L'éveil des champions (John)

Le seul moment bien pire que celui où l'on doit assumer une erreur, c'est le lendemain.
L'instant crucial où elle est faite peut être une torture, mais l'humain est masochiste.
La période durant laquelle on fait sa connerie, n'est pas forcément la pire.
L'homme est très doué pour fourrer sa tête dans le sable.
Entre autres. Evidemment.

Oliver a donné rendez-vous à John Constantine, l'occultiste de renommée mondiale et allié de la JLA - occasionnel partenaire de Zatanna, grand cherchant devant l’Éternel et scélérat face aux plus terribles des démons.
Green Arrow a besoin d'apporter son aide. C'est viscéral, aujourd'hui plus que jamais.
Le fascisme rampant ayant porté son Ultimatum aux regards du monde, nul inaction n'est innocente.
Plus encore depuis qu'il a aidé la JLA - ce qui l'aura aidé lui, à se retrouver, aussi - l'archer indompté ressent l'appel et la souffrance de l'homme de la rue, coincé entre la misère et les dommages collatéraux.
Le justicier au grand cœur a engagé le contact avec l'embrouilleur mystique en col bleu.
Pour avancer.
Pour espérer marcher sur ceux qui prétendent à marcher sur l'Europe.
Pour qu'aucune bonne volonté ne demeure une île isolée. Afin de reconquérir ensemble la Justice, la Vérité et... le Monde Libre.

Ollie a fait appel au fils chéri et haï des déesses de la magie.
Le charmeur britannique a répondu à l'appel, contre compensation. Peut-être eut-il accepté de toute manière.
Faire confiance, c'est aussi valoriser. Oliver valorise, donc. Il récompense celui qui aurait une sacrée fichue veste à retourner. Du moins a-t-il prévu de le faire. Green Arrow se fend de sacrifier une bête, par l'offrande de la Bête-Sans-Nom, le Monstre de Stanley Dover, il paiera son dû. Oui. Quitte à fâcher un démon. Probablement parce qu'il ne comprend pas ce que cela implique. Très certainement parce qu'il déteste cette engeance de toutes façons, pour ce qu'ils ont fait à sa ville.

Mais là, ce n'est pas ou plus l'heure de la négociation.
Est venu le moment du jour d'après. Après des pratiques et libations qui n'eurent rien de sacrificiel, du moins pour Oliver.
Si ce n'est qu'il a sacrifié.
Sa sobriété, et d'autant plus, son amour-propre, en l'espèce.
Pour rien.
Sans raison, sans enjeu.
Du moins, ce n'est pas tellement qu'il s'en souvienne. La nuit est un immense trou noir.
Ce qui n'excuse rien.
Ce qui n'empêche pas de comprendre aisément où il se trouve, avec qui... et pour quoi faire.

Ollie quitte le lit, le cœur en peau de banane.
Le corps mis à l'épreuve par les folies que lui suggère ses membres endoloris.
Il s'eclipse avec autant de discrétion que possible de la silhouette emmitouflée dans la couette.
Il traverse l'appartement inconnu, sur la pointe des orteils, une tension marquée entre les épaules.
Sauf que la silhouette féminine qui ronfle sur le plan de travail... est sur le plan de travail. Et non le lit.
Il se retourne vivement, pour voir dépasser une touffe de cheveux blonds comme les blés.

Il se souvient qu'il a pris contact avec John Constantine.
Il reconnaît surtout Cupid, alias Carrie Cutter, assoupie dans un appartement, probablement le sien.
Un regard dans les environs le confirme, avec toutes les photographies obsessionnelles de l'archer vert.

Il se touche le visage.
Oliver est à peine rassurée de constater qu'il a dû conserver son masque domino tout du long.

Il a fauté.
C'est fait.
Une flèche ne revient pas en arrière, s'il fallait imager davantage une telle situation.
Oliver sirote un café froid à même le pot, avant de s'affairer, cherchant à rétablir un semblant de normalité.
Comme s'il assumait, au fond.
Green Arrow n'assume rien. Il regrette toujours. Mais lorsqu'il tire, c'est fait. Alors, le coq chante, pour cacher qu'il n'est pas fier d'avoir mis les pieds dans le bousin.
Il nettoie et relance la machine à café.
Il fouille les placards et tiroirs afin de préparer le seul plat que Dieu lui a donné de maîtriser...

"Debout, les belles du jour ! Ce matin, c'est Egg McChili. Extra-chaud, mais je ne crois pas que ça en ait dérangé jusqu'au bout de la nuit..."

Autant arracher la flèche de sa cible avec douceur et personnalité.
Et quitte à se sentir comme un tas de fumier, autant ne pas finir par essayer de s'étriper... Trop vite.
Vu le calibre de la cliente avachie, ça finira par revenir.
Qu'importe, ils se sont donné quelque chose d'intime, autant se l'avouer avant de passer subrepticement à autre chose... un peu plus tard...