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You fix a bird, you buy a cage [Batman]

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You fix a bird, you buy a cage [Batman] Ven 3 Nov 2017 - 23:19

You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Jason se rappelait avoir couru le long de cette rue des dizaines – peut-être même des centaines de fois. Même maintenant, alors qu’il baissait les yeux et que le bitume se fondait dans l’obscurité, il avait l’impression de voir les craquelures et défauts dans le trottoir aussi clairement qu’en plein jour. Il trouvait presque ironique le fait qu’il aurait pu tracer le plan de Gotham les yeux fermés à même pas dix ans, mais que la ville ne s’était réellement ouverte qu’à lui quand Bruce l’avait emmené sur les toits pour la première fois. Une partie de lui, plutôt importante, voulait renier de toutes ses forces l’idée même que Bruce avait été celui qui lui avait fait goûter à la liberté vraie, mais il suffisait qu’il lève les yeux pour s’avouer vaincu. Quand il était petit, Gotham mangeait le ciel et le surplombait, l’écrasait presque – mais maintenant qu’il pouvait sauter de toit en toit, l’horizon s’était ouvert et c’était lui désormais qui surplombait les ombres à ses pieds. Par une nuit comme celle-ci, inhabituellement belle et sans nuage, c’était presque une bénédiction de se tenir tout là-haut et de pouvoir observer le halo violâtre laissé par les lumières artificielles de la ville se mêler avec le bleu plus profond de la nuit. S’il se concentrait vraiment, Jason pouvait apercevoir, du coin de l’œil, quelques étoiles. Il faut croire que même la lumière céleste brille sur la raclure. De quoi avoir un peu d’espoir, dans ce monde de brutes.

Il plissa les yeux et reporta son attention sur la porte rouillée en contrebas. Les criminels n’essayaient même plus de cacher l’entrée de leurs sales tanières, mais Jason ne pouvait pas vraiment les blâmer pour ça : après tout, tout ce qu’ils risquaient, c’était quelques os cassés et un bref passage à Blackgate. La justice ne valait plus rien dans cette ville : le tribunal avait migré vers la cafétéria de la prison de Gotham et elle était servie sans appel à coups de jointures et de chaussures. Pour la pègre de la ville la plus torturée de la côte est des Etats-Unis, nulle arme n’était plus efficace qu’un bataillon d’avocats pourris jusqu’à la moelle. Cela faisait bien longtemps que le G.C.P.D et la loi ne régnaient plus à Gotham, et si personne ne faisait rien, bientôt, les étoiles brilleraient sur la vermine et la cruauté.

Et Jason savait mieux que personne, après tout, que rien n’était fait. Rien qui comptait réellement en tout cas.

Il s’assit nonchalamment sur le muret qui bordait le toit qui lui servait temporairement de repaire pour la nuit. Tant que la porte ne s’ouvrait pas, il ne pouvait rien faire. Sa cible était un nouveau dealer arrivé peu à Gotham, qui pensait que distribuer de la drogue dure à des gamins ferait de lui le roi des rues encombrées de Park Row. Son zèle n’avait d’égal que sa stupidité, mais Jason n’allait pas se plaindre : il vivait de la stupidité des criminels. Aussi amusant que ce fût de voir un bleu se pointer et penser qu’il suffisait d’un peu de poudre ou de cachets pour renverser toute une ville avant de se prendre une chauve-souris dans le coin de la figure, Jason appréciait largement moins retrouver la même raclure quelques mois plus tard, dans les mêmes rues. Et cette fois, bien plus discret et moins stupide. Quoi que, ça, ça restait à voir. S’il y avait bien une chose qu’il n’aimait pas, c’était des jeunes succombant à une nouvelle drogue de laboratoire.

Il ne lui restait plus qu’à attendre patiemment que l’idiot qui lui servait d’occupation pour la nuit pointe le bout de son nez crochu hors de sa tanière, et si possible avec un sac plein à craquer, ce qui prouverait une bonne fois pour toute que Jason avait trouvé le cerveau de cette opération branlante. L’idée d’éclater quelques rotules le mettait d’une humeur joviale, et, s’il avait un peu de chance, il pourrait même rajouter quelques clavicules à son palmarès de la nuit si son dealer ambitieux se trimballait avec ses hommes de main. Il ne restait plus qu’à prier alors, uh ?

Jason glissa ses doigts le long de la crosse d’une de ses armes à feu, le regard toujours rivé sur la porte, mais son geste, jusque-là machinal, se stoppa brusquement quelques secondes plus tard. Il pouvait presque sentir le métal froid à travers ses gants et l’odeur des détritus qui cascadaient des bennes à ordure plus bas s’était presque transformé en goût dans sa bouche. Presque. Ceci dit, il y avait une sensation dont il était sûr – tellement sûr à vrai dire qu’il ne perdit pas de temps à s’assurer qu’il avait raison et que sa bonne humeur chuta drastiquement.

« J’ai passé l’âge d’avoir besoin d’une baby-sitter, tu sais, » lança-t-il, à première vue, vers le vide qui s’étalait sous ses pieds.

C’était presque facile de ne pas l’entendre, presque impossible de le sentir, mais Jason avait versé de longues années dans l’art de se tenir à l’ombre du Batman, et il était passé expert en la matière. L’atmosphère avait changé, légèrement mais suffisamment, et les légers bruissements qui provenaient de la longue cape de son ancien mentor ne ressemblaient pas tant que ça aux battements d’aile d’un oiseau nocturne. Pas pour Jason, en tout cas.

« Je peux te sentir me juger d’ici, » reprit-il d’un ton acide, avant de tourner la tête sur le côté.

Il était fidèle à lui-même, toujours aussi grand et imposant, toujours aussi sombre et supérieur. La lumière qui venait de la rue en contrebas n’était pas assez puissante pour venir éclairer les yeux de Bruce, et pour une raison quelconque, ça ne fit qu’agacer Jason un peu plus. Il écarta ses doigts de la crosse de son arme et se retourna résolument vers l’allée qu’il surveillait.

« Qu’est-ce que tu fais là ? »
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Sam 4 Nov 2017 - 14:55

Le silence répond aux remarques et questions de Jason.
Pendant un long moment - plusieurs minutes, même.
Situé dans un endroit malfamé d'une ville qui en compte des dizaines, des centaines, le jeune homme fixe intensément une porte, pour pouvoir littéralement anéantir celui qui doit en sortir ; il en a l'habitude. Si l'ancien Robin n'a pas passé toute sa vie à tuer des criminels, il agit ainsi depuis suffisamment de temps pour avoir forgé une véritable expérience.

Une expérience du meurtre. Une expérience du crime.
Une expérience qui blesse, directement, quelqu'un - quelqu'un à qui il vient de s'adresser ; quelqu'un qui vient de disparaître de la zone où il se trouvait, où il le fixait, dès que son ancien élève l'a identifié.
Quelqu'un qui réapparaît, finalement, et s'annonce d'abord par la parole.


"Ce que j'ai essayé de faire... ce que je tenterai toujours de faire."

Une voix, lourde et puissante, brise ce silence.
Si elle est modifiée, évidemment, elle conserve un élan, un ton naturel qui fait penser au tonnerre, à l'orage qui éclate ; son propriétaire le sait, il en joue. Surtout maintenant.


"Je t'empêche de ruiner ta vie."

Le ton est péremptoire, arrogant.
Il le regrette, mais ne peut faire autrement ; il ne dit que la vérité. Crue, franche et douloureuse.


"Bonsoir... Red Hood."

Les deux derniers mots sont prononcés avec un dégoût évident ; les dire lui fait du mal, autant pour le principe de voir cette identité si chargée par la haine et le crime continuer à exister après tant d'années, que parce qu'elle est réutilisée par un proche... par un fils. Son fils.
Même perdu, même troublé, même en conflit - Jason restera toujours son fils. Son fils qu'il a abandonné,
perdu, avec une douleur sans fin qui les sépare ; mais son fils malgré tout.
Qu'il est temps de sauver.


"Même si les circonstances ne m'emportent pas de joie..."

Une forme apparaît, soudain, à quelques mètres de Jason, sur le toit...
You fix a bird, you buy a cage [Batman] Jim_lee_batman_by_dcjosh
... la forme du Batman, évidemment.
Depuis plusieurs semaines, il tente de retrouver la trace de Jason : ce dernier a des rapports évidemment conflictuels avec ce que d'aucuns appellent la Bat-Famille, la rejoignant parfois, la rejettant souvent, agissant en parallèle constamment ; avec des méthodes inacceptables, hélas.
Maintenant que Bruce a décidé de s'ouvrir aux autres, de mieux comprendre autrui et de moins se renfermer, il entend faire la paix avec ses vieux démons... et surtout Jason. Ce dernier, au-delà de la douleur de l'avoir perdu, est un fils qui s'est détourné de sa voie, et qui se tue lui-même ; Bruce ne peut l'accepter.
Il a perdu sa fille, récemment, sans la connaître - cela lui a fait comprendre la valeur de la vie, et de ses proches. Il connaît Jason. Il connaît son caractère... mais il ne l'abandonnera pas. Il ne l'abandonnera plus.
Il va se battre, pour son fils. Qu'importe le prix.


"... je suis heureux de te revoir."

Le Chevalier Noir s'avance, fait claquer ses bottes sur le béton - puis s'arrête, à environ deux mètres de l'ancien Robin.
Pour ne pas envahir son espace vital. Pour ne pas l'agresser, plus. Pour ne pas rendre le moment plus insupportable.
Par respect, tout simplement - et comme signe, de main tendue. En espérant que cela soit considéré comme tel, surtout...
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Sam 4 Nov 2017 - 16:21

You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
La colère, telle une vieille amie, enfla dans les entrailles de Jason. Armée jusqu’aux dents, elle griffa, déchiqueta et régurgita son lot d’amertume dans le fond de sa bouche. Ses muscles se tendirent imperceptiblement et il se mordit les lèvres, le bout de ses doigts désespérant de retrouver le chemin de son arme. Il avait assisté à un bon nombre d’arrivées spectaculaires du Batman de Gotham, et il n’avait aucunement l’intention d’offrir le plaisir d’être son audience à Bruce, alors il resta résolument tourné vers la porte en contrebas. Si seulement elle s’était ouverte, juste deux minutes plus tôt… L’affaire aurait été réglée rapidement et proprement. Au lieu de ça, elle était fermée, le magasin de ses armes était plein et il sentait le Chevalier Noir s’avancer dans son dos. Ses instincts lui hurlaient de lui faire face, mais Jason en avait marre de lui faire face. Il avait assez donné.

« M’empêcher de ruiner ma vie, » répéta-t-il dans un grognement en secouant doucement la tête.

Il avait conscient qu’il avait l’air d’un gamin qui boudait à ne pas vouloir se tourner vers son invité qui n’avait pas été invité, mais il s’en moquait. Tout, du ton que Bruce employait jusqu’aux mots qu’il utilisait, le poussait un peu plus vers le gouffre et vers cette colère, toujours brûlante, qui n’attendait que de refermer ses mâchoires sur lui.

« Parce que c’est sûr que ce serait dommage, hein, » ajouta-t-il sur un ton moqueur.

Il poussa un long soupir. Il n’avait pas l’intention de se battre contre Bruce – il l’avait déjà fait et ça n’avait pas mené bien loin – mais surtout, il était par contre bien décidé à éliminer sa cible. Le calcul était simple, avec Bruce derrière lui, il était bloqué. Il ne restait plus qu’à le faire partir alors.

Il pivota sur lui-même et prit brièvement appui sur le muret pour se relever. Une partie de son attention était toujours fixée sur la porte derrière lui, malgré sa décision de ne rien faire devant Bruce. Ce serait des plus efficaces, après tout. Le message serait passé et reçu, 5 sur 5. Il jeta un bref regard à la distance qui les séparait. S’il réagissait assez rapidement, peut-être qu’il pourrait être assez rapide pour tuer quiconque passerait cette porte avant que Bruce ne l’arrête. C’était un pari risqué.

Hey, il vivait une vie risquée après tout.

« C’est vrai que tu as l’air ravi, » enchaîna-t-il avec un geste nonchalant vers son ancien mentor. « Mais maintenant que tu es venu, que tu as vu, tu peux repartir. Comme tu le vois, je suis en bonne santé. »

Il y eut un cliquetis de métal derrière lui, et Jason tourna la tête, sa main déjà sur une de ses armes. La porte était toujours fermée, mais il y avait visiblement du mouvement à l’intérieur du repaire. D’expérience, Jason savait que cela voulait dire qu’il ne restait que quelques instants avant qu’elle ne s’ouvre. Il avait beau connaître le nom de son dealer, c’était une occasion en or s’il voulait ajouter une belle brochette de généraux à son festin de la soirée.

Il étouffa un juron avant de se retourner vers Bruce.

« Tu ne me feras pas changer d’avis, B. Tu sais probablement ce que ce mec a fait, à qui il vend ses drogues. Ce sont des gosses qu’il rend accro, et quand ils ne peuvent pas se payer leur prochaine dose, parce que ce salaud ne cesse d’augmenter ses prix, ils tombent malades. Gravement malades. Certains ne survivent même pas. »

Il marqua une pause et la colère rugit de plus belle en lui. Elle remontait à la surface et il avait l’impression de prendre feu. Il pointa un doigt accusateur vers Bruce.

« Je te demanderais bien d’oser me dire droit dans les yeux qu’une enflure comme ça mérite de vivre, mais on sait tous les deux que tu as laissé pire en vie, hein ? Alors ne viens pas jouer le faiseur de moral avec moi. »

Il se détourna, sortit son arme de son holster et la fit tourner dans sa main une fois avant de se mettre en position et de garder en joug la porte rouillée en contrebas.

« Alors ne viens pas me dire que tu veux m’empêcher de ruiner ma vie, » cracha-t-il finalement, ses intonations brûlantes mais déterminées.

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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Sam 4 Nov 2017 - 16:57

Le dialogue, l'échange sont difficiles.
Ils le sont, toujours, avec Jason ; mais encore plus, depuis quelques années - depuis son retour. Depuis que la joie de le retrouver s'est ternie, du fait des choix de vie de son fils adoptif, et des ombres qu'il a choisies de rejoindre.


"Je sais ce que cet homme fait."

Sa réplique est froide - plus froide qu'il ne le voulait.
Mais sa relation avec Jason n'est pas simple, l'excès en fait partie... en a toujours fait partie. Même avant. Même avant que le jeune homme ne s'enfuie, pour retrouver et rejoindre sa mère. Même avant, quand Bruce le recruta et le forma trop vite, le força à prendre la place de Dick, n'écouta pas les preuves de son individualité, encore trop marqué par le départ de son premier élève...
Même avant, leur relation était difficile ; il est évident qu'elle n'a fait qu'empirer, depuis que le Monstre lui a pris Jason, et que ses ennemis l'ont ramené... et l'ont fait souffrir, surtout.


"Je sais aussi que l'enfermer, l'emprisonner, l'arrêter ne réglera pas forcément le problème qu'il incarne - que son organisation incarne. A vrai dire, il est même quasiment sûr que quelqu'un prendra sa place et tentera de gérer après lui... mais cela ne fonctionnera pas aussi bien.
Une partie échouera, et ce remplaçant pourra être encore arrêté - et son propre successeur sera encore moins bon. Cela peut continuer longtemps, j'en ai conscience... mais, en définitive, l'organisation explosera d'elle-même.
Bien sûr, c'est un travail difficile, de longue haleine et exigeant - et il pourrait paraître plus simple de le tuer, là. Plus simple. Plus facile, surtout."


Sa voix a repris un ton calme, posé, pendant son discours.
Il a vu que Jason s'est tourné - il l'a vu s'emparer de son arme, et être prêt à tirer. Il le voit fixer la porte, attendre la sortie de l'homme qu'il veut assassiner ; il ne fait rien, pour l'instant. Il reste à quelques mètres, calme et impassible.
Par respect, encore une fois.


"J'ai laissé pire que lui en vie, oui... et pas un jour ne passe sans regretter cette décision. Tu le sais. Mieux que quiconque, tu le sais."

Il appuie, involontairement, sur quelques mots. Jason ne le voit pas, mais son regard s'est fait plus strict - plus direct.
Les actes du Monstre envers Jason et Barbara sont impardonnables... inoubliables ; et la culpabilité qu'il en retire est infinie. Mais cela n'implique pas que céder à ses démons eut été la solution...


"Même si c'est dur... même si cela peut pousser au désespoir... nous ne devons pas nous abandonner à la facilité - et tu le sais aussi.
En agissant ainsi - tu ne vaux pas mieux que lui. Qu'eux. Que... lui, aussi."


Pas besoin de nom - Jason saura.
Jason comprendra. Jason sera choqué et stupéfait, bien sûr, que Bruce aille jusque-là... et Bruce le regrette, même s'il le pense.
Il le regrette, car il sait que cela lui fait du mal - mais il a besoin d'attirer son attention. Pour leur permettre d'intervenir.


"GO ! GO ! GO ! GO !"

A quelques mètres, la porte rouillée s'ouvre et révèle le trafiquant - qui découvre rapidement qu'il est entouré, encerclé...
You fix a bird, you buy a cage [Batman] Gcpd_by_lroyburch
... par le commissaire Gordon et le G.C.P.D., efficaces en intervention.

"Ne leur en veux pas... ils étaient sur sa piste autant que toi. Leur intervention était prévue ce soir.
Ma... présence n'a pas uniquement empêché que tu le tues ; elle a aussi empêché que le G.C.P.D. tombe au milieu d'une fusillade, entre toi et les criminels."


Pas besoin d'en rajouter - Red Hood est intelligent, il comprendra combien de vies ont pu être sauvées.
Mais pas sûr que cela suffise à calmer sa fureur...
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Sam 4 Nov 2017 - 19:13

You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Jason cligna des yeux et quand il les rouvrit, il était de retour dans la Batcave.

C’était la Batcave de son enfance, et elle avait probablement bien changé. La décoration était très certainement plus fournie maintenant, chaque relique relatant un conte torturé qui ne finissait pas toujours bien, et le souvenir de Jason était figé dans un tube de verre, accessible à tous ceux qui poseraient leurs yeux dessus. Mais dans la Batcave de l’enfance de Jason, le tube de verre n’avait rien de morbide – si ce n’était peut-être le poids qu’il lui laissait dans le ventre. Le tube, c’était Dick – non, le costume dans le tube, c’était Dick, et la voix de Bruce, posée et calme, c’était le chemin qu’il lui restait à faire pour avoir le droit à son propre hommage. Des leçons, toujours des leçons. Il n’avait pas changé d’un iota. C’était toujours les mêmes mots, les mêmes explications, mais Jason avait grandi. Il l’avait, son hommage maintenant, et le fait que ce soit plus une pierre tombale qu’un signe qu’on voulait le voir revenir ne changeait rien. Il avait passé l’âge de croire dur comme fer à tout ce qui passait les lèvres de son père adoptif.

La porte rouillée l’attendait en contrebas et sa décision était prise. Il l’avait prise le jour-même où il avait senti ses os éclater sous les coups du pied de biche. Bruce appelait à sa raison, il le poussait doucement dans la direction qu’il voulait le voir prendre, mais il refusait de comprendre que Jason n’était pas fou. Son discours n’avait aucune emprise sur lui, c’était comme s’il coulait sur sa tenue sans réellement la pénétrer et Jason n’avait qu’à…

Son bras trembla légèrement quand la dernière remarque de Bruce atteignit ses oreilles. Son doigt, comme agité d’un spasme nerveux, frôla la détente, et malgré le ciel dégagé et les quelques étoiles qui continuaient d’encadrer son champ de vision, il eut la très nette impression qu’on lui renversait un seau d’eau glacé sur la tête.

Il pivota sur lui-même, et le canon posa son regard sur le signe qui ornait la poitrine de Bruce.

« Comment peux-tu dire une chose pareille, comment… »

Les mots sortaient tremblant de rage et d’autre chose, légèrement modifiés par les réglages de son casque, mais le reste se noya dans le brouhaha qui explosa dans la ruelle en contrebas. Surpris, Jason jeta un regard par-dessus son épaule, sans pour autant baisser son arme. Il reconnut les voix et le jargon purement policier avant même de voir les insignes et les lunettes de protection accrocher les lumières maladives des lampadaires de Gotham. Son expression était cachée par le casque qu’il portait, lui donnant l’air d’être indifférent à ce qu’il se passait quelques mètres plus bas. Il suivait pourtant du regard le Commissaire Gordon dont la main ferme ne lâchait pas le bras du trafiquant qu’il avait suivi jusque-là. Dans son sillon, d’autres crapules furent sorties du repaire, chacune d’entre elle menottées et mise hors d’état de nuire. Le regard de Jason se posa finalement sur ce bon vieux Harvey Bullock, et il serra la mâchoire. A défaut d’avoir pu s’occuper lui-même de cette vermine, il était au moins sûr qu’ils étaient entre de bonnes mains et non pas laissés aux bons soins de flics véreux. Il les aurait quand ils sortiraient – parce qu’ils sortaient toujours.

Il reporta son attention sur Bruce et sur l’arme qu’il tenait toujours à bras tendu entre eux. Le poids était familier dans sa main, solide. Il agissait comme une sorte d’ancre dans ses moments les plus flous, même les détonations, désormais, avaient gagné en mélodie. S’il tirait, il savait qu’il ne raterait pas son coup, pas alors qu’il se tenait si près de sa cible.

Ses yeux remontèrent vers Bruce et il baissa le bras. Il détestait la façon dont son corps en rejetait l’idée même à chaque fois qu’il qualifiait Bruce de cible.

« Tu as fait tout ça pour les aider et les empêcher d’être blessés, et pourtant… Tu refuses de tuer ceux qui sèmeront toujours douleur et mort derrière eux, » dit-il finalement, avec douleur. Presque avec douceur. « Comment excuses-tu ce choix ? Qu’est-ce qui continue de te faire croire que c’est le seul choix possible ? Il y a trop de vies dans la balance, et tu choisis d’en sauver une. Celle qui ne compte pas. Qui ne devrait pas compter.»


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Dim 5 Nov 2017 - 12:11

Bruce a conscience que sa relation avec Jason est complexe - et douloureuse.
Fait de non-dits, de remords, de regrets, de jalousie, d'incompréhensions, de reproches, de haine parfois, de rejet souvent, d'amour beaucoup, ce lien n'a rien de simple, et peut les hanter pour des années encore ; chacun voit en l'autre un reflet, un aspect de son être, et chacun entend le repousser autant que possible, pour des raisons propres.
Et il sait, aussi, qu'agir comme il l'a fait maintenant... manipuler, provoquer Jason pour l'occuper, pendant que le G.C.P.D. intervient... cela ne peut en rien aider cette relation.

Mais il n'avait pas le choix.
Jason aurait tiré - aurait tué, s'il n'avait pas agi ainsi ; et il ne pouvait pas le laisser faire.
Pas seulement pour sauver le trafiquant. Mais, surtout, pour empêcher que son fils ne tue, tout simplement.


"Le Talmud dit : qui sauve une vie, sauve le monde entier."

Sa voix est soudain calme, posée.
Douce.
Malgré le modificateur de voix, Jason peut entendre et constater ce ton... cette douceur, à son égard.


"Je me couche chaque ce soir et me lève chaque matin avec ce doute : est-ce que ma méthode est la bonne ? Ne serait-il pas plus efficace de les détruire, de les rayer de l'existence, plutôt que de les livrer à une Justice qui ne donne pas réellement satisfaction ?
Ne te méprends pas - je suis assailli par ces questions, ces doutes ; mais je choisis. Je choisis de suivre cette voie... car je pense, sincèrement, que c'est la seule qui permette de construire un avenir."


Bruce ne bouge pas.
Debout, redressé, il a laissé sa longue cape bleue marine tomber sur ses épaules et son corps, de sorte que seul son visage est visible ; et son regard est entièrement fixé sur Jason, définitivement.


"Si nous les tuons... ils disparaissent, oui. Mais leurs proches demeurent, leurs proches endeuillés, leurs proches dans la douleur. Bien sûr, une partie se félicitera de leur disparition - mais une autre partie ne le supportera pas. Ces gens, ces femmes, ces hommes, ces enfants seront aveuglés par la douleur... et ils s'armeront.
Ils se vengeront. Ils se battront. Ils tueront. Ils enclencheront un cycle de violence, qui nous poursuivra encore. Mettons que je tue, donc ; mettons que je te laisse tuer ce trafiquant. Ses proches te chercheront, te traqueront ; tu les tueras, en retour, pour te défendre, alors qu'ils n'auront pas commis de crime. Ou ils te tueront, lors d'un moment de faiblesse. En ce sens, je devrais les tuer ; mais eux-mêmes ont des proches, qui me poursuivront. Qui me tueront. Barbara, Richard, Timothy et Damian devront donc prendre le relais, jusqu'à périr aussi.
Ce cycle est sans fin... il ne peut avoir de fin, à moins de tuer directement le criminel et ses proches ; mais ses proches n'ont rien fait, non ? Donc il faut les laisser vivre. Mais cela implique un danger et la vengeance. Il n'y a pas d'issue."


Il a parlé vite, presque comme un possédé ; il l'est, un peu.
Il est possédé par cette vérité - et par l'envie de la faire partager par son fils, surtout.


"Oeil pour oeil, dent pour dent, cela ne fonctionne pas - cela ne peut pas fonctionner. Le Système judiciaire actuel est défaillant, oui ; mais il offre une alternative à un cycle de violence sans fin, auquel je veux croire... pour lequel je veux espérer.
Toute vie compte - au fond, tu le sais. Toute vie, y comprend celle d'un criminel, peut impacter positivement autrui... un tueur peut être un parent adorable, en quoi alors sommes-nous légitimes à retirer cela à ses enfants ? Nous ne le sommes pas. Personne ne l'est.
Toute vie compte... même celle d'un criminel. Même celle d'un tueur. Car si nous la prenons, si nous commençons à choisir qui doit vivre ou mourir..."


Bruce soupire, et détourne le regard. Il laisse ses yeux glisser sur la Lune, au loin, alors que sa réplique s'échappe par murmure de ses lèvres.

"... en quoi sommes-nous différents du Monstre ?"

Il sait que ce n'est pas son meilleur discours. Il sait qu'il n'a pas été le plus inspiré ici.
Mais il a laissé parler son coeur. Il s'est laissé déborder par sa fougue et ses sentiments. Et il espère, surtout, pouvoir enfin ramener son fils à la raison... et à la maison.
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Dim 5 Nov 2017 - 18:26



You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Le silence retomba sur le petit toit qu’il se partageait, fragile et facilement dérangé par ce qu’il se passait en contrebas. Voitures et fourgonnettes venaient récupérer l’équipe triomphante du GCPD, quelques insultes étaient lancées par les crapules, quelques ordres sautaient d’un groupe à l’autre, mais Jason avait l’impression qu’ils étaient à des kilomètres du chaos causé par l’intervention de l’équipe de Gordon. Ses yeux étaient rivés dans ceux de Bruce, et le discours de ce dernier tournait en boucle dans sa tête. Chaque mot, chaque intonation, rebondissait dans son esprit, comme un écho bloqué à jamais entre les parois d’une grotte sans issue, et les ondes de choc parcouraient tout son corps, fragilisant la moindre de ses cellules et fissurant chacun de ses os. Il avait l’impression d’être en de train de se dédoubler, et il était presque sûr que s’il venait à regarder sur sa droite, il se verrait regarder Bruce avec autant d’intensité qu’il ne le faisait. Sauf que son double serait plus jeune, probablement. Son costume serait différent. L’insigne sur sa poitrine voudrait dire une toute autre chose.

Il savait que Bruce croyait dur comme fer à ce qu’il venait de lui dire. Il savait aussi que son père adoptif n’était pas exempt de faiblesses. Il était comme le commun des mortels, même s’il avait paru invincible à Jason autrefois, et il était en proie aux mêmes doutes. Il le croyait, quand Bruce lui disait qu’il se demandait parfois si sa technique était la bonne. Il ne pouvait faire que ça, le croire. Plus que jamais, Jason se sentait petit et affaibli alors que Bruce lui paraissait grand, indomptable. Il l’avait toujours regardé d’en bas, et il avait toujours voulu le rejoindre au sommet. Si son plus grand obstacle jadis avait été le souvenir de Dick Grayson, étouffant dans la Batcave, c’était désormais un brin plus compliqué que ça.

« Je t’en prie, tais-toi, » dit-il avec lassitude avant d’enfin détourner le regard.

Il baissa les yeux, rangea son arme et prit une profonde inspiration avant de relever la tête vers Bruce et d’hausser les épaules.

« On a eu cette discussion des centaines de fois toi et moi. Ca ne te fatigue pas ? On tourne en rond, B. Je t’insulte, et essaye de te faire comprendre que dans la balance, une vie pourrie vaut toujours moins qu’une dizaine d’innocents tués pour le plaisir sadique d’un monstre, et tu secoues toujours la tête en me parlant de limites, de décisions qui ne nous reviennent pas et du danger de jouer à Dieu. Peut-être que j’ai raison. Peut-être que c’est toi qui a raison. Mais s’il y a une chose que je sais, B, c’est que tu te trompes sur une chose. »

Jason porta les mains à son casque. Ses doigts trouvèrent d’instinct le mécanisme qui permettait de l’ôter sans risquer de déclencher le système de sécurité – petit bijou de l’auto-défense inspirée par le grand et l’unique Bruce Wayne. Le casque se desserra légèrement et il le retira avant de reporter son attention sur son père adoptif. Il voulait que ce dernier voit le regard dans ses yeux, l’expression sur son visage, quand il reprendrait la parole.

« Tu te trompes en disant que je ne vaux pas mieux qu’eux, » reprit-il, son traumatisme dormant dans ses yeux et sa colère des plus évidentes. « Je n’ai jamais ri en tuant. Ce n’est pas moi le monstre. »

Il garda le silence quelques instants, et, une fois de plus, l’air de Gotham s’épaissit autour d’eux. C’était comme si la ville avait arrêté de vivre pour leur donner l’occasion de se faire face loin du chaos qui leur servait d’accoutumée de toile de fond. Il était vrai que c’était la discussion la plus calme qu’ils avaient eu depuis bien des années… depuis avant, en réalité. L’air frais mordait maintenant la peau sur le visage de Jason, qui n’avait plus que le masque autour de ses yeux pour protéger son identité, rappel tout sauf subtil de celui qu’il avait porté en tant que Robin. Il voyait Bruce comme il ne l’avait jamais vu auparavant – tout du moins, le pensait-il. Et Bruce le voyait tel qu’il était. Debout, plantés sur ce toit, avec seulement deux ou trois mètres entre eux, ils étaient si semblables. Et en même temps si différents.

Trop différents.

« Peut-être que c’était écrit. Peut-être que toi et moi, on n’a jamais été destiné à se battre côte à côte. On aurait dû voir les signes. J’étais déjà un mauvais Robin, après tout. »

Ses derniers mots eurent du mal à passer la barrière de sa gorge, et, une fois de plus, il se revit debout devant le costume de Dick, complètement dépassé et loin d’être à la hauteur.

« C’est de la faute de personne, » dit-il avant de marquer une pause. « Tu n’as jamais pu me garder sous contrôle, et c’était pas faute d’essayer, pourtant, » ajouta-t-il avec un petit sourire. « Je ne suis pas Dick. »

Il n’y avait pas que le sang, le costume déchiré et la silhouette terrifiante du costume de Grayson dans le tube… Il y avait aussi de la chaleur, du pop-corn à partager et des éclats de rire. Lors de ses nuits les plus noires, Jason ne pouvait s’empêcher de se dire qu’avec un peu plus de temps, et un peu moins de Joker, les choses auraient tourné bien différemment. Peut-être qu’il se tiendrait du même côté que Bruce. Peut-être pas.

Peut-être que ça aurait fait moins mal.
Peut-être pas.


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Lun 6 Nov 2017 - 10:06

Bruce soupire, quand Jason commence à répondre.
Il a raison - cette discussion n'a pas de sens plus. N'a plus de sens.

Elle a été jouée et rejouée des dizaines de fois, sans parvenir à une solution. Chacun campe sur sa position, chacun considère avoir raison, chacun accepte le point de vue de l'autre mais ne peut supporter qu'il le développe ; chacun est sûr de soi, et veut amener l'autre à adopter sa vision, à comprendre, à partager.
Chacun a un besoin, viscéral, que l'autre le rejoigne.
Mais aucun n'est prêt à céder.

La discussion ne mène à rien, non.
Sur ce point, au moins.


"Non."

Sa voix est froide. Sa réplique est sèche.
Il a frissonné, quand Red Hood a enlevé son casque et qu'il a vu le visage de Jason - ce visage qu'il a découvert brisé, anéanti, vaincu. Mort.
Et qui l'a hanté. Et qui est revenu. Et qui le hante toujours.


"Je conçois que nous sommes en désaccord... que nos points de vue divergent, et que nous ne parvenons pas à les concilier. Mais... non. Non.
Je ne peux pas te laisser dire cela."


Il soupire, lentement.
Sa voix se réchauffe, se radoucit durant son discours.


"Tu n'es pas Dick, je le concède - et j'admets, j'avoue que j'ai tenté de te forcer à être lui. Par erreur.
Tu n'es pas Dick. Tu ne le seras jamais. Et je m'en fiche."


Il lève, lentement, ses mains, qu'il fixe sur son masque.
Il parle, toujours.


"Tu es Jason Todd. Tu as été Robin - un bon Robin, un Robin vaillant, un Robin fier et courageux. Je t'ai découvert et pris à une période... difficile de ma vie, nos rapports ont été compliqués - mais cela ne concerne en rien ta valeur.
Tu as été le Robin qui est parti, seul, pour sauver sa mère. Tu es le Robin qui a affronté, seul, le Monstre. Tu es l'enfant qui s'en est pris à la Batmobile, et qui a réussi à la dévaliser.
Tu as été... et tu seras toujours Robin. Un très bon Robin. Mais surtout..."


Bruce soupire, encore - puis reprend d'une voix soudain d'une douceur absolu.

"... tu es mon fils."

Il enlève, soudain, son masque...
You fix a bird, you buy a cage [Batman] E72bf302096a3717a94b55a4ffa89085--joker-batman-batman-art
... et révèle son visage, marqué par une émotion sincère.

"Tu n'as pas à être à une quelconque hauteur, tu n'as pas à être ce que j'attends de toi... tu n'as qu'à être toi-mêmes, Jason.
Tu es mon fils - mon premier. Dick fut mon pupille, j'ai adopté Tim au décès de son père, j'ai découvert Damian après... mais tu es mon premier fils. Le premier que j'ai adopté. Le premier que j'ai voulu considérer comme mon enfant, comme Jason Wayne."


Debout, sur ce toit anonyme, il a conscience de mettre en danger son secret, ainsi démasqué et parlant sans modificateur de voix.
Mais il s'en fiche.
Son fils a besoin d'aide. Il veut, il doit l'aider ; quoi qu'il en coûte.


"Tu es mon fils. Rien ne peut le dénier - rien ne peut le changer.
Tu es mon fils. Et..."


Il soupire, secoue la tête, puis s'avance.
Un pas. Puis un autre.
Pour s'arrêter à un mètre, à peine, de Jason.


"Je veux te retrouver. Je veux me faire pardonner. Je veux nous réunir."

Bruce lève sa main et la tend vers Jason.
Elle tremble. Il s'en fiche.


"S'il-te-plaît... accepte."

Bruce, ici, se livre plus que jamais - plus qu'à quiconque.
Il le sait. Il le fait à dessein, car il est sincère.
Il s'ouvre aux autres, il a fait le choix de cesser sa paranoïa et sa folie ; il veut avancer. Il veut s'ouvrir.

Mais, surtout... il veut réunir les siens.
Quoi qu'il lui en coûte.
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mar 7 Nov 2017 - 1:27

You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Jason n’était pas prêt à entendre toutes ces choses. Et il était encore moins prêt à les croire. Il avait à peine l’impression de récupérer le contrôle sur sa vie, sur ce qu’il en restait, et Bruce se tenait là, son masque entre ses doigts et ses yeux rendus brillants par la faible luminosité émanant de la rue en contrebas. Les voitures du G.C.P.D s’étaient mises en route et, déjà, leurs gyrophares n’étaient plus en vue. Dans le calme relatif de la nuit, les sirènes, elles, persistaient, distantes mais toujours aussi criardes. Tout lui paraissait irréel, presque surréaliste. Il eut la vague impression d’être de nouveau en proie aux hallucinations et aux voix empoisonnées, mais il ne lui fallut pas plus de quelques instants pour réaliser que ce qu’il se passait était bel et bien réel. Même dans ses rêves les plus fous, Bruce ne lui parlait pas comme ça.

Mais ne comprenait-il pas ? Jason avait nourri sa colère de la déception dans le regard de son ancien mentor, il s’était vanté d’être son plus grand échec et en avait fait un bouclier, une carapace défensive, mais maintenant qu’il faisait un bond en arrière de plusieurs années pour redevenir le fils, la source d’espoir, il réalisait combien c’était ridicule. Cette époque était révolue, mais plus que ça encore, jamais ils ne pourraient y retourner. Ce fossé qui les séparait à cet instant précis, sur ce toit oublié de Gotham, sous ces quelques étoiles et dans ce halo de lumière maladive, ce fossé ne disparaîtrait jamais, et si Jason rentrait au manoir, ils ne feraient que s’y prendre les pieds, tous les deux.

« Tu n’as pas à te faire pardonner, » souffla-t-il.

Il se demanda si Bruce l’avait entendu ou si Gotham avait avalé sa confession, comme elle l’avait avalé lui, mais il se rendit rapidement compte que ça n’avait que peu d’importance. Les mots avaient moins de poids quand ils étaient suspendus dans les airs que quand ils pourrissaient dans ses poumons.

« Je ne t’en ai jamais voulu de ne pas avoir réussi à me sauver. Et pour avant… Je ne t’en veux pas, Bruce. Tu m’as offert une seconde vie, tu m’as donné les moyens d’aider, de me rendre utile, et c’était tout ce que je voulais. Tu m’avais déjà sauvé. »

Il y avait un mais. Il y avait toujours un mais. Bruce avait fait sa part, et la route n’avait pas été dépourvue de rebondissements, mais il avait fait ce qu’il pouvait. C’était Jason qui avait choisi de partir pour retrouver sa mère, et c’était lui qui avait tenu tête au Joker. Des choix, il en avait fait toute sa vie, et il continuerait d’en faire, puisque c’était là son seul et unique pouvoir. Jamais il ne laisserait quelqu’un prendre la responsabilité de décisions qu’il avait prise de lui-même. Mais. Mais.

Il releva les yeux vers ceux de Bruce, en proie à un vrai dilemme interne. Le match se résumait simplement : une certaine partie de lui voulait admettre qu’il aurait aimé retourner au manoir, et l’autre refusait de se laisser aller à de telles rêveries. La première utilisait son crochet du droit pour essayer de faire rentrer dans la tête de l’autre qu’ils pouvaient toujours essayer, qu’essayer n’avait jamais tué personne. Mais la deuxième ne baissait pas sa garde, bien trop fière et déterminée à ne plus se blesser inutilement, et d’ailleurs je te rappelle que si, ça nous a tué, d’essayer… quand on a essayé de sauver notre mère biologique, ça te dit quelque chose ?

Les yeux de Jason voyagèrent entre la main tendue de Bruce jusqu’au visage de ce dernier, et vice versa. Il ouvrit la bouche, mais avant que le moindre son n’en sorte, son regard se posa sur quelque chose d’autre, légèrement à la droite de la tête de Bruce. Il esquissa un sourire, reprit sa contenance et se redressa.

« On dirait que Gotham a besoin de toi, » dit-il en désignant d’un signe de tête le ciel derrière lui.

Les étoiles y avaient été éclipsées, complètement avalées par l’énorme projecteur et le symbole qu’il gravait dans la nuit. Gordon n’avait pas traîné. Encore une nuit remplie à Gotham, quoi de nouveau ?

Jason remit son casque sur la tête d’un geste habitué, et le mécanisme se referma avec un petit cliquetis.

« Besoin d’un équipier pour la nuit ? » proposa-t-il, un léger sourire dans la voix. « Qu’est-ce que tu en dis ? Au souvenir du bon vieux temps. »

C’était une autre façon de dire qu’il y avait un avant et après, et que cette main que lui tendait Bruce n’aurait jamais pu réconcilier les deux. Une question de fossé, de mais et de match de boxe intensif – quelque chose du genre. Il aurait toujours envie de coller une balle entre les deux yeux du Joker, et Bruce n’approuverait jamais.

Des fois, il n’y avait même pas besoin d’essayer pour voir que ce n’était tout simplement pas faisable.

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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mer 8 Nov 2017 - 10:39

Bruce laisse sa main tendue, et conserve un regard demandeur, presque suppliant fixé sur Jason.
Il espère.
Il ose espérer. Il ose y croire. Il ose rêver que le jeune homme, que ce fils perdu puisse enfin revenir à la maison ; qu’ils puissent, enfin, se retrouver ; qu’ils arrivent, enfin, à se comprendre et à s’accepter ; que cet enfer, né il y a tant d’années, forgé dans la douleur, le désespoir, l’abandon et la rancune, s’achève enfin.

Il espère, oui.
Il se prend à espérer – lui le cynique, lui le dur, lui le paranoïaque, lui le désespéré.
Il espère, il y croit, surtout quand Jason parle, lui pardonne, tente de lui expliquer son point de vue – il apprécie, bien sûr ; mais il ne le partagera jamais. Bruce se sait, se sent responsable du trépas de son fils adoptif… rien ne pourra le changer.
Mais il apprécie l’effort, de Jason.
Au moins, jusqu’à ce qu’il comprenne où cela mène.

Il a espéré réussir – mais il échoue.
Jason ne reviendra pas.

Son discours, son beau discours ne s’achève pas – il disparaît dans les ombres, dans les brumes de cette soirée terrible. Si le jeune homme a murmuré ses premiers mots, il ne prononce pas les derniers… mais tous deux les comprennent.
Jason ne reviendra pas.
Il est trop tard – il y a eu trop d’événements, trop d’actes, trop de positions extrêmes et assumées.

Jason ne reviendra pas.
Bruce a échoué à le ramener. Encore.

Il baisse sa main, donc. Il baisse les yeux, aussi. Ses doigts crispent le masque, qu’ils tiennent désormais comme une ancre à briser.
Son cœur est lourd. Son âme en peine. Sa respiration s’accélère – pas par colère, mais par tristesse ; il est vidé. Brisé, presque.
Et s’il se prépare à conclure cet entretien par une note désespérée… le destin lui rappelle que rien n’est jamais aussi simple, ici.


« Ha. »

Bruce se retourne – et découvre ce signal, qui rythme et marque sa vie depuis quasiment vingt ans.
Il soupire, lourdement… puis reprend une grande inspiration. Et se redresse, avant de remettre son masque.
Il serre les poings, il crispe ses muscles… il se renforce. Il referme son cœur, et laisse son instinct, son vœu éternel reprendre le dessus.


« Tu peux venir, oui. »

Sa voix modifiée est utile, généralement pour cacher son identité ou terrifier ses ennemis ; ici, elle lui sert surtout à cacher ce trouble qui ne le quitte que lentement.

« Si tu gardes ces armes à feu dans leurs étuis, et que tu te souviens comme te battre… »

Il veut dire “honorablement”, mais sent que le terme crisperait.

« … avec style. »

Le Batman se lance, alors, et bondit sur les toits – avec vitesse et efficacité.
Son cœur est lourd, toujours ; et son âme demeure en peine.
Mais il accepte la présence et la venue de Jason… parce qu’au fond, il apprécie tout simplement sa présence ; parce qu’au fond, il espère encore… même s’il sait, surtout, que cela ne sert plus à rien.
Bruce a échoué. Jason ne reviendra pas.
Et rien ne pourra arranger cela.


**
*
**

Plus tard, plus loin.
Le toit du bâtiment principal du G.C.P.D. accueille depuis quasiment deux décennies un élément spécifique, connu de tous mais jamais évoqué dans aucun rapport. Les autorités dénient toute présence d’un Batsignal sur le commissariat – mais personne n’est dupe.
Il y est.
Et il y est très utile.


« Koff-koff. »

Sur ce toit, présent depuis bientôt quinze minutes, un vieil homme veille et tousse…
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… comme d’habitude. James Gordon tente constamment d’arrêter de fumer, et replonge constamment ; Gotham est une ville de vices, de tous types.

« Commissaire. »

Une voix lourde s’échappe des ombres, rapidement suivie par une silhouette massive – et plus stricte, plus dure qu’à l’accoutumée.
Le Batman est là… et il ne passe pas une bonne soirée, James peut le certifier ; tant d’années de collaboration et un talent définitif d’enquêteur ne peuvent mentir.


« Bonsoir… je ne pensais pas que vous seriez accompagné. »

Le vieil homme se tourne vers les ombres, et plisse les yeux.

« Vous pouvez sortir… je ne mords pas. »

(HJ/ Si tu veux, je te laisse dicter la menace. Smile /HJ)
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Jeu 9 Nov 2017 - 0:31

You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Les masques retombèrent, à la fois littéralement et métaphoriquement. Bruce Wayne disparut sous les yeux de Jason pour redevenir le Chevalier Noir, et la porte qu’il avait ouverte se referma. Il n’avait même pas eu besoin de dire la moindre chose à voix haute : Bruce avait saisi son sous-entendu au vol. Jason ne put s’empêcher de noter l’ironie de cette compréhension silencieuse qui continuait de les lier. Elle leur venait tout droit de l’époque où ils étaient tous les deux des ombres dans la nuit déjà bien assez dense de Gotham, et où Jason devait interpréter le moindre signal et le transformer en ordre précis. A l’époque, il brillait dans la catégorie, même si parfois, il préférait prétendre qu’il n’avait pas compris, histoire de se permettre une petite infraction. C’était ce lien bien précis qui leur avait permis de s’organiser, de travailler en équipe, de faire front face à toute menace, et il avait de toute évidence survécu au passage des ans. Pas aux changements qui étaient venus avec, en revanche. Ils se comprenaient toujours. Ils n’arrivaient juste plus à s’accorder.

C’était cette idée qui rassura Jason, qui le conforta dans la certitude qu’il avait pris le bon choix. Qui soulagea, surtout, le sentiment de mal à l’aise qui s’empara de lui à l’instant même où Bruce abaissa sa main. Qu’aurait-il pu faire d’autre, de toute façon ? Il serait rentré au manoir, il aurait repris son ancienne chambre, il aurait discuté avec Alfred et partagé un repas avec Bruce, et tout aurait été beau. L’espace d’un instant. Mais que ce serait-il passé à l’instant même où le Joker aurait fait des siennes ? Non, c’était plus prudent de prendre du recul maintenant, plus sûr.

La remarque sur ses armes le fit sourire gentiment. Jason avait l’impression que l’atmosphère autour d’eux s’allégeait enfin, après la tension qu’ils avaient tous les deux créée. Ils retombaient peu à peu dans leurs vieux schémas, et ça impliquait les remarques plus ou moins diplomatiques au sujet de ses armes et des réponses, plus ou moins sérieuses de la part de Jason. Il ne lutta pas, et accueillit au contraire le retour de cette vieille danse presque avec soulagement.

« Je suis le style, Big B, » lança-t-il, taquin, en tapotant les crosses visibles de ses armes. Puis il reprit, plus sérieux. « J’essaierai d’être sage. »

Pas de promesse inutile. Ce serait contre-productif, surtout après ce moment de rare honnêteté qu’ils venaient de partager. Ils iraient en mission ensemble, en tant que Jason et Bruce, en tant que Red Hood et Batman, et ils en étaient tous les deux conscients : Jason pouvait le lire dans les signaux que lançait plus ou moins consciemment son ancien mentor. Vraiment, ce lien entre eux était à la fois une bénédiction et une malédiction – mais dans les cas, il restait des plus ironiques. Jason aurait pu en rire à gorge déployée, mais ce n’était pas tout à fait ce genre d’humour.

Ils n’échangèrent pas un mot lors de leur trajet rapide vers le commissariat : ils n’en avaient pas besoin. Parcourir Gotham de long en large, ils l’avaient déjà à multiples reprises auparavant, et Jason découvrit bien vite que s’il était mort autrefois, les vieilles habitudes, elles, persistaient. Il ne se rendit compte qu’à la moitié du chemin qu’il était retombé de lui-même dans le même schéma : il suivait Batman, copiant chacun de ses gestes, calquant sa trajectoire sur la sienne, comme à l’époque où il était Robin et où Batman avait toujours raison. Sa découverte l’agaça au plus haut point, et il tenta, plusieurs fois, de passer devant son ancien mentor, de reprendre le contrôle sur ses choix, mais il lui suffisait d’une seconde d’inattention pour redevenir le gamin en collant et rejouer à l’ombre du Chevalier Noir. Son humeur chuta drastiquement.

Il n’était pas retourné sur le toit du commissariat depuis qu’il était revenu à Gotham. Puisqu’il se tenait maintenant du mauvais côté de la loi (contestable), l’endroit était passé de terrain ami en terrain ennemi dans son esprit, mais il ne pouvait nier qu’y revenir avait un certain charme. Rien n’avait changé : Gordon se tenait toujours de la même façon, il portait toujours le même manteau, les mêmes lunettes, le Bat-Signal trônait toujours au centre du toit, et les ombres s’étiraient tout autour de la même façon. Même l’entrée de Bruce était la même : spectaculaire, théâtrale et imposante à souhait. Seulement, aucun Robin ne le suivait.

Jason resta d’abord tapi dans la nuit, mais la réflexion de Gordon lui laissa un arrière-goût de défi sur la langue, et il ne lui en fallut pas plus pour sortir de sa cachette.

« Oh, ne faites pas de promesses que vous ne pouvez tenir, Commissaire. »

Jason ne manqua pas ces yeux, pourtant si habitués aux surprises du métier, s’agrandir légèrement, et il en tira une certaine fierté. Probablement mal placée, à en juger par la tension qui vint s’ajouter à celle, déjà imposante, qui semblait peser sur les épaules de Batman. Red Hood commençait à se faire un nom dans les rues de Gotham, et si le G.C.P.D était fan de chauve-souris, l’accueil de Jason risquait d’être différent. Il le savait, et ça n’importait que peu. Au moins, sa réputation le précéderait quand il irait s’occuper de la pourriture qui prenait racine dans le commissariat. On fait ce qu’on peut, avec les moyens du bord, n’est-ce pas ?

Gordon sembla vouloir exiger des réponses, et peut-être même s’énerver, mais un regard vers Batman et surtout le poids virtuel du dossier qu’il tenait dans la main lui fit ravaler son premier réflexe. C’était comme voir la ville toute entière lui tomber sur le coin de la figure : il s’affaissa légèrement, pinça les lèvres et fronça ses sourcils déjà bien froncés, avant de tendre son dossier à Batman. Ah, Gotham, songea Jason, encore plus efficace qu’un pied de biche pour briser quelqu’un.

« Une camionnette de transport de fond a été attaquée à 22h22 précises. Les agresseurs ont laissé quatre corps derrière eux, mais l’équipe en comportait six. Le conducteur et son co-pilote ont été pris en otage. Ma théorie ? Ils ont les codes d’accès et le moyen d’entrer dans chaque bâtiment de la Gotham National Bank, ce qui les rend vitaux. Quelqu’un s’apprête à faire la tournée des banques cette nuit, et j’aimerais, autant que possible, que ça n’arrive pas. Ca fait beaucoup de paperasse à remplir après, et mes articulations ne sont plus ce qu’elles étaient. »

Le casque de Jason cacha son sourire. Gordon pouvait avoir l’air aussi désabusé qu’il le voulait, jamais il ne parviendrait à faire oublier que, de tous les flics de Gotham, il était celui qui était le plus concerné par le bien-être de cet endroit oublié des Dieux qu’était Gotham. Il était, après tout, sur le toit de son commissariat, en plein milieu de la nuit, et il aurait du mal cacher l’espoir à l’origine de cet acte derrière une montagne de je-m’en-foutisme. Gordon n’était pas un homme d’église, mais bon sang, personne n’avait plus de foi que lui.

Jason reporta son attention sur le dossier que Bruce avait maintenant ouvert pour révéler quelques photos et indications. L’attaque avait été parfaitement organisée : commise en plein angle mort entre deux caméras, elle avait été rapide, efficace. Mais, plus que le mode opératoire, c’était l’heure de l’agression qui portait le nom du cerveau de l’opération.

« Double Face, » souffla Jason.

Une fois de plus, l’ironie revenait lui botter le derrière. Cette nuit était décidément digne des pires épisodes de sitcom et même si Jason était habituellement fan (l’épisode où Rachel et Ross se remettent ensemble ? Son préféré.) il appréciait beaucoup moins en être le personnage principal. Double Face avait été le premier homme qu’il avait viscéralement voulu tuer, et le premier qu’il avait épargné. C’était comme un petit voyage à travers les âges pour reconstituer l’homme qu’il était maintenant, et le guide avait choisi la première étape : celui qui avait tué son père et qui, ce soir, avait tué quatre hommes de plus et en tenait deux autres entre la vie et la mort.

Jason releva la tête vers Bruce. Oh, il savait lire les signaux. Il n’avait jamais oublié comment lire les signaux.

Bruce n’avait pas manqué de noter l’ironie, lui aussi.


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Jeu 9 Nov 2017 - 13:57

James Gordon est surpris par l’apparition du compagnon du Batman.
D’une part, parce qu’il aurait juré qu’il s’agissait d’un Robin – son instinct lui hurlait qu’un des Jeunes Prodiges était là, et il lui fait rarement défaut ; mais, surtout, parce qu’il l’a reconnu.
S’il a comme fonction de gérer toute la sécurité de Gotham City, et s’il délègue donc beaucoup, le commissaire conserve un œil sur chaque dossier, sur chaque événement de la ville… et les rumeurs sur l’étonnant et terrible justicier expéditif au casque rouge sont nombreuses.

Le vieil homme est intrigué par cette présence surprenante, surtout parce que cet inconnu… tue.
Il prend des vies. Il viole les règles – de la Loi, mais surtout du Chevalier Noir.
Si ce dernier accepte sa présence, c’est qu’il y a… quelque chose, entre eux. Soit une relation si forte qu’elle permet au Batman de passer outre – soit que ce dernier penche désormais du côté du meurtre ; ce qui est impossible, littéralement.

James Gordon garde ces réflexions pour lui – mais il n’est pas dupe.
Comme il n’est pas dupe de la réaction du Chevalier Noir, quand il comprend les signes et identifie l’ennemi.


« En… effet. »

Sa voix est froide… bien plus que d’habitude. Son corps est crispé… bien plus que d’habitude. Ses doigts gantés tiennent fort le dossier papier remis par le commissaire… bien plus que d’habitude.
Quelque chose ne va pas, le vieil homme le comprend de suite ; mais un coup d’œil rapide vers le visage, doté d’une expression de haine pure et de colère difficilement contrôlée, lui fait comprendre que l’interroger serait une mauvaise idée.

James le connaît bien et l’a déjà vu ainsi – mais rarement. Très, rarement.
Un tel état, une telle expression sont généralement le prélude à une croisade terrible du Batman… les pires. Les plus violentes. Les plus terribles. Les plus absolues.
Les plus destructrices.


« Hem… je suppose que vous allez en… »

Gordon a l’habitude des entrevues avec son sombre allié – il a l’habitude, surtout, de ses disparitions impromptues ; si elles l’ont longtemps troublé, elles sont devenues depuis une forme de jeu.
Il s’y attend, là, mais entend agir comme d’habitude : lancer une banalité, se tourner légèrement, et découvrir qu’il a disparu.
Mais cette soirée n’a définitivement rien d’habituel.

Le commissaire Gordon ne peut finir sa phrase – il n’y arrive pas, en fait.
Car le Batman… part avant.
Il n’attend pas qu’il ait terminé, il n’attend pas qu’il se soit détourné ; il tourne lui-même les talons, et se précipite vers le rebord avant de sauter dans le vide.

Sans un mot. Sans une attente. Sans la routine.
James Gordon ouvre la bouche, de surprise, et glisse quelques instants un regard de pure incompréhension vers Casque Rouge – puis se reprend. Et affiche une mine grave, perturbée.
Quelque chose ne va pas… quelque chose ne va vraiment pas.

Par réflexe, il sort son paquet de cigarettes et en allume une ; Barbara le saura, elle le sait toujours, et elle l’engueulera – mais il s’en fiche.
Quelque chose ne va pas, ce soir, chez son sombre allié… chez son ami costumé.
Et ça l’inquiète. Autant pour lui que pour la ville…


**
*
**

Le Batman saute dans le vide, donc.
Et ouvre sa cape, pour planer et descendre rapidement vers le sol, vers une des ruelles anonymes mais sûres qui entourent le bâtiment central du G.C.P.D. ; il ne lui faut que quelques instants pour atterrir, au milieu des détritus. La sécurité n’implique pas la propreté.
Cinq secondes après, un crissement de pneus se fait entendre, et deux phares éblouissants apparaissent à proximité ; il se redresse, et se tourne lentement vers la lumière.


« Stop. »

Un véhicule fonce directement vers lui, à vive allure..
You fix a bird, you buy a cage [Batman] 2016-batman-1-batmobile
… mais la Batmobile s’arrête juste devant lui.
Il la contourne, et rentre directement dans l’habitacle. Après s’être installé, il appuie sur un bouton – la porte du passager s’ouvre, au moment où Red Hood le rejoint dans la ruelle.


« Monte. »

La porte se referme quand le jeune homme s’installe également.
Le véhicule redémarre immédiatement – en trombes.

Un silence de plomb s’instaure alors, qui a suivi les maigres réflexions de Bruce, prononcées avec un ton terrible. Le regard fixé sur la route, il reprend la parole, mais avec une voix monocorde qui n’augure rien de bon.


« La Batmobile dispose d’un scanner intégré, relié au Batordinateur. Tu le trouveras devant toi. Je te remercie de bien bouloir scanner le dossier du commissaire, pour que le Batordinateur puisse calculer les probabilités des prochains vols. »

Sans le regarder, le Chevalier Noir tend le dossier papier, qu’il a conservé et amené avec lui dans sa descente.
En le regardant bien, et en le connaissant aussi bien, Jason peut aisément comprendre que son ancien mentor… va mal. Ou qu’il a une vraie difficulté, ici. Ce qui n’a pas beaucoup de sens…


« Nous… »

Il commence, mais s’arrête.
Puis soupire, lourdement. Avant de secouer la tête.


« Je sais ce que Double-Face incarne, pour toi. Je sais aussi ce qu’il incarne, pour Dick – il fut son premier ennemi, sa plus grande épreuve. L’affronter est toujours spécifique et compliqué, mais… là… »

Bruce fait un effort. Absolu.
Il essaye de parler, de s’expliquer… de ne pas entièrement se fermer. De communiquer. D’échanger.
De s’ouvrir, en fait. Même si ça fait… mal.


« Harvey Dent ne devrait pas être libre, Jason. »

S’il parlait plus doucement, juste avant, sa réplique devient soudain sèche, froide – terrible.

« Je l’ai emprisonné dans un endroit dont il n’aurait pas pu sortir. »

La Batmobile accélère, il passe les vitesses avec une crispation claire, brutale.

« Il… »

Bruce soupire, puis détourne le regard.
Il réfléchit, quelques instants.
Puis active le pilote automatique, et se tourne vers son fils adoptif.


« Tu l’ignores, mais… il y avait eu une évolution dans ma relation avec Sel… avec Catwoman. Nous… avions envisagé de nous… marier. Parce que… »

Son visage se crispe, et offre alors une expression de douleur réelle, de tristesse absolue.

« Parce qu’elle avait été enceinte. Parce qu’elle avait accouché. Parce que… une fille était née. Ma fille.
Mais… nous avons été leurrés, piégés. L’enfant que nous avions cru avoir – était un autre, qui est mort. Et… notre bébé, il… elle… elle a été tuée, Jason. Il l’a laissée mourir. »


Sa mâchoire se crispe, et la douleur est remplacée par une haine pure.

« Harvey Dent l’a laissée mourir.
C’est pour cela que je l’avais retrouvé – et emprisonné. Il ne devrait pas être dehors, il ne devrait pas courir Gotham. »


L’annexe du Batordinateur bipe dans la Batmobile, et Bruce se retourne vers les écrans avant de reprendre le contrôle manuel du véhicule.

« Il ne devrait pas être en état de le faire. »

Ce ne fut qu’un mot, qu’un souffle, qu’un murmure.
Mais cela dit tout.
Et Jason, son fils adoptif, son ancien élève, son enfant terrible, son miroir… peut craindre le pire, en découvrant chez son ancien mentor l’ombre de lui-même – l’ombre de sa violence, de sa haine.

Une nuit terrible se prépare, dans la ville.
Une nuit à laquelle tous ne pourraient pas survivre…

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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Sam 11 Nov 2017 - 19:00




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Jason et Gordon échangèrent un regard alors que, déjà, la nuit reprenait ses droits sur l’espace que Batman avait occupé quelques secondes plus tôt. Jason lut de l’inquiétude dans les yeux du Commissaire – sentiment qu’il ne partageait pas, mais dont il comprenait sans mal l’origine. L’atmosphère avait changé quand Bruce avait posé les yeux sur le dossier de l’agression de Double Face, alors qu’il ne s’agissait là que d’un caprice du schizophrène. Il avait été plus monstrueux, plus mortel, auparavant. La seule réponse logique était donc que ce n’était pas à propos de ce coup-là.

Et là, ça devenait intéressant.

Jason recula vers le bord du mur avant de se tourner vers Gordon.

« Vous ne devriez pas fumer, » lança-t-il. « Ca pourrait vous tuer encore plus que cette foutue ville. »

Il se souvenait de la théâtralité de ses sorties en tant que Robin, mais il ne cherchait plus à impressionner ni Bruce, ni Gordon. Le Commissaire du G.C.P.D était loin de faire partie des gens qu’il voulait effrayer, alors à quoi bon. Il s’élança au-dessus du vite, les yeux rivés sur la Batmobile qui s’arrêtait déjà plusieurs mètres plus bas, et l’esprit sautant d’un indice à l’autre. Quand il atterrit quelques courtes secondes plus tard, son ancien mentor était déjà assis derrière le volant et l’ignora avec superbe alors qu’il lui donnait l’ordre de sec de le rejoindre dans le véhicule. Jason ne se fit pas prier : si quelque chose lui manquait de ses aventures en tant que rouge-gorge, c’était bien la Batmobile. Ca ne l’empêcha pas de continuer à analyser Bruce, sans même chercher à s’en cacher. Ils étaient trop honnêtes l’un avec l’autre maintenant – brutalement honnêtes même – pour retomber dans leurs vieilles habitudes.

Le silence de plomb qui suivit le démarrage de Bruce donna à Jason une chance en plus de remonter la piste, miette de pain par miette de pain. Pour le moment, il savait que Bruce était en colère, il savait que Double Face en était la raison mais que ce qu’il avait fait cette nuit-là n’en était pas la cause, et il savait que l’attention de Bruce n’était plus du tout focalisée sur lui, et c’était son plus gros indice jusqu’ici. Bruce ne le lâchait jamais du regard quand ils se voyaient, parce qu’il connaissait la menace que représentaient les armes dans ses étuis ; Alors quoi qu’il soit en train de ruminer, c’était sans nul doute gros.

Jason haussa un sourcil quand Bruce lui donna le dossier, mais il scanna ce dernier sans discuter.

« Sacré amélioration, » murmura-t-il d’un ton appréciateur en regardant le petit écran traiter les informations qu’il venait d’y entrer – en moins d’une minute.

C’est cette attente que Bruce utilisa comme toile de fond pour lui donner un semblant de révélation. Jason le vit passer de douleur à colère, le tout dans une froideur qui ferait pâlir d’envie Mr. Freeze, et il ramassa, l’une après l’autre, ces nouvelles miettes de pain dont Bruce lui faisait cadeau. Ce n’était peut-être pas, en effet, le vol de la camionnette de la banque qui le mettait dans tous ses états, mais c’était bel et bien Harvey Dent.

« Dont il n’aurait pas pu sortir ? » releva Jason alors que Bruce se plongeait dans un nouveau silence. « Tu ne l’as pas ramené à Arkham, alors ? »

Bruce l’ignora avec superbe, préférant continuer ses révélations, mais cette fois-ci, il ne sema pas de miettes de pain derrière lui, mais des miches de pain entières. Jason le dévisagea alors qu’il tentait, tant bien que mal, de faire le tri dans ce nouveau paquet d’informations, et d’en digérer le contenu. Il était bien envieux du scanner de la Batmobile à cet instant, parce que son esprit se heurtait à chaque conséquence, à chaque répercussion que ce que venait de lui dire Bruce pouvait avoir.

« Je… suis désolé. Je l’ignorais… Je suis sincèrement désolé, Bruce, » souffla-t-il, secoué par ce qu’il venait d’entendre.

Maintenant qu’il s’y attardait, il se rendait compte qu’il n’avait pas vu Catwoman dans les rues depuis un moment, et pourtant, il gardait un œil sur les rues. Il avait juste pensé qu’elle était partie faire les quatre cents coups ailleurs, puisque, tel un chat, aucune limite, aucune frontière ne pouvait retenir cette femme. Mais elle n’était de toute évidence pas partie vider les coffres de la famille royale de Monaco. Il n’osait imaginer la douleur qu’elle avait dû ressentir et l’épreuve que ce taré l’avait poussée à traverser… Peut-être qu’il lui indiquerait deux trois maisons à visiter la prochaine fois qu’ils se reverraient. Connaissant la cambrioleuse comme il la connaissait – ce qui était loin d’être gage d’intimité puisqu’elle n’était pas facilement cernable – ce serait la seule aide qu’elle accepterait, et encore faudrait-il que son geste ne soit pas qualifié d’aide. Non, ce dont elle avait besoin c’était…

Les yeux de Jason se relevèrent vers le profil droit de Bruce. L’avait-il aidé ? Probablement. Mais comment ? En enfermant le malade qui leur avait fait ça ? En le tabassant ? Jason n’aurait pas dû être surpris : Bruce avait déjà perdu un enfant auparavant sans chercher à le venger, à vraiment le venger. Qu’avait-il fait au lieu de ça ? A quel point s’était-il rapproché de la limite ?

« Que lui as-tu fait, Bruce ? » questionna-t-il, la voix lourde. « Où est-ce que tu l’avais jeté ? »

Il fut coupé par un petit son de notification alors que l’écran de la Batmobile affichait désormais l’adresse d’une banque – celle que l’ordinateur avait calculé comme étant la prochaine cible de Double Face.

« Gotham National Banks, Beaver Boulevard » lut Jason. « Juste en face de Trillium Park. Parfait, on n’est pas très… »

Il fronça les sourcils et reporta son attention sur Bruce. Cause, conséquences, répercussions. Quel beau discours lui avait fait Bruce sur le toit, un peu plus tôt dans la nuit, sur les risques de jouer les bourreaux justiciers. Tu ne causeras que plus de folie meurtrière et de morts, avait-il dit. Se rendait-il compte maintenant que sa logique se retournait contre lui ? Deux agents étaient morts déjà cette nuit, tout ça parce que…

« Il se venge. Ce n’est pas un coup banal. Il t’attendra, tu le sais. C’est sa vengeance. »

Jason marqua une pause avant de reprendre.

« Que lui as-tu fait, Bruce ? »

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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Lun 13 Nov 2017 - 11:45

Bruce le sent.
Il sent le cheminement de la pensée de Jason. Il sent l'avancée de ses réflexions. Il sent l'évolution de sa position.
Et lui se sent poussé dans ses retranchements.

Si, à la base, son fils adoptif a clairement montré sa gêne, sa compassion sincère envers la perte de Selina et de Bruce, Jason a rapidement réuni les éléments dispersés par Bruce - et commencé à comprendre ce qu'il s'est passé.
Harvey Dent a tué la fille de Selina et Bruce. Harvey Dent s'est joué d'eux. Harvey Dent s'est joué de lui.
Et Harvey Dent a disparu... parce que le Batman s'est occupé de lui.


"La cible n'est pas anodine."

Jason vient d'annoncer le prochain lieu d'attaque, et Bruce accélère pour s'y rendre. Il sent, il sait toute la tension qui s'empare de l'habitacle de la Batmobile, alors que son fils adoptif additionne les indices et commence à comprendre que son ancien mentor a commis ici un acte terrible... et duquel Double-Face n'aurait jamais pu se relever.

"La Gotham National Bank est l'endroit où Big Lou Maroni a été tué par Holiday, alias Alberto Falcone. Big Lou Maroni était le père de Salvatore Maroni, qui pensait à tort que le procureur Dent était Holiday - et qui a tenté de le tuer, lors du procès de Carmine Falcone."

Sa voix est lente, calme ; professorale.
Mais il sait, il sent que Jason ne s'y laissera pas prendre - le jeune homme va s'acharner, car c'est sa nature. Il n'est pas comme Dick, compréhensif face à ses silences et préférant attendre que Bruce s'ouvre un peu pour l'interroger ; il n'est pas comme Tim, loyal et discipliné, ne remettant quasiment jamais ses positions en question ; il n'est pas non plus comme Damian, à l'heure actuelle incapable de s'intéresser réellement aux sentiments d'autrui.
Non... c'est Jason. Jason qui n'arrête jamais. Jason qui ne lâche rien. Jason qui s'acharne, même quand ce n'est pas son intérêt - même quand ses proches souhaiteraient qu'il arrête.

Jason.
Son fils. Son poil à gratter. Son miroir.
Sa conscience, toujours déformée.


"Il..."

Ils ne sont plus qu'à deux rues de la cible - mais Bruce soupire.
Jason. Jason l'a percé.
Il a juré de s'ouvrir aux autres, d'en dire plus... de faire confiance. Donc même s'il le souhaite, même s'il le veut... il ne peut pas ; il ne peut plus. Il ne veut plus, même si ça fait mal.


"Je l'ai brisé, Jason."

Sa voix se réanime - elle se fait plus dure, plus terrible. Il réactive le pilote automatique, et tourne un visage en colère vers son fils adoptif.

"Il m'a pris mon... notre enfant, il nous en a fourni un autre piégé, qui est mort devant nous ; et il a laissé notre bébé mourir, Jason. Elle... a agonisé, et il l'a regardée... il l'a regardée, je le sais, il a tout filmé. Elle hurlait, elle pleurait, elle avait besoin d'aide - et il a fait jouer sa pièce, jusqu'à tomber sur la face où il n'avait pas à la sauver.
Il voulait qu'elle meure, et il a faussé son jeu pour y parvenir - et elle est morte. Elle est morte sans que je puisse l'aider, sans que je puisse rien faire..."


Ses poings se serrent, par réflexe. Tout son corps se crispe.

"... alors je l'ai chassé, Jason, et je l'ai brisé.
Mais je ne l'ai pas tué... je n'ai pas pu tuer le Joker quand il t'a tué, et je n'ai pas pu le faire avec Harvey... même si je le voulais. Même si je le voulais plus que tout.
Je l'ai juste... brisé."


Son regard se détourne, honteux.
Honteux d'avouer. Honteux d'avoir agi. Honteux de n'avoir pas agi. Honteux de tout déballer ainsi.
Honteux d'avoir ressenti plus de haine quand elle est morte, que lorsque lui a disparu.


"J'ai brisé son jeu. J'ai brisé son système. J'ai brisé ses personnalités.
J'ai brisé Double-Face - et j'ai brisé Harvey Dent. Aucun d'entre eux ne devrait être là, Jason. Pas après ce que j'ai fait. Et c'est ce qui m'inquiète."


Son discours se coupe, alors que le Batmobile les amène à destination...
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... le pont menant à la Gotham National Bank, aux lumières étonnamment allumées à cette heure tardive.

"Ils doivent nous attendre, scanne la z..."

Son ordre est coupé par une pluie de balles, issue des hauteurs de l'immeuble de la G.N.B., où un balcon est occupé par plusieurs hommes...
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... des hommes de main de Double-Face, vêtus de manière plus colorée qu'à l'habitude.

"Hum. Ces costumes ont cinq ans, déjà."

La Batmobile effectue un virage serré, et vient se placer en parallèle de l'entrée de la G.N.B. ; le côté conducteur, le sien, est le plus exposé aux balles.

"Prêt à sortir ? La manoeuvre B-12 te dit encore quelque chose ?"

Bruce tente de cacher son trouble derrière une réflexion sympathique - mais le coeur n'y est pas.
Il a peur.
Il a peur de retrouver Harvey Dent. Il a peur de découvrir comment l'autre a pu survivre. Il a peur de la réaction de Jason. Et, surtout, il a peur de ce que lui pourrait faire face à l'assassin de son enfant...
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mar 14 Nov 2017 - 0:18



You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Il n’était pas difficile de voir la culpabilité qui pesait lourdement sur les épaules de Bruce. La plupart du temps, il n’était en fait pas difficile de lire ce dernier – c’était plutôt comprendre les raisons de telle ou telle émotion qui demandait un certain travail de patience. Mais cette fois-ci, Jason avait toutes les pièces, de A à Z. Oh, les détails manquaient peut-être encore au tableau en général, mais ce n’était que quelques nuances, quelques couleurs et Jason avait déjà tout le reste. Le cadre, la toile, le sujet, le décor et même la signature en bas à gauche. La Batmobile fendait l’air, Bruce serrait des dents et Jason… contemplait le tableau.

Une partie de lui voulait croire que Bruce avait été aussi chamboulée après sa mort, que le tumulte de sentiments qui s’enchaînaient au fond de ses yeux avait un air de déjà vu et que, justement, c’était Jason qui avait provoqué la dernière tempête en date. Mais Bruce était bien trop perdu face à la violence de ses propres émotions, Jason le voyait bien, et il n’y avait rien là de déjà expérimenté auparavant. Le Chevalier Noir avait perdu pied, et la gravité n’avait plus aucun effet sur lui : la tornade le trimballait dans tous les sens, comme une poupée de chiffon sans valeur. L’image provoqua un léger sourire chez Jason. Chacun son tour.

Une autre partie de lui voulait appuyer sur la plaie. C’était égoïste, un brin sadique et carrément fou, mais il se sentait d’humeur vampirique à cet instant. Un peu de sel sur la plaie suintante et il aurait bu ( et savouré) la douleur de Bruce. C’était une vengeance comme une autre – ou plutôt, c’était ce qu’il voulait se faire croire. C’était une vengeance, certes, mais ce n’était pas la vengeance, et c’est cette nuance-là qui lui fit garder le silence.

Parce qu’il comprenait. D’une certaine façon. Vaguement. De loin. Il comprenait qu’il était Jason Todd et que ce nourrisson qui jamais n’était devenue une fillette était Helena Wayne-Kyle, et que jamais un nom de famille n’avait porté plus de poids. Il comprenait aussi qu’ils ne se retrouveraient pas contre une énième version du film d’horreur qui se jouait dans la tête d’Harvey Dent, mais que ce serait un monstre qu’ils affronteraient ce soir. Un monstre façonné des mains de l’homme qui était censé arrêter les monstres, pas leur donner un nouveau bestiaire à explorer.

Il s’abstint tout commentaire et il n’eut pas besoin de chercher à meubler le silence de toute façon, puisqu’une rafale de balles vint s’écraser sur la carrosserie impeccable de la Batmobile. Il leva la tête vers le bâtiment imposant de la banque en synchronisation parfaite avec Bruce, et tout comme ce dernier, il nota les uniformes d’un ancien âge. Ca lui en rappelait des souvenirs, tiens.

Bruce vira, les pneus de la Batmobile crissèrent sur le sol, et le véhicule s’arrêta, à la pleine vue des tireurs de Double-Face qui s’en donnaient à cœur joie. C’était probablement juste histoire de. Jason était persuadé que Double Face les attendait à l’intérieur, qu’il attendait de pied ferme de se retrouver face à face avec celui qui avait brisé ce qui déjà n’avait pas été entier.

Jason releva doucement la tête vers Bruce, l’intensité de son regard cachée par le casque qu’il portait toujours. Il venait de réaliser pourquoi il avait préféré garder le silence, pourquoi il n’avait pas répliqué et pourquoi la révélation de Bruce ne l’avait pas mis en rogne. Il avait, certes, complété le tableau de Bruce, mais il avait omis de remarquer qu’un autre tableau en était le négatif, et celui-là, c’était le sien. Il était ce que Bruce n’était pas. Il faisait ce que Bruce ne faisait pas. Il pouvait aller là où Bruce, lui, ne pouvait pas aller. Les limites que Bruce se refusaient de franchir, lui, il y avait construit des ponts. La symétrie était parfaite, chirurgicale.

« B12 ? » répéta Jason, un battement de cœur trop tard. Il avait un goût ferreux étrange sur le dos de sa langue. « Evidemment que je m’en rappelle. Comme si c’était hier, » ajouta-t-il, sa voix de nouveau porteuse de son habituelle touche de taquinerie.

Il leva la main vers un bouton précis de la Batmobile – elle avait peut-être changé mais elle restait la même là où c’était le plus important – mais se figea au dernier moment. Il tourna de nouveau la tête vers Bruce.

« Tu ne l’as peut-être pas brisé comme il fallait, B, » souffla-t-il, presque dans un murmure. « Pas comme moi je le pourrais. »

Puis il pressa le bouton, enclenchant ainsi la fameuse manœuvre B12, sans laisser à Bruce le temps de répondre.

La manœuvre B12 était simple, mais son génie reposait sur le travail en équipe et, tout comme manœuvre concoctée par Batman qui se respecte, d’une bonne dose de théâtralité. A peine Jason eut appuyé sur le bouton que la Batmobile envoya deux projectiles fumant contre la façade de pierre de la banque. Les coques éclatèrent et une épaisse fumée s’en échappa, brouillant ainsi immédiatement le champ de vision des tireurs. Bruce et Jason étaient déjà dehors.

Jason fonça sur la droite du bâtiment, laissant ses sens et son instinct prendre le volant alors qu’il plongeait dans l’épais nuage de fumée. Son casque remplaça le brouillard opaque par une vision thermique, et il aperçut, du coin de l’œil, le bout de la cape de Batman alors que ce dernier progressait sur la gauche du bâtiment. Sans s’arrêter de courir, Jason sortit son grappin, visa rapidement et appuya sur la détente pour finalement se détacher du sol. La gravité perdit son emprise sur lui et il s’envola sans un bruit vers le balcon qui servait de repaire de fortune aux tireurs zélés. Sous lui, la fumée continuait de s’étaler, épaisse et presque surnaturelle, jusqu’à atteindre le flan de la Batmobile.

Jason ferma les yeux, suspendu au balcon. Il sentait, plus qu’il ne voyait, son mentor à l’opposé du balcon, pendu lui aussi. Il sentait la tension qui refermait ses griffes sur les tireurs, l’angoisse, même, qui augmentait après chaque seconde de silence de leur part, et finalement il la sentit. Cette électricité si particulière qu’on ne ressentait que quand on était parfaitement synchronisé avec le Chevalier Noir, quand on était sur le point d’agir d’instinct – un instinct taillé pour évoluer sur la même longueur d’ondes que le Batman.

Ils agrippèrent chacun un bras d’un des cinq tireurs en même temps, à la seconde près. Ah, l’électricité… La victime de Bruce bascula dans le vide en poussant un cri de surprise, puis de panique quand le lien qui le rattachait au balcon se resserra autour de sa cheville. Le tireur que Jason avait attrapé, lui, n’eut pas autant de chance. Il cria, oui, mais si son cri ne s’arrêta, ce ne fut que parce qu’il toucha le sol, un peu plus de cinq mètres plus bas. Pas de quoi perdre la vie, mais largement de quoi vous couper le souffle et vous réduire quelques os en bouillie.

Bruce se jeta sur un autre tireur mais l’attention de Jason se détacha des faits et gestes de son ancien mentor. L’effet de surprise n’était plus d’actualité et seule la vitesse et l’efficacité comptaient désormais. Il bondit au-dessus de la balustrade de pierre et sa main se referma sur la nuque d’un des tireurs avant que ses semelles ne touchent le sol du balcon. Elles le firent en même temps qu’il écrasait la tête de l’homme de main de Double Face contre la rampe, brisant ainsi le nez du tireur, probablement son arcade sourcilière et lui offrant un ticket rapide pour le pays de Morphée. Il se retourna vers le dernier tireur, referma sa main sur le bras de ce dernier, mais avant qu’il ne puisse faire quoi que ce soit, l’homme fut éjecté par-dessus le balcon, encore une fois retenu par un câble aussi fin qu’il était résistant.

Jason se redressa, son visage à moins d’un mètre de celui de Bruce. L’électricité grésillait encore sur le bout de ses doigts. Sous leurs pieds, la fumée commençait à peine à se dissiper.

« B12, » dit-il avec un petit sourire dans la voix.

Il se tourna vers la porte et ouvrit la marche.

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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mar 14 Nov 2017 - 14:16

Les balles crépitent sur la carlingue de la Batmobile ; Bruce ne s’en préoccupe pas.
Concentré sur quelques vérifications, quelques informations transmises par les systèmes du véhicule après analyse par le Batordinateur, il récupère des miettes de détails pour essayer d’améliorer leur connaissance du lieu – et minimiser le piège tendu par Harvey Dent ; un vœu pieu, il le sait, mais c’est toujours mieux que rien.
Il n’y a qu’une poignée de secondes, avant que Jason et lui ne sortent, mais cela suffit pour obtenir ces éléments… et pour que Jason lâche l’équivalent d’une petite bombe.


« Hrm. »

Il grogne, et détourne le regard.
Il ne saurait agir autrement.
Jason… Jason a touché un point sensible ; un point qui ne cesse de le hanter, depuis leur départ du toit du commissariat, mais qui l’a rongé durant toute sa traque de Double-Face.

Jusqu’où aller. Jusqu’où frapper. Jusqu’où briser.
Où s’arrêter, en fait. Où s’arrêter pour rester encore lui-même – mais où aller pour apaiser, au moins un peu, ces flammes de pure fureur, de pure haine qui grésillent dans son âme, qui ont anéanti le glaçon autour de son cœur, qui ont rendu cette nuit de poursuite et de châtiment si terrible.

Bruce frissonne, alors que Jason active les deux missiles de la Batmobile… parce qu’il sait.
Il sait à quoi pense Jason. Il sait que son fils adoptif, troublé par tout ça, serait prêt à aller loin… à aller plus loin, contre Harvey. Parce qu’il a péché ; parce qu’il a tué ; parce qu’il s’en est pris à eux, qui demeurent encore la famille de Jason malgré tout.
Il sait à quoi pense son fils, oui ; et il a peur.

Pas de ce que Jason peut faire.
Mais de ce que lui est prêt à le laisser faire…

Heureusement, les missiles sont tirés, et la manœuvre B12 est enclenchée. Elle permet de cesser ces pensées – de cesser de penser ; pour agir, tout simplement.
Sans rien dire, le Chevalier Noir s’extraie du véhicule et profite de la fumée et du chaos pour se propulser vers la Gotham National Bank, comme Jason. Connaissant la manœuvre, connaissant le terrain, et aidé par ses filtres nocturnes, il se projette vers le balcon, pour se bloquer juste à côté.
Après un décompte mental rapide, similaire à celui de Jason, il s’empare d’un des hommes – et le projette dans le vide, avant de le rattraper par un filin ; son fils adoptif fait de même… ou presque. Un bruit sourd se fait entendre, suivi d’un grognement.

Bruce n’en dit rien, mais il désapprouve le choix de Jason de ne pas le protéger ; il n’en dit rien, cependant. Il se projette directe sur le balcon, et abat brutalement ses poings et ses genoux sur les adversaires – ceux-ci n’ont aucune chance.
Même s’ils ne collaborent plus ensemble depuis des années, Bruce et Jason ont suffisamment combattu ensemble pour créer des automatismes, organiser un véritable ballet brutal et absolu, qui n’a que peu d’égal.
Il ne leur faut, en soi, que quelques secondes pour se débarrasser des cinq hommes de main ; et il ne faut qu’un instant au Batman pour secourir l’un de ces criminels, en s’emparant de sa jambe avec un filin pour l’empêcher de subir une chute qui partait mal.


« J… Red. »

Il ne dit pas son nom. Il ne dit pas, entièrement, son nouveau pseudonyme – il ne le peut pas.
Red devra suffire, donc.


« Même si j’ai conscience de parler dans le vide… »

Sa voix est calme, posée ; mais contrôlée, surtout.
Depuis sa sortie du véhicule, il a frappé plus fort, plus dur, plus brutalement que d’habitude. Il a été plus loin que lors de ses premiers contacts – et il le sait.
Il ne se maîtrise pas vraiment, là. Et il a peur que cela empire.


« … essayons de nous… limiter. De nous contrôler. »

Ce n’est pas un ordre – plus une demande, une supplique.
Hautement inhabituelle. Et donc profondément troublante.


« Allons-y. »

Le Chevalier Noir suit Jason, et tous deux pénètrent à l’intérieur de la Gotham National Bank…
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… et notamment un couloir, sombre et désordonné. Trop pour être acceptable, dans une telle institution ; trop pour avoir été organisé à la hâte.
Tout cela a été prévu, en fait. Préparé.
Comme un piège.


« Red… ils nous attendent. Je vais sca… »

Bruce ne peut finir sa phrase – car des pleurs se font entendre.
Des pleurs terribles. Des pleurs bruyants.
Des pleurs d’enfant.

Il relève des yeux éberlués, alors que son corps se crispe et que la peur s’empare de son corps.
Au loin, des formes évoluent, s’amassent – des hommes de main, sûrement. Mais Bruce ne s’en préoccupe pas, pas encore.
Les pleurs d’enfant le hantent… le rongent. Le déstabilisent.

Et Harvey Dent, où qu’il soit, remporte clairement le premier point.

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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mar 14 Nov 2017 - 23:41




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Jason se pencha au-dessus de la balustrade du balcon, histoire de s’amuser un peu en voyant les – mauvais – tireurs de Double Face pendouiller au bout de leurs câbles. C’était de sacré poisson, mais pas très juteux. Ceux qui se trouvaient en bas de l’échelle ne méritaient même pas l’intérêt de Jason. Il avait appris à voir plus grand, et plus gros, et jusque-là, ça lui avait plutôt réussi. Ca ne voulait pas dire, par contre, qu’il n’avait pas le droit de s’amuser un peu, de temps en temps. Même à l’époque où il avait été Robin, la peur que Batman suscitait chez leurs ennemis l’avait amusé au plus haut point, et il en avait même tiré un sentiment de supériorité sans équivoque : qui pouvait être assez stupide au point d’avoir peur d’un gars déguisé en chauve-souris ? Un homme qui, lui le savait bien, n’était rien de plus qu’un gamin traumatisé et dont chaque repas était préparé dans une cuisine plus grande que les taudis de Crime Alley par un majordome à l’humour pince-sans-rire. Ri-di-cule. C’était agréable de se rendre compte que, si bien des choses avaient changé, ça, ça continuait de le faire sourire.

Il tendit le bras, pinça le câble entre ses doigts et le fit onduler dans les airs jusqu’à ce que le poisson au bout pousse un cri de surprise et de terreur. Jason laissa échapper un petit éclat de rire victorieux et moqueur avant de se redresser vers Batman, un grand sourire aux lèvres que ce dernier ne pouvait pas voir.

« Se contrôler, j’ai compris, » répondit-il avant de rajouter, en appuyant bien sur le mot, « Bat. »

Oh, il n’avait pas loupé l’hésitation de Bruce. Si son propre visage était caché par son casque, il restait assez de celui de Bruce pour que quelqu’un comme lui, qui en connaissait les traits une fois le masque tombé – puisse lire les micro expressions qui s’y perdaient. Un grincement de dents par-ci, un tressautement des lèvres par-là et un regard un peu plus long qu’à l’accoutumé, et hop, la traduction se faisait directement dans l’esprit de Jason. Il fallait dire que le dégoût était plutôt condescendant chez Bruce – probablement un reste du peu d’éducation de la haute qu’il gardait à ce jour.

Parce qu’apparemment, c’était acceptable de se vêtir de sa plus grande peur et d’en faire une arme quand sa plus grande peur, c’était un rongeur ailé. Mais quand il s’agissait d’un fou furieux à la voix criarde, c’était dangereux.

Jason se détourna, non pas sans avoir remué une dernière fois le filin – histoire de jouer avec les limites encore - et s’engagea aux côtés de Bruce à l’intérieur de la banque. Le couloir qui se présenta à eux avait tout d’une scène de théâtre, une mise en scène prévue avec brio, et absolument rien du décor habituel d’un braquage de banque. Jason ne s’était pas trompé – non pas qu’il en ait douté, mais la preuve en était désormais tellement évidente qu’il avait presque l’impression d’entendre Double Face le lui hurler à la figure. C’était un piège – non, un jeu même, et Bruce était le pion. Ce bon vieux Harvey n’avait probablement pas prévu la venue de Jason, mais il en faudrait plus pour le déstabiliser. Plus, comme une balle dans la tête, songea Jason avec dégoût alors que son regard courait tout autour de lui.

« Pas de doute, » souffla-t-il quand Bruce prit la parole, mais tout comme ce dernier, il se stoppa net avant de pouvoir rajouter la moindre chose.

Il ne comprit pas tout de suite le son qui vint lui emplir les oreilles. C’était tellement décalé, tellement inattendu, et surtout, ça avait tellement peu de sens pour lui. Il aurait pu reconnaître le grincement sinistre d’un pied de biche contre un mur, ça oui, mais les pleurs d’un bébé, ça ne voulait rien dire pour lui. Mais pour Bruce, par contre, ça voulait absolument tout dire. A cet instant très précis, c’était même la seule chose qui avait un sens.

Ce qui n’était pas le cas des ombres qui se réunissaient et se regroupaient à l’autre bout du couloir.

« Fais chier, » jura Jason en dégainant immédiatement son arme.

Il tira une unique fois et n’attendit pas de voir si sa victime avait été touchée - évidemment qu’elle avait été touchée – pour pousser Bruce sur le côté. Comme s’ils avaient attendu que le feu soit ouvert, les hommes de Double Face inondèrent le couloir de projectiles, et Jason nota avec plaisir que le bruit pourtant tonitruant n’était pas assez fort pour recouvrir les cris de douleur de l’homme sur lequel il avait tiré. Ca faisait mal, une rotule éclatée, ça, il n’y avait pas de doute.

Il maintint Bruce contre le mur avec son avant-bras, remerciant qui quiconque écoutait que l’architecture du couloir leur permette de se mettre à couvert sans se faire trouer le popotin, et il lança sur le côté une de ses grenades leurre très vite suivie d’une autre, fumigène cette fois-ci. Le bruit des coups de feu simulés par la première ne tarda pas à se rajouter à la cacophonie générale. Rien de mieux pour faire croire à ces enfoirés qu’ils ripostaient. Comme s’ils n’avaient que ça à faire.

Jason se retourna vers Bruce et s’écarta enfin de ce dernier – juste assez pour ne plus le bloquer mais pas trop. Il connaissait la douleur qui venait avec la morsure des mâchoires qui venaient de se refermer sur le cœur de Bruce. Ce dernier aussi les connaissait, mais cette fois-ci, la morsure était fraîche, récente. Il ne s’agissait plus d’un unique lampadaire allumé dans une ruelle crasseuse. Ce traumatisme-là n’était pas encore passé en noir et blanc : ses couleurs étaient vives, éclatantes. Brûlantes.

« B ! » cria Jason pour se faire entendre au-dessus du bruit qui résonnait autour d’eux. « Il joue avec toi, il joue ! C’est toi la pièce ce soir, et il va te faire tourner dans tous les sens jusqu’à ce que tu t’écrases, face contre terre, alors ressaisis-toi, okay ?! »

Il pinça les lèvres en reculant d’un pas. Dans son casque, les plans de la banque défilaient déjà, assez rapidement pour qu’il enregistre leurs différentes options. Leur but était évident. Double Face s’était donné trop de mal pour déguiser son petit piège, et il miserait sur la théâtralité de la chose jusqu’au bout, Jason n’en doutait pas une seconde. Histoire de faire manger à Bruce une dose de sa propre médecine.

Le big boss était dans la salle des coffres. Et Jason comptait bien y arrivait. Seulement, pas en jouant selon les règles. Depuis quand s’y pliait-il, de toute façon ?

« On peut utiliser les conduits d’aération et le système de ventilation, » reprit-il. « Il y a une grille à quelques mètres sur la droite. »

Il dévisagea Bruce un instant avant de rajouter quelques mots, sur un ton plus doux, presque délicat et… attentionné.

« Ne le laisse pas prendre le dessus. Ne sois pas son pion. On va le retrouver, et on va lui faire payer. »

A deux, ou tout seul. Seul Jason était capable de lui faire encaisser la facture toute entière, et il le ferait, sans hésiter. Il prendrait la décision, et Bruce n’aurait pas à s’auto-détruire en pensant que sa colère avait coûté la vie d’un homme. Jason pouvait porter ce fardeau pour lui. Il le portait déjà, mais cette fois-ci serait différente.

Peut-être que ce serait la fois qui forcerait la compréhension de Bruce, enfin. Peut-être.


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mer 15 Nov 2017 - 14:38

Les pleurs hantent l’esprit de Bruce.
Ils l’obsèdent. Ils le rongent. Ils s’enfoncent au plus profond de son âme – et en extraient absolument, en vident entièrement toute l’intelligence, toute la raison.

Alors que des hommes armés, lancés par leur ennemi, déboulent dans ce couloir, le Chevalier Noir n’a plus la capacité de réfléchir ou d’agir ; il est bloqué, figé par ces cris, ces pleurs, par ce bruit qui a été envoyé et utilisé à dessin pour le briser… et ça fonctionne.

Jason prend le relais et le pousse dans un coin, non sans avoir lourdement blessé un ennemi ; mais Bruce s’en fiche.
Bruce est loin, en fait. Bruce est très loin.

Bruce est des semaines… des mois en arrière. Quand Helena est née. Quand Selina a accouché, seule et dans la douleur. Quand la jeune femme, qui incarne certainement son âme-sœur, s’est écroulée, de fatigue et de souffrance. Quand Murphy, un agent de Double-Face, s’est emparé du nouveau-né pour l’échanger avec un autre. Quand l’enfant a été livré à Harvey Dent.
Quand ce dernier a… a…


« Ha. »

Bruce n’écoute pas Jason – il n’écoute plus.
Il n’a pas remarqué l’envoi des deux bombes, une factice, une fumigène. Il n’a pas entendu les conseils de son fils adoptif. Il n’a pas suivi son plan.
Il n’est plus en capacité de le faire.


« Ha. Ha. Ha. Haaaa… »

Il halète, respire difficilement ; bruyamment.
Ses yeux sont injectés de sang. Sa respiration est saccadée. Son cœur bat trop vite. Ses doigts se crispent, se détendent, se recrispent. Son corps se redresse, et prend une position anormale.

Il est en état de choc – il est en panique.
Mais le Chevalier Noir ne s’écroule pas, quand il panique… il perd pied. Il lâche les digues. Il rompt les limites.
Il…


« RAAAAAAAAAAAAAAH !!! »

… craque.
Littéralement.


« GNNNAAAAAAAAHHHH !!! »

Le Batman repousse, brutalement, Jason en le propulsant en arrière – puis il bondit.
Il bondit de sa place. Il bondit de sa cachette. Il bondit vers le couloir. Il bondit vers les hommes envoyés par Harvey… il bondit, directement, dans le piège. Mais il s’en fiche.

La rage a pris le pas sur la raison. L’émotion influe sur le cerveau.
Seule la fureur, la colère, la douleur dominent.
Seule l’envie d’en découdre, de frapper, de briser, d’anéantir règne ; et, au fond de lui, Bruce y fait face… et l’accepte, l’assume.

Il se précipite, en hurlant comme un possédé, sur les hommes qui se remettent de l’attaque au fumigène. Ces derniers sont forts, fiers, entraînés et l’ont déjà affronté – mais pas comme ça. Jamais, comme ça.

Il ne leur laisse pas une chance.
Il frappe. Il brise. Il anéantit. Et il recommence.
Il frappe. Il brise. Il anéantit. Et il recommence.
Encore et encore.
Jusqu’à ce que celui qu’il affronte s’écroule, vaincu, sanguinolent – jusqu’à ce qu’il doive le relever, pour s’acharner.
Encore. Et encore.

Bruce est frappé, bien sûr – mais il n’en tient pas compte.
Son esprit a disparu ; seul son corps a pris le relais. Son corps… et sa fureur.
Qui n’a plus aucune limite.

Le Batman ne leur laisse aucune chance, et s’acharne jusqu’à ce que la chair se ramollisse, jusqu’à ce que les os se brisent, jusqu’à les corps deviennent des bouilles.
Il s’acharne. Il se vide.
Et il sourit.


You fix a bird, you buy a cage [Batman] 1

Tandis qu’il laisse le pire de lui-même sortir… Bruce sourit. Il profite. Il aime. Il jouit.
Et se perd un peu plus, à chaque coup.


(HJ/ Désolé pour la brièveté et la faiblesse du message, j’ai voulu concentrer sur l’émotion mais ça ne fonctionne pas à fond ; je laisse tel quel, pour que tu prennes le relais et qu’on voit ce que ça donne. Wink /HJ)
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Jeu 16 Nov 2017 - 18:06




You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Le dos de Jason cogna lourdement contre le mur alors que Bruce le repoussa, toute notion de contrôle complètement évaporée. Le choc fut en réalité si fort qu’il poussa Jason dans ses retranchements et que l’adrénaline déferla par vagues entières dans tout son corps. Il ne restait jamais assez d’espace pour la conscience et la pensée logique dans ce genre de moments, et c’était généralement l’instinct qui tenait le volant quand l’adrénaline s’engageait sur la voie d’autoroute. Et cette fois-ci ne fit pas exception : le choc créa chez Jason un sentiment d’urgence, et ses réflexes prirent le relai. Il fit ce qui lui paraissait le plus censé, le plus vital : il tendit la main et tenta de retenir Bruce,

Evidemment, sa tentative tomba à l’eau. En temps normal, Bruce était déjà plutôt dur à rattraper, et maintenant qu’il semblait carburer à la haine pure et dure, il ne fallait même pas espérer le plaquer contre le mur. Le dos toujours contre le sien, de mur, Jason serra les dents alors que l’adrénaline en lui s’estompait et qu’il prenait conscience de la stupidité de son geste. C’était le genre de réflexe qu’on avait quand on était Robin, quand cette vie comptait encore, pas quand on était mort et qu’on se moquait complètement de ce que faisait Bruce de sa colère. Il n’avait pas le droit de s’en soucier, il en avait fini avec toute cette histoire. Il avait assez donné dans le domaine de la culpabilité de Bruce, et l’époque où il cherchait à le protéger et à gagner son approbation était révolue. Il était libre. Libre. Par conséquent, la bande son du combat plus que déséquilibré dans lequel s’était jeté Bruce n’aurait jamais dû le mettre dans tous ses états. Or, il était dans tous ses états.

Jason se mordit les lèvres et donna un léger coup sur le mur contre lequel il était toujours appuyé avec l’arrière de son casque.

« Fais chier, » grommela-t-il.

Il sortit de sa cachette et rejoignit Bruce en quelques enjambées hâtives. Il referma la main sur l’épaule d’un gaillard qui se croyait de toute évidence invincible puisque même la fureur du Chevalier Noir ne semblait pas lui faire peur. Le bras levé, prêt à attaquer le Batman par derrière, il poussa un cri de stupeur affreusement aigu quand Jason le tira en arrière. Il vacilla, perdit l’équilibre et, sans le lâcher du regard Jason baissa le bras, lui tira dans le pied et le jeta sur le côté.

« Me remercie pas, » lança-t-il avant de se tourner vers Bruce.

Il voulait se dire que c’était par souci de survie, que s’ils se lançaient vraiment dans le combat de boxe contre tous les hommes que Dent avait mis sur leur chemin, ils n’étaient pas sortis de l’auberge. Il voulut même se mettre en colère - alors moi je meurs, et il fait rien, mais quand c’est le chaton de Catwoman, c’est autre chose, hein ?! - mais c’était trop difficile de cacher l’inquiétude grossissante qui gonflait dans ses veines. Il attrapa à la volée le bras d’un autre homme de main qui, enhardi par le premier coup qu’il avait pu décocher sans se faire frapper en retour, retournait à l’assaut. Jason se servit de l’élan de ce dernier pour lui casser le bras avant de le mettre au tapis avec un coup de coude bien placé dans le nez. Il sentit et entendit l’os du malfrat se briser, tout comme il entendait les attaques de Bruce porter leurs fruits, mais c’était, en quelque sorte, encore plus violent.

En temps normal, le Batman était déjà rapide, mais dopé par la couleur et la douleur, il tenait plus du bolide que de la chauve-souris. Le temps que Jason le rejoigne et se débarrasse des deux premiers idiots sur lesquels il avait pu mettre la main, il ne restait plus grand monde debout. Plus qu’un homme de Double Face, pour être exact. Et il n’était pas vraiment debout – ou, disons plutôt qu’il bénéficiait d’une certaine aide puisqu’il aurait probablement préféré s’évanouir et rester au sol, mais c’était sans compter le poing de Bruce qui ne cessait d’en demander plus, encore et encore. Le sang volait, la peau gonflait à vue d’œil, les os se brisaient et les dents tombaient. A ce stade, il finirait même par vaincre le peu de vie qu’il restait chez sa victime, mais Jason doutait que Bruce puisse faire face à une telle conséquence. A part quelques cas bien spécifique, la mort était en général irréversible. Bruce n’avait jamais bien géré l’irréversibilité des choses.

Encore une fois, Jason agit d’instinct. Et encore une fois, son instinct semblait venir d’une autre vie et d’un autre monde. Il fit la chose la plus stupide qui soit, considérant le nombre de personnes baignant dans leur sang à ses pieds, mais il le fit quand même. Il protégea Bruce.

Il le bras, visa, tira.

Sa balle ne ressortit jamais à l’arrière du crâne de l’homme que Bruce tenait toujours. Sans qu’il n’en comprenne trop la raison, Jason y trouva une certaine satisfaction – froide et détachée, certes, mais il ne rechignait pas. C’était une preuve physique, matérielle, que c’était lui qui venait de tuer cet homme, et lui seul. En voila une action irréversible que Bruce pouvait s’amuser à punir autant qu’il le voulait.

Jason rangea son arme alors que Bruce se tournait vers lui. Sa gorge se serra, mais il l’ignora avec superbe. C’était la soirée des réactions complètement hors de contexte, il fallait croire. Son corps ne devait pas avoir retenu qu’il était mort, revenu à la vie, etc etc.

« Si tu as fini, je pense qu’on devrait y aller, » lança-t-il, se voulant détaché mais apparaissant plus en colère qu’autre chose.

Jason lui passa devant et s’avança dans le couloir sans jeter un regard en arrière. Oh, il ne dormirait pas moins à cause de cette balle. Bruce, lui, aurait perdu plus que le sommeil. Jason voulait lui montrer, lui faire comprendre, mais pas comme ça. Pas comme ça.

Et il se détestait pour ça. Il détestait se faire du soucis, encore..


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Ven 17 Nov 2017 - 12:39

Bruce se relève, se redresse.
Lentement, sans un mot, il se retourne – et plonge ses pupilles blanchâtres sur son fils adoptif. Son visage n’exprime nulle émotion, nul sentiment… nulle vie.
Du vide. Rien que du vide.


« Je… »

Et, soudain, tout revient.
Ses lèvres bougent. Ses joues s’activent. Ses membres tremblent. Son cœur reprend une allure normale, classique. La vie lui revient.
La vie – mais aussi ses sens, et ses esprits.


« Bon sang, mais… »

Bruce voit Jason qui range son arme, puis se détourne de lui. Bruce tourne sur lui-même, découvre l’homme qui vient d’être abattu de sang-froid par son ancien élève – mais sa colère, sa légitime haine de tout meurtre s’espacent, disparaissent quand ses yeux se fixent sur le reste… sur les autres.
Sur les corps immobiles, inconscients, blessés, maltraités, mutilés, anéantis. Sur ces hommes, brisés et marqués à vie. Sur ces criminels, qui ont été punis au-delà de toute raison, au-delà de toute conscience.
Sur ces existences, anéanties ; et… sur ses mains. Rouges. Coupables.


« Red, je… »

Il ne se souvient de rien.
Un blanc, un néant – profond et absolu s’est imposé dans son esprit, dès que son cœur a craqué ; et il ne se souvient de rien, ou quasiment de rien. Tout juste a-t-il… des images, des flashs. Des sensations.
Sang. Haine. Violence. Fureur. En boucle, encore et encore.
Et plaisir, aussi – plaisir de faire mal. Plaisir de briser. Plaisir de faire souffrir. Plaisir de dominer.


« Red, attends. »

Jason se dirige, déjà, dans la cage d’escalier de laquelle sont sortis les pauvres types qu’il a massacrés. Si la voix de Bruce n’était qu’un murmure, un souffle faible et brisé, elle reprend soudain une intonation forte – puissante ; au moins un peu, pour qu’il se reprenne.
Pour qu’il retrouve pied. Pour qu’il remonte à la surface.


« Cela… n’aurait pas dû avoir lieu. »

Bruce tremble encore. Il sent, encore, son cœur battre irrégulièrement. Sa respiration siffle toujours.
Il a peur. Il entend, toujours, les pleurs, et sent, sait combien cela influe sur ses nerfs ; il peut encore craquer. Il va encore craquer.
Mais il le refuse.


« Cela ne doit pas… plus avoir lieu. »

Lentement, il lève sa main tremblante – et pointe, de l’index, l’arme de Jason.

« Ca. »

Sa voix est froide, dure.

« Utilise ça, la prochaine fois. »

Son regard, terrible, se fige sur le casque de son fils adoptif.

« Sur moi. »

La réplique est sèche, brutale ; les mots employés et leur sens encore plus.
Il a pleinement conscience de ce qu’il dit – de ce qu’il demande ; et il l’assume. Il vient de craquer, de littéralement perdre l’esprit et de s’acharner sur des gens qui méritaient d’être sanctionnés… mais pas d’être massacrés.

Il offre un dernier regard plein de détermination, mais aussi d’une tristesse mâtinée de fureur, absolues, puis se détourne de Jason, honteux. Sans un mot, il reprend la marche, et s’enfonce directement dans la cage d’escalier.
Il dévale, rapidement, quelques marches et… se rend compte que les autres portes, les autres accès sont fermés ; il est clair que quelqu’un veut les mener à un certain endroit – et Bruce ne peut rien faire d’autre que de suivre, hélas. Pour l’instant.

Au bout de quelques minutes, le Chevalier Noir parvient finalement au sous-sol… à la fameuse salle des coffres.
Qui s’offre, à eux, comme une invitation évidente.


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Bruce s’arrête, et serre les poings.
Les pleurs se sont espacés, sont devenus plus diffus et presque silencieux ; mais ils reprennent, désormais, de plus belle – et proviennent de la salle des coffres, définitivement.
Lentement, le Batman se tourne vers Jason, et lui adresse un signe de tête.


« Couvre-moi. »

Il s’avance, alors. Rentre dans la salle du coffre.
Et pénètre dans l’antre de la bête…
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Sam 18 Nov 2017 - 2:05




You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
Jason se figea quand Bruce prit la parole, et, bien que toujours tourné dos à ce dernier, il comprit immédiatement de quoi il parlait rien qu’à la répulsion qui dégoulinait de ses mots. Il baissa les yeux vers la crosse de son arme que ses doigts frôlaient toujours et il s’imagina, un bref instant, la saisir et se retourner pour tirer la balle la plus importante qu’il aurait jamais à tirer. Il lui était déjà arrivé de visualiser ce genre de scène, bien plus de fois qu’il ne souhaitait se l’avouer, et ça finissait toujours de la même façon : Bruce tombait au sol, les yeux grands ouverts, froids et distants, et son masque parfait perforé à un endroit précis, et Jason, lui, ne rengainait jamais, parce que le ‘rêve’ s’arrêtait là. Il n’avait plus rien, parce que la suite ne valait pas la peine d’être vécue. Ce n’était que des fantasmes de gamin, le vague souvenir d’un gosse qui avait face à la mort le sourire aux lèvres et du défi plein les yeux avant de se réveiller dans un cercueil et de se rendre compte que son nom n’avait jamais eu grande importance. Mais Jason était bien plus pragmatique que cela. Il n’était pas le fou assoiffé de sang que Bruce pensait qu’il était.

« Tu ne comprends vraiment rien, n’est-ce pas, » souffla-t-il.

Ses doigts se refermèrent sur la crosse et il pivota en même temps qu’il dégainait. Le canon de son arme se braqua immédiatement sur Bruce, comme un œil sans pupille, un trou noir sans issue possible.

« Sur toi ? » répéta-t-il, bien plu fort cette fois-ci. « C’est ça, que tu veux ? Que je te tire dessus ?! »

Il ponctua sa dernière phrase d’un coup de feu, mais la balle ne prit jamais Bruce pour cible. Aucun masque ne fut perforé, et aucun corps ne tomba au sol. Jason avait visé, au dernier moment, un des hommes de Double Face passées à tabac par le Chevalier Noir. La balle se logea dans son abdomen avec un bruit presque humide, un bruit sans équivoque.

« Parce que ça ne te suffit plus, maintenant, de vouloir épargner les psychopathes – il faut désormais que tu meurs pour eux ?! » lança-t-il en faisant un pas vers Bruce. « Parce que tu ne peux pas gérer la culpabilité ? Quelle culpabilité ?! Il te torture ! Il te torture littéralement avec les pleurs d’un bébé qui pourrait être le tien et qu’il a laissé mourir ! »

Un nouveau pas, une nouvelle balle.

« C’est moi qui les tue ! Regarde-moi ! Regarde-moi faire ce que toi tu n’arrives pas à faire ! Tu veux te sentir coupable pour ça aussi ? Pour ce que je suis devenu, pour les limites que je peux franchir et dont toi, tu ne reviendrais jamais ?! »

Les quelques mètres qui les avaient séparés étaient désormais presque réduits à néant, mais la colère de Jason, elle, était loin d’être assouvie. Il aurait pu le frapper, il aurait pu perdre le contrôle lui aussi. Ca aurait été tellement facile, tellement simple de se laisser aller, de glisser dans la folie qui l’attendait. Les voix murmuraient dans son esprit, mais sa conscience hurlait – elle hurlait plus fort que tout. Parce qu’à cet instant, il était le garçon que Batman avait nourri sur le capot de sa Batmobile, et il avait besoin que Bruce comprenne.

« Je tuerais la moindre vermine de cette ville sans une once d’hésitation, et sans aucun regret ! Et tu sais pourquoi ? Parce qu’il le faut, parce que c’est le seul moyen réellement efficace de protéger les civils, les enfants, ceux dont le monde se fout complètement. Mais toi ? C’est toi que tu veux que je tue ?! Toi ?! »

Maintenant à quelques centimètres à peine de Bruce, il poussa ce dernier, le sang en feu dans ses veines. Sa vision était floue, altérée, mais il était trop perdu dans ses souvenirs, dans la frénésie de sa colère pour le remarquer ou s’en soucier. Bruce ne comprenait pas. Il ne voyait même pas. Il avait enlevé toute la signification de sa mort. Jason s’était étouffé sur son propre sang, il avait craché ses dents, entendu ses os se briser, sentit ses organes s’ouvrir. Il avait senti l’haleine du Joker alors que ce dernier, hilare, se penchait sur lui pour se moquer avant de le frapper, encore et encore. Plus douloureux que tout, que le pied de biche et ses articulations qui éclataient, il avait ressenti la forme de désespoir la plus pure qui soit quand il avait réalisé que Bruce n’arriverait pas à temps, qu’il serait trop tard, et qu’il allait mourir. Mais Jason faisait face, il apprenait à accepter que sa mort n’avait pas suffi à pousser Bruce hors de ses limites, mais sa vie ? Sa vie ?! Il osait effacer tout ça aussi ?!

« Pourquoi n’arrives-tu pas à COMPRENDRE ?! Tu m’as sauvé ! Tu m’as SAUVE ! Moi et des dizaines d’autres, des CENTAINES ! Mais je devrais te TUER ?! »

Il le poussa une nouvelle fois avant de rengainer son arme avec tellement de force et de violence qu’il crut que son holster ne tiendrait pas le choc. Le cuir se resserra autour de sa cuisse sans pour autant lâcher, mais le léger pincement qui s’ensuivit eut pour mérite de rappeler Jason dans les limites de son propre corps. Il n’avait pas fait d’épisodes dissociatifs depuis un moment, mais l’horloge était à remettre à zéro maintenant. Il ferma les yeux un bref instant et s’efforça de calmer le rythme rapide de son cœur et de retrouver ses marques dans son propre corps.

« Je ne pourrais jamais te tuer, » reprit-il, d’une voix bien plus posée, mais glaciale, tremblante. « Tu agis comme si ce serait facile, évident et même logique, mais tu n’as aucune idée de ce que tu as fait pour moi. Et tu n’as absolument pas le droit de penser que je le ferai, comme si je… comme si je n’étais pas moi aussi ton fils, au même titre que Grayson et Tim. Comme si je n’étais qu’un inconnu et que ma vie avec toi n’avait jamais compté. »

Il serra la mâchoire, le souffle court et le sang battant à tout rompre contre ses tympans. Peu à peu, l’écho de ses propres paroles lui revenait, crispant ses muscles l’un après l’autre. Il était reconnaissant, plus que jamais, que son casque lui permette de camoufler son regard et ses expressions, parce qu’il n’était pas prêt à voir Bruce y faire face. Et encore moins à devoir faire face à la réaction de Bruce.

« Va te faire voir, » grommela-t-il avant de se détourner vers le reste du couloir.

Il n’attendit pas, cette fois-ci, que Bruce le suive pour s’engager sur le reste du parcours que ce cher Double Face leur avait concocté. Heureusement, le chemin se fit sans embauche (heureusement pour ceux qui auraient osé se frotter à la colère toujours bien présente de Jason) jusqu’à la salle des coffres qui représentait sûrement le décor de fond pour la bataille contre le boss final. Les armes de Jason étaient chargées à bloc et il était prêt. Que les règles aillent se faire foutre, il en avait assez de jouer. Il n’était bon qu’à ça, apparemment, alors à quoi bon essayer ?

Il ne répondit rien quand Bruce lui somma de le couvrir, mais il sortit son arme malgré tout et s’engagea à sa suite. Il n’avait plus qu’une hâte : que Double Face se ramène et qu’il puisse lui coller une balle dans chacun de ses visages de tordus. Et après ça, il en aurait fini avec Gotham. Il mettrait les voiles, loin de cette ville qui jamais n’avait voulu de lui, et loin de ses habitants qui jamais ne seraient sauvés.

Et peut-être qu’il ferait d’abord un arrêt chez son pote le Joker. Ils avaient deux trois choses à se dire.


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Dim 19 Nov 2017 - 23:40

You fix a bird, you buy a cage
feat. The Bat & Red Hood

Passer à autre chose... ces mots résonnent encore dans ma tête alors que je suis accroupie sur le bord du toit de la Gotham National Bank. Je boue à l'intérieur. Je repense encore et toujours à cet instant où il m'a dit qu'il était temps que je vive, que je passe à autre chose et que je laisse tomber cette histoire de vengeance... Je l'ai cru quand il m'a dit qu'il s'était occupé de Double Face, je l'ai cru de toutes mes forces... Une part de moi me disait de me méfier, de ne pas le croire, mais je lui ai ordonné de me laisser... J'avais envie de croire ce qu'il me disait... Jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à ce soir, Double Face n'existait plus pour moi. De l'histoire ancienne... je commençais tout juste à avancer, à prendre sur moi et à penser à autre chose qu'à cette histoire de vengeance. Enfin ça, c'était jusqu'à hier... Une de mes sources, le genre de source qui a les yeux et les oreilles qui traînent partout dans la ville et qui est au courant de tout, m'annonce qu'Harvey Dent est ici en ville, à Gotham. Au départ, je ne l'ai pas cru, au départ je me suis dis qu'on se fichait de moi, qu'on avait pris quelqu'un d'autre pour Dent... Puis je me suis renseignée, j'ai posé les bonnes questions aux bonnes personnes et j'ai fini par me rendre compte qu'il m'avait menti, une nouvelle fois... J'ai voulu aller le voir, le mettre au pied du mur, lui demander des explications, mais je n'ai rien fais... sûrement par peur de devoir admettre qu'il m'a menti. Dent est bel et bien de retour ici à Gotham et j'ai l'intention de lui régler son compte une bonne fois pour toute même si pour ça, je dois trahir ma promesse de ne jamais tuer...

Je serre les dents, ma mâchoire est tellement crispée que je sens les pulsations de mon coeur résonner jusque dans mes tempes. Je suis pleine de colère ce soir et je ne veux pas lui laisser une seule chance. La lune est pleine ce soir, une belle nuit pour mourir... Je lève les yeux vers le ciel et je les ferme quelques secondes. Elle est là, avec moi je le sens... Cette nuit, je vais trahir ma promesse et c'est pour elle que je vais le faire... Les poings serrés, je reste quelques secondes silencieuse et immobile dans la nuit. Il est là, je le sais, j'ai vu ses hommes aller et venir, mais pour le moment, aucune trace de lui. Il doit être caché, comme toujours.

Je finis par me redresser avant de bondir. Je me faufile dans la banque, silencieuse et sûre de moi. Je me cache, j'espionne, je piste. Rapidement je me retrouve dans une salle. Elle est sombre et semble vide. Alors que j'entre pour aller y jeter un oeil, je sens quelque chose me taper l'arrière de la tête juste avant de m'écrouler au sol... Il vient de me trouver et il va me le faire payer...

Je ne sais pas combien de temps je reste inconsciente mais lorsque j'ouvre les yeux, je suis attachée à une chaise, dans l'incapacité de bouger. Mon corps est engourdi, j'ai du mal à bouger et lorsque je reprend peu à peu le contrôle, je me rend compte que ma tête est fermement attachée au dossier... comme pour m'obliger à regarder quelque chose... Mes yeux se baladent de gauche à droite, j'essaye de repérer quelque chose, quelqu'un qui pourrait me donner un indice sur ce qui m'attend, mais je suis seule... Devant moi, à quelques mètres je repère un drap blanc accroché au mur, comme un écran de cinéma. Les minutes passent, je demande si il y a quelqu'un, on ne me répond pas, pourtant je sais que quelqu'un est là, à m'observer. Je suis sûre qu'il est là... Alors que je m'attend à subir une torture physique, quelque chose de différent, de bien plus monstrueux se met en route. Une bande son est mise en route et très rapidement je reconnais des pleurs d'enfant... Un bébé qui pleure... C'est instantanément que je me met à penser à Helena, à ses derniers instants... Est-ce de cette façon qu'elle a pleuré ? Je ne supporte pas de les entendre... Cela aurait pu s'arrêter là mais mon geôlier en décide autrement. Devant moi, une photo apparaît, puis une autre. Il me faut quelques secondes avant de comprendre que ce sont des photos de ma fille, de mon bébé. Elle est là, devant moi, sur l'écran, si petite et tellement fragile... et moi je suis là, incapable de l'aider, de la protéger. Les photos défilent puis deviennent de plus en plus sombres et macabres. Les pleurs ne cessent pas alors que devant moi, sur l'écran, apparaît la photo d'un bébé sans vie, d'une pâleur sans équivoque... Je me débat, je pleure toutes les larmes de mon corps, je tire sur mes poings, il faut que je sorte de là.

"ARRETEZ ! CA SUFFIT !!! LAISSEZ MON BEBE TRANQUILLE ! PITIE !!! LAISSEZ LAAAAA !!!"

J'implore, j'hurle, je me débat, j'essaye de retirer les cordes qui m'emprisonnent. Je me scie les poignets mais qu'importe je ne veux plus rester ici. Je ferme les yeux, je ne veux plus voir ces photos qui passent en boucle, je crie pour couvrir les pleurs d'enfant... pleurs qui, je finis par comprendre, sont ceux de ma fille. Finalement, on semble entendre mes plaintes et implorations puisque je me prend un nouveau coup à l'arrière de la tête. Je tombe dans l'inconscience en me demandant si ce soir, je ne vais pas tarder à aller rejoindre Helena... Au moins, je serai avec elle, c'est le plus important...

***

Red Hood et Batman viennent d'entrer dans l'immeuble à leur tour. A peine ont-ils franchi le seuil qu'une bande son leur parvient jusqu'aux oreilles. Des pleurs de bébé... Les minutes passent, ils finissent par arriver dans une salle. Cette dernière est très peu éclairée mais au sol, ils peuvent apercevoir une silhouette allongée au sol, qui leur tourne le dos. En y regardant de plus près, ils peuvent voir qu'elle porte la combinaison de Catwoman. C'est donc tout naturellement que Batman s'approche de la silhouette. Plus il s'approche, plus il remarque un détail qui le glace quelques instants. Elle est enceinte et semble ne plus respirer... En s'approchant un peu plus encore, il remarque avec un certain soulagement que la femme enceinte, étendue au sol n'est pas Selina... Pourtant, cette scène lui rappelle quelque chose...

Autour d'eux, la bande son résonne encore et encore... toujours ces pleurs de bébé. Un bébé comme un autre doivent-ils penser... Sauf que voilà, au bout de quelques minutes, une voix s'ajoute aux pleurs sur la bande. Une voix que nos deux visiteurs ne vont pas tarder à reconnaître... Il s'agit de Dent, de Double Face en personne et ce qu'il dit fait froid dans le dos.

- Quelle chance d'avoir vécu sur Terre pendant 2 jours... quel nombre parfait.

Maintenant, Batman en est sûr et certain, ce sont les pleurs de sa fille qui tournent en boucle depuis son arrivée dans le bâtiment.... et plus il y pense, plus il essaye de regrouper les indices, plus il sait que Selina est ici quelque part.... Lorsqu'ils la trouveront, elle sera inconsciente.
©️ nightgaunt


Dernière édition par Selina Kyle/Catwoman le Ven 15 Déc 2017 - 22:54, édité 3 fois
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Lun 20 Nov 2017 - 21:02

Bruce n'a ni réagi, ni répliqué quand Jason a explosé.
Se figeant, d'abord, il est demeuré de dos un long moment - quasiment tout le temps du discours, plein de douleur, de désespoir, de tristesse et de solitude de Jason ; de son fils. Qu'il a blessé, il le sent maintenant... qu'il a blessé, donc.
Encore.

Le Batman s'est cependant tourné, retourné quand Red Hood lui a tiré dessus ; par réflexe. Cela a permis au jeune homme de se rapprocher, de lui hurler sa souffrance au visage et de le pousser - expression physique d'un rejet psychologique désormais évident.
Jason est touché, affreusement ; blessé. Brisé, presque.
Par quelques mots, une réflexion, Bruce est parvenu à couper encore plus les ponts - à agrandir encore le fossé qui le sépare de son fils ; tout seul, comme un grand.

Alors que le jeune homme range son arme, s'avance, son ancien mentor lève sa main gantée... sans rien dire. Sans réussir à dire quelque chose.
Il voudrait l'appeler - le rappeler. S'excuser. S'expliquer. Exprimer, clairement, sa pensée - dire à son fils qu'il ne veut pas qu'il le tue, mais qu'il l'arrête ; dire à son fils qu'il ne lui demande pas ça parce qu'il le considère moins son héritier que Dick ou Tim - mais parce qu'il sait que lui saurait faire les choix terribles que la situation exigent, à la différence des autres.
Il voudrait l'appeler, le rappeler... s'excuser. S'expliquer. S'ouvrir, enfin.
Mais il ne fait rien.

Et, alors que Jason s'enfonce dans la salle des coffres, Bruce pousse un profond soupir - et baisse les yeux.
Puis, lentement, reprend sa marche... et débouche, lui aussi, dans la pièce, pour rejoindre Red Hood et se placer en position de combat - mais cela ne dure pas.
Car, très vite, le Chevalier Noir entrevoit... quelque chose. Quelqu'un.


"Non !"

Il bondit - plus vif, plus agile, plus déterminé.
Il bondit, et atterrit littéralement aux côtés d'une silhouette allongée au sol... une silhouette en combinaison de Catwoman. Alors qu'il s'accroupit pour regarder, pour vérifier, Bruce sent son coeur s'accélérer, encore... Selina. Bien sûr.
Harvey s'est libéré. Harvey se déchaîne. Harvey veut se venger. Harvey veut... le détruire, en commençant par elle, bien sûr.


"Selina, je..."

Sa voix est affolée, presque désespérée ; mais il suspend sa phrase, en découvrant... qu'il se trompe.
Ce n'est pas Selina. Ce n'est pas la mère de son enfant mort - mais une femme, enceinte et inconsciente ; placée là pour le piéger, le hanter. Comme les pleurs, qui s'intensifient... et qui disposent, soudain, d'une origine, dès que Double-Face prend la parole via un micro.


"Non..."

Accroupi, devant le corps inconscient et immobile, le Chevalier Noir serre les poings - et ferme les yeux.
Les pleurs... ce sont ses pleurs. Ceux d'Helena. Ceux de sa fille, morte. Ceux de son enfant, qu'il n'a pas su protéger. Ceux de son bébé, que Harvey a laissé mourir.


"Harvey... Harvey. HARVEY."

Ses battements accélèrent. Sa respiration fluctue. Son esprit s'embrouille.
Des pulsions naissent - explosent. La colère. La rage. La tristesse. La douleur. La fureur, absolue.
Il veut... briser. Détruire. Anéantir. Tout annihiler, tout...


"Non."

Bruce rouvre les yeux - et fixe ses pupilles blanches sur Jason, à quelques mètres.

"Non. Il ne m'aura pas. Il ne m'aura pas."

La phrase est un mantra - un hymne. Une promesse.
Harvey ne gagnera pas ; il ne le fera pas gagner. Jamais. Jamais !


"Il..."

Lentement, Bruce relève une main tremblante, sous l'émotion, pour appuyer sur un bouton de son masque - et activer des filtres visuels. Il laisse son regard glisser autour de lui, pour voir à travers les murs... et s'arrête au bout de quelques instants, dans une direction.

"Ils sont là."

Le Batman se relève, se redresse - tremblant, encore.
En quelques pas rapides, il s'approche du mur concerné... et appuie un micro-dispositif dessus, avant de reculer d'un pas ; l'explosion est localisée, mais permet de créer un passage direct.
Et de rentrer dans cette autre pièce, alors, où les attendent...


"Selina."

Emprisonnée. Vaincue. Bloquée sur une chaise, la tête fixée vers un écran - vers des images.
D'Helena.


"Bon sang."

Sans prévenir, sans réfléchir, Bruce se précipite vers Selina pour la libérer, n'écoutant là que ses émotions et son inquiétude - avant de se figer, bloqué, en découvrant quelque chose, au creux de son champ de vision ; quelqu'un.

"Salut, Brucie."

Lentement, le Batman tourne son visage - et pose ses pupilles blanches sur la figure qui vient de s'adresser à lui.

"T'en a mis, du temps."

A quelques mètres, un homme est debout - calme, les bras croisés, le regard fixé sur la scène...
You fix a bird, you buy a cage [Batman] Maxresdefault
... avec un micro-sourire, qu'une sorte de prothèse collée à son visage épouse parfaitement.

"C'est ce qu'elle a dû se dire aussi, nan ? Que t'étais en retard... que vous étiez tous les deux en retard..."

"Harvey... si tu crois..."

"Je ne crois rien, Brucie - je sais. Tu m'as tout pris, tu m'as brisé... il est temps de payer pour ça, non ? Une dette va dans les deux sens..."

Selina et Jason découvrent comment Bruce a brisé Double-Face, finalement.
Il l'a soigné. Il lui a remis un visage - il l'a forcé à retrouver un visage, mais ce n'est pas tout ; car, alors que Harvey glousse, Catwoman et Red Hood voient que les mains d'Harvey Dent ont été... changées. Modifiées. Tatouées.
Les deux faces d'une pièce sont tatouées sur chacune de ses paumes, et sur le dos de chaque main. La dualité annulée, littéralement... annulée.

Plus de cicatrice. Plus de possibilité d'envoyer sa pièce pour déterminer, car les deux solutions seront toujours présentées dans les paumes et sur la main.
Plus de Double-Face. Plus de dualité.
Plus rien.
Du moins, c'est ce que Bruce espérait... mais ce dernier découvre, terrifié avec une fureur qui ne cesse de monter, que ce ne fut pas suffisant...
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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Lun 20 Nov 2017 - 23:20




You fix a bird, you buy a cageRed Hood & Batman
C’était comme de mettre les pieds sur un plateau de tournage : tout était calculé à la seconde près. L’éclairage, la mise en place, même la bande son était synchronisé. Jason devait bien l’admettre, Double Face semblait être revenu encore plus cinglé qu’avant, et il avait de toute évidence copié quelques conseils du même livre que Bruce avait utilisé pour créer le mode opératoire de Batman. Ce n’était pas innocent, cette mise en scène. Evidemment que ça ne l’était pas, une femme gisait morte à leurs pieds, mais c’était plus que ça. C’était un message clair et net : si Bruce avait pu le ‘briser’ comme il avait dit à Jason, c’était parce qu’il comprenait comment fonctionnait Harvey. Et Harvey, de toute évidence, n’était pas dupe quant au fonctionnement de Batman.

Jason serra les dents quand la voix d’Harvey se joignit aux pleurs qui faisaient grésiller les haut-parleurs, confirmant ainsi que la musique de fond qu’il avait choisie n’était pas anodine. Il dégaina son arme, retira la sécurité et jeta un regard en coin à Bruce. Ce dernier riva sur lui les yeux de son masque, dénués d’humanité mais que Jason comprenait parfaitement.

« Compris, » souffla-t-il, sa main toujours fermée sur la crosse de son arme.

Il glissa son index sur la détente en jetant un regard autour de lui. Il savait la pression exacte qu’il fallait pour tirer, il connaissait ses armes par cœur, jusqu’à la moindre éraflure. Alors, pendant que Bruce scannait la pièce autour d’eux, il suivait du bout du doigt la fente qui suivait la courbe de la crosse de son automatique, reste d’un couteau contré au dernier moment. Il avait la gâchette qui démangeait, et il avait beau être toujours furieux contre Bruce, il était plus malin que ça. Il savait choisir ses batailles, et s’il y avait bien une cible parfaite sur qui tirer dans cette banque, ce n’était pas Bruce. Même si ce n’était pas l’envie qui en manquait.

Jason se retourna vers ce dernier quand Bruce indiqua une direction. Il s’approcha mais le laissa gérer les détails de leur prochaine entrée dans l’antre de la bête, choisissant plutôt de se pencher près de la femme enceinte. Il jeta un dernier regard à Bruce, qui collait un de ses chers gadgets au mur, avant de se tourner vers la jeune femme et de presser deux de ses doigts contre son cou, à la recherche d’un pouls. Elle n’était pas vieille, même pas la trentaine selon lui, et, sa coiffure n’était pas sans rappeler celle de Selina ce qui n’était sans doute pas une coïncidence. Son ventre était arrondi, développé, montrant une grossesse proche de son terme – mais surtout, elle était morte.

Le pan de mur que Bruce avait pris en mal explosa dans son dos. Jason se releva sans un mot mais la main toujours fermement serrée autour de la crosse de son arme et son index prêt à presser, à appuyer, à détruire. Il enjamba la jeune femme, les mâchoires serrées, et suivit son ancien mentor vers la prochaine étape de leur petit voyage.

« Putain, » grommela-t-il en jetant un premier coup d’œil autour de lui.

Bruce s’étant précipité sur Selina, il préféra s’occuper des photos. Il fallait avoir un vrai cerveau de taré pour penser à faire ce genre de choses, pour prévoir ce genre de choses, et selon le code de Jason, c’était une sentence à mort. L’arme toujours en main, il s’avança à grands pas vers le drap blanc tiré à quatre épingles et qui servait d’écran de fortune.

« Va te faire foutre, Dent, » cracha-t-il en tirant sur le drap pour l’arracher.

Les images défilaient toujours, mais la mise au point étant perturbée et le support bien moins adapté, c’était une forme vague et floue qui s’étalait sur le mur. Un sacré coup du sort, de passer d’un bébé à un tâche vaguement colorée. Peu importe ce que Bruce avait fait de Dent, ce n’était pas assez. Ce ne serait jamais assez.

Aussi, quand Harvey sortit enfin de sa tanière, Jason ne se fit pas prier deux fois pour le prendre en joue. Il ne tira pas cependant – non pas par bonté ou hésitation, mais parce que le Double Face qui s’avançait dans la lumière n’avait plus rien de celui dont il se rappelait. Il n’y avait plus de double face, en fait, mais un seul visage, lisse à défaut d’être naturel, plus de costume bicolore, de chairs dénudées, et les mains, que Jason était tant habitué à voir jouer avec la même pièce depuis des années, se tordaient sur le vide, les tatouages plus vrais que nature ressortant terriblement contre la pâleur de la peau de Dent.

Brisé, avait dit Bruce. La vérité était légèrement différente, légèrement décalée. Harvey Dent n’était pas brisé, il était mutilé. Bruce avait fait un monstre de l’assassin de sa fille, et le monstre revenait hanter ses proies.

« Merde, B, » souffla Jason. Une part de lui était en colère de voir ce que les stupides règles de Bruce lui avaient laissé faire sans pour autant l’autoriser à faire la seule chose qui comptait, mais l’autre part, celle qui changeait de voix, parfois, se réjouissait de voir une telle preuve de cruauté de la part de son ancien mentor.

Alors il pouffa, légèrement, presque hystériquement, en continuant à braquer son arme sur Double Face.

« Je ne vois pas de quoi tu te plains, Dent, » dit-il, le ton narquois, franchement odieux. « Tu es vachement mieux comme ça. »

Il tourna légèrement la tête vers Bruce.

« Tu n’as qu’un mot à dire, et je tire. Je m’occupe de lui. »

Son regard, bien que caché par son casque, se posa sur Selina. Le visage de cette dernière portait encore les traces des horreurs que ce salaud lui avait fait voir et subir. Un seul mot, c’était tout ce dont il avait besoin.

Et il exercerait la pression parfaite.


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Re: You fix a bird, you buy a cage [Batman] Mer 29 Nov 2017 - 12:38

Bruce a libéré Selina ; il la tient, maintenant.
Arrachée de la chaise, arrachée des liens, elle repose désormais dans ses bras – et il l’a détourné des images, des photographies. Dos à ces horreurs, dos à ces abominations qui sont autant de poignards plantés dans son cœur, dans son âme, il conserve la jeune femme contre lui, contre son torse.
Il la tient… comme il tiendrait une œuvre d’art, un trésor, une beauté unique et magnifique ; c’est le cas.

La relation qui unie Selina et Bruce sera toujours compliquée. Leurs liens seront toujours troubles, complexes, douloureux ; et la terrible épreuve que Harvey Dent leur a fait subir n’a fait que renforcer cette souffrance, ce sentiment double, mi-attirance, mi-répulsion qu’ils éprouvent l’un pour l’autre.
Cependant, même s’ils en souffrent… ils ne peuvent s’empêcher de compter l’un pour l’autre. De tenir l’un à l’autre. De s’aimer.
Et de haïr quiconque fait du mal à l’autre.


« Tout doux, rossignol rouge. Tout doux. Baisse cette arme, et fais un pas de deux – il s’agirait de ne pas passer la deuxième trop vite. »

La voix de Harvey Dent s’élève dans le silence tendu et brutal qui s’est imposé dès la fin de la tirade de Jason.
Lentement, le Batman relève son regard, et le plante sur Harvey ; il demeure accroupis, il tient Selina dans ses bras, et calme sa respiration. Il essaye, au moins.
Il sait que son masque dispose de pupilles blanches qui cachent ses yeux – et c’est une bonne chose ; car il est fort probable que leur ennemi aurait déjà fui, rien qu’en voyant l’expression qui glisse dans ses orbites. Et Bruce n’a aucune envie qu’il s’enfuie…


« Tu ne crois quand même pas que je vous ai fait venir pour rien ? Pour deux fois rien ? Ha. Hé. Ha. Hé. »

L’ancien procureur est figé – stoïque.
Immobile, comme une statue. C’est anormal, Bruce le sent, le sait ; c’est anormal, car le Harvey qu’il a connu, le Double-Face qu’il a affronté seraient déjà en train de bouger… de parader. D’avancer.
Mais il ne fait rien ; il ne fait plus rien.
Il y a un problème – un autre problème, chez lui.


« Vous… tu… vous devez, oui. Payer. Tous les deux.
Elle. Toi. Vous. Payer. Et plutôt deux fois qu’une ! Vous devez payer. Tu dois payer. Tu… me l’as prise. La pièce. Les faces. Tu me les as prises.
Tu… n’avais pas le droit. Ni le gauche. Rien ! Tu n’avais pas le droit ! Ni le gauche ! »


Le discours est incohérent – fou. Encore plus que d’habitude.
Bruce comprend, alors.
Harvey est brisé… il l’a brisé. Plus rien ne fonctionne, chez lui. Son logiciel est détruit, mais il n’est pas mort – et il compte se venger, sans savoir comment.
Ce qui le rend imprévisible… et dangereux.


[b] « Harvey… à genoux. Tout de suite. »

Sa voix est terrible, brutale ; absolue. Il se relève, lentement, et tient toujours Selina dans ses bras – mais même ainsi, il demeure puissant, menaçant.
Quel dommage que Harvey Dent soit si enfoncé dans la démence qu’il ne puisse avoir conscience de la menace qui pèse sur lui.


« Non ! N ! O ! N !
Je refuse ! Je ne serai pas à genoux ! Toi ! Elle ! Vous ! Le rossignol ! Mais vous êtes trois ! Trois n’est pas deux ! Trois est trop ! Trois est trop… »


L’ancien procureur s’écroule, soudain, et tombe directement au sol.
Placé soudain en position fœtus, il se gratte le visage et la prothèse, comme s’il voulait se les arracher – comme s’il voulait s’enlever la peau.
Cependant, les attentions des Héros se détournent rapidement de lui – pour se fixer sur une forme, un engin jusque-là caché par Harvey.

Un engin collé au mur, rond… mécanique. Avec plusieurs lumières. Avec un minuteur.
Une bombe.
Il y a une bombe, juste devant eux ! Et elle est prévue pour exploser dans quatre minutes et quarante-trois secondes !


(HJ/ En accord avec Selina, j’ai posté maintenant. Je propose que Jason enchaîne, puis Selina. Smile /HJ)
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You fix a bird, you buy a cage [Batman]
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