Au nord du mur [L'ogre / La banshee]

Le voyage n’avait pas été trés long depuis Castle Broen. Débarquée sur le rivage par un esquif du clan McDougal Siobhan avait été laissée au bord de la mer avec sa monture, un Hobby irlandais noir. Personne n’insistât lorsque la jeune femme demandât à ce qu’on la laisse car elle avait besoin d’aller seul. Le navire resterait sur la plage de galets tandis qu’elle avancerait dans les terres sur sa monture et on y trouvât rien à redire. Tout est encore frais, la mort de son oncle et de son frère comme sa prise de pouvoir. Siobhan est peu bavarde mais ses regards en disent long et personne ne voudrait subir le même sort que sa famille.

Ils l’attendraient donc, élaborant des théories sur les raisons de sa venue de ce coté du mur d’Hadrien. Allait elle rencontrer des druides? La croyance en les banshee est solidement ancrée dans ces contrées et on ne jette pas des accusations de sorcellerie aussi facilement que dans les bourgs. La légende dit que les banshee sont aussi des protectrices, des magiciennes. Mais dans toutes ces légendes quelles que soient les intentions maléfiques ou bénéfiques que l'on prête aux banshee elles ont toujours quelque chose en commun: Elles sont mortelles.

Ce fut au terme d’une chevauchée dans des bois et quelques passages rocheux que Siobhan déboucha au bord d’une forêt sombre. Ce fut d’une colline qu’elle pu apercevoir ce que certains en Irlande nommaient “La Fosse”, un cratère qui n’aurait pas pour origine d’un volcan. C’était le lieu qu’elle cherchait, celui dont son père Garett lui avait parlé peu avant sa mort. La zone était marécageuse et difficilement praticable pour sa monture aussi attacha t’elle son cheval a une souche d’arbre pour avancer sur des pierres empilées pour former des ponts.

Vêtue d’une capuche et une épée à la ceinture de cuir la rousse avance en cet endroit sinistre et puant à la recherche du monstre qui selon les dires, résiderait en ces lieux. Apercevant des ossements humains bien en évidence elle observe autour d’elle en marchant silencieusement, ses oreilles effectuant le véritable travail de recherche. La vie grouille autour d’elle, mais la mort aussi...

Siobhan McDougal est jeune et impressionnable. Réussissant a accomplir le rituel qui lui avait accordé ses pouvoirs elle n’était pas morte, n’avait pas été captée par une dimension infernale pour y demeurer des siècles au contact de créatures hideuses.

Tout cela lui fait donc un choc, elle a peur bien qu’ayant ce tempérament enflammé qui avait fait que son père avait tant insisté pour qu’elle dirige un jour malgré qu’elle soit une femme. La créature qui sort de la caverne l’effraie elle aussi même si elle était là justement pour la rencontrer. L'ogre était plus impressionnant encore que dans les histoires entendues car il ne semblait pas pataud. Musculeux le colosse aux yeux rouge n’a pas tant de gras que cela et laisse peu de doutes à une question: Si je cours, vais-je le semer? Non. Elle oui, peut être. Mais un humain ordinaire non. Et cela fait réfléchir encore plus à ce qu’il faut lui dire car si vous ne pouvez ni le battre ni le semer il gagnera un affrontement quoi qu’il se passe. Heureusement il existe pour les humains un troisième moyen de résoudre un potentiel conflit, le dialogue. Et pour elle aux dons surnaturels plusieurs autres, mais qu'elle connait encore si peux. Tout est tellement frais.

“Je voulais vous rencontrer. Je n’ai pas de mauvaises intentions.”

Quand bien même en aurait elle eu probablement ne l’imaginerait il pas en mesure de le menacer, mais si le fait qu’il s’adressa à elle en gaélique Irlandais et non Ecossais qui était un peu diffèrent avait de quoi interroger la cheffe de clan.

“Comment savez vous que je viens d’Irlande?””

Avait il des dons de divination aussi?

L’ogre posa son épée ce qui était un signe d’apaisement appréciable et diminuait un peu la peur qu’il pouvait générer. Il fit aussi l’honneur d’une réponse allant bien plus loin que ce à quoi la visiteuse s’attendait, à savoir autre chose qu’une compilation de borborygmes et de grognements. Elle s’était attendue à cela, à tord.

“Vous connaissez bien le monde au delà de ces bois, trop pour quelqu’un qui vivrait reclus. Peut être vous y mêlez vous incognito?

A vrai dire elle ne voyait pas d’autre explication car son sens de l’observation n’aurait servi à rien sans une somme de connaissances qu’il aurait acquis en rencontrant du monde, beaucoup de monde autour de lui. Il l’invitât à manger quelque chose et sa première envie fut de refuser, s’inquiétant de ce qu’il pouvait bien vouloir dévorer.

”Hum. Je préfère partager un repas avec vous qu’en être une composante. J’accepte donc.

Elle s’avance d’un pas en repensant aux histoires que l’on raconte sur les ogres, mais pense qu’elle aurait les moyens de se défendre s’il s’en prenait à elle. Et puis au pire elle criera, si cela ne sert chez le commun des mortels qu’a appeler d’autres personnes à la rescousse c’est chez elles au contraire le moyen d’affirmer sa puissance. Alors peu importe qu'ils soient perdus au milieu de rien.

La créature a un appétit d’ogre, est ce étonnant? Si il plaisante sur son anthropophagie Siobhan rit jaune puis regarde d’un air suspicieux ce qu’il y a dans son assiette. Cela sentait bon et c’était des légumes connus sauf celui qui était jaune, tout invitait à y gouter. Elle s’y plia par diplomatie plus que par faim.

“C’est au sujet de ces besognes dont vous avez parlé que je viens vous visiter. Je fais partie d’un clan du Nord Est de l’île, et avons pour rivaux la cité d’Armagh. L’Ulaidh pourrait ne devenir qu’une seule province unifiée si elle tombait mais son château est bien défendu.”

Une basse besogne…la guerre est elle une basse besogne? Nombre de gens y voient là quelque chose d’honorable, l’occasion d’acquérir de la renommée.

“Si vous nous aidiez a faire tomber le château d’Armagh…alors je suis certaine que mon clan vous accorderait des terres parmi celles des vaincus.

Un sourire malin sur le visage la jeune femme joint ses mains en posant ses coudes sur la tablée, se demandant bien si un être vivant dans une caverne loin de tout pourrait être intéressé par la même chose que tous les hommes: Le pouvoir.

L’ogre était capable de faire tomber le château d’Armagh et ne manquait pas d’idées pour y parvenir. Tout en force en finesse ou même en manipulation dans les intérêts de la visiteuse il n’y avait qu’a faire son choix, ce qui n’était pas pour lui déplaire.

“Ouvrir les portes et tuer les gardes les plus fidèles du seigneur suffirait. Voyez vous…détruire une muraille entière ou assassiner le chef de la cité pourrait être gratifiant mais je pense à l’après. Une cité en bon état se défend plus facilement et un seigneur çà se rançonne. Je sais faire preuve de clémence."

Elle le regarde en coin se disant qu’il a compris ce qu’elle veut dire par “ Je”. Le clan c’est elle.

“Je m’appelle Siobhan McDougal je suis la cheffe du clan McDougal. Les fanatiques de St Patrick me voient comme une créature infernale aussi leur faire peur n’aurait pas grand intérêt, au contraire ce qu’il me faut c’est rassurer. Un ogre qui détruit un château et assassine sa noblesse c’est un motif d’unifier tous les clans d’Irlande voyant là l’œuvre d'une sorcière, un surnom dont certains ecclésiastiques m'ont déjà affublée. Dès qu'une femme se sent libre et n'obéis pas aux hommes c'est une sorcière de toute façon.

Elle plissa les yeux, bien que très jeune elle semblait déjà un peu stratège et surtout ambitieuse.

“Si nous envahissons la ville dont vous aurez ouvert les portes nous seront en mesure de la défendre tout en ne faisant pas trop peur aux voisins. Les clans d'Irlande me verront comme quelqu’un avec qui on peut négocier, marchander. Et l’or de la rançon du seigneur serait pour vous. Je suis certaine que vous pourrez vous payer des professionnelles fort jolies et compétentes avec."

Et elle aurait commencée à gagner du terrain sur ses voisins en évitant de trop les alarmer. Lorsqu'ils comprendront ce qu’elle est vraiment il sera alors trop tard pour eux.

Siobhan écoute l’ogre en silence, l’observe manger comme quatre alors qu’elle ne prend que très peu de choses dans son assiette.

“Je ne m’attend pas a être bien vue je le serais obligatoirement mal. Mais si au moins je pouvais éviter qu’ils ne se liguent tous contre moi quand je ne suis pas prête à les affronter ce serait pas mal.

Elle récupéra la miche de pain chaud pour en arracher un morceau et y déposer de la viande.

“Il sera défendu convenablement dès lors qu’ils auront vent que mon clan est en mouvement, ce qui arrivera je ne me fais pas d’illusion. Peut être cent à deux cent hommes, voir plus si ils prennent la menace au sérieux. Je suis d’accord avec vous la loyauté est difficile a percevoir mais il y a un indice en la matière: Les loyaux se rendent moins facilement. Si certains résistent faite un exemple ou je le ferais.

Elle dit cela avec froideur ne laissant aucun doute qu’elle serait capable de se montrer impitoyable si cela permettait d’être prise au sérieux. Certains ont peut être besoin d’une confirmation qu’elle n’est pas arrivée à la tête de son clan par hasard. Les derniers propos de l’ogre sur la gente féminine lui arrachèrent un sourire un peu hautain.

“Vous n’auriez pas besoin qu’elles soient rémunérées? Alors pourquoi en demander en paiement pour vos exploits. Vous n’auriez pas demandé cela si elles venaient vers vous d'elles même.

Cette phrase servie avec peut de diplomatie pourrait mettre son intervenant en colère mais elle n’y pense pas en la prononçant. Elle pouvait être brut de décoffrage.

Siobhan regarda la pâtisserie atterrir sur la table lâchée par les grosses mains de l’ogre et cela la sortit de ses pensées. Elle était réellement surprise par l’être qu’elle visitait, l’imaginant comme une brute quand on lui avait contée sa légende elle découvrait désormais un homme bien plus réfléchi qu’il n’y paraissait, et au fait des choses des diplomaties et de la guerre. Ses histoires concernant les curieuses lui rendant visite ne l’étonnèrent pas tant que cela. Concernant la stratégie a adopter le doute se présentait a elle sans y être invité. Devait elle cacher sa présence lors de leur attaque pour avancer masqué ou au contraire l’afficher? Se servant du dessert elle leva un œil vers les nuages noirs venant des Highlands.

“Ne vous en faites pas pour cela.”

Il n’y avait vraiment pas de quoi surtout pour elle désormais.

“Par ailleurs je suis attendue sur le rivage.”

Elle peinait a se dire que rester pour la nuit dans la grotte de l’ogre soit une bonne idée et sa curiosité n’irait pas jusqu’à là.

“Vous n’aurez pas à vous déguiser ou vous cacher, le secret ne tiendrait pas longtemps de toute manière. Nous n’avons pas de roi non.”

Elle but dans son verre.

“Pas de reine non plus par ailleurs. Pour l’instant.”

Siobhan posa ensuite celui ci puis fini son repas avant de se lever et garder sa cape de fourrure autour d'elle. Elle regarda les nuages et ses yeux s’illuminèrent une seconde d’une lueur blanche. Une brise souffla, le vent comme les nuages venaient de changer de direction tout simplement. Elle se tourna vers son hôte.

“Je vous remercie pour votre hospitalité.”

Elle tira un sou de sa poche et le posa sur le siège qu’elle avait occupée.

“Pour le repas qui fut goûtu. Nous avons un accord donc, je vous enverrais un messager pour vous faire part des détails.”

La rencontre entre l’ogre et la banshee touchait à sa fin, tout comme le sommeil des seigneurs d’Irlande...