And the world's gonna know your name

« Non, non où il est passé, où il passé ? Titus je te jure que si tu l’as emmené dans ta niche je t’envoie au chenil ! »

L’aboiement lourd et grave du Danois répond au regard sombre d’un jeune garçon. Damian Wayne est à cette heure quasiment seul dans le grand Manoir familial. L’adolescent est rentré depuis quelques heures, il a eu le temps de faire ses devoirs, et de s’assurer également que son père, comme son majordome étaient occupés. Ce soir, il s’en est fait la promesse, sera différent des autres. Ce soir, l’image du Batman prendra une nouvelle ampleur, il se l’est juré.

Mais ses plans ont changé, mais un grain de sable, le fameux, vient de se glisser dans ce rouage qu’il croyait parfait. Dans cette chambre où personne n’entre, dans cet ordre parfait qui est le sien, le grain de sable s’est faufilé et a enrayé la machine.
Au milieu de ses trophées, dans cette chambre qui n’a rien de celle d’un enfant, trône une armoire, une armoire qui ressemble à toutes les autres, mais qui n’est pas comme toutes les autres. Pour preuve ce qui ressemble à un double fond, qui est ouvert et dont le code a été activé. Ce même “coffre” vient de mettre un adolescent au bord d’un désespoir étrange et d’une incompréhension totale. Alors oui dans ce chaos incompris, Damian Wayne cherche des réponses, aussi insensées soient elles, car la seule raisonnable est pour l’heure inacceptable. Il faut alors les éliminer une par une, à commencer par celle qui paraîtrait aux yeux de n’importe qui : la plus folle.

« Titus gare à toi ! »

De nouveau le chien aboie, de nouveau Damian ne répond que par un froncement de sourcil avant de s'asseoir à même le sol “vaincu” par deux aboiements et le regard d’un animal auquel il est profondément attaché. Qui déjà vient s’asseoir derrière lui et lui sert d’appui.

« Je sais que ça ne peut pas être toi… Et non je ne te mettrais pas au chenil, tu le sais pas vrai ?»

L’adolescent prend l’énorme cou de l’animal entre ses bras, mais déjà une nouvelle option émerge dans son esprit, la plus raisonnable avant l’ultime catastrophe… Non le seul coupable envisageable. Il doit vérifier, il doit en être sûr avant de faire face à l’inévitable réalité. Alors une nouvelle fois il se relève, ses gestes sont rapides et précis, son coffre est refermé, tout est remis, une nouvelle fois au secret. Un secret qui a été éventré. Alors Damian court dans les couloirs du manoir, se précipite vers une chambre, réservée elle aussi, peu habitée ces derniers temps. Il fouille, cherche, avant d’entendre une voix bien connue

« Vous cherchez quelque chose Maître Damian ? »
« Ah Pennyworth vous tombez ! Vous avez été dans ma chambre aujourd’hui ? »
« Non, pourquoi ? »
« Pour rien, pour rien… »

Alors l’inenvisageable devient l’inévitable, et soudainement Damian perd toute assurance, soudainement son regard fixe sans but le torse d’Alfred Pennyworth.

« Où se trouve Père ?»
« Dans la Cave Maître Damian. »
« Titus attends moi là, je reviens.»

Les pas de Damian n’ont alors qu’une seule destination, sans la moindre hésitation. Et c’est avec rapidité qu’il rejoint ce lieu unique, connu uniquement de ceux qui furent baptisé “la Bat-Family”. Ses pas sont rapides, mais l’assurance n’y est plus, l’hésitation face à cette réalité se fait ressentir. Damian a changé, il n’est plus aussi sûr qu’il le laisse paraître. Ce Père devenu soudainement si humain n’en est que plus impressionnant. Il était sûr de lui, sûr de son choix, de ce choix. Mais à cette seconde il sait qu’il va devoir le défendre, se défendre et convaincre. Parce que la catastrophe annoncée est là, à quelques mètres, alors que Bruce Wayne est seul dans la Bat-cave. Alors Damian inspire un grand coup. Il veut rester le même, il veut être ce Damian là, fort et impétueux. Il veut être ce Maître Assassin que sa mère avait fait de lui pour cacher le trouble, pour cacher ce qui l'envahit, ce qui lentement lui serre la gorge depuis ce jour, depuis cet événement là. Alors quand il se sait assez proche, quand il se sait à quelques mètre à peine de son père, c’est d’une voix sans le moindre trémolo apparent qu’il ne peut que lâcher

« Père ! Tu es entré et tu as fouillé dans ma chambre… »

Ca ne peut être que cela, cela ne peut être que lui. Et le cataclysme annoncé aura bien lieu.

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And you'll be on the walls of the hall of fame

Pando

Ô cette voix il la connaît, il sait. L’affrontement est là, tout proche, inévitable et imminent. Il va devoir l’affronter, le confronter. Comme souvent entre eux, comme seul moyen de communication entre eux : la distance et la défiance. Même si il y a du mieux, même si l’un et l’autre font des efforts. Ce n’est pas encore “ça”.

« Un séjour nostalgique ? Pennyworth et toi avaient dit quand je suis arrivé que c’était MA chambre ! Il n’a jamais été question de séjour nostalgique ! »

Sa voix est semblable à celle de son père, grondante, dure aussi mais l’émotion s’y contient plus difficilement. Surtout depuis… Mais très vites ses pensées se font happer, aspirer même par le seul geste de son père. Cette main qui disparaît, se referme sur un objet, un objet qu’il lui envoie, que Damian réceptionne avant même qu’il ne l’ai vu. Parce qu’il sait. Il n’y a pas de doute. Le pire des scénarios se joue là à cet instant. Les yeux de Damian restent figés sur la silhouette de Bruce, qu’il connaît et reconnaît même si elle a changé. Même si lui a changé.

Les mains de Damian se ferment sur le symbole. Avec force, ses phalanges deviennent blanches. Et la voix de son père ne fait que intensifier ce geste. Les mots, il doit s’expliquer, il doit expliquer ce symbole dans sa chambre, sur sa tenue. Lui qui n’est “que” Robin. Il doit se confronter à ce regard qui ne fait que le mettre un peu plus en colère. La colère seule chose qui semble à cet instant les rapprocher.

« C’est à moi. »

Il sait que ça ne suffit pas, qu’il faut plus, qu’il faudra bien plus si il veut que cela “fonctionne” avec son père. Même si il sait - déjà - quelle réaction sera celle de son Père, celle de Batman. Le seul à ses yeux.

« Je prends la relève en attendant que tu ailles mieux. Père. »

C’est sans appel, si il sait pour Tim et Jason ? Oui il le sait, il a entendu la conversation, à l’angle d’un mur, dans cette cachette qui lui appartient. Il sait la lutte que cela fut pour l’un comme pour l’autre de faire comprendre à Bruce, mais aussi d’accepter de porter le masque. Mais Damian lui sait…

« Je suis ton fils de sang, c’est mon rôle de prendre la relève quand… Quand tu dois attendre d’aller mieux. Ensuite, je reprendrai ma place de Robin à tes côtés. En attendant je m’occupe de Gotham. »

Non il ne sourcille pas, non il ne doute pas, car il ne peut en être autrement, car il est le fils du Batman, le fils de Bruce Wayne. Et si il est le meilleur des Robin, pourquoi ne serait il pas le meilleur des Batman après son père ?

« je savais que tu refuserais de m’aider, tout comme Pennyworth refusera d’ailleurs, alors j’ai fait bon usage des leçons que j’ai reçu. Et je dois expérimenter mon costume pendant ma patrouille ce soir. »

Non il ne plaisante et toute cette assurance se lit clairement dans ses yeux. Il sortira ce soir, il protégera Gotham et le nom de Batman retentira ce soir une fois encore. Sa petite taille ? L’ombre agrandit toujours les silhouettes, et sa technique de combat donnera facilement le change. Du moins c’est ce que Damian pense. Et si il le pense cela ne peut pas se passer différemment.

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Pando

Les mots tombent, sans appels, dans un choc violent à l’échelle de Damian, même si Bruce l’a fait en douceur, même si il a compris que Damian ne réalisait pas l’ampleur des maux de son père. Il s’était voilé la face pour s’éviter cette douleur, niant un constat que d’autres avaient pris à bras le corps. Damian niait que son père ne pouvait plus être le Batman parce qu’il se disait que personne d’autre que lui ne tolèrerait en Robin. Et pourtant à cet instant alors que son père commence à poser des mots tout lui saute aux yeux. Et chaque étape peut se lire sur son visage :

De l’incompréhension d’abord, pourquoi avait il modulé sa voix ainsi ? Pourquoi laisser la douceur prendre le pas sur l’autorité ?
Puis le silence face à cette phrase “je ne reviendrai pas„. Damian du haut de ses treize ans fronce les sourcils, il ne comprend pas. Ne veut pas entendre ni comprendre, cette phrase n’a pas de sens. Et puis il y a la suite. L’aveu d’échec, la douleur sur son visage dans ses gestes, la tristesse aussi. Chaque fois les poings de Damian se serrent, chaque mot le plante dans un coup de poignard. Chaque fois le symbole du Batman entre ses doigts marque son empreinte sur sa peau d’enfant.

Il voit la tristesse de son père, entend ce qu’il dit à propos de son manque d’expérience et cette comparaison impossible entre Tim, Jason et lui.

Et soudainement elle lui explose en plein visage. La douleur non pas psychologique mais physique. Celle qui interdit au corps de continuer, qui prouve que Bruce Wayne ne sera plus Batman. Celle que Damian avait si violemment voilé pour mieux la nier. Celle qui, d’abord, pétrifie Damian. “ Tu seras Batman un jour„ la phrase qui le fait sortir de sa torpeur. Qui lui fait sortir un simple son d’abord un…

« Non... »

Et toujours ces doigts qui, inlassablement se referment. Quitte à saigner, abimé par le métal. Mais pourtant son regard ne parvient pas à se détacher de son père, ne parvient pas à se poser ailleurs que sur lui, sur cette souffrance. Ailleurs que sur cet homme qui soudainement devient plus réel plus accessible, un père au delà du Batman et de ce fantasme qui l’accompagnait depuis si longtemps.

Il y a ses mots, ce regard, cette main qui se pose sur lui. Et finalement Damian comprend. Il sait que son père a raison, mais la peur accumulée, la colère engrangée sont trop difficile à contenir, lui qui n’a jamais été autorisé à craquer lui qui n’a qu’une réponse à l’échec : se battre encore un peu plus. Parce que si l’on est blessé c’est qu’on a laissé à l’autre l’occasion de nous battre. Il ne sait pas quoi faire d’autre que nier d’abord

« Non ça va aller… Tu vas te remettre… Père tu vas…

Le chaos s’en mêle alors. Dans un deuil on parle de phases, clairement Damian met les pieds dans la seule qu’il ne connaît pas, qu’il n’a jamais apprise… il tente de négocier, de marchander comme si cela pouvait modifier l’état de son père

« Je… je ferai des efforts avec Tim et avec Jason. Tu te reposeras plus longtemps et ça ira… Père… Ça va passer… ça va s’arranger

Il y a à cet instant un tel désespoir dans sa voix qu’il semble avoir accumulé toute la souffrance de son père sans plus parvenir à la supporter… Ce père qui lui demande du temps, un temps de l’enfance et l’adolescence que Damian ne connaît pas plus que ce qui le traverse. Alors cette souffrance pour la première fois s’exprime par ce qu’il ne peut maîtriser : des larmes. Comme une réponse à ce sourire triste. Des larmes qu’il n’a jamais voulu ou pu verser. Preuve d’une impuissance totale, d’une incompréhension légitime.

« Père… »

Et finalement ce symbole tacheté de rouge qu’il laisse tomber au sol, dans un bruit sourd. Ce pas qu’il avait fait en arrière s’annule et au contraire il avance vers lui se permettant finalement de baisser la tête dans un

« Papa... »

Qui trahi tout le reste. De la peur éprouvée pour lui à l’incertitude de son avenir. Après tout ses “frères ne l’aiment pas„ alors qui maintenant voudra de lui ?

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Pando

Ce n’est qu’un enfant. Le dire ainsi pourrait être une injure pour celui qui se tient là debout. Pour cet adolescent qui vient - enfin - de comprendre. Mais c’est à cet instant tout ce qu’il est. Un enfant confronté à la douleur de son père qu’il admire tant. Ce n’était et ce n’est pas seulement “Batman„ c’est aussi son modèle, celui qu’il veut imiter et rendre fier. Son idole plus qu’un “simple„ dieu. Un homme qui souffre, qui a mal, et pour qui il ne peut rien faire, pas même lutter à sa place contre cette souffrance.

Ça va aller ? Mais comment cela le peut il aller ? Comment peut il s’en sortir alors que la seule personne qui a confiance en lui ne peut plus se battre à ses côtés. Il voudrait être plus fort, meilleur, plus brave pour ne pas s’écrouler devant son père pour ne pas qu’il ait à endurer cette position plus longtemps. Mais il n’y parvient pas. Il ne peut retenir ses larmes, à cet instant où son père le serre entre ses bras, alors que pendant un instant il reste ses bras le long de son corps. Il ferme les yeux, retient difficilement ses larmes et finalement cède. Il cède à la vérité, à ce qu’il éprouve à cet instant.

Alors sans explications, alors que son corps se secoue sous ses sanglots retenus, il finit par passer ses bras autour de la nuque de son père. Il parvient même à souffler un

« Père… Ils ne vou… Ils ne voudront pas… de moi »

Alors que ses bras se serrent sur un peu plus, ses mains se referment un peu plus elles aussi

« Il n’y avait que toi...»

Voilà en un instant la seule chose qui le maintenait dans un semblant de normalité s’était écroulée, sans laisser la moindre option pour cet adolescent qui n’avait laissé aucune place aux autres. Ces “frères„ choisis il les avaient maintenus à l’écart parce qu’il n’y avait qu’une personne pour lui… Son père, ce père aujourd’hui fragilisé, aujourd’hui blessé et qui pourtant faisait tout pour le soulager. À cette seconde, pour la première fois de sa vie, Damian a peur… réellement peur. De cet avenir incertain, de cette solitude qui le creusait un peu plus. Qui l’éloignait un plus de tout le reste. Il n’y avait que lui, que son père pour l’aimer au-delà son caractère, au delà de son éducation passée.

« Il n’y a que toi... »

Ce qui aurait dû être une catastrophe n’a pas eu lieu. Il n’y a qu’un père inquiet pour son fils, qu’un fils qui se découvre enfant, et au final une famille qui se crée sous le regard bienveillant d’un homme présent depuis toujours…

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Pando