Tribulations sous la surface [Mera]

Quatre humanoïdes aquatiques avaient contrarié mes plans visant à rejoindre l'île où je pensais trouver un portail ancestral vers mon monde natal, histoire de voir un "toubib" de chez nous pour palier au vide qu'avaient laissé ceux qui m'avaient énucluéé.

Après quelques échanges musclés que je trouvais finalement futiles, c'est une véritable troupe qui arrive et m'encercle alors que j'avais cessé le combat laissant mes adversaires digérer la râclée qu'ils venaient de subir. (voir là)

Ces derniers avaient palabré avec les nouveaux arrivants dans un sabir que je compris finalement à demi-mots vu qu'il ressemblait en grande partie au langage des habitants des mers que j'avais rencontrés il y a maintenant bien longtemps.

Ce n'était effectivement pas la première fois que j'avais affaire aux habitants des mers et j'avais eu le loisir d'apprendre la langue lors de ma dernière visite.

Ceux là étaient perplexes. Ils voyaient bien que je m'éternisais sous l'eau sans en avoir trop de déconvenue et semblaient plus encore impressionnés par mes orbites vides et mes capacités offensives malgré ce manque et ma supposée appartenance aux surfaciens comme ils disaient.

Pendant qu'ils discutaient, je virais mes rangers qui me gênaient, ma chemise qui flottait en lambeaux vaporeux, l'un des quatre premiers avait essayé de me poinçonner avec sa lance et un des requins m'avait frôlé d'un peu trop près, ce qui lui avait valu une baffe magistrale qui l'avait envoyé par le fond d'où il n'était pas remonté.

Il ne me restait donc plus que mes Jean's, mes lunettes et ma casquette filant maintenant vers la Grèce à bord du bateau.

Il y eu un échange de cors, moyen de communication entre unités déjà en cour dans ce lointain passé où j'étais venu sur Terre et sous les océans, puis, l'un d'eux s'avança finalement, porteur du casque et du trident décoré qui indiquait son grade de capitaine, ou du moins de ce qui équivalait ici.

Il pointait sa fourchette dans ma direction et fit des mouvement m'indiquant qu'il fallait que je me bouge et que je les suive en m'invectivant dans son langage.

Si j'avais eu mes yeux, j'aurais plissé ceux ci méchamment histoire de lui montrer qu'il ne m'impressionnait pas le moins du monde, mais comme je n'en avais plus, je me contentais d'une moue réprobatrice, m'époussetais les avants bras pour en enlever une poussière inexistante et d'un coup de rein me mettait en position de nage tout en lui faisant signe d'y aller.

Vas-y mon gars, je te suis ... Dis je à grands renforts de bulles.

Il faut dire que parler sub-aquatique avec des cordes vocales faites pour l'air, c'est pas facile, et ça vous donne un accent pour eux pire qu'un Texan ou un Canadien ...

Mais le gars me regarda avec des yeux grands comme des soucoupes, des coquilles Saint-Jacques plutôt, baragouina à un de ses hommes quelque chose que je ne compris pas mais dont je me doutais un peu vu le contexte.

Ce dernier fit passer le mot aux autres rapidement comme quoi l'étranger que j'étais comprenait leur langue et qu'il fallait faire attention à ce qu'ils disaient.

Eux et leurs bestioles allaient vite, ils étaient dans leur élément, mais je n'étais pas à la traine, mon style crawlé valait bien leurs nageoires et autres moyens de propulsion.

Pendant que nous allions ainsi, un bourdonnement commença à poindre venant de notre gauche. Les gardes et le capitaine échangeaient entre eux, parlant d'un truc dont je ne connaissais pas le nom, mais à priori appartenant aux surfaciens.

De loin en loin, retentissaient des sons de conques auxquels répondaient parfois mes gardiens qui se mirent à presser l'allure. Comme quoi, quand Cousteau parlait du monde du silence, il se le mettait profond ... Dans l'oeil bien sur !

Je battis plus vite des pieds, mais vu ma corpulence très peu hydrodynamique et l'absence de tenue ou de mon harnais pour m'aider, j'avais de plus en plus de mal à tenir le train, ce qui ennuyait le capitaine semblait-il.

Il lança un appel et s'approcha de moi en compagnie d'un grand squale, un requin marteau de belle taille.

Il faut aller vite, ils viennent vers nous, accroches toi à son aileron ...

Je fis un mouvement de la tête pour répondre, vu que si je l'avais ouverte, le flot de bulles m'aurait ralenti, et je m'accrochais à la nageoire dorsale du gros poisson.

Tout de suite l'allure devint plus rapide et le ronronnement qui allait en s'amplifiant commença à diminuer d'intensité.

Vu la pente du terrain, nous approchions d'une île, et je commençais à rêver d'air libre où j'aurais l'avantage, mais mes illusions s'évanouirent quand notre petite troupe plongea dans l'obscurité d'une grotte.

Le trajet dans le noir le plus complet fut assez long, méandres de tunnels sinueux et de cavités submergées.
J'y voyais assez bien avec ce qui me servait de "vision" maintenant, assez pour rentrer la tête lorsqu'une stalactite m'arrivait dessus mais qu'évitait hardiment ma monture au dernier moment.

Finalement, nous ressortions en eaux libres et piquions vers le large et les grands fonds, passant entre des compagnies de gardes qui nous laissèrent passer sans nous arrêter. Ils avaient été prévenus de notre passage.

Ce n'est que vraiment très près de la cité que la luminosité jaunâtre et bleuâtre fut visible.

La première fois que j'étais venu ici, c'était par la petite porte, cette fois, c'était par la grande.

C'est dans ces moments là qu'on regrette de n'avoir pas de vue ...

Même si ma perception me donnait déjà une idée de la beauté des lieux, ce n'était qu'une pâle copie de ce qui devait être.

Je lâchais ma monture et lui flattais le flanc pour la remercier lorsque notre groupe arriva sur l'esplanade qui accédait au palais et je fus bien heureux de retrouver la sensation de sol sous mes pieds.

Ce fut sans rudesse ni courtoisie que j'entrais dans l'édifice. Tout avait bien changé depuis ma dernière venue, mis à part quelques statues qui avaient subsistées aux siècles et aux combats.

On me conduisit à une salle où il y avait une sorte d'estrade en marbre et un trône pour l'instant vide tout en haut.
Pas la salle du trône proprement dite où avaient lieu les réjouissances mais à une autre, sans doute une salle de justice vu la sobriété et le nombre de gardes armés jusqu'aux dents qui s'y trouvaient.

Mes accompagnateurs, enfin le capitaine et les quatre que j'avais rossé, se mirent à genoux et ce dernier m'intima à les imiter vu que je prenais tout mon temps à admirer l'architecture locale.

Je mis donc un genoux à terre et un cor sonna.

Le frou-frou d'une robe et le claquement discret de sandales précédèrent l'arrivée de la reine des lieux et le froissement de l'étoffe m'indiqua qu'elle venait de poser son noble postérieur dans le siège qui lui était dévolu.

S'ensuit un rapport des quatre qui est sommes toutes à peu près correct et honnête quant à son contenu, peut être en arrangeant la chose assez pour qu'ils ne soient pas aussi ridicules qu'ils l'étaient, mais du moins n'ont il pas menti sur mes propres faits.

J'y apprends d'ailleurs que la nouvelle reine de Poseidonis se nomme Mera.

Et moi ? Je suis l'étranger, le surfacien, et je ne peux me retenir d'intervenir pour rectifier ces termes crachés comme des insultes ...

Mon nom est Orion, je suis Orion, fils adoptif du très haut Izaya, je suis Orion de New-Genesis ...

Même si mon physique était bien différent, personne ne pouvait avoir survécu assez pour me contredire, n'est-ce pas ?

J'avais lancé ma remarque l'air de rien, sur un ton neutre, sans émotion, mais rien que cette remarque a semble-t-il attisé la morgue de la reine.

Ils sont bien tous les même ces monarques, sans savoir à qui ils ont affaire, ils veulent imposer leur autorité ...

J'avais remarqué sa crispation immédiatement, et son changement d'humeur qui n'était pas au beau fixe déjà en entrant ici. La petite sardine était contrariée et maintenant, elle était à la limite de la crise diplomatique.

Je me lève sur son injonction et la fixe de mes orbites vides. Ma "vue" est un kaléidoscope de couleurs plus ou moins prononcées plongées dans une brume diffuse due à l'eau environnante.

Je voyais les être vivants en dégradés de rouge, jaune, bleu et vert, ainsi que toutes les couleurs intermédiaires, qui découpaient leur silhouette presque exactement et aussi bien que si je les percevais avec de vrais yeux, mieux même car je percevais l'ensemble de leur composition interne alors qu'une vision "normale" s'en serait arrêté à leur peau et à leurs habits.

Les muscles des gardes viraient au carmin par plaques, indiquant qu'ils bandaient leurs muscles pour être prêts à toute éventualité, le vert de leur circulation sanguine s'accélérant tout en dessinant intensément le réseau de leur système sanguin.

Certains d'entre eux avaient des configurations anarchiques par endroits, refflets de blessures passées dont les traces subsistaient encore.

Mais mon observation biologique et mes constatations furent interrompues par leur reine qui s'était rapprochée et me demandait la raison de ma présence ...

Mon attention se reporta donc essentiellement sur elle même si je me tenais au fait des réactions et agissements de toutes les créatures présente dans la pièce.

Je devais baisser la tête pour la "regarder" car elle était plus petite que moi d'au moins une tête et demi, et je constatais que comme ses gardes, elle était sur le qui-vive bien que plus détendue en apparence.

Seule différence, beaucoup plus de bleu chez elle, surtout au niveau de sa tête, sans doute cet état de froid agacement que j'avais détecté dans son attitude, ses gestes et sa voix.

Je pointais le nez un instant vers sa main qui serrait le manche d'un trident, jolie fourchette d'où émanait de drôles de fluctuations.

Ce n'était pas celui d'Orin, Le Orin que j'avais connu et aidé jadis peu après que Shalako ait fait sécession, un de ses aïeux si elle était effectivement de sa lignée et que cela se soit passé dans cet univers.

Je hochais légèrement la tête en répondant à ma propre pensée puis la re fixais pour lui répondre en essayant de ne pas trop faire de bulles, je n'avais pas encore retrouvé le truc pour parler correctement sous l'eau ...

Pour les détails (bulles), il nous faudrait plus de temps (bulles) que vous n'en disposez (re bulles) et que j'y puisse y consacrer (bulles encore), vous voudrez donc bien m'excuser (bulles toujours) de prendre quelques raccourcis ... (chapelet de bullettes et grognement agacé de ma part)

Oh!Oh! ... Crispation de la Dame qui se voit déjà contrariée par mes propos pourtant respectueux, mesurés et lucides, si ce n'est les bulles. Les humeurs de Madame se transmettent instantanément au reste de l'équipe ...

Une mesure urgente pour remédier à cette décompensation générale des esprits ...

Pendant toute mon enfance, cela date aujourd'hui de beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps, Izaya avait fait tout son possible pour endiguer mes ardeurs belliqueuses et me donner un zeste de diplomatie ...

Il fallait aujourd'hui que j'en appelle à ses enseignements pour tuer dans l'oeuf l'hostilité qui montait autours et contre moi.

... Mais pour faire bref, je vais essayer de vous résumer la situation.
Je viens de loin au nord des terres des surfaciens comme vous les nommez. (filet de bulles après deux phrases, il y a du progrès non ?)

J'y ais été abandonné pour mort par ceux qui m'ont pris mes armes, mon armure et mes yeux. (grosse bulle incontrôlable due à mon énervement au souvenir de cet épisode)

J'ai traversé en touriste le continent dévasté par la crise qui se joue actuellement entre vous et eux et je me dirigeais finalement vers cette île qu'ils appellent la Crête aujourd'hui sur un petit bateau afin de tenter d'y activer la porte qui me ramènera sur mon propre monde ... (grosses bulles) Excusez moi ...

Je détourne la tête et mets la main devant ma bouche pour vider définitivement le haut de mes voies respiratoires de l'air qui y était, laissant ainsi le dernier petit chapelet de bulles résiduelles s'échapper de ma bouche. Cela me procure la diversion nécessaire à la recherche des termes les moins déplaisants pour ses gardes.

... Vos gardes m'ont intercepté et ma nature sanguine aiguillonnée par ces contrariétés répétées m'ont poussé à plonger et à leur donner la leçon qu'ils méritaient ...

Je pense que votre majesté peut comprendre cet état d'esprit si elle devait se rendre sur le sol ferme et était interceptée par de la piétaille surfacienne ...

Mince, là j'ai été trop fort, pourtant, j'ai essayé de rester sobre ...
Je lève la main ouverte pour l'inviter cordialement à la fermer et me laisser finir.

... Et comme j'étais là, en-dessous, et que l'arrivée de renfort risquait de faire dégénérer les choses jusqu'à un niveau intolérable pour vos troupes, je n'étais en effet pas venu les combattre ni les blesser sérieusement ou pire les tuer, mais simplement rosser ceux qui avaient eu l'outrecuidance d'interrompre mon voyage ...

Aïe ! Aïe ! Aïe ! Je m'enfonce là ! Je m'enfonce ! Du coup, les humeurs s'échauffent et la mienne en réponse ... Une chaleur commence à monter avec l'afflux de l'Astro-force qui se cumule en moi et l'eau commence à bouillir au contact de ma peau ... ça va mal finir si je ne calme pas !!!!

Je pousse un grand soupir, me lance dans une introspection rigoureuse, fais appel au karma et à l'esprit Zen, et reprends le contrôle de mes émotions finalement.

D'un geste de la main, comme si je chassais une mouche, je dilue la couche brûlante.

... Hum, excusez moi encore, j'ai du mal à contrôler mes humeurs depuis un moment ...

Donc, je décide de me constituer prisonnier afin de comprendre pourquoi les pactes et traités entre les Seigneurs Atlantes successifs, les Olympiens et les autres puissants au sujet des surfaciens ont été brisés ...

Et éventuellement d'apporter ma contribution au rétablissement du statut quo général ...

En toute humilité ...

Et en mon nom propre, comme d'habitude ...

Si votre majesté le veut, évidemment ...

Je m'incline respectueusement en portant main à mon coeur en signe de respect et de paix ...

Restait maintenant à voir si le message était passé, avait été compris et mes erreurs de langage pardonnées, du moins en partie ...

Le protocole et la politique sans quelques baffes étaient difficiles pour moi ...

Elle me croit, encore heureux soit dit en passant, et elle demande à ses sbires de disparaître en quelques geste esquissés de la main, aurais je droit à un entretien particulier avec sa majesté?

Devant les hésitation inquiètes de quelques uns, elle ajoute la parole à ses ordres imprononcés.

Je ne peux contrôler un haussement du sourcil et un petit sourire amusé devant son assurance à pouvoir me dominer par la force.
Même avec le trident d'Orin, l'original, elle était de loin bien incapable de me contrer si je voulais la mettre hors de combat, et encore moins si je voulais l'éliminer.

Mais telle n'était point mon intention ...

Lorsque nos regards se croisent à nouveau, enfin quand elle me fixe à nouveau, parce que des regards, il n'y en a que chez elle actuellement, je hoche la tête d'un air entendu en reprenant une figure plus neutre et détendue pour confirmer que j'ai bien compris l'avertissement.

J'observe ses troupes s'évaporer dans l'ombre alors qu'elle me tourne imprudemment le dos pour aller se rasseoir sur son trône.

Je ne doute à aucun moment qu'ils soient prêts à ressurgir pour porter secours à leur reine dès le premier éclat de voix. Braves petits ...

C'est à ce moment là que mes sens de néo-dieux grandement améliorés par la boite-mère que la Source m'avait éparpillé dans le corps lors d'une aventure précédente perçurent le tintement familier d'une autre boîte-mère qui se signalait.

C'était une sorte de "ping" régulier, comme une émission de sonar qui permettait aux néo-dieux de savoir qu'ils en avaient un autre dans leur environnement plus ou moins proche, un peu comme les téléphones portables des humains d'aujourd'hui qui leurs signalent la proximité d'une personne faisant partie du même réseau social qu'eux.

Cette fonctionnalité pouvait être désactivée par ceux qui avaient les connaissances et les capacités de le faire, comme mon très industrieux cousin par exemple, ou moi même.

Ainsi, nous pouvions savoir qu'il y avait quelqu'un alors que l'autre n'en avait aucune idée.

Le désavantage, c'est quand deux "traficoteurs" étaient proches, aucun des deux ne savait pour l'autre ...
J'en avais fait les frais, souvenez vous.

Cette découverte d'une autre boîte-mère toujours opérationnelle me faisait espérer avoir trouvé un moyen beaucoup plus direct de rentrer chez moi, avec elle je pouvais ouvrir un Boom-Tube, ce que j'étais bien incapable de faire actuellement vu le manque cruel de certains composants de la mienne partis avec mes yeux et l'absence de mon harnais.

Je tournais la tête vers ma droite pour situer l'origine de ce "bruit" et le situais vers le bas, bien en-dessous de l'étage actuel.

Mais je ne pus poursuivre plus avant mes localisations car sa majesté venait de prendre place et m'interpelait.

C'était une bonne question, pourquoi avais-je proposé mon aide en fait ...
Encore un effet de ma trop grande bonté sans doute ... Peut-on appeler cela de la bêtise ?

Je me frottais le menton histoire de me donner le temps de cogiter un plan d'action acceptable.

D'après ce que j'en constate, vous n'êtes pas à l'origine de toute cette pagaille ...

J'ai une fâcheuse habitude, en laquelle je ressemble beaucoup à mon père naturel, quand je m'interroge et que je pose les bases d'un plan d'envergure, je ne peux m'empêcher de déambuler, les mains derrière le dos, tout en parlant tout haut pour moi même.

Et c'est ce que je commençais à faire plus ou moins aux pieds de son estrade.

Hum ... Et j'en viens à conclure que vous en êtes même plutôt une victime au même titre que les surfarciens ...

Trois pas vers la gauche, donc m'éloignant du signal inaudible, puis demi-tour ...

Quelqu'un semble avoir déclaré sa propre hégémonie sur le monde des océans à votre détriment, quelqu'un semble discuter ou du moins ignorer votre légitimité ...

Six pas vers la droite, donc me rapprochant du signal vers lequel je me tourne presque involontairement avant de faire demi-tour après un instant d'hésitation ...

Et ce quelqu'un n'a que faire des traités passés ...
Ce qui est proprement inacceptable, je me trompe ?

Je me suis arrêté à mon point de départ, juste en face d'elle.

Je sens une crispation chez la belle et hautaine atlante, aurais je touché juste ?

Je fais encore une petite pause, agacé par les "pings" répétés et répétitifs qui viennent sonner dans mon esprit et je ne peux m'empêcher de laisser glisser à nouveau mon "regard" vers leur source invisible puis de la fixer le front plissé, contrarié.

... Vous avez un de mes compatriotes dans vos murs ? ...

La question était partie toute seule, plus comme une propre réflexion qu'une véritable question que je lui posais.

Il fallait que je sache ...

Il existe une espèce de serpent qui vit dans les mers chaudes, au corps coloré et attirant, et terriblement meurtrière pour le commun des mortels.

Lorsque c’est le moment des amours, les mâles deviennent particulièrement dangereux car les phéromones dispersées par les femelles, moins nombreuses en général, les rendent téméraires et particulièrement irascibles.

C’est dans ces moments-là qu’ils s’approchent généralement des plongeurs en ondulant pour vérifier de plus près que ces appendices bougeant de chaque côté ne serait pas une compagne tant convoitée. Il faut préciser qu'ils n'ont pas une très bonne vue et que leurs sens sont particulièrement perturbés à cette époque.

Et il arrive que l’infortuné se voie la main mordue alors qu’elle était tendue pour une caresse à cette créature curieuse et imaginée amicale.

La mort peut être rapide et douloureuse si un sérum n’est pas injecté rapidement, et même alors, la victime déguste un moment tant le venin est agressif.

Lorsque la reine d’Atlantis se lève en réagissant à ma question à propos d’un éventuel compatriote accueilli ou retenu dans son royaume, je ne peux que faire le parallèle avec cette créature reptilienne.

Chaque pas vers moi aussi élégant qu’empli d’une sensualité naturelle me semble une dance qui fait onduler ses hanches et flotter vaporeusement sa chevelure derrière elle.

C’est en ce genre d’occasion, tout comme un levé ou un coucher de soleil, qui me fait regretter mes chers yeux.
J’aurais donné une main, plus facile à régénérer entre nous, pour pouvoir apprécier ce spectacle et surtout déchiffrer les traits de son visage afin de me renseigner plus sur ses pensées et ses intentions.

Car ni sa voix , ni son expression corporelle ne me donnaient d’information valide sur sur ce qu’il pouvait advenir.
Juste une sensation, un instinct aguerri par des siècles de guerres et de combats, de traîtrises et de politiques ainsi que cette infirmité qui m’était advenue qui me poussaient à mobiliser mes ressources pour engager le combat.

Alors que je la fixais de mes orbites vides, en retour de ses propres regards, je sentais l’Astro-force s’accumuler en moi et redoutais d’un coup qu’elle n’explose malheureusement sans la contrainte de mon harnais qui la rendait plus docile …

Je fis un effort titanesque pour faire baisser la pression et ralentir mon métabolisme alors que l’eau autour de mes mains commençait à avoir une température voisine de l’ébullition. Je les mettais prestement derrière mon dos, invisibles pour la naïade qui se rapprochait.

Il fallait que je tue l'air chargé d’agression dans l’œuf … Et pour cela, que je donne une explication plus exhaustive.

Je me raclais la gorge et détournai le visage pour fixer mon attention sur l’endroit d’où partais le signal qui n’avait cessé depuis que j’étais à portée de la boîte-mère qui le diffusait.

Comme vous le savez sans doute, ou du moins en avez-vous entendu parler, ceux de mon peuple utilisent certaines technologies, qu’ils soient d’Apokolips ou de New-Genesis.

L’une d’elles est ce que nous nommons communément des « boîtes-mères » qui nous permettent l’accès à différentes possibilités.
Elles sont généralement de petite taille, comme un petit lingot de matière noire presque indestructible tout à fait anodin en apparence.

Toutes les boîtes-mères détectent la présence d’un ressortissant de mon peuple et communiquent entre elles pour identifier leurs porteurs respectifs.

Elles envoient un signal de reconnaissance, un peu comme font les baleines avec leur sonar, inaudible pour la majeure partie des êtres vivants si ce n’est nous sous certaines conditions.

Ainsi, nous pouvons savoir qui est près de nous, sans pouvoir distinguer l’ennemi de l’ami tant qu’une certaine distance n’est pas franchie, tant qu'une identification précise n'est pas échangée.

Je me frotte le menton un instant, car, expliquer à un étranger le fonctionnement de ces appendices indispensables que sont devenues les Boîtes-mères pour mon peuple me fait revenir certaines particularités sur elles.

Celle qui se trouvait ici relevait d’une identité qui ne m’était pas étrangère bien qu’inconnue à ce moment.
Mais un vague sentiment de lien puissant m’y liait, comme une parenté lointaine … Sans doute normale puisque elle était à un Néo-dieu, mais plus avérée bizarrement.

De plus, si elle était appariée actuellement à un compatriote, de quelque camp qu’il soit, le message aurait été différent, bien différent …

Cette boîte était isolée, sans propriétaire, une aubaine pour moi, une porte de sortie de ce monde et de ma condition …

Une possibilité de retourner rapidement sur New-Genesis et d’être soigné, du moins assez pour garantir une régénération complète de mes yeux perdus …

Et peut-être de retrouver mon équipement et d’enfin pouvoir partir à la recherche du coupable activement … Quel espoir !

Restait à faire cela pacifiquement, du moins tant que la reine des Atlantes coopère amicalement, ce qui n’était pas gagné à cet instant.
Si je voulais tout faire en ce sens, il fallait que je mette plus de cartes sur la table … Honnêteté et sincérité, enfin autant que possible.

La boîte-mère qui se trouve quelque part là-dessous me permettrait de retourner chez moi directement sans avoir à faire le long, dangereux et pénible périple que j’avais commencé avant que vos soldats ne m’interceptent …

Je tournais mon visage à nouveau vers elle.

Si vous me permettiez de la récupérer, je vous en serais redevable … Donc votre débiteur …

Je lui proposais un marché, dont les termes devaient être posés, mais où chaque parti y trouverait son compte.

Encore fallait-il qu’elle soit intéressée …
Encore fallait-il qu’elle ait l’intelligence d’y voir son avantage …
Sans exagérer bien entendu …

La boîte-mère me ferait gagner un temps précieux, mais qu’est-ce que le temps pour un être de ma condition ? Un siècle vaut un mois, tout est une question de point de vue n’est-ce pas …

Sa présence physique commençait à exacerber mes sens, dans des domaines bien éloignés les uns des autres …
Ferait-elle appel à quelque faculté spéciale pour m’enchaîner, me corrompre ? Ou était ce une réaction personnelle tout à fait involontaire ?

Je penchais la tête sur le côté dans cette attitude universelle de celui qui demande une réponse qu’il attend positive.

Elle devait se décider, sa décision devant nous précipiter aux antipodes des relations entre deux êtres, ou plutôt entre une monarque et son peuple et un être défini comme un dieu par dans de nombreux mondes et univers.

Vous pouvez me conduire jusqu’à elle ?

Comme si la forme des paupières sur mes orbites vides ne prouvaient pas assez de l'absence des globes oculaires, elle agite ses doigts devant pour vérifier si j'y vois.

Je reste immobile tout en me faisant la réflexion qu'elle ne comprend certainement pas comment j'y vois effectivement sans ces organes ...

Biotechnologie intégrée chère madame ...

Et si j'avais mon harnais, j'y verrais comme si rien n'avait changé .. Mais je n'avais pas cette précieuse extension de moi même, malheureusement.

Je hoche la tête affirmativement alors qu'elle interrompt son geste et recule.
L'important pour moi n'est pas qu'elle se rende effectivement compte de ma cécité, mais bien qu'elle comprenne l'importance de cette boîte pour moi. Enfin pas trop car elle pourrait y voir un moyen de pression plus important qu'elle ne pouvait l'envisager jusque là.

C'est agaçant d'attendre ne serait ce quelques secondes quand quelque chose est important pour sois même. Je scrute ses gestes, maudissant encore l'absence de ma vue car je n'ai qu'une impression globale d'elle. Impossible de lire ses micro-expressions, juste quelques informations thermiques qui se révèlent difficiles à interpréter avec cette eau qui fausse tout et mon ignorance de son espèce.

"Lire" les gens demande un minimum de pratique et de les avoir côtoyés un peu.

Sa pensée semble avoir cheminé assez loin, et comme tout monarque avisé, comme toute personne de pouvoir intelligente, elle se pose la question de ce qu'elle pourrait tirer comme avantage de ma situation. Elle avait quelque chose que moi, un inconnu, désirait, et pour lequel elle pourrait tirer un prix avantageux ...
Quelle qu'en fut la forme ...

Une bonne reine qu'ils avaient là les atlantes ...
Mais elle n'avait toujours pas pris la mesure de ma propre valeur, de qui elle avait devant elle.
J'éclate d'un rire tonitruant quand elle conclut.

DES GARANTIES !?!

J'ai du mal à retenir mon hilarité.

Des garanties !?!
J'arrive à me retenir de rire, mais ne peux éviter de sourire franchement.

J'essuis distraitement une larme qui coule au coin de mes paupières closes tout en faisant quelques pas de côté pour me placer exactement à l'endroit où le signal de la boîte-mère est le plus fort.

D'un coup, je me ferme et reprends mon sérieux. Je désigne le sol à mes pieds et ma voix est comme un grondement de tonnerre.

N'avez vous pas compris ce que je suis? N'en avez vous aucune notion ?

Si j'avais voulu, au moment même où j'ai senti l'appel de la boîte-mère, j'aurais pu traverser tout ce qui me sépare d'elle, quoique que ce fut, et sans que vous ou vos armées puisse rien faire pour m'en empêcher.

Quoi qu'il y ait pour la garder, je l'aurais pulvérisé pour m'en emparer.

Je m'écarte de l'endroit où je suis sans pour autant me rapprocher d'elle par soucis de ne pas avoir une attitude trop agressive.
Je croise les bras et je la fixe, reprenant d'un ton plus mesuré.

Mais je ne suis pas mon père naturel ...

Ni aucun de ses lieutenant.

Izaya, le Haut-Père m'a élevé dans le respect de la vie et des êtres et a réussi à enfouir ma nature sauvage au plus profond.

Je baisse la tête en la secouant de gauche à droite en signe de dénégation et c'est presque en murmurant que j'ajoute.

Je ne suis pas comme Darkseid ... Non ...

J'exhale un profond soupir qui fait monter puis descendre mes épaules.

Je n'ai d'autre garanties que ma parole pour ce qu'elle vaut quel que soit le pays, le monde ou l'univers ...
Rien d'autre.

Et si vous refusez, je ne vous implorerai pas, je m'en irai les poings dans mes poches crevées, comme disait Rimbaud, et je reprendrai ma route par la bouche d'Hadès telle que je me l'étais tracée ...

Je marque un temps d'arrêt puis reprend :

Du moins après avoir donné mon aide pour le problème qui occupe les atlantes et les humains actuellement, comme je l'ai déjà promis, à moins que de cela aussi vous vous défiez et que vous n'en ayez pas besoin ...

Les gardes sont revenus et en les observant, j'ai l'impression qu'ils réagissent à un ordre donné d'une façon ou d'une autre par la reine.

Ce n'est pas eux qui me surprennent le plus, c'est ce qu'elle dit en se tournant vers moi. Qu'elle me suivait ...

Euh, okay, mais qui est la tenancière ici, qui connaît à priori mieux que moi les environs, elle, du moins à ce qu'il devrait être.

Si quelqu'un venait à New-Genesis, chaque habitant connaissait suffisamment les lieux pour conduire un quidam vers une destination approximative ... Sauf au palais où le nombre de guides à peu près aptes se réduisait considérablement. J'étais de ceux qui pouvaient le faire en tous cas, ayant été élevé dans les murs et y ayant vécu assez longtemps.

Faut croire qu'ici, c'était pas le cas ou que la "dame" était nouvelle venue.

Je pensais qu'elle ferait appel à un sbire, un serviteur, que nenni !
Débrouilles toi mon gars !

La débrouille, ça me connait, bien obligé quand on roule sa bosse dans les pires endroits où la notion et la connaissance de l'environnement fait la différence entre la victoire ou la défaite, la vie et la mort même.

Par contre, encore une fois, mon harnais me faisait défaut, j'allais devoir faire appel aux vieilles pratiques apprises dans ma jeunesse.

Ok, une minute, faites silence ...

Je fais quelques pas pour me mettre à la verticale du signal, pose un genoux à terre et la paume de la main sur le sol.

J'entre alors dans une sorte de méditation que je pratiquais dans la jungle de ma planète d'adoption lorsque mes émotions étaient par trop débordantes.

Ma perception s'étend rapidement au travers de la pierre du sol, des zones libres et d'un autre obstacle, puis d'une fine épaisseur de roche.
Arrivé là, je me cale sur les émissions de la boite-mère qui vont dans tous les sens et je commence mon chemin à rebours.

La fine parois qui masque la boite-mère passée, je ressens la présence d'un grand vide, une salle haute de plafond aux murs bizarres, irréguliers. Le sol renvoie un écho mou, comme une pièce jonchée de poussière fine.

L'air étant absent, je recherche puis détecte les courants d'eau. Ils viennent de deux endroits. L'un petit d'un côté, une porte de service ou un couloir secret, l'autre d'une arche fermée, une grande porte à doubles battants, aussi grande que la salle du trône pas loin.

La salle pouvait laisser le passage à une foule nombreuse, et cet espace la contenir sans problème. Mais aucune âme n'était venu là depuis des lustres semblait-il.

Mon esprit passe cet huis et immédiatement ensuite se heurte à un amat de gravas qu'il traverse. Je "suis" dans une autre alcôve d'où partent plusieurs couloirs.

Ici, l'eau circule bien plus, venant de l'un d'eux avec des relents de grand large. Une ouverture vers la mer profonde à l'autre bout ? Je m'y fraye un chemin, suivant les effluves.
J'arrive dans un autre lieu qui devait être clos aussi mais qui est éventré vers le haut aujourd'hui. Curieux.

Une colonne de marbre trône sur un piedestal, rien n'et posé dessus, mais je perçois une grande puissance fantomatique résiduelle. Quelque chose était là dessus, quelque chose de très énergétique qui me dit quelque chose et qui y a séjourné assez longtemps pour y laisser sa trace.

Je perçois aussi les ruines laissées par un combat titanesque qui a eu lieu ici. Des éclats d'armures atlantes et d'autres étrangères à ce monde, de minuscules parcelles d'armure d'Apokolips. Il y a eu bataille entre atlantes et des gens de ma race ici !

Je sais où je me trouve alors pour y être allé au moins une fois. La salle où le cube a été dérobé par Darkseid en la personne de Steppenwolf, son lieutenant.

Reste à trouver le chemin à partir d'ici, ce qui est bien plus rapide.

Je suis resté genoux à terre à peine une minute et je me redresse.

Suivez moi donc puisque une reine ne peut me fournir de guide dans son propre palais
Je sais, j'aurais pu éviter cette remarque sarcastique, mais on ne se refait pas ...

Je me mets en branle donc et sors à grande enjambées, enfilant couloirs et salles, escaliers et arccades pour descendre deux étages plus bas.

J'arrive rapidement à la salle où était caché le fameux cube et je lui montre du doigt la stèle vide surplombée par une déchirure d'où on voit la haute mer.

Je suppose que vous savez au moins ce qu'il y avait là et ce qui s'est passé ici

Petite pointe d'humour caustique encore.

Je me faufile entre les débris et m'introduis dans un autre couloir, sombre et étouffant et j'arrive enfin devant un autre monceau de pierres qui masque presque intégralement les doubles portes de plus de trois mètres de haut.

Quelques efforts et le milieu est dégagé, je pousse fortement sur les vantaux du portail qui s'ouvrent finalement, provoquant la chute de quelques pierres instables et fait se lever un nuage épais de vase.

Le sol semble d'un marbre blanc aux nervures noires en dessous.


Pas de lumière, et peu de courant pour dissiper rapidement cette bouillasse.

Je vois une torche de chaque côté et j'en prends une qui s'allume immédiatement. On y voit pas mieux pour cela, mais comme si un mécanisme oublié venait de se mettre en route, de l'eau fraîche brasse la salle et éclaircit rapidement l'environnement.

Se révèle alors pour nous les murs et le plafond de cette cathédrale sous-marine.

Une histoire semble racontée, une bataille, et en reconnaissant les armures et les traits de ceux qui y sont représentés, je prends conscience que c'est l'ultime bataille de l'alliance des dieux grecs, des atlantes, des amazones et de d'autres peuples contre l'envahisseur venu d'Apokolips pour asservir la Terre et ceux qui y vivent.

C'est comme une bande dessinée sculptée dans les murs dont les débuts partent de ce portail que nous venons de franchir jusqu'à l'aboutissement en face, Zeus et Orin blessant le général en chef ennemi puis Ares lui donnant l'estocade finale avant qu'il ne fuit dans une sorte de char céleste.

Au milieu de la salle, il y avait une estrade, sur l'estrade, un haut siège tourné vers cette fin, et posé sur les accoudoirs, un trident, le même qui était représenté sur les murs si ce n'est une des dents qui était brisée.

Le signal vient du fond ...

En avançant, malgré mes yeux absents et grâce aux perceptions qui les remplaçaient plus ou moins avantageusement, je peux suivre le déroulement de l'histoire en décryptant les sculptures à peine resortante faites sur les murs.

On y voyait incontestablement les défenseurs, bien identifiables, et les agresseurs, que je ne reconnaissais que trop bien, des para-démons en majorité et quelques Néo-dieux aux armures frappées d'un ancien symbole d'Apokolips.

Les tableaux offraient des vues rapprochées où les personnages avaient plus ou moins la taille réelle et d'autres en arrière plan dont les proportions allaient de la hauteur d'une main à celle d'un doigt sans pour autant perdre le soucis du détail donné par le ou les artistes.

C'est dans une de ces petites représentations que je découvrais quelque chose qui faillit me faire m'arrêter sur place.

Il y était représenté un groupe d'amazones en grande difficulté au sommet d'une petite colline, cernées par une horde d'ennemis et venant de l'arrière un guerrier monté sur un cheval brandissant une grande hache enflammée de la main gauche tout en arborant une pelta au bras droit, face tournée vers le lecteur.

La pelta, comme chacun sait, est le petit bouclier en demi lune des amazones, décoré le plus souvent de la chouette de la déesse. Mais là, à la place, il y avait un signe que seuls ceux de chez nous ou ayant quelque culture de New-Génesis pouvaient identifier, et ce dessin stylisé était celui qui m'était assigné particulièrement.

Etrange quand on sait que je n'étais pas né alors, quelque centaines d'années me séparaient de cet événement.

L'armure ensuite, même si elle semblait à peu près suivant les standards de l'époque, renforçait cette bizarrerie. Ceux qui me connaissent y trouveraient incontestablement des motifs reproduisant ceux de mon harnais à s'y méprendre.

Et enfin, un homme fonçant à bride abattue pour aider les amazones, c'était presque du roman et même du domaine de l'anecdote que ces demoiselles n'auraient su accepter ...

Heureusement, la reine était subjuguée par le trident posé sur le trône à cet instant et ne remarqua rien, du moins je ne le constatais pas en lui jetant un bref regard.

Moins de deux mètres plus loin on voyait la même scène mais où la situation était inversée, les para-démons jonchaient le sol, les guerrières mues par un nouvel élan se ruaient sauvagement au combat avec au milieu d'elle, les dépassant de deux bonnes têtes au moins, le guerrier à pied les invectivant au combat.

Et ce guerrier, c'était incontestablement moi ! Enfin avec ma tête reconfigurée habituellement par ma boite-mère, pas celle que j'ai actuellement.

Ce mystère m'était entier mais ne représentait pour l'instant pas ma priorité.

La reine venue à mes côtés, je m'approchais de la source du signal que j'avais perçu plus haut.

Elle se situait immédiatement à gauche de la représentation de la fuite du général en chef des agresseurs juste un peu en retrait de celle à droite où Hermès lui donnait le coup de grâce.
Y était représenté Zeus, que je reconnaissais lui très bien même s'il était un peu plus jeune et avec moins d'embonpoint, et un autre géant, le roi d'Atlantis de l'époque.

Zeus foudroyait l'Apokolipsien tandis qu'Orin lui plantait son trident dans le corps. La combinaison des deux pouvoirs, l'éclair et la magie du trident avaient presque vaincu le géant venu d'un autre monde qu'Hermès termina ensuite. L'histoire, la légende, dit que c'est ce dernier qui en a eu le mérite, mais la rumeur pleine de vérité affirmait que c'était ces deux là qui avaient vaincu.

Je m'arrêtais devant la dernière scène où le généralissime vaincu nous faisait face lamentablement, tiré par ses deux capitaines vers la soute d'un appareil transporteur de troupe antédiluvien d'Apokolips.
Son blason ne me disait pas grand chose, mais barrant en diagonale en travers de son ventre et de son torse, trois petits trous étaient repérables, ceux laissés par le trident qui l'avait frappé.
Curieusement, une fine ligne circulaire délimitait l'endroit, rendue presque invisible par le dépôt qui s'y accrochait encore.

Je fus obligé de lever le bras pour l'essuyer avec la paume de la main.

Le signal vient de là, il doit y avoir un moyen d'ouvrir cette cache sans devoir tout défoncer ...

Je me tournais vers la reine interrogateur.

Je voudrais éviter d'abîmer ce chef-d'oeuvre, vous avez une idée ??

C'était tout simple en fait, je pensais que le trident ébréché aurait pu servir, être la clef à insérer dans les trous, mais la simple pression d'une main atlante sur la zone délimitée avait déclenché le mécanisme alors que j'avais essayé de faire la même chose l'instant d'avant, sans succès.

L'air triomphant de mon hôtesse était un ravissement, une transformation totale par rapport à ce qu'elle affichait depuis les premiers instants de notre rencontre.

Elle semble avoir rajeuni de bien des années et je percevais à cet instant tout le poids que pouvait générer un royaume sur son souverain, charge qui venait d'un coup de s'alléger pour l'occasion.
Elle est si excitée par cette chasse au trésor qu'elle me précède, du moins jusqu'à ce que la prudence lui souffle de me laisser passer devant au cas où il y aurait danger.

Du moins, c'est ainsi que je percevais ses actes.

On touche au but en effet, l'appel est si fort qu'il en est assourdissant

Je passe donc devant elle et descend une volée de marches, courbant la tête car le plafond du passage est un peu bas pour moi.

La première marche s'enfonce sous mon poids, je le sens, mais comme aucun déclic ne m'indique un quelconque piège en train de s'armer, je continue alors qu'une luminescence claire commence à inonder le passage et la pièce qui est au bout.

Arrivé en bas, je me retrouve dans une petite salle de quelques dizaines de mètres carrés au plafond assez haut.

Un passage est aménagé entre deux immenses monceaux d'artefacts étrangers à cette terre mais dont la nature est plus qu'évidente pour moi.

Nom d'un paradémon ! C'est le butin de guerre de la bataille décrite dans la salle d'avant !

C'était des pièces d'armures par centaines, des armes, des morceaux de corps bio-artificiels parfois dont des élytres et des ailes transparentes, des objets technologiques brisés ou peut être encore fonctionnels, tout cela accumulé en deux petites collines encadrant un sentier menant à un autre monceau qui barrait le mur d'en face.

Je pris un des casque par sa crête et le soulevais.

La tête du para-démon, enfin son crâne, était encore logée dedans, ses mâchoires s'ouvrant maccabrement sous l'effet de la gravité dans un cris de protestation silencieux.

Pôvre bête ... Je raille avant de le jeter par dessus le reste sans aucun respect, la mandibule inférieure sautant à l'opposé du reste sous le choc.

Je jette un "regard" circulaire sur tout ce fatras. Il y a à peine les restes d'un escadron ou deux ici ... Il doit y avoir d'autres caches quelque part si ils ont ramassé tous le matos ...

Ce qui m'intéresse est devant moi cependant et j'avance de quelques pas avant de commencer à déblayer tous les trucs qui sont par dessus.

Une fine poussière s'élève et là encore un système d'épurage se met en route qui la fait rapidement disparaître.

Enfin je la trouve, une petite boîte noire rectangulaire sans importance pour qui ne sait ce qu'elle est ni ce qu'elle peut faire.

Je la saisis entre deux doigts et la dépose dans le creux de ma main gauche précautionneusement.

Dix centimètre sur cinq et deux d'épaisseur renfermant l'espoir de rejoindre mon monde en un clin d'oeil.

A l'instant où elle s'y trouve, le signal s'interrompt et je sens un mécanisme de contrôle me sonder.

Vérification automatique et habituelle de mon identité qui cesse dès l'instant où la machinerie est assurée que je ne suis pas le propriétaire initial.

Un spasme interrogatif pulse et interroge mon esprit, chose tout à fait normale aussi.

Ben oui quoi, je ne suis pas ton maître mais je suis de son monde, de sa race.
Voyons maintenant de qui il s'agissait ...

Dialoguer avec une boite-mère est autant possible par voie orale que psionique, mais dès que j'entre en contact avec son intelligence réduite, je me rends compte qu'elle est âgée, très âgée, d'une version bien antérieure à celle que je possédais.

C'était un peu comme comparer le plus perfectionné des ordinateurs avec une montre suisse pour ne pas dire un cadran solaire. Limité quoi. D'ailleurs, si elle avait été plus récente, des protections auraient été dressées dès l'instant où elle aurait eu la certitude que je n'étais pas son légitime propriétaire. Je m'y étais préparé et rien ne survient.

Pourtant, elle a les fonctions de base essentielles, reconnaissance de l'interlocuteur, "souvenirs" du propriétaire et de quelques décennies d'événements enregistrées et, le plus important, possibilité d'ouvrir un vortex vers mon monde.

Par contre, au niveau énergie, le bas blesse un peu.

Depuis le temps, elle a besoin d'un petit coup de pouce qu'une exposition au soleil ou à tout autre source de radiation pouvait fournir.
Faute du premier, une impulsion d'Astro-force provenant de ma paume la revigore et je commence mon interrogatoire.

La réponse me sidère.

Quoi ? Qui ça ?!? je ne peux m'empêcher de m'exclamer.

Cette révélation est si incroyable que je me tourne vers l'atlante et lui révèle ce secret enfouis depuis tant de temps au milieu de tous ces débris d'une armée vaincue.

L'ancien propriétaire de cette boite-mère était un ressortissant d'Apokolips, un certain Uxas, fils de Heggra un des trois souverains primordiaux d'Apokolips, qu'on connait aujourd'hui sous un autre nom, ... Darkseid ...

Partout dans le monde sous-marin et notamment en Méditerranée, il y a de grandes et profondes fosses, des réseaux de cavernes dont certains sont scellés depuis des siècles, renfermant des artéfacts ou des trésors oubliés depuis des lustres ou, pour certaines, garantissant que des choses ou des êtres dangereux ne puisse en sortir et parcourir le monde d’en dessous ou d’au-dessus pour le détruire.

Dans leur grande sagesse, les responsables et les seigneurs, vainqueurs, firent ramasser tout ce qui venait de l’ennemi, entassèrent ce qu'ils ne pouvaient détruire immédiatement dans de tels lieux puis les murèrent pour ce qu’ils prévoyaient être une éternité ou du moins le temps de pouvoir y consacrer plus d'attention après la guerre.

Ce que je n’avais pas perçu initialement lorsque je donnais une petite impulsion à la boite-mère pour la revigorer, c’est cet infime signal qu’elle avait diffusé initialement avant de redevenir passive.

Partout dans les restes antédiluviens de l’armée de Darkseid oubliés, de petites lucioles s’éveillèrent.

C’étaient une infime portion des cohortes d’Apokolips qui revenait partiellement à la vie, cherchant dans un premier temps à reconstituer leurs corps démembrés et éparpillés avant de se mettre en route comme des zombis pour converger vers la source de l’appel, peu soucieuse d’être attaquées, détruisant avec leurs griffes la roche qui barrait le chemin avant de cheminer sur le fond en lignes qui se renforçaient peu à peu.

Leur maître avait lancé son appel, elles devaient y répondre.

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Je suis perplexe autant que suspicieux, Darkseid a toujours été quelqu'un de retors, même dans ses plus jeunes années et je tiens dans ma main un de ses biens les plus précieux de l’époque, une de ses boîtes mères.

Bien sur, ce n’est pas la principale, c’est une auxiliaire et d’après mes premières constatations, celle qui gérait sa protection et les communications avec ses troupes.
La petite éraflure sur un des petits côtés qui se prolongeait sur un des grands attestait du coup violant qui l’avait fait sauter, coup sans aucun doute donné par le trident que tenait la reine actuellement.
Mais principale ou auxiliaire, je me doutais qu’il y avait quelque chose de dissimulé dans les mécanismes contenu par le boitier, quelque chose qui était censé protéger les données et les fonctionnalités d’une intrusion quelconque.

Pour l’instant, mes tâtonnements n’avaient rien déclenché et cela était très inquiétant.
Pensif, je me massais le menton de ma main libre, geste universel de quelqu’un qui cherche ou s’interroge …

L’atlante venait de venir se planter devant moi après avoir aussi prospecté les dépouilles de la pièce.
Je tournais le visage vers elle, relevais le menton en fait, et je hochais la tête.

Ce que je vais faire ? euh … Déjà essayer de prendre le contrôle de cette chose sans déclencher une catastrophe, ensuite, réactiver les fonctions endormies de mes propres systèmes pour dans un premier temps re matérialiser mon armure. Pour le vortex qui me ramènera au bercail, ça attendra que notre deal soit réglé. Mes yeux peuvent attendre encore un peu.

Je regardais ensuite tout autour de nous les dépouilles des para-démons et un sentiment de malaise indéfinissable m’envahit.

On va sortir d’ici pour l’instant, libre à vous de faire examiner toutes ces reliques par vos scientifiques et vos soldats pour en retirer quelque chose, moi, ça me hérisse le poil d’être au milieu de ces trucs. Venez, retournons dans l’autre salle.

Et je tournais les talons pour monter la volée de marches et parcourir le chemin pour revenir à la grande pièce où était mémorisé dans la pierre les hauts faits d’une époque révolue.

Sans aucune gêne, je me dirigeais vers son centre et m’installais sur le trône, la paume ouverte devant moi, fixant le petit hexaèdre noir.

Je n’aime pas ça, oh non! Je n’aime pas ça …

Mon front se plissait sous l’effet de la concentration intense nécessaire pour faire tomber les barrières et modifier les caractéristiques de l’objet afin de les affilier à moi-même.

Encore une fois, je me mesurais à mon père, enfin à mon proto-père plutôt et à sa malice.

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La boite-mère à peine éloigné de quelques dizaines de mètre de la pièce où elle venait d’être découverte, des lucioles illuminèrent la nuit qui était automatiquement retombée sur les restes des escadrons.

Les orbites du crâne sans mandibule qu’avait jeté Orion s’emplirent d’une lueur verdâtre et de dessous les cadavres et les pièces d’armures, ce qui avait été les composants de ce qui avait été son corps commencèrent à se frayer un chemin pour le rejoindre.

Plus de chaires sur les os devenus inutiles pour la plupart, juste des morceaux de mécaniques morbides qui n’avaient qu’un seul objectif, se réunir à nouveau et s’unir pour recréer un semblant de vie et se mettre au service du maître.

Point de biologie là dedans si ce n’est une toute petite fiole logée dans chaque crâne et reliée à la positronique.
Seules celles qui avaient survécu aux combats, aux ravages du temps et au manque d’énergie résiduelle pour les maintenir en vie s’étaient activées, bien heureusement.

C’est pourquoi elles étaient si peu de par le monde, mais assez pour sembler nombreuses, quelques centaines au demeurant, n’ayant qu’un seul but, rejoindre l’épicentre du signal qui les avaient réactivé et reprendre du service.
Déjà, partiellement reconstruites, les morceaux manquants les suivant pour les rattraper, certaines formes chaotiques rampaient vers l'escalier.

Lentement, vu l'absence de masse musculaire qui n'avait pas survêcu, les cohortes zombi se dirigeaient vers Atlantis.

Beaucoup tombaient dans les abysses où l'énorme différence de pression soudaine faisait exploser les enveloppes protégeant les petits cerveaux qui s'étaient réveillés.

D'autres croisaient des prédateurs, poulpes, calamars, requins et que sais-je, et si ceux ci parvenaient à arracher ou briser les capsules en les démembrant, immobilisaient définitivement les pantins.

Certaines disparaissaient dans les laves de volcans sous-marins assez fréquents dès l'instant où ils se trouvaient sur leur chemin.

Aucun esprit de survie ne subsistait, n'avait été encore rétabli, juste la volonté indéfectible de poursuivre leur chemin en ligne droite jusqu'au bout.

Point d'entr'aide, point de camaraderie, juste des colonnes silencieuses de monstruosités obstinées avançant de plus en plus rapidement à mesure que leurs pièces se rejoignaient et s'assemblaient.
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Il faut savoir qu'à cette époque, la piétaille d'Apokolips était constituée d'unité biosynthétique dont les muscles étaient des aggloméras de cellules clonées, les tendons et les nerfs de polymères, les os de roches molles calcaires entrelacées de fils de silice, le tout animé sous des cuirasses ou des "peaux" chitineuses dont la structure était copiée d'insectes originaires d'un monde que les humains ne connaissent pas encore.

Le système central, mi-électronique, mi-biologique gouvernait tout cela, la première partie majoritairement inclus dans les partie chitineuses gérant le tout alors que la seconde, très parcellaire et encapsulée dans une coquille de la taille d'une noix, présidait aux services de l'apprentissage et des actions et réactions nécessaires à la compréhension des ordres et à l'instinct de survie.

Cette partie biologique avait été issue de bien des formes de vie avant de devenir totalement synthétique et clonée d'être humanoïdes plus avancés pour finir. A l'époque, elle provenait directement d'une espèce se rapprochant physiologiquement des chauve-souris qui avait le système social similaire aux abeilles.

L'espèce avait presque disparu suite aux prélèvements massifs pour monter les armées d'Apokolips pour la guerre et les esclaves au moment où les scientifiques purent synthétiser les familles spécialisées de "cerveaux" bien moins coûteuses et plus rapides à créer.

Ainsi, batailler sur terre ou dans les airs ne posait pas de problème et le propriétaire de la boite-mère faisant office de "reine" assurait la fidélité à toute épreuve des escadrons qui, comme leurs homologues biologiques purs, donnaient leur vie pour obéir aux ordres ou sauver leur maître.

Tout cela, je l'avais appris de mes mentors lors de ma jeunesses, comme tous les enfants de New-Genesis, mais je ne pensais pas alors que cette connaissance aurait une réalité après autant de temps passé.

Tout cela me vient à l'esprit alors que je suis concentré sur le motif intérieur de cette boîte-mère providentielle afin de le modifier juste assez pour subvenir à mes besoins immédiats, à savoir me rendre mon armure et ouvrir par la suite un vortex vers mon monde, et non pas vers celui de mon très cher père biologique.

Mais la rumeur qui grandit et avec elle l'angoissante fureur de la reine me perturbent.

Je ne dirais pas que c'est anormal, juste un peu surprenant et inattendu.

Soyez sure que je suis toujours sur mes gardes, mais ce qui s'avance vers nous n'est pour l'instant pas prioritaire ni dangereux.

Ce ne sont que des ombres qu'il ne faut pas éveiller plus que ce qu'il n'est.

Après ça va devenir un peu plus chaud, mais pour l'instant ...

Laissez les venir ...

J'ai à peine levé le nez pour regarder vers le couloir plongé dans la nuit dès que nous l'avions quitté.
De petites lucioles rouges sautillaient à différentes hauteurs dans son encadrement, grossissant peu à peu.

Un nuage diffus de poussière commençait à en sortir, immédiatement aspiré par les mécanismes automatiques de la grande salle.

Au moment où j'allais me replonger dans mes investigations et modifications de la boite-mère, une main spectrale apparaissait et s'agrippait au chambranle de la porte pour hisser le reste du corps dans la lumière.

Un para-démon, enfin une armure sans beaucoup de restes organiques dedans plutôt, s'avança dans la lumière.

Il lui manquait une aile et l'autre était définitivement tordue, sa jambe droite traînait lamentablement derrière lui et raclais le sol en traçant un sillon dans la fine de couche de vase restante, retenue par un ou deux tendons au reste de son corps.

Sur sa tête, elle avait un casque, mais en-dessous, aucune mâchoire inférieure.

Je crois que c'est notre ami de tout à l'heure, laisse venir ...

Reste juste sur tes gardes pour l'instant ...

Si ça se passe comme je le crois, il va se mettre au "garde à vous" devant moi ...

Sinon ...

Je dois terminer mon piratage ...

Et je me replongeais dans les méandres d'instructions piégées de l'antique boite-mère.

Les uns après les autres, les pantins entrèrent et effectivement se rangèrent les uns à côté des autres face au trône.

Armée hétéroclite et dépenaillée de fantômes dont certaines pièces se traînaient encore jusqu'à leurs places alors que l'ensemble principal attendait déjà les ordres.

J'entendis à peine l'arrivée d'un groupe d'hommes armés qui cherchaient la reine pour l'informer de ce qui se passait dehors ...

Trop absorbé ...

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Dehors, c'était la panique, les soldats atlantes voyaient arriver ces ombres surgies du passé qui convergeaient vers la ville, et, comme les portes avaient été fermées immédiatement, après avoir essayé de contourner les murailles, il les escaladaient à la force de leurs doigts spectraux.

Lorsqu'ils arrivaient en haut, à défaut de les tuer, ils étaient repoussés et retombaient pour se relever et se réassembler avant de reprendre leur ascension.

Pourtant, ils ignoraient totalement les soldats, du moins pour le moment ...

Des messagers couraient de toutes parts, convergeant vers le palais pour avertir la reine et l'armée emplissait les murs pour repousser l'attaque présumée.

Encore et encore ils se redressent et tentent de contourner l’obstacle qui les empêche de répondre à l’appel, encore et encore ils sont repoussés et tombent lentement sur le fond, se reconstituant après quelques secondes d’immobilité.

Ce « jeu » peut durer une éternité, ne pouvant être interrompu que par la fatigue croissante des défenseurs, mais les cohortes d’Apokolips ne sont pas si dénuées de sapiens que cela.

Déjà certaines se convertissent en mineurs, grattant et arrachent des blocs des murailles avec leurs doigts armés du métal de ce monde brûlant d’où ils viennent.

L’esprit de ruche commence à se reconstruire peu à peu au fur et à mesure que les capsules leur donnant une « vie » se rechargent, sortent de la stase qui les a engloutis ils y a des éons.

Certaines ne se relèvent pas, très peu en fait, la fiole s’étant brisée par hasard sur une pointe rocheuse qui garnit le bas des défenses de la capitale atlante prévue pour arrêter les armées de crabes géants d’un adversaire passé actuellement emprisonné dans les profondeurs insondables de l’océan.

La marée monte donc et infecte les murs, inexorablement.
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J’y suis presque…

Je réponds à la reine dont le ton est presque hystérique.

Les para-démons sont pratiquement tous remonté maintenant et nous encerclent dressées et immobiles, telles des statues morbides grotesques, leurs orbites écarlates fixées sur le centre de leur rang, vers le trône ou je suis assis, toujours à mon labeur.

C’est bon, j’y suis …

Tout à coup, un frémissement m’entoure, mon image se brouille alors que l’eau qui m’entoure est agitée sous la poussée des molécules qui disparaissent et sont remplacées.

Mes Jean’s s’évaporent ainsi que mon tee-shirt auxquels se substituent mon armure d’un rouge écarlate.

A la place de mon casque qui lui aussi m’avait été arraché, se crée un bandeau entourant ma tête, couvrant mes orbites vides d’un masque semblant d’or le plus pur.
Je me lève alors et je descends les quelques marches, la transparence normale de l’eau revenue alors que le processus est achevé.

Arrivé au bas du piédestal, je me redresse de toute ma taille et d’une voix forte, je lance l’ordre dans la langue de mes pères.

Dans un bruit de tonnerre, les morts vivants se redressent, claquant du poing sur leur torse pour saluer leur général avant de mettre leurs bras le long de leur corps, aussi droits et raide qu’il leur était permis.
Aux ordres, comme jadis !


Je vais te montrer leur point faible maintenant car lorsque trop d’entre eux seront désactivés, l’effet de ruche risque de prendre le pas sur mon autorité usurpée …

Ils savent déjà que je ne suis pas leur « reine » originale, leur général en chef, mais m’obéissent car j’ai le bâton de commandement pourrait-on dire …

Je levais ma main dans le plat de laquelle se tenait la boîte-mère pour la montrer avant de finalement la faire disparaître dans une des « poches » de ma ceinture d’armure.

J’avançais jusqu’au para-démon sans mâchoire inférieure et de l’index pointait la racine d ce qui avait été son nez sous le casque.

C’est là où de nombreuse croyance situent le troisième oeil qu’il faut frapper, deux centimètre derrière se trouv le pivot de leur vie, regardes …

Ma main descend doucement jusque sous la bordure du casque puis remonte à l’intérieur brusquement, perforant l’os du palais du crâne à l’intérieur et saisissant à la vitesse de l’éclair puis extrayant une noix noire que je brandissais sous ses yeux.

Ceci est leur conscience, leur libre-arbitre, leur vie. Sans cette chose, ce ne sont que des pièces de métal inoffensives.

Il suffit de bien viser et d’y mettre la force qu’il faut pour les briser …

Beaucoup de force …

Une arme à feu des humains d’en haut y parviendrait sans doute, une lance ou un trait bien appliqué aussi … Il suffit de briser cette enveloppe …

Je joignais le geste à la parole et j’écrasais la chose à peu près de la taille d’un œuf de pigeon entre mes doigts, apparemment sans effort pour un spectateur extérieur.

Simultanément, le corps dont provenait la petit chose s’effondra dans un bruit de ferraille atténué par la viscosité de l’eau.

Ce que je ne remarquais pas alors, tout à ma démonstration, c’est le remous qui se propagea imperceptiblement dans les rangs.

Tu as un trident en trop, tu peux me prêter le vieux s’il te plaît ? … demandais je en tendant le bras vers la reine …

A ce moment là, un son strident monta des para-démons, se propageant peu à peu à tous les « morts-vivants » jusqu’à ceux de l’extérieur.

L’appel de la ruche était lancé et elles se mirent toutes en position de combat, du moins autant qu’elles le pouvaient.

Oh ! Oh ! je crois que ça va foutrement chauffer maintenant ! …



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Tout à coup, les envahisseurs passifs commencèrent à rendre les coups et à agresser véritablement leurs opposants.
Le combat s’engageait véritablement pour finir …
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Oui, ensemble, dos à dos comme à l'exercice !…

Et le ballet mortel commence, mortel pour eux car trop lents, trop peu discipliné pour attaquer efficacement au point de se bousculer les uns les autres jusqu'à faire tomber leurs voisins.

Dès que j'ai réceptionné le vieux trident dans ma main, j'ai senti sa puissance endormie se réveiller.

Dès que j'ai commencé à faire monter l'Astro-force en moi, j'ai constaté qu'il vibrait au diapason, aussi impatient que je l'étais à en découdre.

D'étranges volutes dorées forment entrelacs et arabesques qui sillonnent le manche de l'arme de l'ancien souverain de l'Atlantide, remontant vers les dents qui en arment le bout pour les faire briller d'un feu mystique.

L'ancienne magie régénérée et la force guerrière de la Source mêlées inondaient l'immense pièce comme un phare.

Un rictus mauvais se dessine alors sur mes lèvres et je commence ma moisson.

Le trident s'enfonce dans les crânes comme dans du beurre, perforant les capsules et éclatant les os tout en les les pulvérisant de l'intérieur à cause de cette énergie combinée qui s'y déverse.

De mon autre main libre j'attrape les têtes et enfonce mon pouce et mon index dans les orbites vides pour saisir l'oeuf qui anime ces corps et le broyer après l'avoir extirpé ou à demeure.

Le combat est inégal, presque ennuyeux, ils n'ont pas la vivacité d'antan qui les rendait si dangereux pour leurs adversaires ...

Cela me laisse l'occasion d'observer la reine se battre avec une énergie ardente qui transparaît dans ses yeux et dans l'eau qui nous entoure.

Très vite le nombre diminue et je perçois cela par l'intermédiaire de la boite-mère.

Une image baignait mon esprit, comme un ciel étoilé, et à chaque "oeuf" qui était détruit, une lueur s'y éteignait invariablement.
Sans doute un indicateur pour le propriétaire de cette armée, pour moi celui de la fin de ce combat.

Bientôt, une zone sombre, presque totalement démunie de point lumineux, trônait en son centre, position que nous occupions dans cette pièce.

Mera renvoya le dernier dans un sommeil définitif et la dernière lueur disparut.

Restait une sorte de couronne perceptible à bonne distance, sans doute ceux qui tentaient d'entrer dans la cité et qui s'opposaient aux gardes d'Atlantis.

Mais là aussi, telles des chandelles sous le coup des courants d'air, les loupiotes diminuaient en nombre.

Par je ne sais quel procédé, la reine avait communiqué sans doute la méthode à utiliser pour neutraliser l'ennemi et ses troupes y mettaient plein d'entrain.

Finalement, je quittais ma posture de combat alors que les morceaux de la dernière victime s'effondraient sur le sol et je me tournais vers ma coéquipière.

Elle me fit penser à ce moment là à Wonder-woman lorsqu'elle était habitée par la foi guerrière des dieux dont Ares avait fait les frais ...

On ne titille pas les femmes de pouvoir, à moins d'être masochiste ... Qu'on se le dise !

Je secouais ma main gauche pour en faire tomber les restes d'éclats d'os ...

Je crois qu'on a fini ici, restera plus qu'à faire le ménage. Par contre, dehors, de l'aide sera appréciée je crois ...

Et je quittais la pièce pour rejoindre les remparts ...

Une fois dehors, je désigne le haut d'un mur où peu de combattants résistaient du mieux qu'ils pouvaient et d'où descendaient des soldats blessés assez sévèrement, mâles ou femelles, supportés par des camarades qui une fois déchargés de leur fardeau remontaient pleins de volonté pour reprendre leur place, je lui criais m'élançant :

Je prends par là et on se rejoint de l'autre côté !

Et fonçant comme à mon habitude, dépassant ceux qui montaient tout en évitant ceux qui descendaient, j'entrais en lice.

Le combat changea d'âme, l'ennemi fut décimé et les défenseurs revivifiés par ce prompt et vigoureux renfort.

Je les invectivais de la voix, décomposant mes mouvements à l'occasion pour bien leur montrer comment vaincre facilement.

Je ne sais si c'est le trident flamboyant que j'utilisais ou ma propre férocité à laquelle je donnais libre cours, mais ils furent galvanisés et criaient des vivas à chaque portion de muraille délivrée.

Au fur et à mesure de notre avancée, la rumeur s'amplifiait et gagnait les coeurs jusque dans la ville.

Enfin, j'aperçu Mera qui fauchais ses opposants précédent ses défenseurs, et quand le dernier Para-démon s'écroula entre nous, proprement coupé en deux par son trident, je m'arrêtais et appuyé sur le mien comme s'il s'était agit d'un bâton de pélerin, je lui souris :

Une bien belle bataille menée de main de maître, de maîtresse devrais je dire ... Nul doute qu'on en reparlera encore dans quelques siècles ...

Dans ma tête, l'esprit de ruche n'était plus que ténèbres ...

Nous avions vaincu les troupes de cet âge où Darkseid n'était pas encore et où l'union des dieux, des hommes, des Atlantes et de bien d'autres peuples avait sauvé ce monde et bien plus, du moins temporairement ...

Finalement, je lui tendais le trident royal qui s'éteignit peu à peu lorsqu'il quitta ma main.

Je n'en ai plus besoin je crois et il doit retourner à sa légitime propriétaire ... ajoutais en m'inclinant.

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Même si les restes de l'armée ancienne avaient été vaincu et éradiqués, même si une fois de plus la victoire était pour ceux de la Terre et surtout des mers, à différents endroits du cosmos des alertes tintèrent faiblement, certaines oubliées et ignorées, d'autres qui éveillèrent à leur tour des forces ou des consciences inconnues.
Derrière le Mur, la Source était de ces dernières ...

EPILOGUE

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Recevoir les remerciements de la reine d'Atlantis me fit un petit quelque chose au coeur.

Je la dévisageais du regard un peu surpris, puis hochais la tête.
Elle ne disait pas ça comme ça, elle le pensait, et c'était un peu nouveau pour moi.

D'habitude, j'évite ce genre "d'effusions" en m'évanouissant dans un boom-tube.

Je ne manquerai pas une occasion de revenir pour découvrir un peu plus votre belle cité.
Et soyez assurée qu'en cas de problème, si j'en suis averti, je viendrai vous apporter mon soutien ...

Mes yeux glissèrent vers le trident maintenant éteint, puis sur sa dent épointée, et alors les rouages de ma mémoire se mirent à fonctionner.

Lorsque j'avais investi les appartements de mon père, Darkseid, j'avais fureté un peu partout et j'avais découvert une petite salle où des artefacts étaient exposés comme dans un musée.

Parmi eux, il y avait une pointe de métal grisâtre d'une dizaine de centimètres sous globe et cette tige correspondait en fait à la partie manquante de l'antique trident que tenait actuellement Mera.

Attendez, j'ai peut-être un petit quelque chose qui pourrait compenser les ennuis que je viens de vous causer sans le vouloir, une seconde ...

Je glisse alors mes doigts dans la poche de mon armure où j'ai mis la boite-mère récupérée et quand ils entrent en contact, j'ordonne d'ouvrir un vortex sur le côté, juste une fenêtre à hauteur de poitrine.

Cherchant autour de moi, je me baisse pour ramasser un gant d'un des para-démons vaincu, le triture et le malaxe un peu pour en réduire son volume sans en changer trop la forme tout en lui donnant un aspect recherché, tous les doigts repliés sauf le majeur bien tendu, signe reconnaissable par tous les humains de la surface.

Je me penche alors et disparais jusqu'à la taille dans le trou ouvert dans l'espace.

L'échange est rapide, surtout qu'une série d'alarmes commencent à retentir, et je me retire de là cachant dans mon poing fermé quelque chose, le gantelet modifié ayant disparu.

Le vortex se ferme avec un léger pop caractéristique des anciens modèles ...

Ne bougez pas, ça ne va prendre qu'un instant Dis je en saisissant la dent brisée d'une main et en posant le poing fermé à son extrémité.

Immédiatement, l'arme des rois Atlantes se remet à briller et je fais transiter dans ma main supérieure l'Astro-force en la contrôlant le plus finement possible.

Une chaleur ardente se propage dans ma main inférieure alors que la refonte s'exécute, alors que la partie manquante retrouve sa place d'origine.

L'eau tout autour s'agite un peu et boue puis, lorsque j'ouvre les mains et lâche le trident, tout s'arrête.

Tous ceux qui sont présents peuvent constater alors que le trident des rois est à nouveau complet, si ce n'est une mince écharde, à peine une aiguille à coudre, qui manque sur l'un des côté.

Contrairement à la précédente fois, le trident continue à briller alors que Mera le tient entre ses mains.

Assez content de moi, pour cette réparation et surtout la blague faite au souverain d'Apokolips, j'ai un large sourire en regardant ce spectacle, les poings sur les hanches.

Il manque encore un petit bout, mais l'essentiel est à nouveau à sa place.

A nouveau, je glisse mes doigts dans la poche et effleure la boite-mère, ouvrant un autre vortex bien plus grand, assez pour me laisser passer cette fois.

A une prochaine fois donc, je vous enverrai quelque chose pour me contacter sous peu ... Ne baissez pas les bras et ne comptez que sur vous !

Je lui fais un petit signe de la main, la pose ensuite sur mon coeur.

Un instant d'hésitation puis j'ajoute bien impertinemment :

Et je vous trouve vraiment très jolie!

Je franchis alors la porte immatérielle qui se referme derrière moi.

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ceci clôture cette petite histoire pour moi

Merci Mera !