Non loin de la ville d'El Paso et en plein désert du Chihuahua, le parc national de Big Bend accueillait - néanmoins - et sur demande, de temps en temps, des festivals ou des conventions dans sa partie la plus désertique.
Tel était le cas du Camp d'été de l'Alliance Raciste, fédération regroupant divers groupuscules, mouvements et associations unies par une même passion : la haine.
Ainsi, le désert texan s'était retrouvé investi par des tentes et des chapiteaux, abritant une colonie d'environ un millier de personnes, issues de toute une nébuleuse de mouvements plus ou moins radicaux et plus ou moins du mauvais côté de la loi, pour 3 jours de conférences, débats, assemblées générales, concerts et jeux en tout genre.
Le campement s'était organisé autour de son centre : un grand chapiteau (à la manière d'un cirque) permettait de regrouper l'ensemble des participants pour l'assemblée générale. Tout autour, il y avait de plus petits chapiteaux servant à accueillir les différentes conférences et ateliers mais aussi la cuisine, les salles de convivialité, l'infirmerie et plusieurs réfectoires.
Enfin, le cercle le plus éloigné du chapiteau central était constitué de tentes plus ou moins grandes abritant les dortoirs (de 2 à une cinquantaine de personnes) ainsi que la tente des organisateurs, servant de passage obligé à qui voudrait pénétrer dans le campement. En effet, du grillage de 2 mètres de haut avait été installé en toute hâte, tout autour du camp, le temps de la durée de la convention, preuve s'il en était besoin des grandes capacités des organisateurs de l'événement.
Enfin pour garantir la sécurité de la convention, des gardes armés (avec stetson et cravate texane) de carabines et de colts à poudre arpentaient en permanence les ruelles créées par l'installation des tentes et chapiteaux.
La presse et les officiels n'avaient pas été conviés et étaient clairement considérés comme
persona non grata.
La police n'était pas non plus la bienvenue, comme les héros costumés.
Et pourtant c'était là que la mission de Supergirl devait s'accomplir. La jeune kryptonienne, un sac à dos sur les épaules, en tenue civile, des faux papiers dans sa poche, était sur le point d'entrer dans le campement...
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Suite au briefing, Liberty Belle avait fait en sorte de fournir de faux documents d'identité à Supergirl. La jeune femme s'appelerait dorénavant - et pour les besoins de la mission - Siegrid McFarlane et serait habitante de Métropolis où elle serait étudiante.
Liberty avait bien mis en garde Supergirl sur la nécessité d'une parfaite discrétion et l'avait encouragé à parfaire son "histoire". Elle lui avait conseillé d'indiquer qu'elle avait eu vent de l'existence du camp d'été par le
darknet où elle surfait à la recherche d'informations sur ses sujets favoris...
Puis, Liberty lui avait expliqué la différence entre les différents mouvements qu'elle était susceptible de rencontrer :
- le Ku Klux Klan : les cagoules pointues du Klan croyaient en la suprématie de la "race" blanche sur toutes les autres, souhaitaient réduire en esclavage les personnes de couleur, étaient le plus souvent homophobes et antisémites et n'écartaient pas l'action violente, notamment les lynchages, les violences physiques ou les menaces en tout genre
- le Parti Nazi Américain : néo-nazis nostalgiques d'un IIIème Reich qu'ils n'avaient pas connu, leur haine s'exprimait essentiellement à l'encontre des juifs et des tziganes mais touchait également les homosexuels et plus généralement les peuples "non aryens". Ils avaient la violence chevillée au corps et revendiquaient l'extermination pure et simple de leurs adversaires. Ils n'excluaient pas la possibilité de prendre un jour le pouvoir par la force
- les Valkyries de R'lyeh, même si Atom avait été chargé plus spécifiquement d'enquêter sur elles : jeunes femmes adeptes de la magie noire et de la nécromancie, elles partagaient - du moins pour celles qui étaient présentes lors des événements d'Ivy Town - une admiration sans faille pour Adolf Hitler et les nazis. Groupe le plus secret de l'Alliance, Supergirl n'aurait peut-être pas à les croiser... Elles aspiraient à la destruction du monde et de l'humanité toute entière, sous le joug des Grands Anciens, des divinités malfaisantes ! Leur arme était la magie, la violence directe ne semblant pas - a priori - faire partie de leurs méthodes...
- "Amérique d'abord !" : mouvements de jeunes gens friqués et désœuvrés qui souhaitaient "purger" l'Amérique de la prétendue gangrène qui la rongeaient... Ainsi pour les membres de ce mouvement, il convenait en premier lieu de se débarrasser des étrangers, mais également des aliénés et des SDF... Ils avaient pu s'illustrer en faisant de véritable chasse aux clochards et n'écartaient pas la possibilité de commettre des violences sur autrui. Leur particularité étant qu'ils avaient des noirs dans leur mouvement...
... et puis, en marge de ces "grands" mouvements, il y avait aussi des groupuscules ou de simples particuliers, représentant individuellement et en groupe toutes les nuances du racisme et de la xénophobie.
Ce camp d'été était très clairement un conservatoire de la haine. De toutes les haines.
Et c'était ici que Supergirl allait devoir trouver les informations dont la JSA avait besoin, à savoir :
- pourquoi et comment des membres des organisations précédemment citées s'étaient retrouvées à intervenir à Ivy Town, en masse, pour commettre diverses infractions (violences, dégradations, pillages), tandis que Captain Nazi et Bob Kirkland cherchaient à utiliser la machine temporelle, la Time Pool ?
- pourquoi les leaders de ces mêmes groupes semblaient être surpris de cette initiative dont ils ne semblaient pas être à l'origine ?
Il s'agissait donc de se renseigner discrètement et ce camp était une occasion idéale pour le faire ! D'autant plus que les leaders de ces mouvements feraient pendant ces trois jours une conférence sur la question et que bon nombre de personnes impliquées dans les événements d'Ivy Town avaient d'ores et déjà été libérées et étaient présentes au Festival.
Et c'était pour cela que Supergirl se trouvait actuellement devant le seul point d'entrée au festival, devant l'un des organisateurs qui lui demanda simplement :
"Qui êtes-vous ? Que venez-vous faire ici ?"Il tendait la main pour que Supergirl puisse lui donner sa pièce d'identité. Son collègue ajouta, d'une manière plus affable :
"Si vous avez des questions, n'hésitez pas..."