Ultime volume de l'intégrale Urban Comics consacrée au Sandman de Neil Gaiman (et donc ultime review pour ma part !), ce tome VII nous offre un sommaire assez copieux et nous gratifie de nouvelles pages grandioses de la bédé fantastique...
... mais ne fallait-il pas ça pour conclure une série aussi gigantesque et immense que Sandman ?
Quoiqu'il en soit, ce volume VII nous présente les derniers épisodes de la série régulière avec le dernier story-arc, "The Wake" (La veillée mortuaire, #70-73), deux épisodes solos (#74-75 et c'est LOIN d'être du remplissage... On va le voir mais le Sandman n'a jamais été aussi bien dessiné que dans l'épisode #74 et quant au #75, il résume à lui TOUT seul toute la série), la nouvelle illustrée "The Dream Hunters" (1999) par Yoshitaka Amano (dans un autre volume de l'intégrale, il y a la même histoire mais dessinée par P. Craig Russell) que je n'ai pas et qui ne sera donc pas chroniquée et le graphic-novel "Endless Nights" (2003) que j'ai et dont je vais dire tout le bien que j'en pense !
Bon mais d'abord la fin de la série régulière...
Sandman #70-73 : The WakeMorpheus est mort à la fin du précédent arc et il a été remplacé par Daniel, le fils de Lyta Hall, qui est donc devenu le nouveau Dream. Afin de clore le chapitre "Morpheus", il va falloir lui donner des funérailles et se réunir en une veillée mortuaire particulièrement démesurée pour évoquer son souvenir et lui rendre hommage. C'est en gros le script de cet arc, du moins de ses trois premiers épisodes, le dernier constituant le versant humain de ce même arc (en gros les #70-72 se passent dans le Rêve, le #73 traite de la souffrance particulière d'un être humain particulier... Hob Gadling !).
Le tout est (magnifiquement) dessiné par l'immense Michael Zulli qui nous avait déjà illustré deux histoires mettant en scène Hob Gadling (#13, Intégrale I ; #53, Intégrale V). J'irai même jusqu'à dire que c'est la cime graphique de toute la série mais l'épisode #74 me donnerait immédiatement tort !
Pour la petite histoire, le #70 est le premier épisode que j'ai lu de Sandman donc j'y suis particulièrement attachée !
Sandman #70 (S#70) : A la suite de la mort de Morpheus, tous les autres Endless en activité (Destiny, Death, Desire, Despair & Delirium... tous sauf Destruction qui a démissionné) sont convoqués aux fins de s'occuper des funérailles de leur frère disparu.
Ils se rendent (en compagnie de Barnabas, le chien parlant de Delirium ^^) à la Nécropole de Litharge pour récupérer le livre de cérémonie et le suaire mortuaire (donnant une explication d'ailleurs à l'une des historiettes de la Nécropole de Litharge racontée dans l'épisode #55, Intégrale V ^^ Car chez Gaiman, tout finit toujours par [plus ou moins] s'expliquer ^^).
Dans le Château du Rêve, Daniel est en train de prendre ses marques. Le Corinthien l'épaule dans ses fonctions.
Caïn exige de Daniel qu'il recrée son frère Abel, tué par les Furies lors du précédent arc... Ce que Daniel va faire. Il va faire de même avec Mervyn et Gilbert, qui va néanmoins refuser de revenir à la vie (rappelant juste qu'il a mené une belle vie et qu'il a même été amoureux de Rose Walker... mais que tout cela doit avoir une fin). Matthew le corbeau, quant à lui, va râler sur Ève et lui expliquer que Daniel n'est pas son boss (son ami en fait), que son boss c'est Morpheus et qu'il est mort.
Et dans le monde éveillé, partout les gens s'endorment pour célébrer la mémoire de Morpheus... C'est le cas de Nuala l'elfe, de Rose Walker, de Richard Madoc (#17, Intégrale II), de Lyta Hall, d'Alex Burgess qui a été sauvé de la malédiction de Morpheus (#1, Intégrale I) par la mort de celui-ci et d'Hob Gadling...
... et ils se retrouvent tous dans le monde des rêves avec tous les autres... Bast, Chiron (le centaure de "World's End", Intégrale V) ou l'Ange Duma (Season of Mists, Intégrale II)... pour la veillée et les funérailles...
S#71 : Alors que les rêveurs attendent que les Endless aient fini de construire le lieu de recueillement, Lucien rappelle le protocole à Daniel : en tant que nouvelle incarnation de Dream, il ne pourra pas assister aux funérailles de son prédécesseur et ne pourra rencontrer les autres Endless qu'une fois la cérémonie terminée.
Les rêveurs, quant à eux, échangent des souvenirs de Morpheus. C'est le cas pour son ex, la muse Calliope, pour Thessaly (une autre ex de Morpheus), Titania (peut-être aussi une ex de Morpheus) ou Mad Hettie (on n'espère pas - pour lui - qu'elle soit une autre de ses ex).
Daniel et Matthew tentent de s'expliquer, tandis que Nuala & Cluracan rencontrent le double maléfique de ce dernier.
Et puis, on a un bel échange entre Rose Walker, son frère Jed (Doll's House, Intégrale I) et Lyta Hall.
Chiron boit avec Hob Gadling ; Constantine trinque avec Sherlock Holmes ; et Batman, Clark Kent et le Martian Manhunter font une petite apparition.
S#72 : Les discours s'enchaînent en honneur de Morpheus. Destiny commencera, puis Bast la déesse chat, Desire (qui n'a vraiment pas l'air triste !), Despair, Wesley Dodds (l'autre Sandman !), l'Ange Duma qui se contentera de pleurer, Delirium, Matthew le corbeau et puis tant d'autres...
Death et Orphée (pourtant mort de la main de son père, Intégrale IV) rendront un dernier hommage et puis... ce sera tout pour Morpheus !
Et on se rendra compte que les funérailles que l'on voit à la fin de "World's End" sont celles-là même auxquelles on assiste... La mort de Morpheus a bouleversé la réalité et a entraîné la tempête de réalité de l'Intégrale V qui va bloquer tant de voyageurs...
Pendant ce temps, Daniel, qui est resté bien sagement de son côté, recevra la visite de Destruction, venu incognito.
Une fois son frère parti, Daniel pardonnera à Lyta Hall (qui est accessoirement la mère de sa partie mortelle) la mort de sa précédente incarnation et ira rencontrer sa famille, épaulé en cela par Matthew (qui décide de rester en tant que conseiller de Daniel ^^).
S#73 : L'épilogue de "The Wake" nous emmène dans une reconstitution médiévale à laquelle participe la petite amie d'Hob Gadling. Pendant qu'elle vaque à ses occupations, Hob va boire tout seul dans un coin... ressassant notamment ses regrets d'avoir été un jour esclavagiste, de nombreuses années en arrière...
... et alors qu'il est ivre mort et seul, Death lui apparaît pour savoir s'il veut toujours vivre.
Et Hob lui explique sa position.
Puis Hob va rêver et faire un rêve magnifique dans lequel il part pour un long voyage en compagnie de Morpheus et de Destruction !
Cet épisode est tout simplement extraordinaire et apporte un point final au dernier arc de cette série incroyable.
S#74 - Exiles :Episode bonus dessiné par John J. Muth, cet Exiles est à mon avis le sommet graphique de la série. Muth a un petit côté McKean quand ce dernier renonce à ses collages pour reprendre un pinceau. Quant au scénario, il développe à nouveau l'idée qui avait été initiée dans l'épisode "Soft Places" (#39, Intégrale III), celui où Marco Polo se trouvait perdu dans un désert étrange...
... dans "Exiles", un dignitaire chinois (mais d'il y a trèèèèèès longtemps) en disgrâce se retrouve exilé de l'autre côté d'un désert, dans une ville lointaine... Et dans le désert, il hallucine et voit son fils mort ainsi que d'autres choses étranges. Il croisera finalement Dream sous ses deux incarnations successives (Morpheus puis Daniel) et refusera de devenir le conseiller de Daniel, estimant que ce n'est pas dans son parcours de vie.
Graphiquement le meilleur des épisodes, au niveau du scénario l'un des plus grands (et qui rappelle, un peu je trouve, le "Mr. Punch" de Gaiman & McKean).
S#75 - The Tempest :Pour le dernier épisode, Gaiman résout la dernière interrogation posée par la série...
... quelle était la seconde pièce que Shakespeare devait écrire pour Morpheus conformément à leur marché (#13, Intégrale I), après "le Songe d'une nuit d'été" (#20, Intégrale II) ?
Eh bien il s'agit de la Tempête ! Et dans ce dernier épisode (dessiné par Charles Vess), la série va revenir sur la création de cette pièce en suivant la petite vie de William Shakespeare, jusqu'à l'accomplissement de son pacte avec Dream, quand le célèbre dramaturge apprendra pourquoi le Dieu voulait cette pièce (car contrairement au personnage de Prospero, Morpheus ne quittera jamais son île [ses responsabilités] et d'ailleurs finira par y mourir).
Comme je l'indiquais, ce dernier épisode résume bien toute la série ! Une série qui traitait d'un être qui devait changer ou mourir et qui, ne pouvant changer que dans de strictes limites, a fini par mourir... Magistral !
Sandman - Endless Nights (2003)Dernier bonus pour cette série (du moins que j'ai lu), ce Graphic Novel de 160 pages comporte 7 histoires courtes, signées Neil Gaimain, illustrées par 7 dessinateurs différents et traitant - chacune - de l'un des Endless...
Death (P. Craig Russell) : Wow ! On commence par du très, très lourd ! L'histoire consacrée à Death (+1) se passe sur une île au large de Venise (+2), est clairement inspirée du "Masque de la Mort Rouge" d'Edgar A. Poe (+3) et est dessinée par P. Craig Rusell (#50, Intégrale V, +1000) !
Le narrateur, un mercenaire, se rappelle son enfance, alors qu'il allait jouer - en vacances - sur une petite île au large de Venise... Il se souvient d'une abbaye en ruine et d'une porte qui refusait de s'ouvrir... et de la belle femme qui attendait devant cette même porte (Death).
Et devenu grand, il revient vers cette abbaye... et voit que Death attend toujours devant la porte qu'on lui ouvre !
En bonus, Death habillée en courtisane vénitienne !
Desire (Milo Manara) : Le gigantesque dessinateur italien spécialisée dans la bédé de fesses (mais pas que : c'est aussi un grand fantaisiste, comme en témoignent son "Jour de Colère" [et tout le cycle Guiseppe Bergman] ou son travail avec Federico Fellini) s'attelle au dessin pour le chapitre consacré à Desire. Et c'est une grande réussite graphique !
Côté scénario, nous avons une jeune femme qui veut un homme... Et elle croise le chemin de Desire qui lui indique qu'elle a toujours porté sa marque. Et cet homme elle l'aura et il deviendra son mari et le chef du clan (on est dans une peuplade barbare, genre viking). Mais un jour il sera tué et ses assassins viendront chez elle...
... et c'est là où les talents de Desire lui serviront à assouvir sa vengeance !
Vous l'aurez compris, encore une grande histoire ! Ce recueil serait-il parfait ? La troisième histoire nous le dira peut-être...
Dream (Miguelanxo Prado) : ... et c'est encore une réussite ! Somptueusement dessinée (mais tout le recueil en met plein les yeux ^^), l'histoire consacrée à Morpheus (Dream) se passe il y a fort longtemps... Quand la vie n'existait pas encore réellement dans l'univers et que l'esprit des différentes planètes se réunissaient en congrès sous l'égide des Endless pour décider du sort de l'univers...
... notre Dream à nous est, quant à lui, tombé follement amoureux de Killalla, une sorte d'ancêtre très éloignée des Green Lantern. Il voudra d'ailleurs remercier son frère préféré, Desire (Oo, c'était il y a VRAIMENT TRÈS longtemps) de les avoir mis ensemble !
Comme c'était il y a fort longtemps, les Endless sont méconnaissables : Despair est dans sa précédente incarnation (qui ressemble à celle qu'on connait, sauf qu'elle a en plus d'abominables tatouages tribaux sur tout son corps [dénudé] ^^), Delirium est encore Delight, Death est franchement pas sympa, il y a encore Destruction et... Destiny est Destiny ^^
En bonus, on aura l'origine de la brouille entre Dream & Desire et on verra même Rao, l'esprit de la planète Krypton ! Et celui de la planète Oa !
Despair (Barron Storey) : Il s'agit d'un recueil de 15 textes, illustrés par des dessins et des collages (un peu à la manière de Dave McKean d'ailleurs), parfaitement déprimants. Il s'agit, d'ailleurs, plus d'un interlude qu'une véritable histoire !
Delirium (Bill Sienkiewicz) : Delirium s'est perdue dans la tête d'une jeune fille et n'arrive plus à en sortir ! Aussi son chien-parlant, Barnabas, et Daniel, le nouveau Dream, décident de monter une opération de sauvetage, en l'espèce en envoyant 5 humains complètement timbrés pour la secourir... Totalement barré ! Mais illustré par l'immense Bill Sienkiewicz (Elektra Assassin, la saga de l'Ours Démon des New Mutants...) !
Destruction (Glenn Fabry) : Très bien dessinée par le type que fait les couvertures de Preacher (Glenn Fabry), cette histoire narre les recherches que mènent deux scientifiques qui ont découvert un monolithe contenant des vestiges... du futur !
Et nous verrons non seulement Destruction mais aussi Delirium ! En effet, cette dernière va mal depuis le sauvetage décrit dans l'histoire dessinée par Sienkiewicz, du coup son grand-frère qui l'aime - Destruction - est revenu juste pour elle (comme il accepte de la voir dans "Brief Lives", Intégrale IV).
Là encore, c'est super ! Et loin d'être anecdotique !
Destiny (Frank Quitely) : Pas vraiment une histoire mais un rappel en quelques pages que dans le livre que tient Destiny tout ce qui a été et sera est écrit. Très beaux dessins au passage !
En résumé, "Endless Nights" (publié chez Delcourt, sous le titre "Nuits éternelles") n'est pas du
fanservice mais bien une oeuvre à part entière qui peut même constituer, en tant que telle, une bonne introduction à l'univers de Sandman !
Et en résumé général, vous l'aurez compris, à mon sens, Sandman est l'une des meilleures (sinon la meilleure) séries à avoir jamais été imprimée aux USA. Neil Gaiman a réalisé une immense oeuvre qui mérite d'être lu, relu et re-relu !
Que dire de plus ? Tous les scénarios sont de Gaiman, toutes les couvertures de McKean et...
... un nouveau volume devrait être publié en décembre chez Urban Comics, reprenant la dernière mini-série signée Gaiman, "Sandman Overture", publiée entre 2013 et 2015 (6 épisodes seulement) et traitant d'événements directement antérieurs à Sandman #1 !
C'est dire que j'ai hâte de mettre la main sur ce volume, de le lire et de vous le chroniquer !
Mais dans l'attente, je ne suis pas mécontente d'avoir terminé (pour l'instant) cette dernière chronique consacrée à Sandman !
(et n'oubliez pas de lire également les mini-séries Death, dont la première a été - d'ailleurs - excellemment
chroniquée par Lady Shiva. C'est de la [très] bonne came !)