[Branefold Interior] La fin du début, le début de tout le reste [PV. Ray]

J'hésite encore quelques secondes avant d'envoyer ce message.
Ce ne sont que quelques lettres, j'en ai conscience, mais... ça implique trop de trucs. Je suis seul. Seul comme jamais je n'ai été. Et c'est devenu ma seule certitude, là. Mon seul horizon. Ma seule perspective. Et je veux pas qu'on me l'enlève. Me raccrocher à autre chose me semble tellement... compliqué. Impossible, quoi. Valider l'envoi de ce message, permettre à la connexion de Terre-0 de passer jusqu'à moi, ça demande un courage que je n'ai p...
MERDE, envoyé !

...
On va dire que... que c'était voulu.
Ce qui n'est pas totalement faux non plus.
J'ai peur de ne plus être seul oui, mais c'est ce que je veux, in fine. Mes proches. Les gens que j'aime. Autour de moi. Mais les avoir proche, c'est un risque... le risque de rappeler le manque. Le risque de les voir exposés au danger, comme... mon...
D'un bref mouvement de la main, je balaie tout ça, je frotte les larmes sur mes joues, et j'ouvre devant moi un petit rift mal foutu, bringuebalant.


J'ai fait mieux, c'est sûr, mais qu'est-ce que j'en ai à faire ? Hein, franchement ? Rien. C'est ça. Rien à faire du tout. Rien à foutre. Ca me passe au dessus de la tête. Mon pouvoir, mon rôle, mon apprentissage, là, ça ne vaut plus rien. Tellement plus rien que je vois, au loin, quelqu'un qui observe. Quelqu'un qui n'ose pas avancer. Quelqu'un que je connais bien. Très bien. Mieux que quiconque dans tout l'Omnivers, peut-être.


Qui aimerait bien venir, mais qui n'ose pas.
Car il est lié de près ou de loin à ce qui m'est arrivé.
Et il tient à mon... intimité ? Ma solitude ? Je pense très sincèrement qu'il ne sait pas du tout comment s'y prendre, et qu'il préfère éviter d'envenimer la situation.

Peu importe.
S'il ne vient pas, quelqu'un d'autre viendra.
Quelqu'un de pas très doué non plus, mais qui va quand même passer ce portail mal fichu pour me voir. J'en veux pas à Tempus. Ca doit être dur pour lui de me voir comme ça sans réellement pouvoir intervenir. Je sais qu'il est limité par le code des Fuginautes, et qu'il l'enfreint constamment pour moi. Mais... j'ai besoin de quelqu'un là.
J'ai besoin que quelqu'un me sorte de la solitude du Branefold Interior.

Il est là.
Et il fait son Ray Palmer, avec ses machineries bizarres, ses détecteurs de tout et de rien, sa mine constamment surprise et ses cheveux encore plus en bataille que l'état de Métropolis après la chute de Luthor. L'espace d'un instant... ça m'agace un peu. Mais la sensation passe, bien vite remplacée par ce même vide qui me berce depuis... depuis.
Ah, Ray Palmer, on dirait presque un gosse dans un magasin de bonbons, là. SI j'étais plus en état, que j'avais accompli le quart de ce qu'il a accompli et que j'étais Superman, je serais presque tenté de lui tirer les joues comme une vieille mamie gâteuse. Mais je suis rien de tout ça, alors je reste immobile, sur mon bout de caillou flottant dans l'immensité environnante.

- J'veux pas vous cacher de trucs, ni vous spoiler Professeur... mais vous êtes pas au bout de vos surprises.

J'arrive pas à faire mieux qu'un sourire triste, fade, sans substance.
C'est si dur que ça d'être plein de vie, en temps normal ? En même temps, c'est pas tous les jours qu'on est responsable de la mort de son propre père, n'est-ce pas ?
Pour éviter de trop m'attarder sur cette pensée, je me mets alors à parler.

- Tout. On accède à toute l'existence depuis le Branefold Interior.

Mais ça ne dure pas.
Ma voix s'évanouit après, et impossible de la retrouver, jusqu'à ce que le Professeur se taise à son tour, et laisse le silence reprendre sa place légitime. Quelques secondes passent ensuite, sans que lui ou moi n'ayons envie de dire quoi que ce soit.
Ca ne dure pas. Pas trop longtemps, en tous cas. J'espère.
Car j'ai une réponse à lui fournir.
Pas celle qu'il attend, sûrement, mais c'est un début quand même.
Faut pas trop m'en demander, là, et prendre le peu que j'ai à donner.

- Je peux voir plein de gens, quand je me concentre. De la vie, partout. C'est complètement fou, quand on y pense. Ca grouille. Beaucoup. Tout le temps. Du cœur aux confins des univers et multivers successifs. Et pourtant... pourtant je me sens seul. Plus seul que je n'ai jamais été.

Je replie les jambes contre mon torse, comme pour les retenir de s'enfuir, loin de tout ça, loin de cette tristesse étouffante. Une espèce de voile grisâtre corrompt tout ce que je vois, tout ce que j'entends. J'ai envie d'aller mieux, oui. En fait, je VEUX aller mieux, même si ça semble compromis pour le moment.

- Si je vous ai laissé venir, c'est pas pour avoir un mentor. Parce que, sans vouloir vous manquer de respect, vous êtes un peu nul à ça. Mais c'est pas grave, hein. Je voulais juste avoir un ami avec moi. Même en me forçant un peu.

Et, alors que je devrais continuer, ma bouche s'arrête.
Les mots restent coincés au fond de ma gorge, au point de la rendre douloureuse.
Ils gonflent, ils se tordent, sans oser pointer le bout de leur nez.
Comme si jaillir à l'air libre allait les rendre réels, et les ancrer pleinement dans notre monde. A la place, bien pitoyablement, voilà ce qui sort:

- Vous savez ce qui s'est passé...

- Hrrrrmf.

Du revers de ma manche, j'essuie les larmes qui coulent.
Le sel d'une mer bien triste envahit ma bouche, quand je me mords la lèvre inférieure.
Mais Ray Palmer, LE Atom, tente quelque chose. Quelque chose qui m'aurait fait bondir en temps normal, tel un marsupilami bleu spatio-temporel.
Là, je n'ai comme seule réaction qu'un sourire triste.
Parce qu'il vient de faire une blague.
C'était HAUTEMENT inattendu !

- Hé, vous forcez pas si vous voulez pas, Professeur.

Inattendu et... j'allais dire adorable, mais non.
Ce n'est pas assez pour ça. Pas assez au gars qui a voulu m'enfermer pour me priver de mes pouvoirs pour être considéré comme adorable.
C'était cool. Juste cool. Cool de sa part d'essayer, et marquer l'essai sans transformer.
Oui ça m'arrive de regarder le rugby, à la place du foot. J'aime pas les gros casques grillagés.
D'un petit mouvement de la tête, je l'invite tout de même à venir s'assoir, sur l'excroissance rocheuse juste à côté de moi.

- J'apprécie, en tous cas.

Mes lèvres se plissent, témoignant de ma réflexion.
Voudrais-je Blue Beetle ou Elongated Man à la place d'Atom à mes côtés, là, maintenant ?
Des gens moins rudes, plus habitués aux jeunes et aux bêtises, avec une âme de papa et des onces de douceur à distribuer.
Est-ce que c'est ce que je veux ?
Peut-être...
Peut-être pas...
Je sais pas trop.
Tout est encore assez flou.
Alors il faut que je verbalise mes pensées, pour avancer.

- Mr. Kord et moi... on a pas encore trop eu l'occasion de travailler ensemble. C'est... hrmf, un bon collègue on va dire ?

Oui, il est sympa.
Et on va bien s'entendre, j'ai aucun doute là-dessus !
C'était le super-scientifique préféré d'Ernie. Elle le trouvait drôle, accessible, fun, et pis il avait Booster Gold quoi ! Les délires complètement assurés. Moi, c'était Atom. A croire qu'avant même d'être un héros, j'aimais déjà me prendre la tête avec les gens les plus compliqués.
Cela dit, je suis quand même tombé sur l'ange d'Opal City.
J'ai eu beaucoup de chance.

- M'sieur Ralph... il est bien occupé à travers le payx. I-il enquête sur des cultes occultes. Faut pas que je le dérange. Ca s'rait dangereux. Mais j'irai le voir... au moins pour lui dire. Lui dire qu'il va pas me perdre non plus. J'lui ferai jamais ça.

Il a d'autres chats à fouetter qu'un gosse pleurnichard pas foutu de protéger les siens, et qui va évidemment lui rappeler sa défunte femme avec laquelle il a encore tant de mal à faire la paix. Je veux pas. Jamais.

- Pis vous... je voulais pas trop vous voir... pas à cause de tout c'que vous venez de dire, Professeur. Ni à cause des SMS. Ca, je m'en contrefiche. Vous comptez pour moi aussi. Mais c'est ça le souci.

- Mon père est...

Non.
Ca sort pas.
Peut pas le dire.
Trop dur.
Yeux immédiatement humides.
Chier...

- ... parce qu'il était proche de Sideways. Je suis pas Batman, Superman, ou... Atom, mais mon pouvoir attire la convoitise. Il l'a déjà fait. Il le refera. Et vous, vous, les gens que j'aime, vous allez en subir les conséquences !

Le voilà, le nœud du problème.
Au-delà de mon deuil, au-delà de mes doutes, de ma tristesse, de mes larmes, du froid dans mes tripes, de ma rancœur, de ma colère et de mon désir de vengeance: le cœur de tout ça, c'est que les attaques sur mes proches vont continuer, j'en suis sûr. C'était loin d'être un accident. Mais comment éviter ça ? Si on a pu s'en prendre à la personne la moins connue du monde pour me toucher, pour me briser, qu'est-ce qui peut les empêcher de s'occuper du Professeur, de M'sieur Ralph, d'Ernie, de Gar, de Joey, de Tim, de Steph et des autres ? Tous ces autres qui sont devenus mes proches, par la force des choses...

- Et ça, je sais pas gérer ! Comment on fait, Professeur ? Comment ?!

- Coupable, non... mais responsable...

Ce murmure s'échappe de mes lèvres, sans que je puisse réellement y faire quoi que ce soit. Les mots, autant que les silences, témoignent de ce que je pense, aussi sûrement que si j'avais prononcé chaque lettre, chaque syllabe, chaque mot.
Sideways n'a pas tué David Flynn. Mais il l'a amené à mourir. Sans Sideways, Derek James aurait encore ses parents; ses deux parents. Et il ne serait pas là, paumé au milieu d'une dimension frisant le merveilleux, avec un titan spatio-temporel en lévitation à plusieurs centaines de mètres de là et un grand petit héros à ses côtés. Il n'aurait pas tout ça. Mais il aurait autre chose, comme tous les autres adolescents de Gotham: ses deux parents. Les Noëls auraient été moins tristes, et les plaies dans le cœur et l'âme moins vives. Et, même si le Professeur parle vrai, parle fort, parle profond, comme il m'a rarement parlé... bah j'arrive pas à l'écouter aussi proprement que je voudrais. Une petite voix dans ma tête hurle "JE SAIS !" à tout rompre, agacée, coléreuse, destructrice. Impossible de l'étouffer... impossible de parler de "je". J'y arrive plus.
Alors je me tais, quelques longues secondes, uniquement ponctuées d'un très las hochement de tête, presque mécanique.

Et quand la voix me revient, c'est pour dire:

- Elle avait l'air d'être chouette, Laëthwen.

Ecouter, ça a été difficile.
Mais voir... voir la rêverie dans le regard du Prof, voir les traits de son visage s'adoucir, voir toute cette tendresse inattendue surgir du passé... ça, j'ai su le faire. Parce que le babil, je le connais. Après quelques moments passés ensemble, je commence à m'habituer. Mais pas à ce que j'ai vu se déployer autour de lui, cette espèce d'aura de... je saurais pas trop dire. Mélancolie ?

Petit soupir.
Ma vie veut plus rien dire.
J'ai Atom qui me réconforte, là. En parlant de lui.
En soulignant le parallèle qui existe entre nous. Alors qu'il y a un an de ça, il voulait m'enfermer dans une boîte pour me retirer mes pouvoirs. J'en rirais presque, si la situation s'y prêtait. Derek James le plus bizarre des jeunes héros ! En attendant, je pose mon regard sur mon homologue, mon collègue, mon... mon prof quoi.

- Merci... de me parler. De m'aider. Je suis pas très doué non plus pour être triste, j'ai l'impression, hé hé...

Petit pouffement sans grande conviction en essuyant une larme sur ma joue.
Un petit tremblement me remue la lèvre, qu'un rictus instinctif vient immédiatement recadrer.
Je m'apprête à ouvrir ma grande bouche, pour dire quelque chose, quand...

KRAK

Immédiatement, je me redresse, les sens à l'affût.
On presse contre les parois du Branefold Interior.
Ca force.
Et par "ça", j'entends un truc dont j'ignore tout.
Un truc qui vient d'ailleurs. Un truc... muche.

KRAK

Un nouveau craquement.
Pas bon.
Pas bon du tout.
De fines failles se dessinent dans l'air, au centre de tout et de rien.
Un nuage sombre s'en échappe, comme si la corruption d'un ailleurs pire que le nôtre cherchait à s'infiltrer chez nous. Corruption, parce que ça à l'odeur d'œuf pourri, de moisissure et le goût de cendres dans ma bouche. Un combo éminemment rassurant, nous sommes d'accord.

Je vois Tempus se crisper, au loin.
Son bâton jaillit de sous sa cape, comme s'il avait toujours été là.
Et il s'avance, prudemment, vers l'étrange manifestation. Sans savoir, pas de pouvoir. Et c'est dans une pareille embuscade qu'il a jadis perdu son bras...

Et d'un coup, sans crier gare, le miroir se brise !

KRAAAAAAAAAAAAAASHK

Le Branefold Interior vibre, comme si toute sa structure était attaquée !
Ce qui est le cas, je le sais, je le sens. J'aurais même dû le sentir avant, mais c'était la surcharge, là. Trop, trop, trop. Mon esprit était boursouflé de chagrin, faut dire.
Quelque chose venu d'un ailleurs qui m'est totalement inconnu pénètre au cœur des plus grandes défenses du Multivers. Et ce quelque chose est franchement, vraiment, définitivement... moche. Et terrifiant. Et gigantesque. Et probablement apocalyptique. Du genre fin des mondes.
Meh.
J'ai perdu mon père.
C'est pas un monstre de pacotille qui va m'arracher à mon deuil.


Le puissant Fuginaute s'élance alors, pour tenter d'intercepter la bête.

- JEUNE DEREK, RAY PALMER DE LA TERRE, FUYEZ !

Oh ça non Tempus.
J'en ai marre de fuir.
J'en ai marre qu'on me prenne pas au sérieux, au point de s'attaquer aux gens que j'aime.
J'en ai marre d'être le petit soutien à l'arrière, qui file un coup de main sans faire plus.
J'en ai marre de tout ça, et cet intrus va payer. Pour l'intégralité.

C'est bon de parler.
C'est bon de se taire.
Malgré le chagrin, malgré la douleur, ça vient adoucir ce qu'il y a là-dedans, à côté de mon petit cœur. Comme si la masse d'armes cloutée plantée dedans venait d'être retirée. Ca saigne toujours, je risque le tétanos, l'anémie et une septicémie carabinés, mais une petite part de mal-être se dissipe.

Mais comme toujours, il est bien impossible de pouvoir simplement profiter de ce genre de moments, nooooon ! On trouve toujours derrière les fagots une menace extra-dimensionnelle bizarroïde pour venir nous chatouiller dessous les pieds ou vouloir dévorer l'entièreté de l'Humanité, bien sûûûûûr. Et vu l'état de surprise de ce vieux Tempus scrutateur, genre statue grecque immobile, ça va être à nous de gérer la petite crise des familles.
Nous.
Ray Palmer et Derek James.

- J'ai... pas trop eu le loisir d'étudier la physique du coin. Gravité amoindrie, présence d'énergies multiples venues de tout le Multivers... mais sans outils de mesure, difficile d'être précis. C'est du pur instinct. ... ouais, il me faudra vraiment un de vos appareils, là. Ils sont cools.

Je babille un peu.
Moins joyeusement que ça a pu l'être, mais les vieilles habitudes n'ont pas appris au vieux singe à faire la grimace. Ou un truc du genre.

- Par contre, à défaut d'être pleinement maître du terrain, je sais à quoi on a affaire.

Hé oui.
En fait, je sais.
Pour ces trucs là, précisément.
Ce n'est pas la première fois que je tombe face à des bestioles de ce type ici. Elles sont dangereuses, mais ça n'est que de la piétaille, des éclaireurs sans cervelles tout juste bons à déblayer le gros du terrain en attendant que les poids lourds déboulent ensuite.

- Ces trucs, là. Oui Prof, ce qui tente de vous manger la jambe, là. Ca se détruit sans problème. Ca n'a que la conscience nécessaire pour distinguer ce qui est consommable ou pas. Mais il va continuer à en arriver, de plus en plus.

Du doigt, je pointe l'ouverture d'où émane la corruption.

- Jusqu'à ce qu'on ferme la faille. Notre objectif donc. Ou que leur "pôpa" se ramène. Là, on serait très très trèèèèèèèès mal. Genre catastrophiquement mal. Apocalyptiquement mal. Fuginautement mal. Donc à nous d'éviter ça, d'accord ?

Si le Derek d'hier ou de demain pouvait me voir là, il serait surpris, étonné et peut-être dérangé par l'espèce de neutralité émotionnelle dans laquelle je me trouve. Je ne suis que triste détermination, car c'est mon devoir pour le meilleur et pour le pire.

- Sus à la faille.

Et je m'élance, aux côtés de mon super-scientifique de professeur.
Bond, rebond, rift et rerift ! Passer d'une monstruosité à l'autre se fait avec beaucoup d'aisance, malgré les tentacules, griffes, crocs, yeux, doigts, langues, mandibules et crochets qui viennent déchirer ma tenue et lacérer ma peau. Ca fait mal, mais j'ai connu pire. Bien pire.
Quand je peux, j'élimine.
Quand je ne peux pas, je laisse à mon binôme.
Le temps nous est compté, là. Alors je fonce.

Jusqu'à atteindre l'anti-rift.
Jusqu'à avoir la tête presque de l'autre côté... face à une vision hallucinante; hallucinée.


- Prof... Ray... Prof... c'est... c'est ce dont je parlais.

Je bégaye...
Un froid terrible envahit mes tripes.
Celui d'une angoisse totale, celui de la peur.
La peur pour moi. La peur pour mes proches restants. La peur pour mon monde. La peur pour tous les mondes.

Un tentacule noirâtre s'agrippe à la faille, et s'y hisse.
Puis un autre.
Puis un autre.
Six longs membres passent alors dans le Branefold Interior, suivi d'un corps grotesque, aux multiples yeux verdâtres. Le "pôpa" est arrivé. Et il observe. Il nous observe. Il dévisage notre existence, celle du Prof, la mienne, celle de tout ce qui existe dans notre Multivers.


Et il voit que c'est bon.
Alors il décide de le détruire.
Sans aucune autre forme de procès.

- C'est ce qui se presse contre le... le Multivers. C'est ce qui vit au-delà... dans les ténèbres...

- ... cela pourrait surcharger d'énergie la matière luciphage dont est composée cette créature, et la faire s'effondrer sur elle-même dans le meilleur des cas... exploser dans le pire. Mais ça, c'est pas grave. On est dans un coin excentré du Branefold Interior. Il n'y aura personne à blesser. A part nous, bien sûr. Hé hé.

J'aurais envie de dire que ça me rappelle le bon vieux temps.
Mais il y a jamais eu de bon vieux temps comme ça. C'est tout frais, tout nouveau, et il nous faut nous accorder, le Prof et moi ! Relier les cerveaux pour une réflexion optimale, même si je me doute bien que c'est pour me faire plaisir qu'il laisse sa phrase en suspens, comme pour voir si je suis. En temps normal, je dis pas, ça aurait pu m'agacer. Là, dans un contexte de crise pareil, avec l'adrénaline et les lambeaux de chagrin qui habillent mon petit cœur tout mou d'adolescent, je passe sur le geste. Au moins c'est gentil, je me dis !

Cela dit, maintenant, il faut trouver une étoile en train de se "supernovatiser". Et rien à voir avec une étoile super avant-gardiste, je sais juste pas comment appeler ça, flute ! Et s'il paraît qu'on trouve une supernova toutes les trois secondes au sein de l'univers observable, va tomber sur la bonne au bon endroit au bon moment, quoi. Sauf si...
Sauf si je vise précisément un type d'étoile, connu pour sa faculté à déclencher plusieurs novas au cours de leur vie. Sauf si je vise l'étoile qu'il me faut, la meilleure qui soit. Oooooooh oui, j'ai une idée. A la con, évidemment. Pour changer. Mais quand on a un petit cervelet, on fait ce qu'on peut voyez-vous.

Un grand sourire naît sur mes lèvres.

- Je sais quelle étoile fera l'affaire.

Et me voilà à m'atteler à la recherche de cet astre précis, à travers l'espace et le temps, avec une paire de chiffres en tête comme seule aide. J'ai pas le droit à l'erreur, sinon on risque de se retrouver au milieu d'un trou noir. Et même si Collapser m'a bien dit qu'ils étaient des gardiens de l'univers, bienfaisants et protecteurs, m'y perdre ne fait pas partie de mes projets de la journée. Paraît qu'il y fait TOUT NOIR dedans. Brrrrr...
On a déjà eu assez de visions flippantes comme ça pour aujourd'hui.

- Il faut juste me gagner un peu de temps pour que je calcule tout. Que je mette les portails bien en place. Les protections, aussi. Vous pourriez faire ça pour moi, Professeur ?

Petite mise au défi, bien comme il faut.
Bien sûr qu'il peut, c'est Atom ! Mais qui n'a jamais taquiné son prof lors d'une invasion de créatures primordiales venues d'un multivers corrompu en constante redéfinition, je vous le demande ? Ah, y a que moi ? Très bien, je note.
Ou pas.
Parce qu'il y a de bien plus sérieuses questions posées sur la table, là.

- Et après, nous pourrons parler de cet endroit. Et de ce Multivers Noir. Et de ce que vous avez entendu à son sujet. Pour régler ça avant que ça ne nous explose à la figure. On est bon ?

Si on est bon, c'est parti alors !

- Batifoler, batifoler... vous en avez de bonnes des fois, Professeur !

On se concentre Derek.
C'est pas anodin ce que tu vas faire, là.
Tu vas capter l'énergie d'un soleil en pleine nova pour faire éclater un luciphage monstrueux en pleine boulimie, sans te cramer et sans cramer ton prof. Traaaaaanquille, les doigts dans le nez. A condition de pas se foirer. Mais tu vas pas te foirer. Tu le sais. Tu le sens. Parce que tu n'as pas le droit à l'erreur, là. Et parce que tu es largement capable d'une telle merveille. Tu en es capable, parce que tu entends une voix au fond de toi, tout au fond de toi, entre deux savants calculs et une touche de recherche spatio-temporelle. Cette voix, c'est celle de ton père. Qui croit en toi. Qui t'encourage. Qui te dit que rien ne t'est impossible, même sauver le Branefold Interior, et conséquemment le Multivers.

Des larmes coulent sur tes joues.
Tu le sais.
Tu le sens.
Mais tu n'y prêtes pas attention.
Elle ne te gênent pas; tu ne vois plus avec tes yeux. L'immensité du tout s'étend autour de toi, captée par tes sens incroyables, par l'impossible perception dont tu fais preuve aujourd'hui. Et tu serres les dents, alors que tes mains s'agitent devant toi: tes doigts disparaissent par instant au cœur même du tissu de la réalité, à la recherche de cette étoile.
Cette étoile unique, importante, géniale. Cette étoile qui est à la fois source de ta présence ici, ainsi, et résolution de la menace qui pèse sur vos épaules, au Professeur et toi.

- Allez... allez... ALLEZ !

Tu forces, tu arqueboutes l'espace et le temps pour le plier à ta volonté !
Les atomes accélèrent et ralentissent à la fois autour de toi, la relativité n'a jamais été plus présente que là, entre tes doigts ! Et enfin, tu y es.
Tu le sens.
Tu as atteint ton but.
Le rift est au bout de tes ongles, prêt à s'ouvrir d'un coup.
Condamnant le monstre venu d'ailleurs, et ton professeur aussi si tu ne fais rien.

RFFFFFFFFFFFFFFFFT
RFFFFFFFFFFFFFFFFT

Mais je fais. Je fais même totalement !
J'ouvre simultanément deux rifts, un pour aspirer dans la micro-seconde mon Prof, et l'autre pour révéler à la face de la créature une étoile.
Mais pas n'importe laquelle.


Une étoile blanche, à la fois énorme et minuscule, puissante et dérisoire, fabuleuse et absolument normale; cette étoile, cette énergie, elle n'est pas inconnue. C'est celle de toute la technologie que manie mon Professeur depuis des années. C'est celle qui a fait de lui le plus petit des grands héros.
Non en fait.
Elle l'a juste aidé sur cette voie. Il l'aurait été, dans tous les cas.

Cette étoile, c'est SON étoile.
SA naine blanche. La naine blanche de Ray Palmer.
Qui vient illuminer le luciphage, le nourrir de sa nova, le faire grossir, grossir, grossir à la limite de l'improbable, de l'impossible et... se désagréger en un milliard de flocons argentés, chargés d'une énergie folle.
Ses rejetons ont droit au même destin, quelques secondes après.


- RPBT10611115, autrement appelée Atomia !

Et là...
Bah je suis vidé.
Au point de ne plus pouvoir tenir debout, et de chuter sûr la rocaille de notre petit astéroïde.

Qu'il est agréable de ne pas s'écraser par terre comme un vulgaire sac à patates ! Parce que la vie de héros, c'est pas mal une histoire d'amour entre son visage et le sol bien rude, bien dur. Je suis sûr qu'il doit exister quelque part une règle multiverselle de la physique qui détermine que l'attraction de la Terre est plus forte quand il s'agit de la face masquée d'un justicier ! C'est pas possible autrement !
Cela dit, là, j'y échappe.
Grâce au Prof. Qui couvre drôlement bien mes arrières, je dois avouer. Yeah ! Vive lui, jetons lui des confetti mentaux en guise de remerciement ! Qui sait ? C'est peut-être l'aube de Ray Palmer, sidekick grisonnant du jeune et pétulant Sideways ?
Même pas en rêve, mon vieux ! T'as encore tes preuves à faire pour ne serait-ce espérer qu'un p'tit jeune se mette à te suivre pour être ton disciple. Alors l'ex-Atom, sauveur des mondes, des terres, du temps, des Ligues de Justice et tout le tralala ? Cours toujours, comme disent les jeunes... des années 90.

Mais ne vous y trompez pas, ce n'est pas parce que je multiplie les bêtises dans ma tête que dehors, j'ai l'air d'être aux anges. Tout mon corps est alourdi de fatigue, et c'est un regard lent, long et sombre que je porte sur mon sauveur en jet-pack.


C'est pas méchant, hein !
J'arrive juste pas à faire mieux que ça.
Le combo épuisement + perte de mon dernier parent, ça me laisse trop vide pour quoi que ce soit d'autre. J'entends les compliments, nombreux et élogieux compliments (j'aurais tellement rougi en temps normal que mon masque serait certainement entré en combustion spontanée). Ils parviennent jusqu'à mes oreilles, oui... mais l'étape suivante, à savoir la pleine intégration de l'information, baaaaah... non. Y a un blocage. Jusqu'au moment où il me tend une gourde et une barre de céréales.
De l'énergie !
Suffisamment pour prendre une grande inspiration, et lâcher avec un demi-sourire:

- Je préfère Star Wars. Mais je suppose qu'il faut de tout pour faire un monde...


Allez.
Je pourrais peut-être pas enchaîner les rifts de sitôt, là, mais ça va mieux.
Suffisamment mieux. Autant dans le corps que dans la tête, d'ailleurs. Suffisamment pour traiter le retard des infos qui attendent dans mon petit cerveau primitif. Et rougir. Illico. Evidemment. EVIDEMMENT.
Pour autant, cette fois, ce n'est pas aussi intimidant que je m'y attendais.
Bien sûr, ça fait très plaisir, ça place la barre haut pour la prochaine crise... mais pas plus que ça en fait.
Alors du coup, je me permets une petite folie !
Allez, c'est le moment !
Y en aura peut-être pas d'autres !

- Merci Pro... merci Ray. Vraiment.

OH JE L'AI FAIT !
J'AI DIT RAY, ET PAS PROFESSEUR !
OH LE FOU !
J'EN REVIENS PAS !

J'en reviens tellement pas que toutes mes défenses émotionnelles sont totalement abaissées là.

Et il en profite pour sortir quelque chose qui me souffle un peu.
Enfin, il dit quelque chose, plutôt. Il parle de mon père. De la fierté qu'il doit avoir, là où il est.
Mon enthousiasme retombe comme un soufflé. Mais l'émotion arrive. Je la sens, elle galope depuis mon cœur jusqu'à mes yeux.

Heureusement que Tempus ramène ses grosses genouillères bleues, ça me juste donne l'occasion de renifler un bon coup et d'essuyer la petite humidité qui perle au coin de mes paupières. Nickel. Juste à temps pour répondre au Prof, et...

- Jeune Derek. Je crois que... qu'il va nous falloir parler, effectivement.

... et à Tempus.
Qui semble réellement déstabilisé par tout ce qui vient de se passer.
Vu les marques sur sa cuirasse et sa cape, il s'est lui aussi battu. Contre des rejetons du "pôpa", sûrement. Pour soutenir notre effort et assumer son rôle de gardien.

- Nous laisser ?

Je me tourne vers le Professeur Palmer.
En secouant doucement la tête.
Pas possible plus fort, ça tournerait trop.

- Non. Sauf si vous voulez, hein. Mais je crois que j'ai besoin de gens, là.

Le regard quasi-mécanique de mon premier mentor se pose tour à tour sur nous deux, et c'est d'une voix grave et profonde qu'il lâche un simple:

- Soit.

Il va poser son gros derrière bleu (c'est un fait, il fait trois fois ma largeur d'épaules !) sur une excroissance rocheuse proche de nous, regarde autour de lui l'espace d'un instant, comme si on l'épiait... est-ce que les autres Fuginautes sont invisibles ?
Bref. Père Tempus va nous raconter une histoire.

- Il m'est normalement défendu de l'évoquer auprès de quiconque, mais... nous allons parler de ce qui se trouve derrière le voile, au-delà des frontières de notre Multivers, au-delà du Branefold Interior, au-delà de notre juridiction, qui s'arrête à ces frontières souillées et scellées: le Multivers Sombre.

Star Trek.
Avec Dr. Who, la série qui représente le mieux les aventures abracadabrantesques du Professeur Palmer et son équipe de fieffés scientifiques, tous prêts à partir affronter moult dangers mortels et sauver des civilisations entières. Et il est vrai que je n'ai jamais vraiment regardé.

- Eh bah étonnamment, je suis juste passé à côté, en fait.

Pas par dégoût ou manque d'envie.
Simplement, l'univers est tellement grand, tellement vaste qu'il est difficile de trouver un premier angle d'attaque... et pis bon, j'étais lycéen jusque là, avec des journées fort peu extensibles (à l'inverse de mon débit de parole) et déjà des jeux, bouquins et séries en cours. Ca limite, au bout d'un moment.

- Disons que la prochaine fois que je ramène une pizza napolitaine, on en profitera pour rattraper ce manque FLAGRANT dans ma culture, hé !

C'est... bizarre.
La douleur est toujours là.
Mais j'ai pas à me forcer pour rire un peu. Pour m'amuser.
L'adrénaline qui pulse encore bien bien fort dans mes veines, je suppose.
Ca rend tout moins gris, moins sale, moins triste. Et ce même si Tempus a, semble-t-il, prévu de nous faire déprimer avec ses explications de ce qu'était l'horreur instable entraperçue dans la faille de tout à l'heure.

- Le Multivers Sombre... même scellé depuis l'aube de la création, il prédate, et ce dans tous les sens du terme, tout ce que vous pouvez connaître de votre perception humaine. Il est une masse à la fois totale et inachevée, un générateur perpétuel d'énergie Crisis, un ensemble grotesque singeant la stabilité exemplaire de ce qu'Alpheus le Forgeur de Mondes a su créer. Vous.

Hé non, le Multivers Sombre pouvait pas juste être un monde sympa, avec de l'ombre noire sous les cocotiers, des petites vaguelettes noires qui viennent lécher les pieds, et du sable noir sous les fesses. Allez, j'accepterais même que le sable se glisse dans le maillot de bain !
Mais non.
C'est une zone de non-droit cosmique, avec des relents apocalyptiques.
Génial.

- Mais tout imparfait qu'est ce Multivers Sombre, son pouvoir de corruption n'est pas à négliger. Il s'insinue dans chaque faille, à la recherche d'une faiblesse à exploiter pour faire basculer les mondes dans le chaos. Aujourd'hui, avec la lente extinction des Fuginautes et les nombreux cataclysmes successifs qui se sont abattus sur votre Terre, le pilier central du Multivers, son pivot... je crains que sa force n'ait grandie, et qu'elle s'applique désormais à pénétrer notre réalité. Comme vous avez pu le voir il y a quelques minutes. Et comme le jeune Derek semble le percevoir depuis plusieurs semaines déjà.

Oui.
Je le sens.
Ca pulse dans ma tête, comme si ça essayait de s'en échapper. Ca vient gratter, taper, tenter de s'infiltrer chez nous. C'est un bruit de fond constant, qui a pris en force au fil des mois. A croire que ça s'arqueboute pour briser les bien belles barrières qui nous séparent.
Et pas en vain.

Tempus semble hésitant...
Il nous regarde, il me regarde, il nous regarde...
Et soupire finalement, l'air contrit.

- Je ne puis malheureusement en dire plus. L'ordre des Fuginautes vous tiendrait rigueur d'un tel savoir. Maintenant... partez, s'il vous plaît. Il me faut soigner cette faille avant que cela ne laisse de cicatrice.

Ce n'est ni une menace, ni un ordre. Juste une demande exténuée d'un professeur, d'un ami même, à un élève, un autre ami. A moi, du coup. Car si je ne doute pas du potentiel de séduction de Ray, la situation n'a pad réellement été propice aux rapprochements amicaux.

Alors, en silence, respectant sa demande, j'ouvre un rift direction Ivy Town, à l'abri des regards, dans les laboratoires de la Team Atom. C'est que je commence à bien les connaître, moi !

RFFFFFFFFFFFFFFFFT

Moi aussi épuisé, je m'affale comme un sac dans un fauteuil à roulettes, et me frotte le front avec la lenteur de celui qui ne sait pas s'il va s'endormir de fatigue ou bondir tant il y a de choses à faire. Quoi qu'il en soit, je soupire à mon tour, l'air encore sous le choc. De tout.

- Ma foi. C'était... inattendu.

Je me sens... étrange.
A la fois extrêmement vide, de sentiments, d'énergie, de force et à la fois animé d'une petite étincelle qui fait encore se mouvoir mes bras, mes jambes, mon cœur et mon esprit. Je ne suis pas mort. Je ne suis pas mourant. Je suis simplement en deuil. Différemment que pour ma mère, malgré les circonstances tragiquement similaires, mais c'est une certitude.

Un léger soupir s'échappe de mes lèvres quand les contours de l'Atom Cave se dessinent dans mon champ de vision. (sérieusement, va vraiment falloir changer de nom... l'Atom CAVE... non mais... et pourquoi pas le Nucléon, par exemple ? Un truc qui fasse moins mauvaise série Z ou plagiat éhonté de la Batcave...).
Au moins, c'est un lieu que je connais.
Un lieu sécurisé. Peut-être actuellement plus que le Branefold Interior, vu l'attaque que nous venons d'essuyer. Le cliquetis des machines, le ronronnement des ordinateurs, la lumière des écrans m'apaise, un peu. Et la voix du Professeur, lui aussi happé par toute cette technologie, s'élève. Elle se veut rassurante, référencée, sage.
Et moi, j'ai tendance à bien plus bouffon du roi que ministre des comptes. Alors je ne peux que réagir comme tel. En tentant de blaguer, pardi !

- Une boîte ? Je croyais que les gens de votre génération disaient "une discothèque" ?

Mais je n'insiste pas.
Apparemment, l'humour ne veut pas de moi, là.
Et je m'en rends suffisamment compte pour embrayer sur quelque chose d'un poil plus sérieux.

- Oui. Vous savez, il y a des chances que ce soit plutôt moi qui vous ai impliqué là-dedans, Pro... Ra... Doc. Ouais, Doc c'est bien, en fait.

Eh bah voilà.
J'esquive le prénom, qui me met encore pas trop à l'aise, pour un truc plus sympa, plus punchy, et qui me donnera l'impression d'être Marty McFly si jamais on voyage de nouveau dans le temps. Tout bénèf comme on dit dans le jargon des truands. Enfin je crois.

- Même si je voulais pas intervenir sur ce genre de phénomènes, mon petit doigt doté à super-pouvoirs me dit que ça va malgré tout me tomber sur le coin de la figure. Parce que de près ou de loin, je suis lié à tout ça. Alors clef des enfers, rejeton dimensionnel imprévu, sauveur prophétisé ou juste glandu passé au mauvais endroit au mauvais moment, aucune idée de ce que je suis de tout ça. En tous cas, ça me touche, et ça touche les gens auxquels... je tiens. Beaucoup trop. Alors me cacher maintenant que le compte à rebours a commencé, ce serait faire honte à leur mémoire, et aux raisons de leurs... peines...

Et là, boum.
Je suis un peu moins vide, mais je me prends un mur de fatigue en pleine poire !
Dur dur de résister à un bon bâillement des familles, mais je suis plus sûr de m'être lavé les dents ce midi... faudrait éviter que le Doc ne découvre un bout de salade coincé entre deux dents.
Alors je m'étire, comme un chat, et soupire longuement pour chasser le plus d'air possible de mes poumons, las.

- Ouais, vous avez raison. Je veux bien un lit, si ça vous gêne pas trop. Mais avant... ça vous dirait, une margherita ?

Je sais pas de quoi l'avenir sera fait...
De plus de pertes, peut-être ? De mésaventures douloureuses ? Sûrement. Mais si enfiler un masque et une cape était un simple petit plaisir égoïste, cela ferait bien longtemps qu'on les aurait remisés au placard. Nous ne sommes pas des dieux à vénérer. Nous ne sommes pas des monstres à craindre. Nous essayons tout bonnement d'être juste, et de défendre ce qui mérite de l'être. Alors il faut serrer les dents, tenir, au nom de ce qui est bon, et ne rien lâcher. Pour que plus jamais un enfant n'ait à perdre ses parents dans Crime Alley.
C'est la fin du début de ma vie. Et le début de tout le reste.
Je suis Derek James.
Je suis Sideways.

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