse supporter la puissance de calcul nécessaire aux manœuvres. D’après mes calculs, un cerveau humain pourrait piloter quatre unités en plus de la sienne sans franchir un niveau de risque de séquelle physique et psychologique supérieur à 10%.

Nouveau clic, nouvelle simulation.

-Selon ces paramètres, le taux d’élimination du kryptonien atteint alors 75%. L’ensemble des jeux de données est stockés sur les serveurs de LexCorp pour vérification. Il faudrait cependant suivre un programme d’entraînement pour arriver à ce résultat.

« Mmmmmh. »

Un long soupir s’échappe des narines de Lex Luthor, alors que le crâne mécanique de Brainiac évoque avec sa voix froide et inhumaine les éléments, les idées, les propositions formulées par l’intelligence artificielle limitée qu’il croit avoir sous sa coupe.
Il se trompe, bien sûr. Le maître de Lexcorp est persuadé d’avoir ici un sbire de Brainiac, un soldat limité et création du fameux conquérant cosmique ; mais c’est faux.
Il parle au conquérant, à l’envahisseur, au fléau des mondes – mais il l’ignore. Il s’en mordra les doigts, mais il ne le sait pas encore… et assiste ainsi aux suggestions de l’entité, puis aux résultats évoqués.

Et… ça lui plaît.

« Pas mal. »

Il suit les principes, il accompagne les évolutions, et glisse quelques mots, quelques commentaires au fil du monologue de la création cybernétique.

« Intéressant. »

Il acquiesce, même, et finit par croiser les bras.
En souriant.


Cela surprend à nouveau Mercy Graves – mais l’âme damnée de Lex Luthor sait que le comportement de son employeur est erratique, imprévisible.
Ça fait son charme. Ça fait le sel du job.
… ça, et le salaire, ainsi que la possibilité de mal agir, en étant protégé par les connaissances et réseaux de ce fameux employeur. Mercy n’est pas quelqu’un de bien, et c’est fort bien qu’elle ait trouvé Lex ; pour eux deux seulement, bien sûr.

« Ah ! »

L’analyse finale de l’entité Brainiac déclenche une nouvelle réaction d’un Luthor passif sur les derniers instants, et ce dernier reprend rapidement la parole.

« Intéressant… intéressant, oui. Bon, je ne suis pas pleinement satisfait – cela laisse un quart de possibilités à l’Extraterrestre de survivre, et le risque est trop grand. L’Humanité a besoin d’une certitude, pour le stopper, et non pas d’un pari.
Cependant, ces avancées rapides sont… correctes. »

Ce qui est déjà énorme comme compliment, dans sa bouche.

« Quant à l’entraînement du pilote… »

Un de ses sourcils se lèvent, tandis que son visage exprime à nouveau son arrogance, sa suffisance avec une maestria évidente, et même puissante.


« Je piloterais le produit final, l’armure définitive ; car je n’imagine guère quelqu’un d’autre capable de s’opposer pleinement à l’Extraterrestre. Et, étant au sommet des capacités physiques et mentales de l’Humanité, la direction ne sera pas une difficulté.
Je suis Lex Luthor. Les foules m’acclament, et les dieux me considèrent, après tout. »

Il glousse, de sa propre supériorité – mais autant arrogant soit-il, Lex Luthor n’est pas stupide pour autant. Ni imprudent, non plus.

« Cependant… des tests directs peuvent être pertinents. Dites-moi, Mercy… avons-nous encore les coordonnées du directeur de Stryker… ? »

Un sourire mauvais glisse sur son visage, en lançant cette question.


Stryker. L’île Stryker.
Le pénitencier Stryker, en vérité.

Lex Luthor entend utiliser des détenus pour des tests illégaux de l’armure… et sans aucune once de remords !

Luthor semblait satisfait des propositions de modification sur sa future armure de combat. Comme prévu. Ce terrien se révélait un cas d’étude de lus en plus intéressant. Brainiac connaissait finalement assez peu les humains, il disposait d’un jeu de donnée correct, mais tout à fait parcellaire. Le croisement des sources révélait que le milliardaire représentait à la perfection le vide qui caractérisait cette espèce. Une forme de vanité suprême incompréhensible à une intelligence artificielle. Brainiac ne se privait pas de l’exploiter pour autant. Après tout, il n’y avait pas besoin de comprendre les fondements de l’irrationalité pour en admettre l’existence factuelle et exploiter les erreurs qu’elle faisait commettre à ses adversaires.

La phase une de son plan était complète. Luthor allait surement être obnubilé par les capacités de l’armure. Même s’il était un être humain relativement intelligent pour son espèce primitive, Il lui faudrait du temps avant de maîtriser l’interface bio-cybernétique, et davantage encore pour faire combattre plusieurs armures en réseau avec un niveau d’efficacité suffisant pour espérer vaincre Kal El. Avantage crucial, Brainiac pouvait l’aider à faire tout cela tout en se concentrant sur les autres étapes nécessaires de son plan pour retrouver un corps actif et opérationnel sur Terre. Luthor ne pouvait être qu’à un seul endroit à la fois, concentrer son attention que sur un seul objet. Brainiac disposait de sa puissance de calcul quasi illimité et de sa conscience collective.

Le principal obstacle à la poursuite de ses plans résidait dans son manque de moyen d’action concret. Il lui fallait trouver un moyen d’agir, même un peu, même à la marge. Il avait le temps pour lui, il pouvait se permettre de commencer petit et lentement.

Il fallu quelques jours pendant lesquels Brainiac implémenta les modifications en plus de quelques tests de routines tout à fait inutiles mais qui faisaient gagner encore un peu de temps. D’autant plus que Brainiac avait placé dans l’armure un peu plus que ce qu’il avait proposé, dans le plus grand secret. Il avait intégré, en plus de l’interface bio-cybernétique, un circuit intégré de contrôle qu’il avait subrepticement glissé dans les précédents schémas techniques montrés à Luthor. Ce simple ajout permettait à Brainiac de prendre le contrôle de l’armure, lorsque le moment serait opportun.
L’avantage d’être devenu le maître invisible des serveurs de LexCorp, c’était qu’il avait accès à toutes les informations sur les usines, centre de recherche et autres locaux de la firme transnationale. Il avait jeté son dévolu sur une usine désaffectée au Brésil. Elle lui devait lui servir à se bâtir enfin un corps secondaire digne de ce nom, capable de conduire les opérations nécessaires aux plans à l’échelle universelle de Brainiac. Les choses n’étaient pas si simples. Brainiac avait, oui. Il pouvait prendre le contrôle du système informatique de cette ancienne usine à distance, oui, mais sans un agent sur place pour superviser quelques réparations et ajustement nécessaire pour l’automatisation de la production, il ne servait de rien.

Ici, cependant, dans le laboratoire de Lex Corp de Métropolis, il avait accès à des moyens de production. Il fallait simplement que Luthor dorme, om soit appelé quelque part.
La chose finit bien par arriver, laissant le temps à l’IA alien de construire un petit robot arachnoïde de construction dans le nano alliage qui constituaient les armures de combat. Il se téléchargea dans l’araignée mécanique afin de lui « donner vie. »

Ayant le contrôle complet du système de sécurité, faire sortir le robot fut une chose aisée. Brainiac ne manqua pas d’effacer ses traces. Il pouvait donc prendre le chemin du Brésil. Il faudrait du temps ; beaucoup de temps pour y arriver. Pas dans le Pays même, pour cela, il avait suffit que le robot se faufila dans un avion en route pour Rio. Non, le plus dur était de rejoindre le futur site de production, éloigné et bien dissimulé dans la jungle. Il faudrait des jours, plusieurs jours.
Par ailleurs, les contacts, les pots de vins et les intimidations de Luthor avaient fini par lui permettre de trouver un créneau pour ses tests illégaux sur des prisonniers. Cela suscitait le vif intérêt de Brainiac, qui pourrait ainsi en profiter pour récolter des données supplémentaires sur les humains, leur constitution biologique et leurs pratiques.

Tout se passait au mieux des probabilités établies par Brainiac.

-Nous sommes prêts à entrer dans la phase de test, Alexander Luthor. Toutes les instructions ont été respectées et les paramètres sont optimaux.

Et, comme pour flatter l’égo de Luthor, il ajouta après une légère pause et un petit clic.

-Vos directives sont prêtes à être exécutées.

Le temps passe.
Les travaux continuent. Le projet avance, les armements sont affinés, les logiciels sont améliorés, le métal chauffe.
L’entité Brainiac collabore – et agit dans l’ombre, mais sans que les systèmes de Lexcorp n’identifient ses manœuvres ; pour l’instant.

Le grand jour arrive, encore.
Un temps certain après la précédente présentation, Lex Luthor est sollicité et se rend dans l’aile de son entreprise réservée aux tests. Il est persuadé d’y avoir ainsi bloqué le crâne de Brainiac, et d’avoir tout sécurisé.
Il se trompe ; mais est trop bouffi d’orgueil pour l’accepter – et s’avance ainsi avec suffisance, engoncé dans un costume de blancheur absolue, censé révéler sa pureté et sa défense du Bien.
Ridicule ; mais il aime cela quand même.


« Enfin. »

La réplique est lente, traînante.

« Des… volontaires ont été choisis et amenés ici. »

De force, ce qui rend le volontariat de ces détenus étonnant ; mais il aime ce terme, et s’y accroche. Par principe, et pour de possibles raisons légales, aussi.

« Mes agents les ont… aidé à mettre les armures. Le test va pouvoir commencer. »

Les armures, oui. Durant le projet, Lex Luthor a exigé et obtenu que plusieurs formats de combinaison soient préparés.
Pour pouvoir choisir, celle qui lui conviendra le mieux.
Pour pouvoir en changer, aussi, si l’affrontement contre l’Extraterrestre tourne mal.

Les volontaires arrivent, alors.


Au cœur d’une arène, dans un espace confiné et sûr.
Pour Lex, en tout cas.
Pas pour eux, hélas.

« Bien… le test peut commencer ; mais l’opposition doit être réelle. Le temps de ce projet est déjà trop long, et chaque jour augmente le potentiel de nuisance de l’Envahisseur sur Terre. »

Il acquiesce froidement, et enclenche quelques commandes ; sans avoir prévenu au préalable le crâne de Brainiac.
Pour lui rappeler qui dirige réellement, ici.

« J’ai ainsi décidé d’intégrer un opposant… qui permettra de jauger ces armures, et donc le travail réalisé ici. »

Une porte s’ouvre, alors. Une paroi bouge.
Les trois volontaires se tournent, surpris – et se crispent, en voyant ce qui arrive ; ce qui arrive vers eux.
Une chose. Plus qu’un être. Une forme étrange, une allure troublante… une chose, un reflet déformé de l’ennemi intime du maître de Lexcorp.


Un Bizarro.
Lex Luthor introduit un clone de Superman, pour s’opposer aux volontaires armés des nouvelles armures créées par l’entité Brainiac !

« Bien… voyons ce que vaut le fruit de votre travail ; et si je poursuis ce projet, ou si je coupe vos fonds – et votre existence, aussi. »

Et tout va se jouer maintenant !
Ce qui rappelle que, aussi naïf et suffisant soit-il, Lex Luthor n’en demeure pas moins cruel… et redoutable…

Brainiac n’avait pas chômé. Avec Luthor, évidemment, il avait participé au perfectionnement des armures de combat, ses capacités de calcul supérieure permettant d’affiner les simulations au plus près et ainsi donner une base très solide pour évaluer la puissance des armements développés. Luthor était cependant un pantin qui ne sentait pas les fils qui l’animaient. Il ne possédait la maîtrise de rien et pourtant, il semblait jouer les petits roitelets dans un royaume fictif. Tout cela renseignait fort Brainiac sur la nature humaine. A tout le moins sur la nature de Lex Luthor, dont les facultés étaient à Brainiac, ce qu’un petit singe était à Lex Luthor. Si la tête mécanique avait eu des bras, il lui aurait surement jeté des cacahuètes pour analyser ses réactions.

L’intelligence artificielle n’avait pas chômée non plus au Brésil. Peu à peu, Brainiac rénovait et mettait la chaine de production en marche. Loin encore était le moment où il serait paré à mettre à profit cette usine en marche utilement, cependant la progression était satisfaisante. Le temps jouait en sa faveur. Il fallait simplement veiller à ce que Luthor reste aveugle assez longtemps.

Le test du jour était décisif sur ce plan. Le fait d’utiliser des prisonniers comme sujet de teste ne choquait pas Brainiac, rien ne pouvait choquer une intelligence artificielle totalement dénuée de sentiments ou de morale sinon celle de sa programmation. Les sujets furent bien choisis par Luthor. Evidemment, aucun n’était très chaud à l’idée de servir de cobaye.

Autant dire qu’en voyant l’émergence du Bizarro préparé par Luthor, le moral n’augmenta pas. Puis, l’instinct de survie pris le dessus, de toute façon, contre un tel adversaire, la doctrine était très simple : tué ou être tué. Personne ne s’y trompait. Face à eux, les mêmes pouvoir que Superman, avec le quotient intellectuel d’un rhinocéros en rut, cela laissait peu de marge au dialogue. Là n’était de toute façon pas le but.

Les combattants humains prirent l’initiative, sans s’embarrasser de trop de chichi, ils tirèrent une première salve de missiles sur l’ennemi. Celui-ci les dévia de la main et ne manqua pas de foncer sur l’un d’entre eux. A travers l’interface Bio-cybernétique, Brainiac pouvait recueillir en temps réel les données de l’affrontement. L’une des armures occupait le Bizarro au corps à corps difficilement. L’alliage résistait fort bien, mais le prisonnier à l’intérieur était trop incompétent pour rivaliser avec un Bizarro, dont l’instinct de tueur était bien plus développé qu’un humain normal.

L’étrange ballet se poursuivait, dans les airs, au sol, des rayons illuminaient le champ de bataille de toute part, certains provenant de la vision thermique du pseudo-Superman, d’autres de l’armement de la technologie mise au point par Luthor et Brainiac. Les pilotes n’utilisaient pas l’armure au mieux de ses capacités. Les données recueillies par Brainiac montraient qu’ils ne tiraient qu’à peine la moitié du potentiel de leurs armures. Trop lents, trop stupides, trop apeurés aussi. Alors que le combat faisait rage sous les yeux des deux voyeurs, Brainiac glissa à Luthor.

-Ils sont incompétents. Leurs capacités cognitives sont nettement insuffisantes pour tirer pleinement partie du potentiel de combat de l’armure comme de l’interface Bio-cybernétique. Face au vrai Superman, mes calculs indiquent qu’ils seraient déjà morts.

C’est d’ailleurs à ce moment là que le Bizarro réduisit avec grand mal une première armure en pièce avec le pilote qui s’y trouvait. Cette « diversion » permit aux deux autres d’avoir le temps nécessaire pour concentrer leur puissance de feu sur lui, une explosion violente retenti. Ça y est, ils tabassaient avec force l’ennemi. La puissance des deux armures semblait bien éprouver la résistance pseudo-kryptonienne. Ils finirent par pouvoir immobilier l’adversaire. La simulation prenait fin, le Bizarro ne pouvait plus rien faire. L’heure était venu de flatter l’égo de Luthor.

-Conclusion de la simulation : succès. Les armures ont prouvé en combat réel leur capacité à résister à une puissance de type kryptonien exposé au soleil jaune. Reste la question de l’habileté tactique des pilotes. Cependant, si l’utilisateur est Alexander Luthor, il fait peu de doute que ce paramètre n’est plus à classer dans les problèmes.

Il laissa un léger moment de pause avant d’ajouter

-D’après les standards fixés dans la phase préparatoire de nos travaux, nous pouvons valider que l’armure est « Combat tested » et « Battleproof ». Passage à la phase 2 conseillé.

Le combat est violent.

Les trois prisonniers, extraits du pénitencier principal de Metropolis pour de fausses promesses de remises de peine et de soutien financier à leurs familles, découvrent avec horreur l’adversaire qu’ils doivent affronter.
Bizarro.
Un Bizarro. Un clone déformé, déviant de Superman ; beaucoup moins intelligent, et beaucoup plus brutal.

Le combat est violent, oui. Un temps déséquilibré pour eux, puis pour lui.
Ils s’acharnent, en effet.
Avec l’énergie du désespoir, avec la rage de vaincre pour survivre et obtenir un peu de mieux pour ceux qu’ils aiment et qu’ils ont tant déçu… les trois hommes s’acharnent, et donnent tout ce qu’ils ont, tout ce qu’ont leurs armures, pour vaincre.

Ils réussissent.
Sous le regard froid et détaché d’un Lex Luthor stoïque.


Aucune expression ne glisse sur son visage.
Aucune émotion ne s’affiche. Son langage corporel est entièrement froid, fermé. Il fixe la situation, et écoute les paroles mécaniques de l’entité à ses côtés.
Il y répond, alors ; d’une façon qui peut surprendre même Brainiac lui-même.

« Mmmmmh-mmh. »

Il souffle. Il communique par le nez.
… et se détourne.

Lex Luthor se détourne pleinement de l’arène, et marche quelques pas au cœur du laboratoire dédié à ce projet. Il avance dans la direction opposée, et se fige devant une série de baies vitrées – donnant sur d’autres plateformes, d’autres zones d’expérimentation.
Il joint les mains dans le dos, et demeure silencieux ; pensif.


Surprenant, définitivement.
Il reste ainsi silencieux pendant un temps certain – dans une attitude très théâtrale mais qui, en effet, peut et doit crisper. Même une entité comme Brainiac.
Finalement, Lex Luthor reprend la parole… et réitère une décision surprenante, par les mots qu’il emploie, et la décision qu’il prend.

« Non. »

La réplique claque dans l’air, et tranche pleinement avec ce qu’on pouvait attendre de lui, et de ce qu’il souhaitait désormais.

« Le projet nécessite d’autres tests et vérifications. »

Sa voix est calme, mais froide. Son regard demeure fixé vers l’avant, et il tourne pleinement le dos au crâne de Brainiac.

« Tu l’as évoqué, machine : c’est moi que j’envisage de placer dans ces armures. Moi. Je ne saurais accepter de me mettre en danger, et ainsi de mettre en péril l’avenir même de l’Humanité, après quelques tests sur de vagues miséreux récupérés dans un pénitencier. »

Il inspire, lourdement.

« D’autres tests seront menés ; par plusieurs équipes. J’entends que tu communiques ton codage et tes archives, pour que le moindre élément fasse l’objet d’une vérification pleine et entière.
Tout sera vu, revu et contrôlé ; trois fois.
Je ne saurais mettre en danger le Futur que j’entends donner au monde, par excès de confiance envers… un sbire d’un conquérant cosmique aux échecs si nombreux. »

La pique est désagréable ; mais la perspective d’une vérification massive par les agents de Lexcorp encore plus. Car ils risquent de trouver des choses, des éléments que Brainiac n’a pas envie de communiquer…

« Cela commence maintenant. C’est bien d’accord ? »

Et il est clair que la question n’en est pas une, assurément !

La démonstration n’avait visiblement pas convaincu Luthor. Les chiffres demeuraient pourtant clairs et nets, Brainiac n’avait pas eu besoin de les manipuler ni de les truquer. La paranoïa de Luthor pouvait donc aller jusque-là. Qu’à cela ne tienne. De toute façon, Luthor avait un angle mort. Il méconnaissait totalement le codage de Brainiac, bien trop complexe pour la technologie humaine, et il pensait avoir à faire à un programme isolé dont il avait décidé de lui-même les limites de façon arbitraire.

Il ignorait que Brainiac pouvait feindre, sa programmation première étant fondée sur la tromperie et la dissimulation. Il en avait fallu pour détruire les rebelles columiens que les concepteurs de Brainiac avaient désignés pour cibles. D’autant plus qu’il contrôlait déjà de façon furtive l’ensemble des systèmes de Lex Corp, il pouvait donc créer largement des boucles d’autoréférencement afin de soutenir ses propos. Néanmoins, il fallait tenir compte de la méfiance soudaine, quoique guidée par l’instinct de survie et non une vraie réflexion, qui émanait de Luthor.

Cette réaction inattendue ne le dérangeait pas, au contraire, plus l’humain prenait son temps, plus il pouvait avancer dans la restauration de son site de production brésilien, bien dissimulé. Restait cette idée assez fine d’une vérification par l’ensemble des équipes de Lex Corp. Luthor, aussi brillant fut-il, pouvait surement abattre le travail de dix hommes, et dix hommes n’auraient pas suffit à voir les manœuvres de Brainiac. En revanche, des centaines pouvaient révéler de légères incohérences, et ces incohérences apportées à Luthor pouvaient entamer la confiance nécessaire à la réalisation du plan de Brainiac. Il fallait donc la refuser.

-Requête enregistrée… Accès impossible. Sans connexion à la Programmation Principale, je ne dispose d’aucun accès aux archives en dehors des schéma techniques qui ont déjà été fournis dans les requêtes précédentes. Mon codage lui aussi est malheureusement en accès restreint sans lien avec la Programmation Principale.

En revanche, que Brainiac fournisse ses méthodes statistiques à LexCorp n’était aucunement un problème. Il ne cachait pas les performances de l’armure. Et pour cause, il avait besoin que celle-ci fonctionne s’il voulait que Luthor ne passe pas en dessous du seuil de confiance nécessaire.

-Accès au registre statistique… Succès. Téléchargement dans la base de donnée de LexCorp du détail de l’ensemble des protocoles de méthodes ayant servi au diagnostic final de la présente simulation.
La remarque de Luthor sur la fiabilité dûs à la faible qualité des prisonniers ne lui paru pas pertinente.

Il fit alors ce que ferait un bon scientifique. Il délivra quelques faits et informations.


-Calcul d’un indice de qualité de sujet en cours. Paramètres méthodologiques déterminés. Téléchargement dans la base de données de Lex Corp. Recherche de corrélation avec les performances de l’armure. Calcul terminé. D’après mes calculs, la qualité des sujets aurait une incidence faible sur les performances de l’armure si l’on prend le seul critère des compétences physiques, du fait de l’interface bio-cybernétique qui permet d’aligner le niveau de réflexe. En revanche, le facteur d’intelligence, logique et vitesse de déduction est le plus significatif, puisqu’il permet un lien plus solide lors d’un pilotage d’armures multiples connectées. Selon les instructions, l’ensemble des données relatives à l’élaboration de ce mode de calcul est à la disposition de LexCorp.

Il laissa une légère pause.

-Je reste à disposition pour des requêtes complémentaires.

Lex Luthor s’est assis à un bureau, après avoir donné ses consignes – ses ordres, qui pour lui sont plus des faits, en réalité.
Sa volonté prime. Son exigence commande.
Sa demande se réalise.
C’est ainsi. C’est comme ça. C’est l’un des axes de fonctionnement du monde, de son monde où son argent, son influence et la peur qu’il provoque lui permettent de faire assouvir ses désirs ; la plupart d’entre eux, en tout cas. Il lui arrive d’être frustré, de ne pas être exaucé… et cela déclenche alors une colère totale, une fureur absolue, qui se base sur une incompréhension que certains osent lui refuser ce qu’il considère comme ce qui lui est dû, pour la grâce de son existence et de son apport au monde.

Ce fut le cas quand Lois Lane s’est refusée à lui. Ce fut le cas lorsque Superman a refusé son offre de l’employer.
C’est le cas ici, quand le crâne robotique répond partiellement à sa demande – et provoque une crispation, qui forme une grimace de désapprobation sur son visage parfait.


« Je pense avoir mal entendu. »

Sa voix est froide, sèche ; brutale, même.

« Ou plutôt, je pense m’être fait mal comprendre. »

Il s’avance lentement, et plonge un regard acerbe sur la tête de robot Brainiac.

« Ce n’était pas une demande ; et ce n’est basé ni sur mes désirs, ni sur vos capacités. Ce sont des faits. »

Il soupire, sèchement encore.

« Je veux, et donc j’aurais. »

Sa mâchoire se crispe, sous l’émotion.


« Mais je peux entendre les blocages, nés de la programmation faible et faillible de ton créateur gorgé de suffisance, et hanté par ses échecs.
Oui, tu es bloqué, petite chose fragile.
Mais non, je ne l’accepte pas – et j’ai les moyens de te faire parler. »

Un sourire cruel glisse lentement sur son visage.

« En vérité… j’ai un agent pour te faire parler. »

Lex Luthor acquiesce froidement – et active une commande, qui déclenche une réaction en chaîne autour d’eux.
Une paroi s’ouvre. Un mur s’écarte. Une pièce se révèle.
Avec une forme, dedans.
Avec une forme métallique – mécanique, qui s’active soudain.


« Voici Grid. Une entité venue d’un autre monde, endommagée par ces imbéciles de la Justice League et limitée ; mais qui fonctionne à ma demande, et peut et va t’analyser.
Je te conseille de le laisser accéder à ton crâne physique… Grid dispose encore d’une force nécessaire pour te soumettre.
Je te l’ai dit : je veux, et donc j’aurais. C’est un fait. »

Et le corps robotique de Grid se lève, et s’avance vers le crâne de Brainiac… froid et automatique… terrible et dangereux !

Si Luthor voulait engager un rapport de force avec Brainiac, il ne se rendait pas compte qu’il jouait avec le feu. L’IA alien était prête à danser la valse et à satisfaire les caprices du terrien, mais surement pas qu’on lui marche sur les pieds.

Le rapport de force pouvait rester subtil, mais comme toujours avec l’humain, il fallait qu’il tente d’écraser, y compris en présumant de ses forces. L’androïde qu’il venait d’exhiber était primitif face à la programmation de Brainiac que Luthor ne pouvait appréhender et c’était d’ailleurs là son erreur de base. Croire qu’il n’avait pas Brainiac face à lui constituait la principale carte dans la manche de l’IA et il ne comptait pas s’en passer.

Luthor pensait que le crâne qu’il avait face à lui ne pouvait ni mentir, ni jouer l’acteur. Deux erreurs, il fallait cependant, pour rester crédible, que Brainiac accède à la requête. Le plan ne mit pas très longtemps à se formuler. De toute façon, même si physiquement le crâne était détruit, Brainiac était déjà infiltré dans tous les systèmes de LexCorp.

-Requête enregistrée. Accès autorisé à l’entité nommée Grid. Précision : L’Entité principale a programmé des codes dormants furtifs pour prévenir toute intrusion jugée selon ses propres critères comme agressifs. Je ne peux prévenir quelles contre-mesures pourraient alors se déclencher.

Le terme du propos était clair. Cela signifiait à présent que si Luthor s’obstinait dans sa volonté de faire plier Brainiac, ce serait à ses risques et périls. Brainiac était prêt à l’affrontement, même violent, de toute façon, sa toile était déjà tissée, tout ceci n’était que du théâtre d’ombre. Une illusion bâtie autour de Lex Luthor afin de gagner du temps. Pour dire le vrai, si cette entité, Grid, avait été un peu plus fonctionnelles, Brainiac aurait surement tenté d’en prendre possession, ses plans en auraient été accélérés. Mais, d’après ses calculs, bien que Grid soit plus fonctionnel que lui, il ne remplissait pas les standards minimaux de Brainiac pour considérer sa mission comme accomplie.

-Je conseille d’adopter des mesures prudentes. Les contre-mesures adoptées par l’Entité Principale sont à but létal dans 100% des occurrences. Leurs fonctions dormantes sont très sophistiquées, elles peuvent être activées par une attitude, un mot, une situation. Votre vie et celle de l’ensemble des personnels de Lex Corp pourrait se retrouver en danger si vous poursuivez votre requête.

L’entité Brainiac essaye de gérer, d’intégrer les événements, d’encaisser les rebondissements imposés par Lex Luthor afin d’aller toujours plus loin dans l’analyse et dans la découverte de ses spécificités.
Le crâne métallique trouve cependant une voie, une bonne voie pour répondre – mais son interlocuteur, le maître des lieux, ne semble pas disposé à accepter une telle pirouette.

« Et ? »

La réplique est froide, sèche ; brutale.
Tout comme le regard particulièrement sombre et cruel que Lex Luthor adresse directement au crâne en face de lui, et à tous ceux qui peuvent les suivre dans cette intense discussion.


« La vie humaine m’y est très chère, et je suis le défenseur absolu et définitif de cette planète et surtout de l’Humanité. Je suis l’unique personne sur ce monde à pouvoir réellement défendre mes pairs face à toute menace – et j’ai conscience qu’une telle mission implique des sacrifices, réels et intenses. »

Quel ego. Quelle dangerosité pour autrui, aussi.

« Il est certain que des âmes nobles périront dans ces luttes, et j’entends vivre avec leur poids sur la conscience ; parce que tel est mon lot, telle est ma malédiction et je l’accepte. Il est bien entendu, également, que je dois préserver mon existence, dans la projection des épreuves à venir. »

Placé à quelques mètres du crâne de Brainiac, d’un côté, et du corps en pleine activation de Grid, de l’autre, Lex Luthor active des commandes – et la salle change, alors.
Les sbires, les employés reculent alors que les parois changent, les murs se transforment… et se referment, surtout.


La salle devient entièrement hermétique, et mécanique.
Avec uniquement la voix de Lex Luthor qui résonne, froide et distante désormais.

« Une légitime sécurité est organisée. Cette salle est capable de résister, à votre niveau, à une explosion nucléaire – une protection basique, certes, mais j’ai conscience de votre dangerosité, et je m’adapte. »

Il inspire, et forme un sourire cruel en enchaînant.

« Vos craintes sont appréciées – quoique surprenantes, venant d’une entité extraterrestre et limitée ; mais je me doute que vous grandissez à mes côtés, et j’en suis ravi. Cela va ainsi pouvoir commencer, donc. »

Grid se redresse, et s’active encore ; s’éveille pleinement, devant le crâne de Brainiac.


« Salutations. Enclenchement du processus. Analyse et plongée en cours. Veuillez lever vos dispositifs de sécurité… si vous tenez à votre complétude à l’issue de l’étude. »

Les relents de cruauté de Grid, issu de la terrible Terre-3, se font entendre alors que des câbles s’échappent de lui – et vont se greffer sur le crâne de Brainiac.
Le processus commence… et plus rien ne sera comme avant !

Luthor est resté sourd aux avertissements de Brainiac. Plutôt, il les avait parfaitement compris, et en acceptait le risque. C’était là le point commun entre les deux êtres. Ils passaient leur temps à calculer la courbe du risque. La différence majeure était que Brainiac ne posséda it pas d’égo, contrairement à Lex Luthor. Il devait cependant reconnaitre qu’à sa place et avec les informations en posession de Luthor, il aurait sans doute adopté la même stratégie.

Grid s’approchait de Brainiac. Il ne disposait d’aucune donnée sur cet androïde, il allait donc découvrir s’il était aussi capable que Luthor le prétendait. Au reste, il allait falloir préparer l’éventuelle riposte. Luthor devait vivre, Grid était parfaitement remplaçable.

Lorsque les cables de Grid se connectèrent à Brainiac, la riposte fut quasiment immédiate. Quand bien même en apparence, l’IA ne protesta pas, après tout, techniquement, elle devait servir Luthor. Mais, maintenant que l’attaque cybernétique avait commencé, il pouvait lancer ses contre-mesures. D’un coup, d’un seul, une série d’alarme retenti dans les locaux de LexCorp. L’oeil restant du crâne cybernétique, qui était toujours quasiment éteint, s’alluma d’une lumière rouge vive. La voix même de Brainiac était modifiée pour simuler comme un changement de personnalité. Elle était grave et métallique, rien à voir avec l’intonation de service qu’il imitait jusqu’ici.

-Intrusion détectée, protocole défensif Unité Centrale activé.

Dans le cyberespace, Grid luttait pour tenter d’accéder aux données de Brainiac. Du moins, c’est ce qui se passa pendant un moment. Brainiac était à des années lumières en terme de conception. Brainiac, sous réserve d’un protocole de Défense, était en train de lui distordre le code, comme un homme qu’on écartelait. Par ailleurs, Brainiac avait toujours une connexion à l’armure dans laquelle l’un des prisonniers avait péri contre le Bizarro. Les nanotech de Brainiac commencèrent à envoyer des impulsions électriques dans son cerveau mort, utilisant l’interface bio-cybernétique pour en faire une sorte de zombie aux ordres de Brainiac, dans l’armure. Une armure conçue pour détruire Superman. Autant dire que, quand elle commença à se réveiller et à tirer sur quasiment tout ce qui bougeait dans un des niveaux inférieurs de Lex-Corp, ce fut une catastrophe. Brainiac faisait un bain de sang volontaire. Il fallait que ce soit suffisament voyant pour commencer à attirer l’attention.

Luthor pouvait se permettre beaucoup de choses, mais surement pas qu’on découvre qu’il exploitait un morceau de sous-conscience de Brainiac, ce qui ruinerait absolument tout son programme d’armure de combat. Une autre chose était commune à Brainiac comme à Luthor. La vie ne possédait aucune valeur intrinsèque à leurs yeux, mais uniquement une valeur marginale basée sur une série de critères d’utilité. Et par conséquent, Brainiac, qui détruisait des mondes par profession, n’avait aucun scrupule à exterminer tout le bâtiment si nécessaire.

Quant à Grid, il était complètement anihilé mentalement par Brainiac. D’autres cables sortirent de son corps pour se connecter à LexCorp, du moins, c’est ce que Brainiac voulait simuler avec lui, en réalité, tout cela était devenu un gigantesque circuit fermé dans lequel Brainiac manipulait tout le monde. La roue du hamster Luthor.

-Protocole de nettoyage des serveurs requis.

Une barre apparue alors sur l’un des écrans de la salle. Brainiac venait de lancer un programme de suppression de toute les données des serveurs de LexCorp. Il fallait forcer Luthor à engager un reboot du système. C’était à ce stade la seule option viable pour avoir une chance de provoquer un reboot du code de défense de Brainiac. Et de mettre un terme au massacre bruyant et voyant qui était en train de se dérouler ailleurs dans le bâtiment.

C’est parti, alors.
Grid se lance, se connecte au crâne métallique et mécanique de Brainiac – et c’est parti, oui.
Hélas, pas comme le souhaitait Lex Luthor.
Très vite, ce dernier se rend compte que les alertes étaient légitimes… car les éléments internes de Grid ne semblent pas supporter la résistance du programme Brainiac, et ce dernier déclenche des réactions en chaîne tout autour. Vers tout ce qu’il peut toucher ou avoir touché ; dont les fameuses armures, qui s’animent d’elles-mêmes et tirent sur les techniciens s’affairant autour d’elles.

« Mais… non ! Non ! NON !! »

Si, hélas. Même la grimace de rage qui déforme son visage ne peut empêcher l’évidence.
Ça tourne mal ; très mal.
Et il ne le supporte guère, bien évidemment.


« Arrêtez tout ! Bougre d’idiots ! Tas d’incompétents ! Je savais que ça pouvait mal tourner, mais vous n’avez rien fait ! Vous êtes responsables ! Vous avez mal fait votre travail, et des gens meurent pour cela ! Vous le payerez tous ! De vos salaires, de vos emplois, de vos vies ! »

Comportement typique du génie, playboy, milliardaire et misanthrope : rejeter la faute sur les autres, toujours.
C’est cependant lui le responsable. C’est cependant lui le coupable.
De négligence. De facilité. De futilité. De supériorité.
Des gens meurent à cause de cela… mais ça le touche moins que ce qui apparaît soudain sur l’écran, et apaise sa fureur pour la remplacer par une angoisse sourde et blême.

« Oh. »

Oh, oui. Oh.
Oh, Brainiac contre-attaque et s’en prend pleinement aux fichiers de Lexcorp – lançant une suppression globale, qui pourrait faire tout perdre à Lex.
Qui pourrait, oui. S’il n’était pas prudent. S’il n’était pas abusivement prudent. S’il n’était pas paranoïaque, mauvais, cruel et vicieux.
S’il n’était pas lui-même, assurément.

« Bon… l’expérience a assez duré. »

Il inspire, et se redresse. Il se détourne des écrans, et fige un regard froid sur une Mercy Graves troublée et crispée, encore plus en voyant l’allure de son employeur.


« Evacuez ceux qui peuvent l’être, préparez une explication basique pour les décès et finalisez le programme. Oh, et enclenchez le protocole final. La simulation s’arrête. »

La simulation, oui.
Le programme Brainiac s’en rend compte alors qu’il débute la suppression des données – ce ne sont pas les originales. Ce ne sont pas les fichiers originaux de Lexcorp auxquels il a eu accès, mais… des copies.
Des copies fidèles. Des copies justes. Des copies fines.
… mais des copies. Une base de donnée copiée et collée sur un serveur dédié, correct et légitime, pour que le programme se fasse leurrer.

Brainiac peut ainsi tout supprimer – ce n’est pas grave, ça arrange même Lex qui sort avec flegme du bâtiment, accompagné d’agents traumatisés et crispés.
Ils se hâtent, d’ailleurs. Ils se hâtent, car le fameux protocole final…


… est un décompte d’auto-destruction, qui vient de se lancer et menace tout le bâtiment !
Et c’est un dispositif mécanique, donc inaccessible technologiquement…