Bilan de Crise... ou bilan et crise ? [Xanadu]

Il n'est pas dans ses intentions de le surprendre.
Alors... lorsqu'un vortex légèrement brumeux apparait dans le dos de celui qui se tient tête basse, occupé à s'affairer sur son travail, un léger tintement annonce son arrivée. Comme une fine clochette résonnant à ses oreilles.

Nimue s'extirpe avec délicatesse du portail qu'elle a créé une fois qu'elle a localisé Ray. On peut rapidement distinguer dans son dos le salon de sa boutique plongé dans une semi pénombre, le large canapé de velours et la table sur laquelle se dispersent quelques cartes de tarot, avant que le portail ne se referme.

- Excuse moi de m'inviter de la sorte, mais je préférais rester discrète. S'excuse t'elle d'une voix teintée de gêne, en esquissant un sourire aimable.

Toujours ce même regard indéfinissable, qui voit sans voir, mais se pose toujours là où il faut avec une étonnante justesse. En l'occurrence... dans celui de l'homme blessé qu'elle est venue voir.

Vêtue d'une ample robe qui traîne sur le sol, d'un vert pâle rappelant les pousses naissantes d'un tilleul, les fines broderies d'or et d'argent parsemant le tissu, sa longue chevelure raide et noire dégoulinant le long de ses épaules jusqu'à l'arrière de ses cuisses, on la dirait tout droit sortie de l'un de ces traditionnels contes chinois.

Joignant ses mains puis entrelaçant ses doigts sur son ventre, elle semble contempler celui qui lui fait face de très longues minutes avant de reprendre la parole.

- Ce qu'il s'est produit en Atlantis était terrible pour toi.

Pas "a du être", ni "a peut-être été".
Non..
Elle sait... que ça a été terrible pour lui.

Ils se connaissent depuis un moment maintenant, sans pour autant être véritablement proches. Pour autant... aujourd'hui... lui est apparu comme une évidence qu'il avait besoin d'elle.
Ainsi est-elle venue. Tout naturellement. Sans chercher plus loin.

- Je t'écoute. Finit elle par dire d'une voix douce et encourageante.

Être en mesure de déstabiliser quelqu'un est un art. Parfois amusant, parfois malsain. Tantôt manipulateur, tantôt candide. Certains l'emploient à bon escient, provoquant interrogations et surprises, léger mal aise sans qu'il ne soit pour autant limitant, jusqu'à une remise en question parfois.
Quant à d'autres... la déstabilisation est une manoeuvre parmi tant d'autres pour parvenir à leur but, engendrer un trouble, créer une ouverture.
Nimue est de la première catégorie. La plupart du temps, du moins. Cependant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, cela est rarement intentionnel. Une sorte de... seconde nature, en quelque sorte.

Faisant fit du trouble de son interlocuteur, elle lui adresse simplement un sourire et un hochement léger de la tête en guise de réponse à son salut.

Mais elle se tait. N'ajoute pas un mot de plus.

Les traits se figent, se fixent, puis se raidissent, s'assombrissent. Les mots cheminent doucement dans l'esprit du savant, jusqu'à atteindre l'endroit où ils devaient parvenir. Et si elle ne le voit pas de ses yeux, l'aura qu'il dégage est bien plus éloquente que les expressions qui se succèdent sur son visage à cet instant.

La perplexité est de mise. Ils ne se connaissent que peu, cela est vrai. Principalement par ouïe dire, un peu pour s'être par moments croisés ça et là. Il est perturbant de se confier à une inconnue. Mais cela est parfois salvateur. Parce que de l'inconnue... on se moque bien souvent des sentiments ou du jugement. La plupart du temps, c'est bien l'avis de nos proches, de ceux que nous aimons, qui compte le plus. Ce que peut bien penser un étranger croisé au détour d'un couloir... qu'importe... quelque part.

- Tu fais fausse route, Ray Palmer.

Ces quelques mots se détachent calmement de ses lèvres, alors qu'elle l'a laissé aller jusqu'au bout de sa pensée sans l'interrompre. Ou plutôt... qu'elle l'a laissé poser son entrée en matière. Car il est plus que probable qu'ici ne subsiste encore que la face émergée d'un iceberg bien plus imposant sous la surface.

- Bien qu'il en donne l'apparence, le pouvoir de Merlin n'est pas sans limite. Poursuit-elle d'une voix égale.

Nimue ne cherche pas à le contraindre. Elle ne brise la distance à aucun moment. Ne se place pas face à lui. Son indéfinissable regard reste plongé sur un horizon qu'elle est probablement la seule à percevoir.

- Tu ne possèdes pas les pouvoirs qu'il faut pour l'affronter, mais tu es loin d'être le seul. Cependant... Tu as risqué ta vie et tu as été utile.

Contrairement à la conclusion à laquelle il semble parvenu, ce qui est pour le moins logique si on se place à sa hauteur, dans son esprit, que l'on se met à sa place... tout simplement.

Cependant.

- Qu'il ait été seul ou aidé, les sorts qui ont été jetés en Atlantis demandent beaucoup de pouvoir. Plus il y a de cibles, plus les ressources nécessaires décuplent. Et pénétrer dans l'esprit de quelqu'un pour le tourmenter est non seulement la pire abomination que la magie puisse permettre, mais demande également de grands pouvoirs. Ainsi... à ta hauteur... tu as participé à affaiblir la puissance qui était à sa disposition à ce moment précis. Tout comme Power Girl, Superman et le Green Lantern.

Elle se garde de mentionner la présence de Nick Necro, ayant des choses à régler avec lui et ne souhaitant pour l'instant par révéler qu'il était parmi eux à ce moment.

Nimue ponctue ces mots par un doux sourire. Il ne pouvait rien faire de plus. Il n'aurait rien pu faire de plus, même en étant Atom. Mais... il a participé à sa manière et en risquant sa vie.

- Alors, je te le demande, Ray Palmer. Quelle plus belle preuve de puissance et de courage que celle de risquer sa vie pour les autres.

Un délicat sourire se dessine sur les lèvres de son interlocutrice alors qu'il reprend la parole après un temps de silence. Un silence troublé, empreint peut-être d'un peu de perplexité, de doute ou encore de questionnement.

- Je te rassure, Ray Palmer, ça n'est pas le cas.

Elle lance ces quelques mots d'une voix amusée, alors qu'il partage avec elle le sentiment qu'il éprouve. Oh non... elle est bien loin de le connaitre aussi profondément qu'il peut l'imaginer.
Simplement... Nimue est très âgée, extrêmement sensible aux énergies qui l'entourent, sa cécité lui a également permis d'aborder son environnement d'une manière bien différente et sa rédemption lui a offert une empathie dont elle n'était pas capable auparavant.
Tout cela aide un peu à la compréhension de l'autre.

- Non ce n'était pas assez, en effet. Confirme t'elle d'un ton doux, sans user pour autant de pommade pour apaiser ce que cela a déclenché en lui.

La compassion... ce n'est pas toujours une tape sur l'épaule.

- Ce n'était pas assez. Cependant. Dans les conditions qui étaient les nôtres, tu n'aurais pas pu faire mieux. Par contre... tu aurais pu faire pire. Bien pire. Et c'est cela que tu dois retenir.

Avant... à l'époque... le passé.
Nimue extirpe un soupir. Le passé... cet effroyable et terrifiant passé, qui vient régulièrement hanter une majorité des êtres qui peuplent ce monde, comme les autres d'ailleurs. Un passé avec lequel fort peu parvient à vivre sereinement. Un passé qu'ils sont trop nombreux à regretter, à pleurer, voire à occulter.

Elle ne peut pas l'aider. Elle ne peut dévoiler le choix qui serait le meilleur pour lui. Le choix qui le martèle depuis un moment, mais qui prend une ampleur bien plus importante à cet instant.
Un choix qui lui appartient. Une décision qu'il est le seul à pouvoir prendre.

- Je ne peux hélas pas t'être d'une grande aide. La seule chose que je puisse te recommander, c'est de te poser une seule et unique question. Si tu prends la décision de revenir vers ton ancienne vie, ou du moins d'essayer. Le fais-tu parce que tu estimes avoir encore quelque chose à apporter au monde ou le fais-tu par orgueil, parce que tu ne tolères pas ce que tu considères comme un échec.

Un léger sourire flotte brièvement sur les lèvres de la médium lorsque son interlocuteur reprend la parole. Il esquisse quelques mots. Ils sont rares, un peu hésitants, à l'image du trouble qui agite férocement l'esprit de cet homme pris entre deux feux.

Admettre que l'on a de la fierté n'est pas le plus ardu.
Admettre que l'on a de l'égo est déjà nettement plus difficile.
Car ce constat, ce face à face avec soi-même, impose l'introduction d'un élément sinequanone sans lequel rien n'est envisageable : la remise en question.
Et se remettre en question... revêt parfois une complexité sans nom.

- Les disparus ne le sont jamais vraiment... le savais-tu... Ray Palmer.

Ces quelques mots énigmatiques se suffisent à eux-mêmes. Car ils posent un principe. Ils plantent une graine qui choisira ou non de germer, selon si on l'alimente correctement ou choisit de la laisser pourrir en terre.

Nimue ne prononce pas un mot.
Elle écoute, attentive, comme toujours, mais choisit de ne pas l'interrompre, ne pas le perturber plus encore, de le laisser... dérouler le fil de ses pensées, de son passé. Ray Palmer est en train de se psychanalyser lui-même, sans doute sans s'en rendre compte.

Il admet. Il réalise. Il analyse. Il constate.

Elle, silencieuse et dont la présence est presque devenue insaisissable, comme si elle était là sans l'être, comme si la pièce était vide de toute présence en dehors de celle du scientifique, assiste à ce renouveau, à cette renaissance.

Paisible. Silencieuse.

Ce n'est que lorsqu'il a pris sa décision, que la dame à la longue chevelure d'ébène brise le silence, de sa voix douce et posée.

- Tu as le droit d'avoir des envies. Tout comme tu as le droit de tenter de nouvelles expériences. Tu as le droit de te tromper, de rebrousser chemin. Tu as le droit de changer d'avis, de revenir sur tes pas pour prendre une nouvelle direction, même si celle-ci t'est familière.

Claire sans l'être, est-ce là toute la complexité de cette femme qui énonce bien souvent des vérités opaques.

Elle fait quelques pas dans sa direction, alors que sa main s'élève délicatement dans les airs et que la pulpe de son index se pose entre les sourcils du scientifique.
Son regard côtoie le vide et le plein en même temps, comme si il embrasait tout et rien à la fois. Bien entendu... Nimue est incapable de juger de la boutade semi bougonne de son interlocuteur.
Alors choisit-elle un moyen détourné de lui faire passer un message, tout en rebondissant sur son trait d'humour, qui n'en est peut-être pas un finalement...

- L'essentiel est invisible pour les yeux...

Son index délaisse le front de Ray, sa main s'exilant quelques brèves secondes avant de se poser à plat sur ce coeur qui bat sous son costume tissé de bleu et de rouge.

- ...on ne voit bien qu'avec le coeur.

Un sourire aimable étire la commissure de ses lèvres.

- Antoine de Saint-Exupéry. Un écrivain français. Un homme charmant.

Du moins... quand il était en vie. Car elle n'a plus croisé son chemin depuis qu'il a franchi les portes de l'autre monde.

Nimue se détourne de lui dans un froissement de tissu et se dirige vers la large porte du laboratoire.
Elle a accompli son devoir, il est désormais temps de prendre congés.

- Je te souhaite de retrouver ce qui te manque, Ray Palmer. Mais je pense que tu es sur la bonne voie. Porte-toi bien, nous nous reverrons sans doute bientôt.

Toujours entre deux eaux, deux vérités, deux mystères, la dame disparait dans le couloir inondé de lumière sans se retourner.

Madame Xanadu… est quelqu’un.

Ray Palmer la connaît sans la connaître réellement. Il sait qui elle est, il a connaissance de son passé – mais l’homme de science qu’il demeure a du mal à accepter, intégrer, encaisser le principe même d’une mystique immortelle, qui a erré du temps du Roi Arthur.
Oui, Camelot et tout ça. Ce qui est paradoxal, car le scientifique a visité cette époque, via la Time Pool, où il a également croisé une des incarnations de Hawkman, son meilleur ami.

L’esprit est une entité, une facette étrange de l’être notamment humain… et oui, Ray a du mal avec l’existence de Madame Xanadu.
Même s’il apprécie son intervention, ici. Même si ses mots, sa présence, sa venue et ses mots lui font du bien, lui apportent un soutien réel.
Mais… la suite…

« Euh… »

La suite provoque la surprise réelle de Ray, dont le visage exprime bien la stupeur – alors que Madame Xanadu disparaît.
Tout simplement !


« Et bah… d’accord… »

La magie.
Définitivement un concept avec lequel il a du mal – même s’il a conscience que cela demeure une puissance proche de la science.
Une science que les scientifiques n’ont pas encore maîtrisée, peut-on dire. Mais…
Oui, ça reste troublant. Même si le directeur de la Justice Academy en fait fi, ici, pour se concentrer sur l’apport, le sujet central du jour.

Sa décision.

Sa volonté, d’aller de l’avant. Son choix, de se relancer. Son envie, de redevenir Atom.
Sa peur, bien sûr, de ne pas réussir – de perdre, encore. De s’y perdre.
Mais… ça se tente. Ça doit se tenter. Il doit tenter. Il doit essayer. Il doit… il est.

Il redevient Atom !

« Ah… merci ! Je… ne sais pas si vous m’entendez encore, mais… merci ! »

Un sourire gêné mais sincère glisse sur son visage.

« Et… merci pour la réplique ! J’ai… lu Le Petit Prince, jadis… et ça fait plaisir d’y repenser ! Merci, Xanadu ! Merci, et… à bientôt ! Peut-être ! »

Ray demeure un peu gêné, troublé de parler ainsi dans le vide – mais il hausse les épaules, et fait avec.
Et… sourit, surtout.

Il se redresse. Il serre les poings. Il bombe le torse.
Il sourit.
Seul, certes, dans son repaire – dans son foyer de solitude, où il a été visité… et où il a changé. Où il vient de changer. Où il vient de décider.

Atom est de retour !

Il en est surpris. Il en est fier. Il en est heureux.
Ça… ne durera peut-être pas, mais qu’importe. Il a décidé. Il a choisi. Il avance. Il essaye. Il sort de sa zone de confort, même s’il revient dans de vieilles habitudes.

Il tente quelque chose. Il évolue. Il vit !
Et ça fait du bien… et Atom est de retour, oh oui !

(HJ/ Merci pour ce RP /HJ)