[SSE][Essentiellement Venise] TIme for Glory

L'hiver 2016 glaçait les rues de Metropolis de ses vents mordants, balançant des décorations frigorifiées qui projetaient d'aveuglantes lumières sur les rues et les avenues. Malgré cela, les trottoirs étaient animés. S'y amoncelaient des parents béats et des enfants émerveillés qui écrasaient leurs minois souriants contre des vitrines hypnotiques. Leurs cœurs tous entiers dans l'illusion d'un monde meilleur et à portée de porte-monnaie oubliaient les problèmes qui en temps normal pouvait leur paraitre lourds et complexes. La présence de l'Armée du Salut ou de Pères Noël en quête d'argent pour une cause perdue ne brisait pas leur illusion, ici l’État s'effaçait au profit d'une charité plus rentable.

Peuple décadent, songeait une silhouette aux allures d'homme dans cette masse qui le répugnait.

D'imposants nuages cotonneux s'amoncelaient dans son ciel nocturne, donnant l'impression que la neige allait ajouter aux images bucoliques sorties d'un magazine des années 60. Le mois de décembre serait rude, offrant aux cheveux roux que le vent balayait la satisfaction de penser à tous les vagabonds qui disparaitraient.

C'est ainsi que Degaton jugeait le monde qui l'entourait. De son regard de plus en plus dur et rigide, pris dans le piège infernal du fanatisme, il voyait les dysfonctionnements, exécrait les enfants aux vêtements chatoyants qui riaient et plaisantaient avec des parents à qui ils devaient plutôt respect et obéissance. La Terre tournait, le Temps s'écoulait, mais les doctrines et les inflexibles pensées du tyran refusaient de suivre le mouvement, figé dans la mouvance, inamovible dans la tempête de l'Histoire.

Ce monde, et tous les autres devaient être repris en main. D'une main ferme, SA main.

Remontant l'avenue, enveloppé dans son long manteau noir sans brassard, ses yeux scrutaient, pesaient, condamnaient. Il s'avançait ainsi d'un pas ferme vers l'immense et impressionnant musée de technologie de Métropolis où se tenait un gala des plus attendus de l'année : celui de l'Université qui pour l'occasion privatisait les lieux.

Vaste édifice néo-classique aux proportions mythiques, le musée projetait une impression de petitesse à quiconque s'en approchait, un comble lorsque l'on observait les immeubles qui l'entouraient. Une vaste place à l'avant et des avenues très aérées autour avaient été aménagées pour provoquer cette impression de gigantisme que le vaste et imposant escalier menant à un portique ne faisait que renforcer. Les colonnes ioniques, taillées dans la pierre blanche, s'élevaient telles des colosses pour soutenir un fronton sculpté représentant les grands moments historiques de la ville tandis que deux imposantes ailes s'étendaient de part et d'autre de cette entrée titanesque, alignant colonnades et renfoncements lumineux dans une perspective audacieuse.

D'immenses projecteurs mettaient en valeur l'architecture des lieux, offrant des reliefs nocturnes agréables à l’œil... enfin, à certains yeux. D'autres, encadrés de broussailleux sourcils roux étaient écœurés de l'architecture hypocrite dont ce peuple sans Histoire s'était entiché.

Une multitude de barrières métalliques et des escouades de police s'étaient déployées pour filtrer l'entrée au bâtiment où une précieuse invitation était nécessaire pour espérer atteindre les tapis carmins qui recouvraient le marbre des marches. Ici s'étalait l'opulence d'une société qui tremblait sur ses fondations.

Le défilé de voitures qui s'arrêtaient devant les marches appelait à lui des tonnerres de flash photographiques et l'attention de médias en roue libre. Triste vision d'une société en plein naufrage...

Nez révulsé, Degaton s'avança vers une entrée plus discrète où attendaient trois policiers qui visiblement s'ennuyaient fermement, loin de la fureur de la foule. Tous les invités n'étaient pas de prestigieux playboy ou des vedettes fortunées. Les professeurs, doctorants, conférenciers habituels ou même le personnel du musée qui avait été gracieusement invité ne rentraient pas par la grande porte, les honneurs du portique étaient réservés.

Il s'avança et les trois uniformes lui jetèrent un regard plutôt vide, jusqu'à ce qu'ils le reconnaissent et se mirent au garde-à-vous. Ses précieux "Enfants" aimaient se lover dans les forces de l'ordre où leur amour du cadre et des armes à feu faisaient merveille. Ils enlevèrent le cordon de sécurité et firent entrer leur maître à tous, heureux d'avoir été au poste pour l'accueillir.

L'homme entra alors dans les lieux où s'agitaient la masse habituelle des début de gala. Divers groupes bruyants s'étaient formés au milieu des vitrines du grand Hall tandis que des valets venaient récupérer les affaires des nantis de ce monde. Manteau toujours fermé sur son uniforme austère, Per vogua entre les robes à perles et les smokings à la recherche d'une porte. Personne ne fit réellement attention à lui, trop occupé collectivement à jacasser et jouer les dilettantes.

Curieux comme il pouvait être facile de pénétrer des lieux aussi bondés et techniquement sécurisés puis de pouvoir s'y déplacer à son aise. Les quelques membres de la sécurité lui jetèrent des regards mais le voyant entrer dans une salle prévue pour le bal, ils conclurent que l'individu était un technicien, aucun invité n'irait se promener avec une telle tenue.

Degaton monta ensuite à l'étage où s'activaient plusieurs ingénieurs sons et lumière pour préparer les lieux. Eux non plus n'y firent pas attention, sans doute un membre de l'administration du musée ou un régisseur quelconque. L'homme savait où il allait sans regarder autour de lui, un habitué assurément.

Pénétrant dans un bureau vide qu'il ferma derrière lui, le voyageur regarda sa montre et se posa dans un siège. Plongé dans le noir, il réfléchissait à ce qui allait suivre, au plan qui devait lui permettre, à lui et Vandal d'avoir accès au multivers. La porte vers une domination plus grande encore...


Les rues de Gotham étaient moins impressionnantes que ses perceptives gothiques. Au ras du sol, à la façon des rats, la population laborieuse et pauvre grouillait dans les ordures. Les murs n'étaient pas sculptés comme dans les beaux quartiers mais recouverts d'affiches, certaines à l'image du tyran qui marchait en manteau noir parmi elles, d'autres pour Anarky, certaines vantaient des produits de luxes inaccessibles ici ou quelques stand-up minables d'artistes ratés.

Les portes ouvertes sur la rue donnaient sur des hall d'immeubles délabrés où s'entassaient drogués et dealer dans l'impunité qu'offre cette zone de non-droit ou sur quelques travailleuses du sexe qui fumaient au sec.

Les voleurs à la tire et les surineurs guettaient leurs proies, avachis contre des poteaux, faisant semblant de discuter, la bouche occupée, mais les yeux alertes. Lorsque Degaton fendait la noire crasse de ses lieux, suivi de deux de ses hommes en brassard, il n'était guère embêté, les quelques petites frappes baissaient les yeux et les plus courageux changeaient de trottoir.

Quelques prostituées dans le besoin tentèrent leur chance, mais firent retraite en voyant le "D" frappé sur la poitrine du manteau. Ici, on aimait pas les nazis, encore moins ceux qui s'organisaient et venaient faire leur propagande en arrachant parfois des enfants à leur famille moyennant finance, mais ils avaient quelque chose dont tout le monde a besoin dans ce quartier : de l'argent.

En temps de besoin, l'on chuchotait de temps à autre le nom de "Degaton". Ses « Enfants » avaient parfois besoin de simples service, comme du pressing ou de la couture d'uniforme pour une cellule locale à pourvoir rapidement et ils piochaient dans les familles dans le besoin pour les aider, paie à la clef. Le voyageur avait naturellement les moyens de faire appel à plus prestigieux et plus efficace, mais cette petite économie aidait les cellules à s'infiltrer dans les habitudes et à se construire une image positive, même lointaine. Les gens dans le besoin se moquaient bien de l'état du monde et des potentiels massacres que leur chef perpétrait, des familles entières mangeaient à leur faim parce qu'il leur payait des ouvrages. C'était de la propagande basique et très locale, mais qui s'avérait précieuse.

Un gant rouge se posa sur une rambarde qui menait à un immeuble aussi mal en point que le reste du quartier. Les bottes cirées du criminel résonnèrent dans le hall jusqu'à ce qu'elle s'arrêtent devant la porte où était peint un piteux "4". Deux coups. La porte s'entrouvrit et une femme d'une vingtaine d'années beaucoup trop maquillée pour son âge ouvrit. Elle parut tétanisée par la vue du visage sévère qui se tenait sur le seuil. Elle déglutit en voyant son manteau.

Il passa sans un mot, bousculant l'hôtesse, laissant ses hommes dehors. A l'intérieur, une femme, visiblement plus expérimentée et plus sûre d'elle attendait, elle ne se montrait pas particulièrement à l'aise, mais au moins soutenait-elle le regard du visiteur.

- Où est-elle ? demanda le nazi en regardant autour de lui.

- Elle va v'nir, déclara sèchement la prostituée. Mettez vous plutôt à l'aise, nous on y va.

Il lui attrappa le bras alors qu'elle faisait mine de partir.

- Je vous souhaite d'avoir bien transmis mon message, la menaça-t-il. Mon temps est plus précieux que le vôtre.

- Je lui a donné... répondit-elle sans cacher le mépris qu'elle avait pour son interlocuteur.

Elles sortirent alors toutes deux.

Degaton ouvrit son manteau, révélant son uniforme et resta debout, observant les alentours. Appartement miteux aux lattes fatiguées et au mobilier rafistolé. Planque de passe, lieu de détente ? Des seringues traînaient ça et là. Décidément, cette ville ne méritait rien de moins qu'un peu de Discipline.

Son bracelet vibra et afficha le chiffre "84".

Un sourire s'étira. Ne restait plus qu'à être contacté par la cambrioleuse à qui il avait fait parvenir sous pli scellé le message suivant :

" Catwoman,
Vous êtes par la présente conviée à mettre en pratique vos talents sur des coffre-forts sécurisés et aider à exfiltrer une personnalité d'une situation qui ne lui convient plus.

L'opération en question se déroulerait durant le carnaval de Venise de 2017. Tenue fournie au besoin.

Votre contact m'a indiqué une "planque" où je pourrais vous rencontrer pour parler des éventuels détails de ce contrat. Je m'y trouverais à la date indiquée sur le carton au dos de ce message.

Votre prix sera le mien.

DEGATON
"


Dans son bureau, plongé dans le noir, Degaton put entendre les techniciens s'agiter, écouter avec soin les ordres du régisseur et sentir le sol vibrer de leurs nombreux pas. Le bal commençait après un buffet garni et des litres de champagne ingurgités. Il se leva avec soin et enleva son manteau pour révéler son uniforme. Puis il tira ses gants de sa ceinture et les enfila. Lorsqu'il sortit de la pièce, il n'y avait plus personne, les ingénieurs étaient à leurs consoles et les techniciens étaient retournés à la salle.

Dans l'immense salon de danse, l'enfilade de lustres projetait une chaude lumière sur les virevoltants cavaliers et cavalières alors que l'orchestre jouait une valse viennoise. Les chaussures glissaient et frottaient le sol briqué sous le regard des invités qui ne pratiquaient pas. Les conversations se mélangeaient aux harmoniques de violons tandis que le maître d'orchestre balançait furieusement ses bras pour donner de l'énergie à ses musiciens. Les verres allaient et venaient de plateaux en mains et de mains en plateaux tandis que les serveurs slalomaient discrètement entre les convives tous absorbés à leur soirée. L'on riait, l'on applaudissait, on commentait.

Degaton observa sa montre. A 21h00 exactement, un flash bleuté marqua le début du silence. L'immense bâtiment parut d'un seul coup figé. Les montres, les mains, les pieds, les jambes, les robes en pleine action, les archers, les musiciens, tous furent semblables à des statues de marbre. Les mécanismes installés des mois durant dans les lustres lors de leur entretien venaient d'entrer en action.

L'escalier qui menait à la salle de bal fut paisiblement descendu. Au sein de l'assistance, une femme, blonde, à lunette, mal à l'aise visiblement dans sa robe de soirée était figée comme tous les autres, prise dans une conversation qui n'avait pas l'air palpitante. Arrivé à sa hauteur, il sortit de sa poche un bracelet qu'il attacha à son poignet droit. Il l'activa.

- ... doute, finit-elle avant de sursauter à la vue du tyran temporel en uniforme qui lui faisait face.

Elle poussa un léger cri et regarda autour d'elle l'effroyable spectacle. Tout paraissait d'une infinie froideur.

- Nous sommes tranquille pour une bonne heure, expliqua Degaton en lui tendant une main. Ceci est un bal, allons donc danser... docteur Glory.

La femme se pinça à l'entente de son surnom.

- Que me voulez-vous ?

- Vous faire une proposition, répondit-il. Mais j'ai interrompu une valse et je m'en voudrais de laisser un tel silence obscurcir nos discussions.

Une main sûre d'elle rejoignit son gant rouge et ils s'installèrent au milieu de la piste de danse. Degaton entama quelques pas en imitant le rythme de la musique qui reprendrait uniquement dans une heure. Lorsqu'ils furent lancés, le tyran reprit.

- Je suis très admiratif de vos travaux docteur.

Pas de réponse.

- Je regrette seulement qu'ils restent aussi timorés. Presque des balbutiements d'enfants connaissant vos talents.

- Comment avez-vous pu...

- Avoir accès à ces derniers ? Allons, vous parlez à quelqu'un pour qui l'avenir n'est pas inaccessible. Hélas je n'ai eu accès qu'à la partie qui a survécu au lynchage des siècles.

- Mes travaux ont été perdu ? s'inquiéta-t-elle.

L'homme rit en effectuant une volte.

- Le temps balaie tout docteur, les mémoires comme le papier. Vous n'avez cependant pas à vous en faire, l'avenir n'a rien d'immuable.

Il pouvait sentir le rythme cardiaque de sa cavalière contre sa propre poitrine.

- Qu'est-ce que vous voulez ? redemanda-t-elle.

- Vous offrir la possibilité de voir plus grand et d'aller beaucoup... beaucoup plus loin. Dans quelques années, un portail dimensionnel s'ouvrira dans les terres glacées de cette planète et vous ferez partie des nombreux chercheurs internationaux qui iront s'échiner à en percer le secret, à l'utiliser et même à tenter de le manipuler. Mais en vain. Les autorités seront rapidement refroidies par les univers parallèles que ce nexus pourrait contacter. Invasion, combat, menaces formeront l'essentiel de l'existence de cette porte.

" Un gâchis monumental.

- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler.

- Bien sûr que non docteur, bien sûr. Tout ceci est l'avenir et mon passé, mon présent également. Vous vous battrez avec Washington pourtant, tenterez de rallier à votre cause des justiciers, mais rien n'y fera, vos recherches seront rapidement reléguées à des simulations et des incursions toujours plus rares via ce portail. Le rêve d'une vie à portée de main pour... rien. Et pourtant vos systèmes de communication inter-dimensionnels seront encore longtemps utilisés.

" Vous verrez même des justiciers parvenir à fracturer les dimensions pour voyager, via des "Rift" et autre éléments qui resteront longtemps hors de votre portée. Malgré votre talent, vos compétences, votre instinct innée pour le multivers et ses mystères. Votre passion docteur, toute entière perdue pour la science et l'avenir.

Sa respiration était plus forte, fatigue, mais aussi colère. De la rage, de l'incertitude.

- Je ne vous crois pas.

- Je m'en doute docteur... je m'en doute...

Et les deux êtres disparurent alors.

Puis ils réapparurent. Lui debout, elle se jetant au sol. Sa robe était humide, ses cheveux glacés, ses lèvres bleutées. Il balaya les épaulettes de son uniforme d'un peu de neige.

- Non... soufflait-elle entre ses lèvres gercées.

- Et pourtant... mais ceci n'est pas une fatalité docteur. Je ne suis pas là pour briser vos rêves mais leur donner un nouvel élan.

- Avec vous... j'imagine.

- Naturellement. J'envisage d'ouvrir une brèche, une sorte de nouveau Nexus des Réalités grâce à une haute technologie alien. Mais si mes connaissances sur le flux temporel sont extraordinaires, celles concernant les dimensions, leurs matières, leurs énergies, leurs interactions me sont inconnues et je veux des résultats rapidement.

- Je... pourquoi faire ?

- A votre avis ?

- Vous êtes un malade, lança-t-elle.

- Un conquérant docteur, ne soyez pas désobligeante. J'entends mettre ce multivers au pas, y mettre bon ordre et vous pouvez m'y aider. Je veux voir flotter au travers du temps et de l'espace mon nom et ma lettre docteur. Des "D" glorieux...

- C'est... complètement fou... nous n'avons pas le droit de... balbutia-t-elle.

Il saisit un bras du docteur et la releva pour la plaquer contre lui et reprendre la danse là où ils l'avaient laissé.

- Oubliez un instant vos préjugés docteur, imaginez plutôt l'immensité de la tâche à accomplir, les pouvoirs colossaux qui se terrent dans des planètes inexplorées, des dimensions inconnues aux règles qui défient notre imagination. Je peux vous offrir une porte vers eux, les comprendre, les posséder, les décortiquer, les analyser !

" Oubliez un peu cette moralité ! Il n'y en a pas, ni ici, ni ailleurs, tout n'est qu'une question de pouvoir ! Même travestie par l'argent, la loi du plus fort est de mise. Regardez autour de vous les ineptes ploutocrates qui vous entourent et vous ennuient de leurs palabres sans fin. Regardez les administrateurs qui bientôt vous mettront des bâtons dans les roues et empêcheront de vos recherches !

" Je n'abandonnerai pas mes projets docteur, avec ou sans vous, j'entends percer les mystères du multivers par tous les moyens nécessaires, sans limite, sans appréhension, je l'ai fait pour le temps, je le ferai pour les dimensions et quiconque me suivra aura sa juste récompense ! Vous pourriez diriger des équipes de recherche et d'exploration, vous pourriez profiter des campagnes de conquête pour accroître vos connaissances vous...

- Assez ! hurla-t-elle en s'écartant de cet homme dont le discours l'effrayait car il paraissait si séduisant et tragiquement vrai alors qu'il avait tout d'une monstruosité.

Degaton se redressa, conscient d'en avoir assez dit pour la faire douter.

- Je vous laisse trois mois pour vous décider docteur. Je sais que vos recherches actuelles sont précieuses et bien gardées et qu'elles ne seront déplacées qu'à une seule occasion : lors du congrès qui se tiendra dans le plus grand secret à Venise pendant son carnaval l'année prochaine.

Ses yeux montraient l'effroi que provoqua la connaissance de cet homme des détails d'un colloque aussi secret.

- Je vous laisse le bracelet que vous avez au bras, il dispose d'un clavier. Si vous vous montrez finalement intéressée par mon offre, tapez "84" dessus. Sinon, il se désactivera et me reviendra. Si vous me rejoignez docteur, je viendrai à Venise pour vous récupérer avec toutes vos affaires, au nez et à la barbe de ceux qui pensent vous avoir sous leur influence afin de vous éviter de pénible poursuites. Dans le cas contraire, nous n'aurons plus affaire l'un à l'autre.

Il tira sur les pans de sa veste et se détourna.

- Une dernière chose docteur. Je voyage dans le Temps alors inutile d'essayer de me doubler.

L'homme s'en alla comme il était venu.

Perturbée, encore frigorifiée, le docteur Glory ne revint pas à sa place et alla plutôt s'asseoir. Lorsque le temps reprit ses droits, Degaton n'était plus là, la valse continua comme si rien ne s'était produit et seul l’interlocuteur du docteur s'inquiéta de ce moment d'inattention. Elle s'excusa, prétextant une affaire urgente et quitta les lieux sans expliquer son état…

[HRP]
- Petit début en douceur pour ce sujet ;
- Degaton a contacté le Docteur Glory en avance de phase pour lui proposer de s'enfuir lors du Carnaval de Venise de 2017, celle-ci a accepté après un temps de réflexion ;
- Degaton attend Catwoman dans un lieu plutôt misérable.
[/HRP]

Alors qu'il se penchait sur une table basse où reposaient des magasines usés par les mains de pervers en manque, une voix l'appela à elle.

- Lui-même,, répondit-il en se retournant, surpris.

"Catwoman est une femme qu'il ne faut pas sous-estimer", tel avait été le conseil de Vandal Savage. On pouvait dire que l'on comprenait aisément pourquoi. Degaton s'autorisa à lever un sourcil en cherchant l'éventuel endroit d'où elle était probablement entrée mais se contenta d'un sourire impressionné.

- Heureux de vous rencontrer, lança-t-il finalement, et de constater que mon offre ait piqué votre curiosité.

Il ne sut cependant pas si elle plaisantait à propos de sa tenue ou tout simpement du Joker. Il connaissait le "clown du crime" de réputation et de nom, mais jamais il ne l'avait croisé, une chose dont il se passerait merveilleusement encore longtemps. Aussi réagit-il de la façon la plus diplomatique qu'il connaissait : en feignant de ne pas saisir.

- Pas de costume de clown pour cette opération ; probablement pas non plus un qui pourrait rappeler votre filiation féline. Nous allons probablement nous jouer d'organisations qui ont de la mémoire et de la ressource. Mon paiement serait bien médiocre si vous vous retrouviez pourchassés alors que vous me rendez service.

Il marcha un peu et s'assit sur l'acottoir d'un fauteuil usé en regardant son interlocutrice. Degaton avait bien des défauts, mais il tenait parole, une nécessité lorsque vous vous réincarniez et deviez probablement tôt ou tard faire face à des individus sans souvenir de vos précédentes incarnations. Il s'autorisa à analyser un peu Catwoman. Fine, élancée, atlétique, silencieuse, l'oeil pétillant d'une malice toute féminine, elle était précisément ce dont il avait besoin. Sa possible filiation avec Batman la rendait dangereuse, mais l'enjeu en valait largement la chandelle et même Batman ne pourrait s'opposer longtemps aux volontés de la SSE, même si Vandal préférait encore faire profil bas à son égard.

- Mais avant de nous engager plus en avant dans ce bal, je me dois de poser la question : quel est vôtre prix ?

Il tira l'une de ses manches et pianota sur un étrange bracelet puis releva le visage.

- Comme indiqué, votre prix sera le mien. Que désirez-vous donc ? Argent ? Bijoux ? Or ? Un artefact particulier ? Un voyage dans le temps ? De l'aide pour un braquage ? Demandez, je suis presque sûr de pouvoir vous l'obtenir.

Son bracelet s'illumina alors et un catalogue grossier apparu devant lui. Il eut un léger sourire en feuilletant et le referma.

- Vous pourrez choisir la tenue qui vous paraîtra la meilleure, indiqua-t-il en lui tendant le catalogue. c'est un excellent tailleur et vous aurez votre commande en un "temps" reccord.

Un autre avantage de voyager dans le temps c'est que rien n'était véritablement long.

- Nous allons avoir un délais fort restreint pour agir lors de ce carnaval. L'Argus sera sur place pour tenter de protéger les recherches de notre cible, recherches qui seront sous la forme d'un cristal bleu de ce type, expliqua-t-il en lui tendant un dessin de l'objet en question, qui sera caché dans un coffre-fort installé pour l'occasion dans la chambre 45 de l'hôtel Cirpiani, en voici le modèle, il lui tendit un autre document. Après quoi, vous aurez pour but de retrouver notre cible qui aura pour l'occasion un costume particulièment sobre, une robe du XVIIème siècle jaune, au Palais des Doges où aura lieu le bal. Nouvelle photographie. De mon côté, je serai dans un appartement situé au nord de la place Saint Marc dont je vous transfèrerais l'adresse, j'y aurais mon matériel de voyage temporel. Comme nous devrons être discrets, j'aurais des réglages très minutieux à régler, d'où la nécessité que je reste à proximité.

" Lorsque nous serons de retour avec nos deux colis, vous aurez votre paiement et nous pourrons nous séparer. Etant donné que la plus grande prudence est de mise, je n'ai pas pu faire autant de repérage que désiré, aussi y'aura-t-il une grande part d'improvisation dans tout ce qui va se produire là-bas.

Il se tut alors, laissant le soin à son interlocutrice de poser les éventuelles questions qui devaient la tarauder, choisir sa tenue et surtout fixer son prix.

Deux styles, deux méthodes. Catwoman, enthousiaste, joueuse, minaudant face à un Degaton rigide, froid au point de paraître cadavérique, sa mission uniquement en tête. Et pourtant, les deux violons semblent, malgré leurs airs très différents pouvoir jouer un moment sur la même partition. Per est clairement déstabilisé par cette femme qui s'amuse, prend plaisir dans cette situation, se montre expressive et même, pour lui, exubérante. Gotham avait réellement une faune criminelle à part.

- Mes sources m'ont parlé essentiellement d'un penchant pour les objets précieux, répondit-il circonspect à la théâtralité que déployait la chatte cambrioleuse.

Ses sourcils se froncent d'incompréhension lorsqu'elle tapa des mains. Il ne se formalisa certes pas, mais il essayait de faire concorder l'image de cette cambrioleuse étrange et mystérieuse dont tout le monde lui parlait en face de cette femme qui croquait visiblement la vie à pleine dents. Sa pensée toute militarisée peinait à trouver des repères ; il se demandait même si elle n'était pas en train de le prendre pour une souris et de jouer avec lui.

Bon, se concentrer sur son prix. Les diamants, soit, ce n'était pas impossible pour quelqu'un qui pouvait aller les chercher à toute époque. Des tonnes, plus compliqué par contre. Degaton réfléchissait à comment satisfaire au mieux un prix si abstrait.

- Des tonnes ? reprit-il plongé dans ses pensées. Je reviens dans une seconde.

Degaton s'évapora alors dans le flux temporel et en revint presque aussitôt pour Catwoman. Le tyran n'avait cependant pas exactement la même tenue. Cette dernière était plus neuve, les bottes par contre paraissaient plus poussiéreuses, ses cheveux avaient une coupe légèrement différente. Dans sa main également se tenait une bourse rouge carmin qu'il n'y avait pas avant.

Une seconde environ s'était produite pour elle, mais Degaton avait effectué un détour de 2 mois complets.

Traversant les époques et déployant certains Arpenteurs de ses "Enfants", il écuma les différentes sources diamantaires qu'il put, d'abord les pierres antiques trouvées depuis des rivières, puis au Moyen-Âge, extrayant juste assez de matière pour ne pas paraître suspect ou influer sur la valeur de cette roche ; puis il explora les premières mines de diamant de l'époque coloniale, achetant ou détournant de petites quantités. Profitant des fluctuations des prix de la matière brut dans les années 1730, il emporta une masse plus importante au travers du temps pour les faire proprement tailler dans le futur.

De retour face à Catwoman, il retourna la bourse dans l'un de ses gants rouges et fit couler une dizaine de diamants couleur D et E, les plus beaux qu'elle aurait en pierre taillée dans ce qu'il avait pu rassembler. Des breloques à ses yeux mais des pierre étincelantes et magnifiques aux yeux des experts.

- Je n'en ai pas une tonne comme demandé, mais vous en aurez pour 5 kilos de pierres taillées, deux rivières et un diadème - merci la révolution russe, lança-t-il.

Il espérait bien que cela suffise, sinon il devrait carrément se lancer dans l'exploitation de mines de dimants ou lui donner directement des titres de propriétés et si elle n'avait visiblement pas le tempéremment d'une gestionnaire, lui avait d'autres projets ; il la supposait d'ailleurs plutôt du genre à préférer s'en faire des bains que des bilans financiers.

Puis vint enfin le moment d'enfin partir pour un bond temporel extrêmement mineur. Un nouveau pianotement sur son bracelet et son disque temporel apparut, lévitant au milieu de la pièce. Il l'invita à monter dessus d'un geste du bras.


Les oreilles sifflantes, Degaton se releva. Le pavé humide de la sérénissime était étonnement dur depuis que son épaule l'avait percuté. A côté de lui, allongée sur le pavé, Catwoman. Autour d'eux, une foule de badaud les observe. Catwoman est dans sa tenue de bal, lui dans son acoutrement de noble. Les commentaires qui fusent sont tous en italiens. Quel vacarme... cheveux, charettes et bavardages en toile de fond, sans compter le vent et le clapoti de l'eau.

Il se redresse d'un geste sec alors qu'une cloche de navire sonne au loin. Sa mémoire était incapable de retracer le cheminement qui les avait conduit là et la vue des multiples mâts qui transperçaient l'horizon, couplés aux costumes des vénitiens lui fit comprendre qu'il y avait eu un saut temporel. Son atterrissage ajoutait que ce n'était pas un voyage de plaisance...

Le bruit de soldats se fit alors entendre : bottes et plastron métalliques, hallebardes et rapières. XVIIème certainement.

Il se pencha alors vers Catwoman, ne voyant aucune trace de Glory...

- Il faut y aller si vous ne voulez pas découvrir le pont des soupirs... lui intima-t-il.

Il leur fallait courir pour trouver un abris et une fois au calme, essayer de découvrir ce qui avait bien pu se passer...


Catwoman et Degaton se matérialisèrent dans une chambre moderne où attendait déjà un homme en tenue sévère. Il se leva de son siège et salua sur supérieur. Autour d'eux, au moins cinq unités centrales et deux ordintauers portables formaient une toile de câbles et de malettes ouvertes dans la pièce.

- L'équipement est opérationnel colonel, fit-il rapidement. Nous avons également reçu les costumes demandés.

Il indiqua rapidement deux sacs à vêtement, l'un pour homme, l'autre pour femme.

- Parfait, vous pouvez disposer.

Lorsque son subordonné quitta la pièce, Degaton se tourna vers Catwoman.

- N'oubliez pas de choisir votre vêtement et de donner la commande au caporal qui vient de sortir, lui rapella-t-il, évitons de générer des paradoxes aussi proche du début de notre opération. Ensuite vous pourrez vous en vêtir.

De son côté, il prit le costume qui lui avait été préparé et s'en alla se changer dans une pièce mitoyenne.

De retour, mal à l'aise dans cette tenue d'un autre temps, il s'installa derrière un ordinateur pour lire une série de messages techniques. Visiblement satisfait de sa lecture, il tendit un bracelet sous la forme d'une fine montre de poignet hors de prix à la chatte cambrioleuse.

- Système de communication, se contenta-t-il de dire, au cas où. Pas de traçage par contre, nos adversaires sont du genre méfiant et surveillent les puces GPS. Amusez-vous bien.

Après quoi, il laissa la cambrioleuse à ses affaires, préférant se concentrer sur le réglage de son équipement.

De l'autre côté de la place San Marco et d'un bras de mer, l'hôtel Cipriani s'étendait sur l'île de Guidecca et bruissait au rythme des musiques et des festivités du carnaval. Masques et robes allaient et venaient dans des froissement continue au milieu de touristes et de badauds munis d'un appareil photographique. Hôtel de luxe aux dimensions quasi inégalées dans la lagune, donnant sur le Palais des Doges pour mieux ravir ses hôtes, il s'imposait comme le rendez-vous d'une population riche et puissante. Ainsi, au milieu des convives, on pouvait toujours admirer des costumes trois pièces noirs et des oreillettes, aux aguets de la moindre anicroche. A peine une gêne sans doute pour la plus grande des voleuse, mais l'arbre ne cachait-il pas la forêt ?

[HRP]
- Degaton propose à Catwoman de juger des diamants qu'il peut lui proposer ;
- Degaton et Catwoman se réveillent au XVIIème siècle dans la lagune de Venise ;
- L'opération se déroule pour le moment nominalement en 2017 ;

Le sujet mélange du coup deux époques à gérer, Catwoman et Degaton en fuite au XVIIème siècle avec un trou de mémoire et l'opération de cambriolage et d'enlèvement en 2017, jusqu'à comprendre ce qui s'est passé.

N'hésites pas s'il y a la moindre question.
[/HRP]

Per fit un léger signe de tête lorsqu'elle parut satisfaite de la qualité de ses pierres. L'on aurait pu croire que la sinistre réputation de Degaton l'isole. Après tout, qui voudrait faire affaire avec un fasciste aussi rigide ? Il pouvait par la suite se montrer dur, inflexible, colérique, emporté et surtout brutal mais il était bon payeur et homme de parole.

Le paiement était ainsi chose réglée. A la façon de Catwoman visiblement. La cambrioleuse était à l'aise dans cette négociation, brisant les distances sociales sans vergogne face à un type dont l'incarnation était toute militaire. Une main serrée ou un "allons-y" aurait fait l'affaire, une tape sur la joue c'était nouveau et perturbant.

Pas étonnant qu'elle ait une réputation retorse, tout paraissait n'être qu'un jeu pour elle. La suite donnerait visiblement raison à cette impression.


Relevés, les deux criminels commencent à courir. Leurs vêtements les gênent moins que la foule à fendre. Heureusement les armures ventrales des soldats de la sérénissime les rendent encore plus lents. Ils prennent une ruelle au hasard, ici pas de GPS pour venir en soutien, pas de carte préétablie. Degaton ignore totalement où ils ont atterris exactement dans la cité et il n'a pas le temps de se poser la question.

Les pavés sont glissants d'une averse récente et le fasciste pousse des jurons chaque fois que ses jambes cherchent à s'enfuir dans la mauvaise direction. Soudainement, un escalier en pierre mène vers la porte ouverte d'une demeure. Il s'élance, gravit les marches quatre à quatre, une main sur la rambarde taillée pour éviter de tomber.

Il surgit dans l'encadrement de la porte. Un homme et une femme discutent. Les deux s'interrompent en voyant le visage roux en sueur. L'homme s'avance pour venir fermer la porte.

D'un réflexe assassin, Degaton sort de sa ceinture un pistolet plasma et carbonise les deux vénitiens avant qu'ils n'aient pu réagir. Il rentre, invite Catwoman à faire de même et pousse la porte derrière eux. L'odeur des cadavres carbonisés est épouvantable, mais au moins la garde n'irait pas les chercher ici.

Plaquant ses deux mains sur la table où s'entassaient différents tissus, il essaya de se concentrer pour retrouver des bribes de ce qui s'était passé.

Il vit alors sur son bras que son costume était arraché... non, pas arraché, coupé. Il regarda. La veste et la chemise étaient transpercées et sa peau avait visiblement cicatrisé récemment. Il avait utilisé un kit de soin. Étrange.

- Impossible de me rappeler... grogna-t-il. Vous avez des souvenirs de votre côté ?

Soudainement, un crieur public secoua la rue de sa voix puissante.

- Braves vénitiens et douces vénitiennes, la nouvelle veut qu'une sorcière soit apparut dans l'honorable palais de notre Doge bien aimé ! Emprisonnée, la créature n'a dit mot compréhensible pour l'oreille. Elle sera, pour éviter troubles et inquiétudes, exécutés ce soir même !

Degaton regarda Catwoman. Qui était donc cette troisième personne ? disait clairement son regard.

Dans une maison proche, un homme entouré d'une famille endormie par des fléchettes observe le logement où les deux criminels ont pris place. L'individu serre un bandage sur une plaie qui s'est rouverte. Sur son visage, de belles traces de griffures pas encore cicatrisées...


Après avoir observé les différents équipements qui affichaient bien des éléments incompréhensibles, Catwoman pu distinguer plusieurs écrits troublants sur un écran. D'abord une liste très précise d'individus avec un signe "omega" à côté qui fut remplacée par un message à l'intention du "Haut Chancelier Degaton", une adresse qui n'avait pas encore grand sens. Sur une autre, elle put voir un flux vidéo d'information de sa propre époque.

- Le diable se niche dans les détails, commenta sobrement Degaton au commentaire de la chapardeuse.

Les deux se séparent. Degaton s'équipe d'un casque à microphone intégré et suit un écran proche pour écouter et interagir éventuellement avec son associée. Le moniteur de l'activité temporelle était encore sereine. La chatte veut alors jouer.

Tout est tranquille, tout est calme. Quel risque y'avait-il ? La frustrer ne lui apporterait rien.

- Il y a encore du temps avant le rendez-vous et si cela dégénère, revenez discrètement au point de rendez-vous, nous pourrons faire un bond temporel dans une autre zone de la cité.

Il se leva alors et équipé de jumelles observait la place. Il ignorait globalement où se trouvait Catwoman, mais si grabuge il devait y avoir, il le verrait vite.

- Amusez-vous bien, conclut-il.

[HRP]
- Au XVIIème, les deux s'enfuient et trouvent refuge dans une maison après que Degaotn ait tué ses occupants. Un crieur public annonce qu'une "sorcière" est apparue dans le Palais des Doges, elle est incarcérée dans le prisons de la cité (sous-sol du palais des doges) ;
- Un type mystérieux les suit depuis une autre maison.
- En 2017, Degaton autorise Catwoman à jouer
[/HRP]

- Si les répercussions de leurs morts sont trop lourdes, il sera toujours temps de modifier leur destin en amont, mais notre problème immédiat n'est pas là.

Degaton ne pleurait pas les cadavres qui parsemaient son chemin. Tous ceux qui l'entouraient finissaient ou finiraient tôt ou tard dans cet état, par la force des choses et les conséquences d'une vie à la trajectoire rectiligne suivant une illusoire "flèche du temps" ou par quelques coup du destin. Degaton avait une vision et des rêves et il n'imaginait pas un instant s'interroger sur la justesse de ses moyens.

Pour l'heure, il s'inquiétait de ne pas pouvoir retrouver l'enchaînement des évènements qui avaient inéluctablement conduit à ce cafouillage et à l'oblitération de leurs souvenirs.

- Désagréable et dangereux, termina-t-il une fois le crieur public passé.

Per pianota sur son bracelet endommagé qui fit un rapide point sur la situation temporelle. La zone était complètement bloquée. Il grimaça. Quelqu'un ou quelque chose bloquait l'accès au Flux Temporel. Il eut ensuite la confirmation qu'un autre bracelet se trouvait dans la zone, celui du Docteur Glory. Hélas, le verrou temporel plus l'absence de système satellitaire de localisation l'empêchait de deviner où se trouvait cette troisième personne. Tout semblait cependant converger vers cette prisonnière venue d'ailleurs. La spécialiste des voyages inter-dimensionnels était en train de croupir dans une prison. Glorieux départ...

Il fit un rapide topo à la chatte cambrioleuse qui paraissait concentrée sur autre chose.

- Bon, il va nous falloir faire trois chose : libérer cette "sorcière" qui a toutes les chances d'être le docteur Glory ; trouver l'origine de la perturbation qui empêche tout accès au Flux Temporel et enfin retrouver les souvenirs qui nous manquent. Vous voyez autre chose dans l'immédiat ?

Dans l'appartement proche, la lourde silhouette s'éloigna de la fenêtre et prit une porte qui donnait sur un canal. Il regarda un étrange intelliphone qui lui indiquait un compteur. Il poussa un léger grognement avant de sauter sur une barque.

L'opération avait complètement merdé...


La foule était dense, joyeuse, toute à la fête. Les hommes naviguaient de robes en robes, arrachant ça et là de badines oeillades, s'attardant souvent sur les yeux et la gracieuse silhouette de la chatte, mais l'abandonnant tout aussi vite pour quelque autre rire aux échos délicieux. Les femmes, pas en reste, jouaient, s'amusaient de cette légèreté, voyant souvent en quelques pétillements lubriques blottis dans l'iris d'un homme au loup osé à la fois ce qui rendait ces êtres répugnants mais aussi si facile à manipuler. La Nature humaine se parait des atours du carnaval, mais elle s'oubliait souvent jusqu'à ses extrémités les plus viles.

Les quelques gardes qui surveillaient les environs et les accès à l'Hôtel n'étaient guère bavards, mais depuis quelques heures déjà, ils s'ennuyaient et leurs yeux se perdaient dans la contemplation des costumes autant que dans leurs pensées. Un bâillement était un signe bien mauvais, des mains qui se croisaient et se décroisaient, tout autant, offrant à la chatte joueuse assez d'indice pour savoir qui frapper, où et comment. Les lunettes de Soleil cachaient les yeux, mais les tics, même légers étaient un repas pour une artiste aussi brillante que Sélina Kyle.

Au détour d'une poche visitée, Catwoman récupéra ce qui ressemblait à une clef USB, attachée à une étrange carte pas plus grande qu'un ongle de pouce.

Les accès à l'Hôtel étaient rigoureux. La vue de la jeune femme fit sourire un garde parmi les plus expérimentés. Il paraissait s'attendre à quelque chose et s'approcha le premier. Les plus novices se rinçaient outrageusement la cornée de cette sublime créature. L'homme enleva ses lunettes de Soleil, prêt à lui demander son numéro de chambre et sa pièce d'identité.

On pouvait lire dans son regard qu'il s'attendait à une réponse dilatoire mais la façon dont ses yeux coulaient vers le décolleté de la chatte laissait entendre qu'il était prêt aux compromis...

Dans la foule, un homme en costume fleuri observait depuis son masque riant l'entrée où se jouait cette étrange scène. Un orchestre vint alors dans une rue mitoyenne pour jouer un air enlevé et la foule s'agita en riant.

Dans l'Hôtel, la sécurité était minimale, les efforts ayant été mis sur l'accès principal. Les surveillants qui scrutaient normalement de multiples écrans passaient plus de temps rivés sur leurs portables qu'à leur veille. Les couloirs bruissaient du mouvement de robes et de costumes, ici on ne s'arrêtait pas, on circulait, allant et venant pour se préparer aux festivités et en profiter au maximum.

Pris dans l'immédiateté de la situation, Degaton ne releva pas plus que cela le trouble de sa "partenaire". Les moyens mis en place n'étaient pas discutables, l'action prévalait sur les réactions, avancer au détriment des accrocs fait dans le temps. Quiconque piégeait le tyrannique ingénieur avait de quoi s'inquiéter des répercussions, la bête piégée pouvait se révélée plus dévastatrice que l'homme. Venise ne s'en sortirait pas indemne.

- Pour la tenue, il doit y avoir de quoi se changer dans des pièces voisines, indiqua-t-il à la judicieuse remarque de la féline.

Puis, alors qu'ils "visitaient" la demeure vénitienne, il répliqua à son interlocutrice.

- Je voyage dans le Temps, "loupé" est une chose très relative. Je n'en dirais pas autant pour celui ou celle qui a tenté de me gêner.

Une salle sentant la fourrure et le tissu parfumé s'offrit à eux. Ici du linge de maison, là une armoire où pendaient des vêtements plus acceptables. Degaton n'avait pas à se changer à la différence de son accompagnatrice, aussi se contenta-t-il de grogner en s'éloignant, cherchant une arme blanche ou quelque chose de plus discret que son arme futuriste. Il trouva une dague, un coupe papier et dédaigna un mousquet. S'il devait en venir à de telles extrémités, autant se servir de plasma.

Dès que son accompagnatrice fut vêtue, ils purent sortir dans les rues de la Sérénissime. Direction la masse populaire qui convergeait dans un ressac de conversations vers la place San Marco. Les discussions en italien formaient une litanies désagréable aux oreilles du tyran qui cherchait toujours ses souvenirs, craignant quelque coups fourrés supplémentaire de la part des responsables de cette sale histoire.

Le Palais des Doges, dans son panorama de gondoles et de mâts qui fléchaient l'horizon s'étalait de tout son luxe sur la place pavée où les chausses et soierie de la cité côtoyaient le temps d'une exécution les lainages et autres manteau de cuir usé de la roture. On pouvait distinguer, çà et là quelques voleurs à la tire qui délestaient de leur richesse les riches marchands trop attirés par les piques des gardes de la cité pour prendre garde à l'avenir des bourses de velour qui pendaient à leur côté.

L'air de l'Adriatique caressait cette foule extatique, emportant avec elle le chant des oiseaux marins. Les commentaires répondaient aux commentaires, l'ignorance à l'ignorance et dans cet enchâssement sans fin de préjugés et de "moi je sais", Degaton se sentait autant à l'aise qu'un cuirassier dans une baignoire.

Il se pencha vers Sélina et lui chuchota.

- Nous allons passer par une rue mitoyenne. De là i y a une maison qui doit déjà avoir un écusson de lion sur le haut d'une porte. Il existe là un passage vers le Palais.

Cette même rue, même s'ils ne s'en souvenaient guère tous les deux, qu'ils avaient déjà emprunté quelques siècles plus tard...


Per ne put que s'incliner face à la facilité avec laquelle cette féline tentatrice se jouait des passions masculines. L'homme en face s'était fait ferré comme un vilain poisson entre les griffes expertes de la cambrioleuses aux charmes ravageurs. Il fallait admettre qu'elle avait des avantages et assez d'assurance pour en tirer le maximum de profit. Dans une société toute entière pervertie et pétrie de désirs, les hommes n'étaient rien de plus que des bêtes fouettées par leurs passions.

Il n'éprouva aucune pitié pour ce type qui allait connaitre le royaume de Morphée bien malgré lui. S'il avait été un véritable Homme, il n'aurait pas fait passer son intérêt avant son devoir et une chatte comme Sélina n'aurait pas pu faire frétiller sa libido. Une société de contrôle était plus que jamais nécessaire dans l'esprit déréglé du fasciste.

Mais le résultat était là et il n'allait pas s'en plaindre, il lui faudrait cependant rester sur ses gardes avec Catwoman, un faux pas est vite arrivé face aux invitations d'une aussi plantureuse créature. Elle l'intriguait trop.

Per n'émit aucune remarque à la déclaration de la chatte, la discrétion était de mise de son côté.

Les couloirs ne représentaient pas un obstacle pour la chatte et sa tenue en faisait une parfaite résidence. Pourtant, dans l'établissement, une silhouette, plutôt massive, suivit du regard la féline cambrioleuse. L'individu en question tapota de l'index sa paire de lunettes qui fit défiler devant ses yeux une série d'informations. Il maugréa.

Les portes défilaient et la chambre du Docteur Glory était toute proche. Pas de garde, rien qui paraissait trahir la pièce en question, c'était une suite comme les autres dans ce décorum pompeux.

Soudainement, la porte vola en éclat. Un garde du corps rebondit contre le mur d'en face et s'écrasa au sol, inanimé. Un coup de feu retentit suivit d'un sifflement désagréable. Un deuxième homme fut projeté hors de la pièce.

- Nul n'est de taille face au puissant Psymon ! retentit une voix désagréablement stridente.

Spoiler:

Le criminel en tunique sortit de la pièce en lévitant, comme pour soutenir son discours. Derrière lui, le coffre de la chambre volait comme un ballon gonflé à l'Helium, relié au puissant télépathe par un fin fil jaunâtre d'énergie.

Il tourna la tête vers Sélina Kyle.

- Tsaa ! cracha-t-il. Tu pourras te vanter triste chose d'avoir pu admirer le Grand Psymon !

Puis il lui tourna le dos dans un mouvement dédaigneux dont il avait le triste secret.

[HRP]
- Désolé pour le temps de réponse.
Je te laisse le soin de faire l'infiltration dans la Palais des Doges si tu veux, Psymon est tout à toi
[/HRP]

Catwoman devenait caustique. Perte de mémoire, perte de repère ou moralité qui prenait le dessus ? Un mélange des trois peut-être ? Toujours était-il que Degaton lui jeta le regard d'un père à une fille qui posait une question impertinente, mouvement de bouche à l'appui. La situation l'énervait déjà suffisamment sans qu'il ne doive passer du baume sur des scrupules.

- Est-ce une manière pour vous de rouvrir des négociations sur une rémunération plus motivante ? lança-t-il acerbe.

Puis il poussa la porte d'une demeure dont la description correspondait bien à ses indications. A l'intérieur, trois hommes et deux femmes se levèrent. Ils saluèrent Degaton à la romaine. Per fut lui-même surpris.

- Gloire au Haut Chancelier ! firent-ils en coeur.

La situation devenait étrange. Il ne connaissait aucun d'eux et... ce titre lui fit froncer les sourcils. Que se passait-il avec la trame du temps ?

L'un d'eux s'avança et lui tendit une lettre frappé de son initiale. Il s'en saisit et l'ouvrit. A l'intérieur, deux lettres "V.S.". Un sourire mauvais déforma ses traits.

- Quelqu'un semble avoir veillé sur nous, informa-t-il.

Dans une pièce attenante, l'uniforme de Degaton l'attendait avec la tenue de cambrioleuse préférée de la chatte chapardeuse.

- Les affaires reprennent...


- Comique est effectivement le mot. Il va falloir s'en débarrasser, Psymon est une petite ordure, lança Degaton qui connaissait bien cet imbécile arrogant, si vous en avez l'occasion, éliminez-le de façon définitive sinon il ne vous lâchera pas.

Catwoman n'avait pas une réputation de tueuse, mais sur un mal entendu ou une belle occasion il valait mieux lui donner la clef pour traiter Psymon : la mort. C'était un télékinésiste de talent, capable de projeter une énergie dévastatrice, mais aussi un vantard sans pareil. Le genre de type que l'on aimait parce qu'il captait la lumière et servait de cible ou de rideau de scène.

Degaton put suivre le dialogue entre lui et la cambrioleuse. Typique du type.

- Catwo... commença Psymon en fronçant les sourcils en se retournant.

Mais déjà la féline était sur son dos. Surpris, désagréablement fallait-il le préciser, il se déconcentra. Le lourd coffre vint frapper contre le sol suivit de son "porteur" qui s'étala de tout son long. Un télépathe au corps-à-corps devenait rapidement pathétique.

- Comment oses-tu charnelle créature t'en...

Mais il fut de nouveau interrompu par l'arrivée d'un homme, solide, costaud, au faciès patibulaire de celui qui a une mission et n'entend pas accepter deux guignols pour l'interrompre. Il avait au poing une arme beaucoup trop futuriste pour cette époque et une prothèse bionique remplaçait l'un de ses bras.

Son exact intervention coïncida avec une perturbation qui vint affoler tous les indicateurs des machines de Degaton. Il renversa sa chaise, comprenant ce qui se passait... Il se saisit à temps d'un fusil automatique qui était posé près de lui. Sa porte vola en éclat. Une rafale répondit à cette introduction musclée. Deux hommes en uniformes finirent en passoire et vinrent teinter le mur d'en face de rouge.

- Catwoman, lança Per dans son communicateur, interventions militarisée de mon côté, je me déplace jusqu'au palais pour récupérer le professeur. Priorité aux documents de votre côté et on se retrouve là-bas. Suivez les cris et la panique.

Des bruits d'uniformes et de chaussures renforcées se firent entendre dans le couloir. Per pianota une séquence d'urgence pour son équipement et dégoupilla une grenade qu'il balança dans le couloir.

Autour de lui, une bulle temporelle commençait à englober son matériel tandis qu'il fuyait sur son balcon.

Une vaste explosion fit trembler les alentours et des cris de panique prirent le pas sur les festivités. Une pluie de verre couvrit la course de Per qui sauta dans la rue en contre-bas.


- Il va nous falloir faire vite, déclara Per à sa comparse alors que la foule hurlait au dehors d'aller voir la mort de la sorcière. pour calmer les perturbations temporelles il va falloir que nous nous rassemblions avec le docteur et...

Il souleva la lourde trappe qui menait à un aménagement dans les fondations de Venise pour rejoindre le palais. Humidité et pavé glissant, odeur de marécage, rien de bien engageant. Il leva la tête vers Sélina et disparut... Comme s'il n'avait jamais été là, mais la chatte en gardait un souvenir précis. Les "Enfants de Degaton" qui les avaient accueillis furent également comme effacés de sa vie.

Sélina Kyle était désormais seule...

[HRP]Toutes mes excuses, je n'avais pas vu ta réponse à temps ! [/HRP]

La fange marécageuse sur laquelle reposait la Sérénissime fut seule témoin des répliques de Catwoman. Jusqu'à ce que l'écho d'un fracas de bois se fit entendre. Résonna alors une voix lourde, guerrière et burinée.

- Paradoxe réparé ici... enfin, en partie. Je me réserve la chatte.

Les tonalités brutales de la voix rappelèrent à Catwoman une étrange course.


La cambrioleuse n'avait pas attendu longtemps avant de se mettre à courir pour échapper au type aux allures de Cyborg qui avait débarqué aussi abruptement que Psymon plus tôt. L'homme n'avait émis que quelques grognements avant d'épingler de pauvres victimes qui n'auraient pas dû être là.
Au loin, on entendit l'évanescent brouhaha de hurlements et une vaste explosion souleva un large panache de fumée.

Le nouvel arrivant poussa un juron, buriné et violent, d'une voix au diapason.

- Reviens-là la chatte ! hurla-t-il de cette voix si caractéristique.

Il se mit alors à courir de son pas lourd de soldat entraîné, sauta par dessus un Psymon qui joua la carte de la discrétion, laissant là ses deux "concurrents" s'écharper.

Tandis que ses bottes frappaient le sol en cadence, il porta une lourde main vers une oreillette et balanca un "Catwoman en visuel, je la poursuis.".

Il tira alors quelques coups non ajustés pour effrayer la cambrioleuse, mais elle était mille fois plus agile que lui.


Alors qu'elle était seule, Degaton réapparut. Nouvelle tenue visiblement, nouveau regard et nouvelle intonation. L'être violent qui l'avait laissé plus tôt paraissait avoir changé. Il paraissait posé et l'observait comme l'on regarde la photographie sépia d'un ancêtre lointain et inconnu. Il releva une manche de son manteau marron pour laisser apparaitre une dizaine de montre connectée qui indiquait diverses information.

- Perturbations temporelles, indiqua-t-il d'une voix affreusement lointaine. Il a été expulsé de cette trame temporelle par un vieil ennemi, vous ne le reverrez pas avant d'avoir mis la main sur le Docteur Glory. Mais voyez le bon côté des choses, plus personne ne sera "cramé"...

C'était dit sur le ton d'une affirmation glaçante. Degaton allia le geste à la parole et plongea une main au travers d'une poutre qui tenait un bâtiment près d'eux.

- Je suis hélas déphasé avec notre temporalité et il ne pourra plus vous être d'aucune aide... d'autant que je sens les équipements des Linear Men chercher à m'expulser de nouveau. Vous allez devoir remonter par ce chemin, indiqua-t-il en pointant une direction dans les ténèbres. Vous tomberez dans un couloir qui mène, si partez vers la droite, au pont des soupirs et les geôles du Palais. Une spécialiste de votre envergure n'aura aucun mal à trouver la seule prisonnière qui parle américain et ouvrir sa cellule, elle devrait toujours avoir sur elle son bracelet de voyage temporel, il vous suffira de le toucher pour l'activer, vous avez sur vous assez de tachyon pour permettre un transfert. Mais faites attention, il se peut qu'il se trouve sur place ce cher RIP Hunter

Il disparut comme une télévision à tubes cathodiques qui aurait été débranchée violemment.


2017.

Le Carnaval qui a lieu dans la ville de Venise tourne au cauchemar. Un carabinieri cherche à calmer la population mais se fait bousculer dans un canal. Degaton, fusil parfaitement visible saute par dessus une femme qui a été jetée à terre dans la panique. Son manteau XVIIème claque derrière lui tandis que dans la foule une femme l'interpelle.

Non...

Liri Lee des Linear Men...

Il tira une rafale qui transperca une paire d'innocents. La foule devint alors encore plus incontrôlable dans sa volonté de s'éloigner du tyran qui reprit sa course. Soudainement, Per sentit ses jambes repartir en arrière et son mouvement s'inverser. Ses pensées continuaient leur cheminement mais tout son trajet se rembobiner. Malin les sales gosses. Tout parait saccadé, l'énergie que nécessitait Venise était énorme, ils avaient déployé de sacré moyens. Leur petit manège ne fonctionnait heureusement que par soubresauts. Lorsqu'il eut une ouverture pour reprendre le contrôle de ses bras, il pianota sur le bracelet qui ornait son avant-bras. Le monde repartit alors en marche arrière, mais pas lui, ni Catwoman qui disposait d'un lien avec son équipement.

Liri Lee tenta alors de lui envoyer une décharge étourdissante qu'il esquiva. Un homme reçut le coup et s'effondra avant d'être rembobiné. L'énergie du tir repartit en arrière et le tyran dut l'esquiver une nouvelle fois.

Les bousculades causés par les combattants génèraient de l'énergie temporelle paradoxale. Le ciel s'assombrit et se teinta comme les tunnels du Flux Temporel.

- Arrête ça immédiatement ! lui lança son adversaire alors que Degaton continuait de courir vers le Palais des Doges.

Il ne connaissait pas le verbe "s'arrêter".


2017.

Autour de Catwoman, le monde parut surréaliste, la population allait tantôt en marche avant, tantôt en marche arrière, seule elle et son poursuivant paraissaient continuer de vivre dans un écoulement classique.

- Au nom du Multivers, arrêtes-toi ! beugla le taureau furieux qui cherchait à l'attraper...

- < Cette sorcière est une espionne gênoise ! >, hurla une voix italienne très forte.

- < Ses vêtements sont étranges ! sans oublier tout ce que l'on a trouvé sur elle que l'on ne peut s'expliquer ?! > ajouta une autre.

- < Ses airs affriolants, sa coiffure démoniaque ! > balança un homme à la voix ferme.

- < Voyez comment ses genoux et son buste étaient exposés, c'est une succube venu tout droit des enfers ! > s'énerva un dernier.

La salle des doges était en effervescence et les théories les plus folles s'échangeaient sur le pauvre docteur Glory qui croupissait dans une geôle à voûte basse où les rats se battaient pour un morceau de pain rassi, jetant sur elle des regards affamés.

Le conseil de la ville cherchait une solution simple pour se débarrasser de la créature apparue quelques heures plus tôt. Le Doge désirait avant tout faire justice dans les règles, les représentants religieux voulaient en faire un exemple pour prouver à la papauté que Venise n'était pas un antre de perdition comme pouvaient l'être au yeux du plus haut hiérophante toutes les villes portuaires. Le reste du conseil se divisait en deux camps : des enragés pour qui un bûcher sans procès était nécessaire quitte à embraser la ville en accablant les juifs qui résidait dans la Sérénissime au passage ; ou des modérés qui cherchaient au contraire à juguler la haine populaire sur la seule sorcière afin de clore cet épisode le plus simplement et en maîtrisant une populace aussi méprisée que crainte.

Une chose était certaine : Glory serait exécutée, toute n'était qu'une question de politique et donc, de temps.

La salle du conseil était ouverte et les voix résonnaient dans les couloirs qui y menaient. Dans l'un d'eux, une grille menant dans un mur qui plongeait jusqu'aux fondations de la ville avec un escalier de pierre grossièrement taillée pour soutenir la fuite éventuelle des dirigeants de Venise, transmettait les échos de voix jusqu'à une chatte cambrioleuse.

Sa course paraissait avoir porté ses fruits, son poursuivant paraissait loin, même si les échos de ses pas lourds et pesants paraissaient venir de plusieurs endroits.

- < Que l'on amène la créature >, ordonna soudain une voix, < directement à la Question. >

Et des applaudissements sanguins se firent entendre. Dans la foule, un homme en tenue de prêtre sortit pour rejoindre le Pont des Soupirs.


2017.

- Police du temps ! Agent O'Connell ! hurla son poursuivant qui soufflait comme un boeuf.

Il était clairement moins endurant, sans doute performant sur un bon sprint mais qui commençait à devenir pataud. Il ne sautait plus aussi bien les obstacles et bousculait sans vergogne ce qui barrait son passage. Le monde, qu'importait son sens, paraissait ne pas l'empêcher de poursuivre sa mission.

Soudain, un grondement sourd et menaçant provint du ciel devenu multicolore. L'agent tira une salve en direction de Catwoman pour la pousser à rebrousser chemin.


Sur la place San Marco, Degaton atteignit enfin les portes grandes ouvertes du Palais, bouscula un garde piégé dans une boucle temporelle où il baillait. Un nouveau tir étourdissant frappa un mur près de lui. En réponse, Per se retourna et tira au jugé, frappant plusieurs civils et poussant Liri Lee à se mettre à l'abris.

- Pauvre malade ! lui hurla-t-elle.

Alors qu'il s'apprêtait à monter dans l'escalier le plus proche, une femme en robe de soirée, une sacoche en cuir à son côté déboula et le regarda, paniquée : le docteur Glory.

- Que se passe-t-il ? demanda-telle essoufflée.

- Pas le temps, grogna Per en lui empoignant le bras.

Maintenant il fallait user de l'énergie des paradoxes générés pour déchirer l'espace-temps. Venise n'en sortirait pas indemne mais lui, Glory et Catwoman oui.

Restait Liri Lee à l'extérieur...


Alors que Travis O'Connell peinait, il se sentit quitter le sol. Il poussa une interjection de surprise puis fut projeté en direction de la chatte qu'il percuta de plein fouet. Derrière lui, lévitant dans le ciel qui s'embrasait littéralement, le psychotique Psymon riait et déchaînait sa télékinésie. Derrière lui, comme un petit chien fidèle, le coffre du docteur.

- Nul n'est de taille face à Psymon !

Il saisit alors ses deux adversaires et les jeta directement sur la place San Marco.

- Admirez ma force et ma puissance !

- Quel emmerdeur... grogna O'Connell en regardant Catwoman sur laquelle il était toujours allongé.

Il fit une roulade et tenta de tirer sur l'ennemi volant qui répliqua avec une salve qui fit voler des pavés dans la foule toujours prise dans son piège temporel.

Un puissant éclair multicolore vint frapper un toit du palais des Doges.

Dans la cour, Degaton pianotait sur son bracelet temporel.

- Je crois que je vais reconsidérer notre collaboration, lança Glory.

- Je crois bien au contraire que non...

[HRP]
- Le Docteur Glory va être sortie des prisons pour aller ente les mains de l'inquisition pour la "questionner", je te laisse le soin de faire sa libération comme bon te semble ^^
- En 2017, le poursuivant de Catwoman décline son identité et sa fonction, c'est Travis O'Connell des Linear Men (police temporelle auto-proclamée)
- Sur la place, Degaton atteint le Palais des Doges et le Docteur Glory qui dispose d'un bracelet qui lui permet d'échapper au contrôle temporel des Linear Men ;
- Psymon revient dans la course et projette Catwoman et Travis sur la place.

Situation en 2017 : Catwoman, O'Connelle, Liri Lee et Psymon sur la place San Marco (avec le fameux coffre à ouvrir), Degaton et Glory dans la cour du palais des doges, il suffit de passer la double porte du Palais pour que tout le monde se rejoigne. Une tempête temporelle commence à frapper.
[/HRP]

L'homme encapuchonné comme un moine jura en un américain parfait lorsqu'il entendit la corne et les cloches indiquant que la sorcière s'était enfuie. Des prisonniers hurlèrent qu'une diablesse tout de noir vêtue était venue la sauver, d'autres s'égarèrent sur de libidineuses pensées. Il observa une montre connectée qui n'avait rien à faire dans ce siècle et repèra la signature de l'un de ses alliés qui peinait à trouver l'entrée du Palais des Doges depuis les souterrains. La chatte avait un coup d'avance...

Il s'élanca alors dans les couloirs pour tenter de mettre la main le premier sur elle lorsque soudainement, un coup de tonnerre retentit. Le ciel au dehors prit une teinte digne du flux temporel... Nouveau juron. Américain réellement parfait.

Dans la Sérénissime et dans le Palais des Doges, c'était la panique et les imprécations de fin des temps commencèrent à retentir dans les couloirs. Tous eurent alors un flash rapide de la silhouette de Per Degaton dans sa tenue du XVIIème siècle qui semblait chercher quelque chose.

Le moine enleva sa toge précipitamment, révélant la silhouette de RIP Hunter, un RIP plus vieux, bien plus vieux, du genre qui avait beaucoup baroudé et qui s'attendait au pire maintenant que son adversaire tentait de revenir dans cette époque en brisant son propre bouclier temporel. L'énergie que déployait Degaton était à la mesure de l'enjeu.

Un vent surnaturel balayait les canaux et la surimpression d'une ville beaucoup plus moderne essaya d'éclipser la splendeur du XVIIème siècle vénitien.

Le bracelet temporel de Glory, qu'elle avait soigneusement caché, émit un fin sifflement. Elle le tira d'une poche de sa tenue et s'abstint de tout commentaire, préférant suivre la cambrioleuse-sauveuse. Elles furent surprises par un cri :

- Catwoman !

Hunter venait de les retrouver mais il fut soudainement agressé par une forme qui apparut de nul part : Per.

Dans sa tenue militaire habituelle, le tyran lui infligea une série de coups de poings.

- Tu pensais pouvoir me piéger éternellement loin d'ici ?! lui hurla-t-il avec un coup de botte en prime. Tu as eu tort d'utiliser deux verrous... Jeunesse ignare !

Il lui enserra la gorge avec son avant-bras et lui colla la tête contre une vitre qui donnait sur la lagune. L'eau de la ville commençait à s'élever dans les cieux et des gondoles comme autant de feuilles mortes portées contre toutes les lois de la physiques tourbillonnaient dans les airs.

- Tes petits pièges se sont retournés l'un contre l'autre et ils cherchent à revenir à leur source...

RIP essayait d'articuler une phrase mais l'étreinte enragée de Per l'en empêchait.

Des images soudaines d'une fête qui se tenait en 2017 apparurent autour d'eux et comme s'ils n'étaient que des spectres, les invités et les visiteurs leurs passaient au travers.

L'orage se déplaçait dans le temps...


2017.

Alors que son rembobinage temporel devenait des plus anarchiques, que le ciel commençait à cracher des vents furieux qui démontaient les canaux et renversaient les gondoles, la place San Marco pouvait admirer la foulée athlétique de Catwoman qui remontait vers Degaton et Glory.

La fin de cette mission approchait. Per continuait de tirer en direction de Liri pour couvrir la course de la cambrioleuse. Derrière lui, Glory tremblait face au déballage. O'Connell tenta de venir en aide à sa comparse qui peinait face à l'agressivité de leur cible prioritaire. Psymon, lui, choisit de suivre la chatte qui était une adversaire qu'il jugeait plus coriace. Des salves psychiques éventraient la place et ses lourdes pierres volaient.


Glory tira sur le bras de sa sauveuse.

- Accrochez-vous...

Et elle appuya sur son bracelet.


Au même moment, en 2017, Catwoman atteignit le groupe, un éclair surgit du ciel pour frapper la place et Psymon envoya une décharge psyonique dans leur direction.

Lira tenta un hurlement.

O'Connell poussa un juron.


Le time Stream trembla avec violence. Un tunnel le déchira de part en part, reliant le XVIIème siècle et l'année 2017. Quatre silhouettes furent aspirées dans la violence de l'impact. Le mélange entre énergie psychique et temporelle se mélangeant jusqu'à effacer trois mémoires des récents évènements et les recracher aléatoirement dans la Sérénissime. Des siècles trop tôt pour eux.

Les oreilles sifflantes, Degaton se releva. Le pavé humide de la sérénissime était étonnement dur depuis que son épaule l'avait percuté. A côté de lui, allongée sur le pavé, Catwoman. Autour d'eux, une foule de badaud les observe. Elle est dans sa tenue de bal, lui dans son accoutrement de noble. Les commentaires qui fusent sont tous en italiens. Quel vacarme... cheveux, charrettes et bavardages en toile de fond, sans compter le vent et les clapotis de l'eau...


A l'inverse, du XVIIème siècle, comme aspirée par le toboggan aquatique le plus débridé de l'univers, Catwoman et Glory furent transportées dans l'autre sens. Le bracelet de la scientifique émit alors un léger "bip" et elles furent déviées dans leur course.


2020.

Chong Mai.

Une déchirure s'ouvrit dans le bureau de Degaton et les deux femmes furent projetées dans un canapé. L'atterrissage le plus réussi de leur mission.

La faille se referma, le bracelet se désactiva...

Le Silence.

Rien que le silence.

Glory,la tête en bas, une tenue dévastée par son aventure fortuite, les cheveux en bataille, les larmes aux yeux de toute cette agitation se mit à rire nerveusement. Elle qui n'avait connu que des laboratoires et des conférences, des centres militaires expérimentaux, venait d'être projetée dans le grand bain d'une nouvelle vie d'ombres et de violence.

- Merci, lança-t-elle à Sélina alors qu'elle portait ses mains à son visage.

Soudainement, plus sobrement, par une simple porte, entra Per Degaton. Il avait la mine radieuse de celui qui venait d'accomplir une mission et qui voyait les résultats tant attendus.

Les Linear Men venaient de subir un sérieux revers, il avait réglé le compte de RIP Hunter et Glory était entre ses mains...

- Mission accomplie, lança-t-il en se dirigeant vers son bureau pour en tirer un coffret.

Sa voix laissait percer quelques pointes fort inconnues pour qui ne le fréquentait pas depuis longtemps : de la satisfaction. Dans le coffret, les diamants promis, une liasse de dollars bien verts et une statuette égyptienne magnifiquement ouvragée représentant un chat. Il le tendit à mademoiselle Kyle.

- Le paiement et une petite prime compensatrice vus les détours de notre opération, commenta-t-il.

Degaton était du genre à considérer la vie des autres comme une marchandise, d'autant plus avec des mercenaires et/ou des cambrioleurs. Mettre leur vie en danger représentait pour lui une part du contrat et selon le niveau, il considérait qu'une légère prime suffisait à calmer les ardeurs.

Cela pouvait fonctionner, la plupart du temps, mais cette chatte l'avait déjà plus d'une fois désarçonné par son comportement...

[HRP]Voilà qui devrait clore ma présence sur ce sujet (sauf si ton perso veut encore interagir un peu, ce qui est tout à fait possible), un grand merci à toi pour ta participation et ta plume bondissante ![/HRP]

[Essentiellement Venise] Time For Glory

feat. SSE

En seulement quelques secondes, me voilà assise, dans un fauteuil, dans le bureau de Degaton. Je n'ai aucune idée de comment c'est possible mais tout ce que je viens de vivre m'empêche de chercher une explication plausible et surtout compréhensible... Je crois que ça fait quelques temps, maintenant, que j'ai arrêté de vouloir comprendre ce qu'il s'est passé... sans parler du cheminement dans le temps qui m'a complètement retourné la tête. Je passe une main dans mes cheveux, ferme les yeux quelques secondes et regard autour de moi. Glory est là, la tête en bas, toute aussi perdue que moi et à en croire le regard qu'elle me lance alors qu'elle me remercie, je crois qu'elle n'espérait plus se faire sortir de là.... Je lui adresse un sourire convenu avant de me redresser et de me mettre sur pieds.

Degaton fait son entrée à ce moment là, beaucoup moins affecté que nous deux. "Mission accomplie", je pousse un soupir de soulagement et semble me détendre immédiatement. Il y a encore quelques secondes, j'étais prête à bondir sur le premier qui passerait la porte.

"A la bonne heure !"

Je m'approche alors du bureau dans lequel Degaton vient de sortir un coffret. Mon sourire s'élargit et je récupére ce qui m'est du.

"La prochaine fois, quelques diamants en plus seront les bienvenus."

Je fais un clin d'oeil à Degaton et me tourne ne direction de la sortie. D'un signe de la tête, je salue Glory et je disparais en quelques secondes, sans laisser aucunes traces derrière moi... Après tout, je suis la pro pour ça !

nightgaunt

HRP: Merci à toi pour ce rp intéressant ^^ j'ai pris plaisir à jouer avec toi en tout cas.